LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3 DE LA CONSTITUTION
Le Gouvernement, dans le cadre du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, a retenu son amendement n° II-2843 , qui n'a fait l'objet ni d'un avis du rapporteur spécial, ni d'un examen en séance publique par l'Assemblée nationale.
L'amendement du Gouvernement majore de 15 millions d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme 148 « Fonction publique » de la mission « Transformation et fonction publiques ». Ces crédits sont destinés à porter la subvention de l'État au profit du financement de la formation des apprentis dans les collectivités locales .
L'article L. 451-11 du code général de la fonction publique prévoit en effet que le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) verse aux centres de formation d'apprentis les frais de formation des apprentis employés par les collectivités . Il bénéficie à ce titre, parmi d'autres ressources, d'une contribution de l'État , définie dans le cadre de la convention d'objectifs et de moyens conclue entre l'État et le CNFPT. La majoration des crédits prévue par le présent amendement est conforme à la trajectoire définie dans la convention d'objectifs et de moyens.
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Les crédits des missions « Gestion des finances publiques » et « Crédits non répartis » n'ont pas été modifiés par le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution.
EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 9 novembre 2022, sous la présidence de Mme Christine Lavarde, vice-président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Albéric de Montgolfier et Claude Nougein, rapporteurs spéciaux, sur les missions « Gestion des finances publiques », « Transformation et fonction publiques », « Crédits non répartis » et sur le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
M. Claude Nougein , rapporteur spécial sur les missions « Gestion des finances publiques », « Transformation et fonctions publiques », « Crédits non répartis » . -Je vais vous présenter au nom de mon collègue Albéric de Montgolfier, qui n'a pu être présent ce matin, et moi-même, les crédits d'un bloc de trois missions assez différentes et d'ampleur budgétaire inégale, mais que nous avons l'habitude d'examiner ensemble : les missions « Gestion des finances publiques », « Transformation et fonction publiques » et « Crédits non répartis ». Je vous présenterai également le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État », au nom d'Albéric de Montgolfier, car je ne suis pas le rapporteur spécial de ce compte.
Je commencerai par la mission « Crédits non répartis », dont les deux dotations sont prévues par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF).
La « provision relative aux rémunérations publiques » fait de nouveau l'objet d'une ouverture de crédits, à hauteur de 80 millions d'euros cette année. Cette dotation vise à financer des dépenses du titre 2, dont la répartition exacte au sein des programmes du budget de l'État ne peut être déterminée au moment de la programmation budgétaire. Cette année encore, la dotation servira à financer des mesures pourtant décidées plusieurs mois à l'avance. Elle aura ainsi vocation à financer l'extension du « forfait mobilités durables » décidée dans le cadre du rendez-vous salarial de la fonction publique du 28 juin dernier, et des mesures de convergences indiciaires et indemnitaires s'inscrivant dans le cadre de la réforme de la haute fonction publique, qui a pourtant été actée en 2021. Ce procédé n'est évidemment pas satisfaisant du point de vue de la bonne information du Parlement, c'est pourquoi il est souhaitable que la répartition de ces crédits intervienne au plus vite.
J'en viens maintenant à la « dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles », qui fait l'objet cette année d'une ouverture de crédits particulièrement élevée, à hauteur de près d'1,8 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). Pour mémoire, cette provision était systématiquement dotée depuis 2018 de 124 millions d'euros. Le Gouvernement sollicite donc cette année une enveloppe 14 fois supérieure au montant conventionnel, avec pour seule justification les incertitudes liées à la crise énergétique et au contexte international et macroéconomique. Ce montant nous semble particulièrement excessif au regard de l'exécution des deux exercices précédents. Pour les années 2021 et 2022 le Gouvernement avait sollicité en cours de gestion l'ouverture d'enveloppes supplémentaires sur ce programme, pour des montants et des motifs du même ordre, contre l'avis de notre rapporteur général. Il s'avère que l'exécution budgétaire a donné raison à notre commission, puisqu'aucun crédit n'a été consommé sur cette dotation lors de ces deux exercices. C'est pourquoi nous vous proposons, dans une logique de sincérité budgétaire, et dans la droite ligne de la position constante de notre commission, un amendement visant à minorer d' 1 milliard d'euros les crédits de ce programme.
Sous réserve de cet amendement, nous vous proposons d'adopter les crédits de cette mission.
J'en viens maintenant à la mission « Gestion des finances publiques », dotée de 10,9 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et de 10,5 milliards d'euros en crédits de paiement (CP). Elle porte les crédits des deux grandes administrations de réseau du ministère de l'économie et des finances, c'est-à-dire la direction générale des finances publiques (DGFiP) et la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI). Elle porte également les crédits du secrétariat général du ministère.
Nous avons l'habitude de vous dire, avec Albéric de Montgolfier, que la mission est l'une des seules à contribuer à la maîtrise des dépenses publiques. Nous ne pourrons pas faire la même chose cette année : les crédits demandés sur la mission en 2023 connaissent une hausse inédite de 9 % en autorisations d'engagement et de 5,4 % en crédits de paiement.
Lors de nos auditions, nous avons cherché à comprendre les raisons de cette hausse très significative. Elle s'explique en large partie par la hausse des dépenses informatiques et, dans une moindre mesure, par l'engagement d'un grand projet immobilier pour le ministère.
Par ailleurs, les dépenses de personnel, qui représentent 80 % des dépenses de la mission, augmentent moins vite que le total des dépenses de la mission. Cela s'explique par le fait que le schéma d'emplois de la mission est une nouvelle fois négatif : 680 équivalents temps plein (ETP) seraient supprimés en 2023. Il faut noter que la DGFiP est l'administration qui participe le plus à cet effort, à hauteur de 850 ETP supprimés. À l'inverse, le programme 218, porté par le secrétariat général du ministère, verrait ses emplois augmenter de 181 ETP, notamment en faveur de Tracfin et de l'Agence pour l'informatique financière de l'État (AIFE).
Je rappelle que la mission est quasiment la seule à présenter une baisse de ses emplois. Il est vrai cependant que le rythme des suppressions d'effectifs ralentit de plus de moitié cette année : selon les personnes que nous avons entendues, c'est lié à des redéploiements sur des missions sous-dotées, dans l'attente de gains de productivité supplémentaires.
Les responsables de programme nous ont en effet indiqué que l'objectif était bien de retrouver une trajectoire de stabilisation voire de baisse des crédits à moyen terme. D'ailleurs, lorsque nous tenons compte de l'inflation, les crédits de la mission baisseraient en volume sur la période 2023-2025.
Voici donc pour ce qui a trait aux grands équilibres de la mission. Si nous comprenons les besoins en informatique pour cette année, nous serons vigilants au retour d'une trajectoire de stabilisation pour 2024. Celle-ci nous semble tout à fait envisageable, alors que les réformes engagées par les administrations de la mission devraient porter leurs fruits.
Les administrations poursuivent en effet les chantiers entamés ces cinq dernières années.
Le premier chantier, entamé de longue date par la DGFiP, est celui de la rationalisation de son réseau et de ses emprises territoriales. Vous le savez, il y a eu un changement de méthode en 2019 avec le lancement du « nouveau réseau de proximité », qui devrait être finalisé à la fin de l'année 2023. En comptant les services relocalisés dans les villes moyennes, la DGFiP est désormais présente dans 2 844 communes. C'est bien mais, attention, il ne s'agit pas toujours d'une présence permanente mais de points de contact et de présence dans les maisons France Services.
À côté de cette réforme, qui touche surtout les contribuables, il y a aussi la mise en oeuvre des conseillers aux décideurs locaux, pour les collectivités territoriales et surtout les communes. La cible de 1 200 conseillers installés en 2022 ne sera pas atteinte, après une montée en charge plus lente que prévue : 447 conseillers aux décideurs locaux sont entrés en fonction en 2021, ils devraient être environ 800 en 2022 et 1 013 à la fin de l'année 2023.
Selon la DGFiP, les élus locaux sont plutôt satisfaits des prestations effectuées par les conseillers aux décideurs locaux. Nous avons pour notre part toutefois insisté sur la répartition de ces conseillers sur les territoires. Il faut trouver un équilibre entre les grandes collectivités, aux enjeux financiers les plus importants, et les petites communes rurales, souvent les moins à même de disposer d'une expertise technique en interne.
Le deuxième chantier est le transfert à la DGFiP du recouvrement des impositions jusqu'ici gérées par la Douane. Ces transferts ont commencé en 2019 et devraient se poursuivre au moins jusqu'en 2025. Cette réforme peut générer des gains de productivité et des économies d'échelle. Elle doit surtout conduire la douane à s'interroger sur ses missions fondamentales et à se recentrer sur son coeur de métier, le contrôle des flux de marchandises et de passagers.
Troisième et avant-dernier axe prioritaire de développement pour la DGFiP et la douane, la valorisation de la donnée. Au départ, il s'agissait surtout de développer des techniques d'analyse de données de masse au service du contrôle fiscal pour la DGFiP et de la lutte contre les trafics de toute nature pour la douane. L'objectif est double : améliorer le ciblage des contrôles et parvenir à détecter les cas de fraude les plus complexes.
Le quatrième et dernier chantier est celui de l'informatique. Les dépenses informatiques ont trop longtemps servi de variables d'ajustement : cela ne fait que quelques années que les budgets ont été sanctuarisés. Ces dépenses sont pourtant extrêmement importantes, d'une part pour résorber la dette technique des applications et systèmes d'information des administrations, et, d'autre part, pour développer de nouvelles applications à même de générer des gains de productivité à moyen terme.
La gestion des chantiers informatiques souffre toutefois encore d'un problème majeur : ainsi, lors de chaque projet de loi de finances, nous constatons que les coûts et les délais des projets ont été réévalués à la hausse. Au fil du temps, certains doublent voire triplent de volume ! Il est grand temps que des indicateurs soient mis en place pour mieux suivre ces projets.
Au regard de ces constats, vous aurez compris que nous avons quelques réserves sur la programmation des crédits pour l'année 2023, même si nous comprenons une partie des hausses. Toutefois, compte tenu de la gestion des administrations et du retour à la stabilisation prévu dès 2024, avec une baisse des crédits en volume à moyen terme, nous vous proposons d'adopter les crédits de cette mission.
Je passe désormais à la mission « Transformation et fonction publiques », qui se compose désormais de six programmes à vocation interministérielle et qui concernent des sujets aussi variés que la rénovation des cités administratives de l'État, les projets porteurs d'économie à moyen terme, les ressources humaines ou encore les start-ups d'État. Pour 2022, elle est dotée de 800 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et d'1,1 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). C'est une très forte augmentation par rapport à 2022, de près de 44 % pour les crédits de paiement.
La hausse de ces crédits doit toutefois être nuancée. Elle résulte d'abord d'une mesure de périmètre sur le programme 348. Ce dernier, auparavant entièrement dédié à la rénovation des cités administratives de l'État, compte une nouvelle action en 2023, dénommée « Résilience ». Derrière ce titre ampoulé, se cache un appel à projets pour le financement d'actions dites à « gains rapides », avec une enveloppe dotée de 150 millions d'euros. Ce sont des actions à faible coût qui génèrent de très importantes économies d'énergie. Il s'agit pour nous d'une mesure de bonne gestion. Le directeur de l'immobilier de l'État nous a ainsi expliqué que le coût du mégawatheure économisé par la mise en place d'une action à gains rapides est de 1 000 à 1 500 euros. Pour une rénovation globale, c'est de l'ordre de 7 000 euros le mégawatheure.
L'année dernière, nous avions noté des progrès dans la gestion de la mission. Ces progrès se poursuivent, même s'il faut reconnaître qu'il existe encore des difficultés. Par exemple, la sous-consommation des crédits demeure importante sur certains programmes, comme celui portant le fonds pour la transformation de l'action publique. 190 millions d'euros sont encore annulés dans le cadre du projet de loi de finances rectificative pour 2022. Pourtant, le Gouvernement propose de prolonger le fonds de trois ans, en le dotant de 330 millions d'euros.
Il est vrai que les objectifs de ce fonds doivent être soutenus : il s'agit d'apporter l'impulsion nécessaire à l'amorçage de projets ou de réformes porteurs d'économies à moyen terme, notamment dans le domaine numérique. Encore faut-il cependant que les délais de contractualisation soient raccourcis.
Autre exemple, sur le programme 348, avec la rénovation des cités administratives. Les retards pris dans les travaux ont conduit à décaler les délais de livraison de la plupart des projets de rénovation. Entretemps, le coût des matières premières a fortement augmenté et seule l'annulation de deux projets permet de couvrir l'augmentation de ces coûts.
Au final, si la mission porte des objectifs ambitieux, la réalisation n'est pas encore totalement au rendez-vous. Il est vrai cependant que la gestion s'améliore et que ces progrès doivent être encouragés. Nous vous proposons donc d'adopter les crédits de cette mission, en notant également qu'elle est l'un des vecteurs de l'investissement public.
Mme Christine Lavarde, présidente . - Merci pour cette présentation.
M. Claude Nougein, en remplacement de M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial des crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » . - Il me revient de vous présenter, au nom de mon collègue Albéric de Montgolfier, les crédits du compte d'affectation spéciale (CAS) « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
Malgré des efforts notables, tant sur le volet dépenses que sur le volet recettes, la baisse tendancielle des recettes du CAS risque d'entamer sa soutenabilité financière.
Le CAS enregistre une baisse de 18,2 % de ses dépenses entre 2022 et 2023, passant de 415 à 340 millions d'euros. Cette diminution concerne surtout les opérations structurantes et les cessions tandis que les dépenses d'entretien du propriétaire augmentent. Il y a lieu de s'en réjouir, puisque l'entretien a longtemps été le parent pauvre de la politique immobilière de l'État. La marge de manoeuvre devrait encore s'élargir dans les années à venir, puisque les dépenses d'entretien devraient atteindre 200 millions d'euros en 2025. La sous-consommation des crédits hors période de crise doit toutefois conduire à la prudence.
Par ailleurs, la diminution de la programmation en 2023 vise aussi à reconstituer la trésorerie du CAS. Les recettes du compte connaissent en effet une baisse tendancielle, en dépit d'un rebond en 2023. Ainsi, par rapport à 2022, les produits de cessions immobilières augmenteraient de 90 millions d'euros avant de diminuer de 150 millions d'euros par la suite, tandis que les redevances domaniales augmenteraient de 20 millions d'euros en 2023 pour se stabiliser ensuite.
La répartition des recettes est préoccupante : en finançant aux deux tiers les dépenses du CAS par les produits de cession, une érosion excessive du patrimoine immobilier de l'État pourrait survenir, qui pourrait entraîner les recettes du CAS dans une spirale baissière.
La politique de redynamisation des redevances menée par la direction de l'immobilier de l'État est à cet égard louable, mais on peine encore à en percevoir les fruits dans les recettes du compte. De même, le recours au bail emphytéotique permet de concilier l'impératif de dégager des recettes et celui de conserver, pour l'État, ses biens emblématiques. Une réflexion stratégique sur la durée optimale des baux devrait toutefois être menée, faute de voire leur nombre diminuer.
Ces constats en demi-teinte s'ajoutent au fait que le CAS ne remplit pas le rôle d'impulsion stratégique qui devait être le sien.
Le compte demeure d'ailleurs contourné dans ses règles et concurrencé par d'autres vecteurs budgétaires. Les entités ou ministères occupants ne sont censés pouvoir exercer leurs droits de tirage sur le CAS qu'en contrepartie de la mutualisation de produits de cession. Or, certains ministères ou projets disposent de dérogations. D'autres bénéficient d'avances sur cession, dont le montant s'élèverait à 373 millions d'euros pour l'année 2022.
Enfin, compte tenu de l'insuffisance des recettes du CAS, d'autres vecteurs budgétaires reprennent ses objectifs, entraînant, selon les mots du directeur de l'immobilier de l'État, « un véritable éclatement qui nuit à la performance ». La rénovation des cités administratives est par exemple, cette année encore, portée par le programme 348 de la mission « Transformation et fonction publiques ».
Au total, si CAS n'est, dans son état actuel, pas suffisant pour porter les grands projets immobiliers de l'État, il n'est pas interdit d'envisager que son modèle fasse l'objet d'une réforme dans les années à venir. Le chemin est étroit, mais il existe.
C'est pourquoi Albéric de Montgolfier vous propose de réserver notre position sur les crédits du CAS.
M. Jean-François Husson , rapporteur général . - J'insiste sur l'importance de regarder de plus près les trajectoires à moyen terme des dépenses de l'État et de ses opérateurs, c'est ce qui nous permet d'avoir une vision plus juste des efforts engagés. Il semble par ailleurs possible, par une gestion rigoureuse et comme la DGFiP l'a démontré, d'améliorer l'efficacité des dépenses publiques, voire de réaliser des économies.
M. Marc Laménie . - Nos rapporteurs ont publié récemment un rapport très intéressant sur l'organisation et les moyens de la douane face au trafic de stupéfiants. Ils formulaient des recommandations et soulignaient les carences de moyens humains, en tout cas sur les missions de surveillance, ainsi que la nécessité d'investir dans des moyens techniques. Où en est-on sur ce sujet dans le projet de loi de finances ?
Les trésoreries de la DGFiP sont les interlocuteurs des élus. Or, beaucoup ont fermé et leurs effectifs se sont réduits. Pourriez-vous nous donner des précisions sur l'évolution des effectifs et du réseau, au niveau central comme local ?
Enfin, je m'interroge sur les défis de la gestion du patrimoine immobilier de l'État, le suivi des opérations de vente ou de rénovations. Certains ministères, comme celui de la défense, conservent encore un patrimoine important.
M. Thierry Cozic . - J'aimerais revenir sur le programme 156 de la mission « Gestion des finances publiques ». Globalement, ses crédits augmentent de plus de 9 % et représentent, cette année encore, la part la plus importante des moyens de la mission. C'est dans ce programme que figure la restructuration de la présence de proximité de la DGFiP. Le Gouvernement a annoncé pour 2023 l'achèvement de la couverture nationale du réseau France Services avec une présence à moins de 30 minutes des usagers. Les remontées de terrain dont nous disposons aujourd'hui font notamment état du caractère artificiel de cette présence, dans la mesure où les amplitudes horaires d'ouverture des services sont très réduites. Je m'interroge donc sur la faisabilité de ce dispositif.
Deuxième point, je reviens sur les cités administratives et leur plan de rénovation : en 2023, on aurait dû en livrer dix-huit, et dix-neuf sont prévues pour 2024. Or le programme 348 « Performances et résilience des bâtiments de l'État et de ses opérateurs » est celui qui enregistre le plus de retard dans le décaissement des crédits et, par voie de conséquence, le plus de reports de crédits. Je m'interroge donc sur la sincérité des montants prévus dans le budget.
Enfin, les crédits du programme 552, « Dépenses accidentelles et imprévisibles », progressent de 389 % pour s'établir à 2,074 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 1,774 milliard d'euros en crédits de paiement (CP). Or, il suffit au Gouvernement de les annuler en fin de gestion pour donner artificiellement l'impression de bien tenir les dépenses. Votre amendement visant à minorer les crédits du programme d'un milliard d'euros me semble donc pertinent.
M. Arnaud Bazin . - Je note la forte augmentation des crédits de la DGFiP, principalement motivée par la mise à jour de grands programmes informatiques. En général, quand on parle de grands programmes informatiques à la commission des finances, notre attention s'éveille assez vite. Nous avons en effet constaté à maintes reprises de regrettables et notables échecs. De plus, qui dit grand programme informatique dit souvent recours à des cabinets de consultants. Quels sont les objectifs principaux visant à améliorer notre efficacité en matière de gestion ? Fera-t-on appel aux services compétents de la fonction publique comme cela devrait être le cas ? La DGFiP recourt-elle fréquemment à des prestataires externes ?
M. Michel Canévet . - Je note deux bonnes nouvelles dans le rapport. D'abord, la poursuite de la baisse des effectifs, signe d'une volonté de maitriser les dépenses de personnel et de fonctionnement, et ensuite la réduction du patrimoine bâti de l'État qu'il importait de rationaliser. Il convient maintenant de le moderniser, mais les opérations semblent difficiles à concrétiser, par exemple sur la rénovation des administratives. Est-ce un problème lié à la longueur des procédures et des contrats ? à l'importance des délais de paiement ? Enfin, quelles sont les deux cités administratives dont la rénovation envisagée ne pourra être réalisée ?
M. Antoine Lefèvre . - Puisque nous évoquons les difficultés de rénovation des cités administratives, je témoigne qu'à Laon l'essentiel des travaux réalisés a consisté à refaire un parking et à en interdire l'accès au public... Les horaires de permanence se réduisent. Si les cités se transforment en bunkers, c'est un problème pour les usagers. Certes, la dématérialisation se développe, mais une partie de nos concitoyens a besoin d'une présence physique, de pouvoir venir se faire expliquer certaines démarches.
Quant à l'objectif « zéro artificialisation nette » (ZAN), s'applique-t-il aussi à l'État dans ses opérations immobilières ? Le projet de l'Agence française de développement d'installer son nouveau siège du côté de la gare d'Austerlitz suscite par exemple des débats à cause de sa consommation du foncier.
M. Jérôme Bascher . - Parvient-on à recruter de nouveaux informaticiens à Bercy ? Le tarif « fonction publique » n'est pas très attractif. Les spécialistes de finance et de statistiques sont très recherchés : par exemple, à la Caisse des dépôts, les fonctionnaires disposant de ces compétences se font souvent débaucher avec des offres de salaires jusqu'à deux fois supérieures. Aurons-nous les moyens de nos ambitions sur ce sujet ?
M. Claude Nougein , rapporteur spécial. - M. Laménie revient sur l'organisation et les moyens de la douane face au trafic de stupéfiants. Les douanes réalisent 80 % des saisies de stupéfiants. On note une stabilité du nombre des agents de douane - 17 000 agents environ -, mais, comme nous le soulignions avec M. Albéric de Montgolfier dans notre rapport, ils manquent de matériel moderne, notamment de scanners - scanners corporels dans les aéroports et scanners pour les conteneurs arrivant par bateau dans les grands ports. Je salue l'effort réalisé à cet égard dans le budget 2023, avec par exemple l'acquisition de huit camions équipés d'un système de scanner à rayon X et de deux scanners fixes pour le contrôle du fret postal.
Les effectifs de la DGFiP connaissent une nouvelle baisse en 2023, mais moindre que celle des années antérieures, où jusqu'à 2 000 postes ont pu être supprimés. Le plafond de la mission s'établit à un peu plus de 93 000 équivalents temps plein, dont la très grande majorité, 76 000, sont dans les services départementaux. Plus de 2 700 sont en administration centrale. M. Cozic m'a interrogé sur la présence dans la DGFiP dans les territoires : je peux lui dire que le ministre de la transformation et de la fonction publiques, M. Guérini, a confirmé que 98 % des Français se situaient aujourd'hui à moins de 30 minutes d'un point d'accueil. Nous partageons toutefois son constat, il ne s'agit pas toujours d'un point fixe ouvert cinq jours dans la semaine...
À propos des cités administratives, le retard est incontestable. Pendant longtemps, le Gouvernement nous a dit qu'il fallait faire des choix, qu'on ne pouvait pas tout faire et il y a eu un très long processus de sélection puis de définition des projets. Bref, si je caricature un peu, on a eu beaucoup de réflexion, mais peu d'action ! Aujourd'hui, après avoir pris du retard, le Gouvernement semble enfin vouloir terminer son programme, certes en décalé puisque les dernières cités administratives ne seraient plus livrées en 2024 mais en 2025. Or, entretemps, le coût des matières premières a fortement augmenté et seule l'annulation de deux projets permet de couvrir l'augmentation de ces coûts. Les deux projets abandonnés sont ceux de Brest, arrêté par la direction de l'immobilier de l'État, et de Melun, sur décision du préfet dans le cadre d'une réflexion plus générale sur la gestion du patrimoine immobilier de l'État dans le département. M. Lefèvre a raison : ce n'est pas en transformant les cités administratives en « bunkers » que l'on répond aux attentes de nos concitoyens. Au contraire ! Le rapport humain reste primordial : certains de nos concitoyens n'ont pas du tout accès au numérique et ne pourront jamais faire leurs démarches administratives en ligne.
Les crédits demandés sur la dotation des « dépenses accidentelles et imprévisibles » sont quatorze fois plus élevés que ceux demandés chaque année depuis 2018 en loi de finances initiale. La hausse est impressionnante ! Notre amendement vise à les réduire d'1 milliard d'euros. Je rappelle que notre commission s'était déjà opposée à des hausses d'une ampleur comparable dans le cadre des projets de loi de finances rectificative en 2021 et en 2022 et que, finalement, les crédits n'avaient pas été utilisés. Le Gouvernement doit réviser son modus operandi, car la question de la sincérité de ce budget se pose.
À propos des grands programmes informatiques, j'ai posé la question des cabinets de conseil en audition à M. Jérôme Fournel, le directeur général de la DGFiP, qui a répondu qu'il se montrait « prudent » et que la DGFiP se distinguait parmi les administrations de l'État par un très fort degré d'internalisation de la maitrise à assistance d'ouvrage et, plus globalement, de la gestion des projets informatiques. Accordons-lui le bénéfice du doute.
Thierry Carcenac et moi-même avions, en 2019 déjà dans le cadre de notre rapport budgétaire, proposé l'instauration d'une grille de rémunération particulière aux informaticiens de l'État. Des progrès ont été réalisés, notamment sous l'égide de la direction interministérielle du numérique (Dinum), qui a mis en oeuvre et diffusé des grilles de rémunération dérogatoires pour certaines compétences rares et spécialisées.
La question de la baisse des effectifs de la DGFiP a enfin été abordée : c'est vrai qu'on est passé de plus de 100 000 agents il y a trois ou quatre ans à un peu plus de 94 000 aujourd'hui. Cette évolution s'explique notamment par l'instauration du prélèvement à la source, par la suppression de la taxe d'habitation et de la redevance audiovisuelle ainsi que par la dématérialisation de nombreuses procédures, source de gains de productivité. C'est de la bonne gestion : je suis toujours surpris quand j'entends parler de « dynamisme de la dépense publique », le vrai dynamisme devrait se traduire par une baisse des dépenses publiques, et non par une hausse !
La commission a décidé à l'unanimité de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Gestion des finances publiques ».
Mme Christine Lavarde , présidente . - Je soumets au vote l'amendement FINC.1 . qui vise à minorer d'1 milliard d'euros les crédits du programme « Dépenses accidentelles et imprévisibles ».
M. Didier Rambaud . - Je m'abstiens.
L'amendement FINC.1 est adopté.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Crédits non répartis », sous réserve de l'adoption de son amendement.
La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits de la mission « Transformation et fonction publiques ».
La commission a décidé de réserver son vote sur les crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».
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Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses décisions. Enfin, elle a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État ».