II. RENFORCER LES MOYENS BUDGÉTAIRES ET HUMAINS POUR RÉPONDRE À LA CRISE

A. UNE TRAJECTOIRE BUDGÉTAIRE QUI RÉPOND À L'URGENCE

Le constat formulé lors des États généraux de la justice est clair : l'institution judiciaire est « au bord de la rupture »4(*). Face à cette crise, dont la tribune dite « des 3 000 » magistrats5(*), greffiers et auditeurs de justice a constitué l'acmé, le renforcement des moyens de la justice prévu à l'article 1er est bienvenu.

De l'ordre de 1,89 milliard d'euros, soit 21,23 %, la hausse ainsi programmée des crédits serait ramenée en volume à 6,80 % en prenant en compte l'inflation. Proche de la programmation votée, pour la mission « Justice », par le Sénat dans le cadre de l'examen du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2023-2027, la hausse ainsi proposée des crédits s'inscrit dans des hausses de crédits similaires pour les ministères régaliens. Elle impliquera néanmoins une diminution relative des crédits ouverts pour d'autres missions pour tenir les objectifs de dépense publique fixés6(*).

Cette programmation budgétaire aurait notamment vocation à financer des créations nettes d'emplois dont l'article 1er fixe le niveau à 9 395 à l'horizon 2027. Souhaitant mieux reconnaître l'engagement et les besoins de recrutement des greffiers et conseillers pénitentiaires de probation et d'insertion (CPIP), la commission a porté à 1 800 et à 600 le nombre respectif de créations nettes d'emplois pour chacune de ces professions.

B. DES DISPOSITIONS FACILITANT LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

L'article 11 du projet de loi ordinaire vise à permettre le recrutement d'attachés de justice par contrats à durée indéterminée ou via des détachements de fonctionnaires pour constituer une équipe d'assistance et d'aide à la décision plus stable autour des magistrats que les juristes assistants dont les fonctions sont par définition temporaires (trois ans renouvelables une fois) et qui restent en moyenne deux ans et demi seulement dans leurs fonctions. La commission a été favorable à cette pérennisation souple, qui devrait favoriser une meilleure couverture territoriale, moins dépendante des caractéristiques du bassin d'emploi dans lequel se trouve la juridiction.

L'article 14 du projet de loi ordinaire entend faire face aux grandes difficultés de recrutement dans l'administration pénitentiaire en développant la réserve civile et en favorisant les recrutements par l'ouverture de postes de surveillant adjoint contractuel, destinés à former un vivier pour les concours, à l'instar des policiers adjoints pour la police nationale.

L'article 15 du projet de loi ordinaire transfère à un magistrat du siège du tribunal judiciaire les compétences civiles exercées par le juge des libertés et de la détention en matière de contentieux des étrangers et d'hospitalisations sous contrainte. La commission n'a pas remis en cause ce transfert qui n'affecte pas les garanties apportées aux justiciables et qui offre une souplesse d'organisation intéressante à des juridictions pâtissant durement de la pénurie de juge des libertés et de la détention.

L'article 17 du projet de loi ordinaire opèrerait un transfert de compétence des greffiers vers les commissaires de justice s'agissant de la mise en oeuvre et du suivi des saisies des rémunérations, ce qui permettrait d'économiser, à compter de 2025, l'équivalent de 140 ETP (répartis pour moitié entre greffiers et agents de catégorie C) qui pourraient être utilement redéployés vers d'autres missions.


* 4 Rapport du comité des États généraux de la justice, p. 36.

* 5 Cette tribune, publiée en novembre 2021, a finalement été signée par plus de 7 000 personnes.

* 6 Comme l'a relevé le Haut conseil des finances publiques dans son avis sur le projet de loi.