- LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX
- I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION
EN 2022
- II. LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS
SPÉCIAUX
- 1. La gestion complexe de la mission
« Travail et emploi » : une sur-exécution
massive, des sous-consommations importantes
- 2. Portées par le soutien à
l'apprentissage, les dépenses de la mission « Travail et
emploi » en hausse malgré le reflux du chômage
- 3. Comme les années
précédentes, des mesures conséquentes de soutien aux
opérateurs en cours d'exercice
- a) Une baisse de la subvention pour charges de
service public allouée à Pôle emploi, mais une augmentation
de ses moyens humains
- b) Le versement d'une nouvelle subvention
exceptionnelle, de 4 milliards d'euros, à France
compétences
- c) Le versement d'une nouvelle dotation
exceptionnelle en faveur de l'AFPA
- a) Une baisse de la subvention pour charges de
service public allouée à Pôle emploi, mais une augmentation
de ses moyens humains
- 4. La poursuite de la baisse des dépenses de
personnel dans le cadre de la réforme de l'organisation territoriale de
l'État (OTE)
- 1. La gestion complexe de la mission
« Travail et emploi » : une sur-exécution
massive, des sous-consommations importantes
- I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION
EN 2022
N° 771 SÉNAT SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023 |
Enregistré à la Présidence du Sénat le 28 juin 2023 |
RAPPORT PRÉSENTÉ au nom de la commission des finances (1) sur le projet
de loi, |
Par M. Jean-François HUSSON, Sénateur |
TOME II ANNEXE N° 32 Rapporteurs spéciaux : MM. Daniel BREUILLER et Emmanuel CAPUS |
(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel. |
Voir les numéros : Assemblée nationale (16ème législ.) : 1095, 1271 et T.A. 125 Sénat : 684 (2022-2023) |
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS
SPÉCIAUX
1. En loi de finances initiale (LFI) pour 2022, les crédits votés au titre de la mission « Travail et emploi » s'élevaient à 17,5 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 16,3 milliards d'euros en crédits de paiements (CP).
2. En exécution 2022, les crédits se sont finalement élevés à 24,8 milliards d'euros en AE, ce qui correspond à une sur-exécution de 42,0 % et à une augmentation de 23,0 % par rapport à l'exécution 2021, et à 20,8 milliards d'euros en CP, soit une sur-exécution de 27,2 % et une augmentation de 17,6 % par rapport à l'exécution 2021.
3. Le taux de consommation des crédits ouverts s'élève à 96,0 % en AE et 89,6 % en CP sur l'ensemble de la mission. Cet écart tient notamment, comme les années précédentes, à la sous consommation importante des crédits ouverts au titre du plan d'investissement dans les compétences (PIC). Sur les 2 847 millions d'euros disponibles à ce titre, seuls 1 016 millions d'euros ont été consommés, soit moins que le montant des reports 2021.
4. La gestion de la mission s'est avérée complexe. En témoignent l'ampleur des reports de crédits opérés (1 815,4 millions d'euros en CP) en particulier sur le fonds de concours du PIC, l'importance des transferts croisés entre le programme 103 et la mission « Plan de relance », les masses financières ouvertes en lois de finances rectificatives en 2022 (2 745,4 millions d'euros en LFR 1 et 1 966,0 millions d'euros en LFR 2), et les importantes sous consommations déjà évoquées.
5. L'exercice se caractérise en outre par l'importante grandissante de l'apprentissage. Au total, le coût brut de l'alternance pour l'État atteint plus de 10,5 milliards d'euros, dont 7 milliards financés par la mission « Travail et emploi ». Les rapporteurs spéciaux relèvent ainsi que la soutenabilité à moyen-terme de la mission est surdéterminée par la dynamique de l'apprentissage. Hors dotations exceptionnelles à l'opérateur France compétences, les dépenses de soutien à l'apprentissage sur le seul programme 103 représentent plus de 2 730 millions d'euros, soit 32 % d'un programme qui représente lui-même 61,6 % des crédits de la mission.
6. La crise sanitaire et la dynamique de l'alternance ont à nouveau pesé sur l'exécution 2022, comme en témoigne le relèvement du plafond d'emplois de la mission et de Pôle emploi, ou encore le versement de 4 milliards d'euros de subventions exceptionnelles à France compétences.
7. Des efforts d'économies structurelles ont toutefois été poursuivis, comme en témoigne la nette baisse du schéma d'emplois et la diminution de la subvention pour charges de service public versée à Pôle emploi.
I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION EN 2022
En loi de finances initiale (LFI) pour 2022, les crédits votés au titre de la mission « Travail et emploi » s'élevaient à 16,0 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE) et à 15,2 milliards d'euros en crédits de paiements (CP), fonds de concours et attributions de produits inclus.
Pour mémoire, la mission comporte quatre programmes :
- le programme 102 « Accès et retour à l'emploi » se fixe pour objectif principal de favoriser l'accès et le retour à l'emploi de tous les publics en s'appuyant sur les structures du service public de l'emploi et en mobilisant au mieux les outils d'insertion professionnelle au bénéfice des personnes les plus éloignées de l'emploi ;
- le programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » se fixe pour objectifs de sécuriser l'emploi par l'anticipation des mutations économiques, contribuer à la revitalisation des territoires et au reclassement des salariés licenciés pour motif économique, faciliter l'insertion dans l'emploi par le développement de l'alternance et enfin édifier une société de compétences, notamment via le volet « formation » du Plan d'investissement dans les compétences (PIC) ;
- le programme 111 « Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations de travail » vise notamment à améliorer les conditions d'emploi et de travail des salariés du secteur privé concurrentiel, contribuer à la prévention et à la réduction des risques professionnels, à la dynamisation de la négociation collective et à l'amélioration du dialogue social et enfin à lutter contre le travail illégal et la fraude au détachement, en s'appuyant sur les services de l'inspection du travail ;
- enfin, le programme 155 « Conception, gestion et évaluation des politiques de l'emploi et du travail » constitue le programme d'appui et de soutien aux politiques du ministère du travail, portant l'intégralité des dépenses de personnel (titre 2) de la mission.
Il est à noter que les programmes 102 et 103, qui relèvent de la politique de l'emploi stricto sensu, représentent à eux seuls 95 % des crédits de la mission.
Évolution des crédits de la mission « Travail et emploi » en 2022
(en millions d'euros et en pourcentage)
AE : autorisations d'engagement. CP : crédits de paiement. Prévision : prévision en loi de finances initiale, hors fonds de concours (FDC) et attributions de produits (ADP). Exécution : consommation constatée dans le projet de loi de règlement.
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Les crédits de la mission ont connu une diminution de - 1,2 % en AE et de -3,8 % en CP entre la LFI 2021 et la LFI 2022. Cette évolution à la baisse avait été prévue par la programmation triennale du PLF 2020 mais dans des proportions bien plus importantes. Les crédits votés en LFI se stabilisent en effet à un niveau élevé : 15 793,1 millions d'euros en AE et 14 643,1 millions d'euros en CP, contre 13 277 millions d'euros prévus dans la programmation triennale.
Surtout, en exécution 2022, les crédits se sont finalement élevés à 24,8 milliards d'euros en AE, ce qui correspond à une sur-exécution de 57,2 % et à une augmentation de 23,0 % par rapport à l'exécution 2021, et à 20,7 milliards d'euros en CP, soit une sur-exécution de 41,9 % et une augmentation de 17,6 % par rapport à l'exécution 2021.
Ce résultat s'explique principalement par :
- d'importants transferts entrants de crédits (4 milliards d'euros, soit 27 % de la programmation initiale), dont l'essentiel est rattachable au plan d'investissement dans les compétences (PIC) : ont ainsi été ouverts 1,7 milliard d'euros au titre des flux 2022 du fonds de concours de France compétences, auxquels s'est ajouté 1,1 milliard d'euros de reports de ce même fonds ;
- l'ouverture, en lois de finances rectificative pour 20221(*), de 4,7 milliards d'euros, dont l'essentiel (4 milliards d'euros) n'a pas financé des activités prévues de la mission mais est allé à France compétences, pour combler son besoin de financement - qui n'avait pas été intégré à la prévision en LFI ;
- la baisse des crédits en provenance du programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de relance » : alors que 1,3 milliard d'euros en CP avaient été transférés en 2021, ces montants ont été fortement réduits en 2022. Ils atteignent en effet 472 millions d'euros, soit une diminution de 63,7 %.
Les crédits de la mission sont donc en forte augmentation, tant en prévisions de LFI (+ 54,2 % entre 2021 et 2023) qu'en exécution (+ 17,6 % entre 2021 et 2022).
Évolution des prévisions et des exécutions entre 2021 et 2023
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
Mouvements de crédits en gestion au cours de l'exercice 2022
(en millions d'euros et en pourcentage)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires
Au total, l'exécution 2022 s'établit, hors fonds de concours et contribution au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions », à 18,9 milliards d'euros de CP, soit un très fort excédent par rapport au plafond prévu par la programmation triennale (13 277 millions d'euros au format PLF 20202(*)).
On constate enfin un taux de consommation des crédits ouverts de 96,0 % en AE et 89,6 % en CP sur l'ensemble de la mission.
II. LES OBSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX
1. La gestion complexe de la mission « Travail et emploi » : une sur-exécution massive, des sous-consommations importantes
Comme l'année précédente, bien qu'avec une moindre ampleur, l'exercice 2022 s'est caractérisé par d'importants transferts croisés de crédits entre le programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de Relance » et les programmes 102 et 103, avec notamment :
- des transferts liés aux contrats aidés à destination des jeunes prescrits en 2021 et se poursuivant en 2022 (141 millions sur 244 millions d'euros programmés en LFI 2022 sur le programme d'origine) ;
- des transferts finançant les plans régionaux d'investissement dans les compétences (Pric) amendés dans le cadre du plan « 1 jeune, 1 solution » (158 millions d'euros) ;
- le FNE-Formation (fonds supplémentaires liés à la relance) : seuls 40 millions d'euros de CP sont transférés, sur 288 millions d'euros de crédits disponibles (dont 242 millions de reports) ;
- la revalorisation de la rémunération des stagiaires de la formation professionnelle (81 millions d'euros) ;
- en sens inverse, un transfert du programme 103 vers le programme 364 de 808,4 millions d'euros en AE destiné au financement de l'aide exceptionnelle à l'apprentissage.
L'exécution 2022 a également connu d'importantes ouvertures de crédits en cours d'année, principalement par rattachement de fonds de concours ou par les lois de finances rectificatives. La grande majorité concerne le programme 103, et plus particulièrement France compétences : ainsi, sur 1 718 millions d'euros ouverts sur fonds de concours hors reports, 98 % relevaient du seul fonds de concours France compétences.
La budgétisation initiale ne comprenait en effet pas de subvention à France compétences, en dépit de la situation financière difficile - et connue - de l'opérateur, une situation qui a justifié un avis défavorable du contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM), de rare occurrence. Pour pallier le besoin de financement important de l'opérateur, d'importants reports de crédits ont été nécessaires, de même que l'ouverture en lois de finances rectificatives de 4 milliards d'euros.
Le choix d'ouvrir de nouveaux crédits interroge les rapporteurs spéciaux, alors que le programme 102 a connu une sous-exécution significative (- 570 millions d'euros), qui aurait pu permettre de procéder à des redéploiements par virement. Dans les faits, ceux-ci ont été limités : le principal concerne un virement du programme 102 vers le programme 103. 119 millions d'euros ont ainsi été prélevés sur les allocations de solidarité spécifique au profit du financement des aides exceptionnelles à l'apprentissage.
Enfin, les rapporteurs spéciaux relèvent que la mission a fait l'objet d'une sous-consommation importante (20,8 milliards d'euros de CP consommés pour 23,2 milliards d'euros de crédits ouverts, soit un taux de consommation de 89,6 %) qui est concentrée sur le programme 103 (12,8 milliards d'euros consommés pour 15,1 milliards ouverts, soit un taux de consommation de 85 %, 2,3 milliards d'euros restant disponibles en fin d'année).
Cet écart tient notamment, comme l'année précédente, à la forte sous consommation des crédits ouverts au titre du PIC : 1 831 millions d'euros de CP non consommés fin 2022 sont rattachés au fonds de concours PIC. Sur les 2 847 millions d'euros disponibles à ce titre (1 164 millions de reports 2021 et 1 684 millions en flux 2022), avec un « effet boule de neige » dû à l'accumulation des reports sur plusieurs années, seuls 1 016 millions d'euros ont été consommés, soit moins que le montant des reports 2021.
Écart entre la prévision en LFI 2022 et l'exécution constatée en 2022
(en millions d'euros et en CP)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires et Chorus
2. Portées par le soutien à l'apprentissage, les dépenses de la mission « Travail et emploi » en hausse malgré le reflux du chômage
Comme l'avaient relevé les rapporteurs spéciaux dans leur rapport sur le PLF 20233(*), l'amélioration de la situation de l'emploi a un effet direct sur les dépenses d'allocations chômage prises en charge par l'État. Inversement, les dépenses allouées dans le budget de l'État au soutien à l'apprentissage augmentent avec la diminution du chômage, au point que la Cour des comptes a estimé que les moyens affectés au développement de l'alternance constituaient « le point saillant de l'exécution 20224(*) ».
Au total, le coût brut de l'alternance pour l'État atteint plus de 10,5 milliards d'euros, dont 7 milliards financés par la mission « Travail et emploi ». C'est l'effet d'une croissance forte des entrées en contrat d'apprentissage depuis 2020, sous l'effet de la mise en oeuvre de la réforme de 2018 et de nouveaux dispositifs de soutien. En 2022, cependant, cette hausse est un peu moins rapide (+ 14 % d'entrées par rapport à 2021).
Coût de l'alternance pour le budget de l'État
(en millions d'euros)
Source : Cour des comptes
La corrélation entre augmentation du chômage et augmentation du coût de l'apprentissage tient pour une grande part à une causalité inverse : l'amélioration de la situation de l'emploi s'explique en effet en partie par l'effort budgétaire en faveur de l'apprentissage supporté par la mission. L'Insee considère ainsi qu'environ un tiers de la hausse de l'emploi salarié depuis fin 2019 résulte de la dynamique des contrats en alternance, notamment en apprentissage5(*) ; inversement, l'érosion de l'augmentation de la population active résulte largement d'une dynamique moins soutenue des contrats en alternance6(*).
Si les rapporteurs spéciaux se félicitent de la contribution de la mission « Travail et emploi » au reflux du chômage, ils relèvent que la soutenabilité à moyen-terme de la mission est surdéterminée par la dynamique de l'apprentissage. Hors dotations exceptionnelles à l'opérateur France compétences (voir infra), les dépenses de soutien à l'apprentissage sur le seul programme 103 représentent plus de 2 730 millions d'euros, soit 32 % d'un programme qui représente lui-même 61,6 % des crédits de la mission.
Les rapporteurs spéciaux relèvent qu'aux fins de limiter ces dépenses, les montants de l'aide exceptionnelle à l'apprentissage, initialement de 5 000 euros pour un mineur et de 8 000 euros pour un majeur, ont été harmonisés à la fin de l'année 2022 à 6 000 euros quel que soit l'âge de l'alternant7(*). Les alternants les moins qualifiés étant souvent les plus jeunes, cette harmonisation apparaît de nature à atténuer les potentiels effets d'aubaine liés aux aides à l'embauche des apprentis et à redéployer davantage de moyens vers l'apprentissage des travailleurs peu qualifiés, là où cette aide est la plus déterminante.
Enfin, la réforme du compte personnel de formation (CPF) votée par le Parlement dans le PLF 20238(*) apporte un début de réponse à la progression non-maîtrisée des charges de France compétences. Il convient toutefois d'éviter que l'introduction d'un reste à charge ne conduise à exclure les salariés les moins qualifiés du bénéfice du CPF ; à cette fin, les restes à charge pourraient être limités aux formations ne débouchant pas sur l'obtention d'une certification inscrite au registre national des certifications professionnelles (RNCP), comme l'a récemment recommandé la commission des affaires sociales du Sénat9(*). Les rapporteurs spéciaux insistent enfin sur la nécessité d'inclure les partenaires sociaux dans ces réflexions, afin que le dialogue social reprenne toute sa place en matière de financement de l'apprentissage.
3. Comme les années précédentes, des mesures conséquentes de soutien aux opérateurs en cours d'exercice
a) Une baisse de la subvention pour charges de service public allouée à Pôle emploi, mais une augmentation de ses moyens humains
La subvention pour charges de service public à Pôle emploi a été fixée à 1 114 millions d'euros contre 1 150 millions d'euros dans la LFI 2021, soit une nouvelle diminution de 36 millions d'euros, après celles opérées en 2020 et 2021.
En 2022, et malgré la baisse continue du chômage, le plafond d'emploi de l'opérateur est à nouveau en hausse, certes d'un montant beaucoup plus faible (+ 100 ETPT) que les années précédentes. En effet, le plafond prévoit le maintien de 700 ETPT au sein des 1 500 ETPT accordés au titre de la crise sanitaire, afin de pouvoir mettre en oeuvre le plan de remobilisation des demandeurs d'emplois de longue durée, dans le cadre du plan lancé à l'automne 2021. De plus, Pôle emploi a bénéficié d'une nouvelle décision de renforcement de ses effectifs sous plafond, au titre de la mise en oeuvre du contrat d'engagement jeune (CEJ), pour 900 ETPT. Les effectifs sous plafond passent donc de 48 778 à 48 878 pour 2022.
b) Le versement d'une nouvelle subvention exceptionnelle, de 4 milliards d'euros, à France compétences
Issu de la loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, France compétences est l'opérateur unique de l'État pour la mise en oeuvre de la politique de la formation professionnelle et de l'apprentissage.
France compétences fait face à une situation financière très dégradée et présente un besoin de financement important : son déficit prévisionnel, tel que prévu dans son budget initial, s'élevait à 3,8 milliards d'euros.
Ce déficit est explicable par plusieurs facteurs, structurels et conjoncturels :
- le déséquilibre structurel entre les ressources et les charges de France compétences. Les ressources ordinaires de l'opérateur, constituées principalement de contributions obligatoires des employeurs, représentent en effet 10,3 milliards d'euros en 2022, contre des charges qui s'élèvent à 16,2 milliards d'euros en 2022.
- quant aux facteurs conjoncturels, le fort dynamisme des entrées en apprentissage en 2022, avec plus de 809 000 contrats signés (+ 13,3 % par rapport à 2021), contribue à solliciter fortement l'opérateur.
- le fort dynamisme du compte personnel de formation (CPF), avec près de 2,2 millions d'actions engagées, représentant un coût de 2,7 milliards d'euros, contre une budgétisation initiale de 1,4 milliards d'euros.
Face à cette situation, une aide financière de l'État était indispensable pour que l'opérateur puisse continuer à assurer sa mission de financement de la politique de l'apprentissage, qui constitue un instrument essentiel de la politique de l'emploi. Celle-ci a représenté un total de 4 milliards d'euros, qui fait suite à la dotation exceptionnelle de 2,78 milliards déjà versée par l'État en 2021. Malgré le montant inédit de ce soutien, les ressources de l'opérateur devraient s'établir à 14,6 milliards d'euros en 2022 conduisant à un déficit de 1,6 milliard d'euros.
c) Le versement d'une nouvelle dotation exceptionnelle en faveur de l'AFPA
La subvention pour charges de service public allouée à l'Agence pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) au titre du programme 103, fixée à 110 millions d'euros en LFI 2022, a été exécutée à hauteur de 233 millions d'euros, ce qui correspond à une sur-exécution de + 111,8 %. Il s'agit d'une hausse importante par rapport à l'exercice précédent (106,5 millions d'euros en 2021, soit une augmentation de + 118,78 %).
L'agence joue un rôle notable dans la mise en oeuvre du PIC, avec par exemple le déploiement du programme « HOPE » dédié à l'hébergement et la formation des réfugiés, ainsi que dans le plan « 1 jeune, 1 solution » avec la mise en oeuvre du dispositif « La Promo 16-18 ».
L'année 2022 a permis à l'opérateur de poursuivre son plan de transformation, qui avait été présenté par la direction générale de l'établissement en octobre 2018. Au 31 décembre 2020, le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) lancé par l'AFPA a permis le départ de 1 217 salariés, dont 1 064 départs volontaires (sur 1 506 candidatures déposées) et 153 départs contraints. Son plafond d'emploi pour 2022 (5 548 ETPT) est respecté.
Au vu des importantes difficultés financières de l'AFPA, l'exercice a cependant été marqué par le versement, comme en 2020 et en 2021, d'une subvention exceptionnelle. Celle-ci s'élève à 123 millions d'euros, elle s'inscrit donc en hausse par rapport à l'année précédente (106,5 millions d'euros). Si l'octroi d'une telle subvention exceptionnelle était à nouveau nécessaire pour éviter à l'opérateur une situation de cessation de paiement, la situation de l'AFPA constitue l'un des risques budgétaires pesant sur la mission « Travail et emploi ».
4. La poursuite de la baisse des dépenses de personnel dans le cadre de la réforme de l'organisation territoriale de l'État (OTE)
Les dépenses de personnel (titre 2) se sont élevées en 2022 à 571,9 millions d'euros, soit un niveau inférieur à l'exécution 2021 (574,4 millions d'euros), dans le respect de l'autorisation initiale (572,9 millions d'euros).
Le plafond d'emplois pour 2022 fixé par la LFI 2022 à 7 961 ETPT, dont 65 transférés, n'a pas été modifié en LFR. Il a été respecté, avec 7 731 ETPT exécutés. Par rapport à l'exécution 2021, qui s'était achevé avec une légère sur-exécution (8 215 ETPT contre un plafond fixé à 8 201 ETPT en LFR), l'exécution 2022 s'inscrit donc dans une diminution des effectifs de 5,89 %.
L'exécution 2022 du programme 155, traduit la mise en oeuvre progressive de la réforme de l'organisation territoriale de l'État, en particulier s'agissant du ministère du travail. La mutualisation des fonctions supports des services déconcentrés au sein des secrétariats généraux communs, mais surtout la création par fusion du réseau des directions régionales et départementales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (DREETS et DDEETS), ont permis une diminution des effectifs ainsi que des transferts d'ETPT vers le ministère de l'Intérieur, qui exerce la tutelle sur les secrétariat généraux communs.
L'exécution 2022 témoigne ainsi de la poursuite de la trajectoire de diminution structurelle des effectifs du ministère du travail.
* 1 Loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 et loi n° 2022-1499 du 1er décembre 2022 de finances rectificative pour 2022.
* 2 Projet annuel de performance de la mission « Travail et emploi » annexé au projet de loi de finances pour 2020.
* 3 MM. Emmanuel Capus et Daniel Breuiller, Annexe n° 32 « Travail et emploi » au Rapport général n° 115 (2022-2023) fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 novembre 2022.
* 4 Cour des comptes, Note d'analyse de l'exécution budgétaire relative à la mission « Travail et emploi » en 2022, avril 2023.
* 5 Insee - Note de conjoncture - 6 octobre 2022.
* 6 Insee - Note de conjoncture - 15 juin 2022.
* 7 Décret n° 2022-1714 du 29 décembre 2022 relatif à l'aide unique aux employeurs d'apprentis et à l'aide exceptionnelle aux employeurs d'apprentis et de salariés en contrat de professionnalisation.
* 8 Article 212 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
* 9 « France compétences face à une crise de croissance » - Sénat - Rapport n° 741 (2022-2023) de
Frédérique Puissat, Corinne Féret et Martin Lévrier - 29 juin 2022.