B. LE SÉNAT

1. Une dotation couvrant pour partie les conséquences de la hausse de l'inflation

Le budget du Sénat est réparti entre trois actions : l'action « Sénat », qui recouvre les missions institutionnelles de l'institution et représente l'essentiel des dépenses et de l'utilisation de la dotation ; l'action « Jardin du Luxembourg » ; et l'action « Musée du Luxembourg ».

Le budget du Senat pour 2024 prévoit globalement un total de dépenses de 372,63 millions d'euros en légère hausse de 1,70 % par rapport au budget 2023 (366,42 millions d'euros). Cette hausse nominale revient à une baisse de 0,9 % en termes réels sur la base de la prévision gouvernementale d'inflation de 2,6 %.

En conséquence, la dotation affectée au budget du Sénat, pour les trois actions, s'élève à 353,47 millions d'euros, soit une augmentation de 2,07 % par rapport à 2023.

La gestion vertueuse du Sénat depuis de nombreuses années, et particulièrement la maîtrise des dépenses de fonctionnement mérite d'être saluée. Si en 2022 et 2023, afin de faire face aux besoins d'investissement (entretien du patrimoine immobilier) et à l'inflation, la dotation a connu une hausse de respectivement 4,64 % et de 2,28 %, son montant n'avait pas augmenté pendant 14 ans (cf. graphique ci-contre), de 2008 à 2021, ce qui a représenté un effort important de maîtrise des dépenses.

Évolution du budget du Sénat entre 2023 et 2024

(en millions d'euros)

 

Sénat 2023

Sénat 2024

Jardin 2023

Jardin 2024

Musée 2023

Musée 2024

Total 2023

Total 2024

Dépenses

Investissement

17,17

14,41

1,58

1,81

0,07

0,07

18,82

16,29

Fonctionnement

335,44

344,62

12,06

11,62

0,10

0,10

347,59

356,33

Total des dépenses

352,60

359,03

13,64

13,43

0,17

0,17

366,42

372,63

Ressources

Produits

5,20

5,48

0,65

0,80

0,16

0,16

6,00

6,43

Prélèvements sur les disponibilités

12,71

11,69

1,39

1,03

0,01

0,01

14,12

12,73

Dotation de l'État

334,69

341,86

11,61

11,61

0,00

 0,00

346,29

353,47

Total des ressources

352,60

359,03

13,64

13,43

0,17

0,17

366,42

372,63

Source : annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2024

L'évolution du budget depuis 2012

Source : Sénat, présentation Commission commune des crédits de l'Assemblée nationale et du Sénat

Les dépenses de fonctionnement s'élèvent à 356,33 millions d'euros, contre 347,59 millions d'euros en 2023. Cette hausse modérée de 2,51 % correspond à la revalorisation du point d'indice de la fonction publique de 1,5 %, le 1er juillet 2023, et à l'inflation anticipée13(*).

L'effet en année pleine de cette revalorisation indiciaire est une composante significative de cette augmentation (soit 3,7 millions d'euros sur une augmentation nette de 8,74 millions d'euros).

En effet, son effet est mécanique et porte sur près des deux-tiers du budget du Sénat (rémunération des Sénateurs, de leurs collaborateurs, des personnels, charges contributives, subvention aux groupes politiques).

Pour les autres dépenses de fonctionnement, l'impact de l'inflation est plus difficile à mesurer. Pour l'exercice 2022, dont le taux d'inflation était de + 5,2 %, son impact, hors effet de l'augmentation de la valeur du point d'indice, a été évalué à un surcroit de dépenses de 3 millions d'euros pour le Sénat.

Enfin, en observant leur évolution sur une période de quatorze ans (2008-2022), le rapport de de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne relatif à l'exécution 202214(*), note que « depuis 2008, les dépenses de fonctionnement ont augmenté de 1,4 % en valeur. Elles avaient jusqu'alors connu une tendance à la baisse marquée, mais ont progressé de 3,8 % en 2022. Cependant, une fois pris en compte les effets de l'inflation, cette hausse en valeur correspond à une diminution des dépenses de 1,3 % sur un an ou de 15,6 % sur cette période. »

Les dépenses d'investissement (16,29 millions d'euros) sont en diminution de 13,43 % par rapport à 2023 (18,82 millions d'euros). Il s'agit d'un montant qui reste proche de l'exécution moyenne de ces dernières années (18,9 millions d'euros en 2017-2022, contre 9,5 millions d'euros en 2006-2016).

Les projets d'investissements sont détaillés ci-après dans les actions « Sénat » et « Jardin du Luxembourg ».

S'agissant des dépenses d'investissement engagées par la direction de l'architecture, du patrimoine et des jardins, les montants annuels varient suivant les années, avec une moyenne d'environ 11 millions d'euros par an sur la période 2010-2020. Ces dépenses sont destinées à conserver et restaurer un patrimoine historique et remarquable, à l'équiper en installations techniques performantes pour permettre au Sénat d'exercer dans les meilleures conditions possibles les missions d'une assemblée parlementaire, à limiter les consommations d'énergies et répondre aux impératifs du développement durable ainsi qu'à prévenir les risques de toute nature susceptibles de menacer l'intégrité des personnes et des biens.

Trois opérations d'ampleur sont en cours :

- la rénovation et la restructuration des deux immeubles sur rue des 26 et 36 rue de Vaugirard ;

- la restauration des façades et couvertures des pavillons Est et de l'aile Est du Palais du Luxembourg ;

- la restauration des grilles et murets du Jardin du Luxembourg.

Des opérations d'ampleur sont par ailleurs en préparation :

- la rénovation et la restructuration du Petit Luxembourg Est (bâtiment C) et de la salle d'accueil du 15 ter rue de Vaugirard ;

- la rénovation de l'espace d'accueil du 15 rue de Vaugirard au Palais du Luxembourg ;

- la restauration des façades et couvertures des pavillons Nord-Est et Nord-Ouest et de l'aile Nord du Palais du Luxembourg.

a) L'action n° 1 : « Sénat »

Les dépenses prévisionnelles de l'action « Sénat » représentent 359,03 millions d'euros en 2024 (soit 96,4 % du budget du Sénat), contre 352,60 millions d'euros en 2023 et 349,43 millions d'euros en 2022.

Les dépenses de fonctionnement de cette action s'élèvent à 344,62 millions d'euros, soit une hausse de 2,74 % par rapport à 2023 :

les crédits liés à l'exercice du mandat parlementaire diminuent de 0,75 % pour s'établir à 159,8 millions d'euros. Cette évolution recouvre à la fois un mouvement de hausse (notamment une progression mécanique du poste des indemnités sous l'effet de la revalorisation du point d'indice) et de baisse à l'instar de la dotation versée à l'AGAS en raison du cycle électoral (les dépenses tendent à atteindre leur plus bas niveau l'année suivant le renouvellement électoral) ;

Dépenses liées au mandat parlementaire

Source : Sénat, Commission commune des crédits de l'Assemblée nationale et du Sénat

les dépenses de personnel sont en hausse, notamment les dépenses de rémunération qui atteindraient 105 millions d'euros contre 101,41 millions d'euros dans le budget réparti 2023 (+ 3,54 %). Cette augmentation s'explique pour 1,5 point par l'augmentation du point d'indice de la fonction publique, par la répartition des crédits opérés en 2023 et par la dynamique de la masse indiciaire (glissement GVT) ;

les autres dépenses de fonctionnement sont regroupées sous différentes rubriques. Le budget des « achats » (compte 60) est stable (+ 0,54 %), tandis que celui des « travaux et services extérieurs » (compte 61) et « autres travaux et services extérieurs » (compte 62) augmente de 3,34 millions d'euros (pour un total de 38,70 millions d'euros) ;

les charges exceptionnelles, habituellement marginales (0,2 million d'euros en 2022 et 2023) ont été provisionnées à un niveau exceptionnel pour 2024 (2,12 millions d'euros), notamment pour tenir compte du risque d'une inflation plus forte que celle ayant servi d'hypothèse à la construction du budget.

Les dépenses d'investissement s'élèvent à 14,41 millions d'euros, soit un montant en baisse par rapport à l'année précédente (17,17 millions d'euros dans le budget réparti 2023).

L'année 2024 verra le démarrage, la poursuite ou l'achèvement de plusieurs chantiers s'inscrivant dans des opérations pluriannuelles, dont notamment :

- l'opération de rénovation de l'ensemble de 26 rue de Vaugirard qui devrait s'achever au premier semestre 2024 ;

- l'achèvement de la rénovation des façades et couvertures de l'aile Est et des pavillons Est ;

- lancement de la rénovation de la salle d'accueil du 15 rue de Vaugirard et des façades Nord.

Concernant les ressources, le montant annuel de la dotation de l'État (341,86 millions d'euros en 2024) permettra de couvrir la quasi-totalité (99,2 %) des dépenses de fonctionnement.

Outre la dotation de l'État de 341,86 millions d'euros, les recettes du Sénat sont composées :

- de produits divers représentant 5,48 millions d'euros ;

- et du prélèvement sur les disponibilités à hauteur de 11,69 millions d'euros (en baisse de 8,05 %).

Ressources du Sénat (action n° 1) prévues par les budgets

Source : Commission commune des crédits de l'Assemblée nationale et du Sénat à partir des données du Sénat

b) L'action 02 : « Jardin du Luxembourg »

Le Jardin du Luxembourg fait partie du domaine immobilier géré par le Sénat ouvert au public, et dont la gestion constitue la deuxième action du budget du Sénat.

Les dépenses s'élèvent à 13,43 millions d'euros en 2024, soit une baisse de 1,56 % par rapport au budget 2023 (13,64 millions d'euros).

Les dépenses de fonctionnement baissent de 0,44 millions d'euros (- 3,65 %) tandis que les dépenses d'investissement augmentent de 0,23 million d'euros pour atteindre 1,81 million d'euros, ces crédits étant majoritairement destinés à la poursuite des travaux de restauration des grilles et des murets du Jardin du Luxembourg. Une opération qui prévoit le déplombage et l'application d'une peinture à haute durabilité sur les grilles, le traitement par dorure à la feuille d'or des flèches et décors et la réparation des murets et ferronneries sur l'ensemble du périmètre du Jardin, soit environ 2 334 mètres linéaires.

Du côté des ressources, le montant des produits attendus augmente de 23,20 % par rapport à 2023 pour s'établir à 796 500 euros. Il comprend les produits des prises de vue dans le Jardin, les redevances versées par les exploitants titulaires de concessions dans le Jardin du Luxembourg, ainsi que des recettes en lien avec des défilés à l'Orangerie Férou et des expositions photographiques sur les grilles du Jardin.

Sur la base d'une dotation inchangée (11,61 millions d'euros), un prélèvement sur disponibilités resterait nécessaire à hauteur de 1,03 million d'euros (contre 1,39 million d'euros en 2023).

c) L'action 03 : « Musée du Luxembourg »

Le financement de la gestion du Musée du Luxembourg constitue la troisième action du budget du Sénat. Celle-ci est confiée à la Réunion des Musées nationaux (RMN) dans le cadre d'une délégation de service public. La convention actuellement en vigueur couvre la période 2020-2026.

Les dépenses s'élèvent à 168 200 euros, un montant identique à 2023, avec 70 000 euros consacrés à l'investissement et 98 200 euros au fonctionnement.

Les ressources proviennent de la redevance d'exploitation fixée à 155 000 euros et comportant une part variable assise sur le chiffre d'affaires. Pour 2023, il est prévu de financer cette action à hauteur de 13 200 euros par un prélèvement sur les disponibilités du Sénat.

2. Un budget s'inscrivant dans une programmation triennale qui, compte tenu des dépenses contraintes, fait percevoir un enjeu de soutenabilité budgétaire

La poursuite du programme d'investissement, nécessaire pour entretenir le patrimoine historique, s'appuie sur l'existence d'une réserve spéciale d'intervention, évaluée à 102,7 millions d'euros à la fin de l'année 2024.

Budget triennal du Sénat, du Jardin et du Musée 2024-2026

(en millions d'euros)

Dépenses

2024

2025

2026

Investissement

16,3

17,2

22,8

Fonctionnement

356,3

359,9

368,5

Total

372,6

377,1

391,3

Ressources

2024

2025

2026

Produits

6,4

6,6

6,7

Dotation de l'État

353,5

353,5

353,5

Prélèvement sur les disponibilités

12,7

17,1

31,2

Total

372,6

377,1

391,3

Solde prévisionnel de la Réserve spéciale d'intervention (fin d'exercice)

102,7

85,6

54,4

Source : annexe « Pouvoirs publics » au projet de loi de finances pour 2024

Cette projection, qui anticipe une diminution de près de moitié de cette réserve d'ici 2026, repose sur des hypothèses très structurantes mais incertaines, à savoir la valeur du point d'indice de la fonction publique qui resterait inchangée à partir de 2024 et une inflation qui reviendrait, au-delà de 2024, aux niveaux observés avant 2021. Par ailleurs, elle retient l'hypothèse conventionnelle d'un maintien en euros courants de la dotation de l'État à son niveau de 2024 pour les exercices 2025 et 2026.

Le rapporteur spécial considère comme essentiel que le Sénat puisse toujours conserver, pour assurer son bon fonctionnement institutionnel, des disponibilités comprises a minima entre deux et trois mois de dépenses, soit entre 60 et 90 millions d'euros, ce qui constituera un enjeu pour le Sénat dans les années à venir.


* 13 Pour mémoire, le taux d'inflation retenu pour la construction du budget est celui du programme de stabilité, soit + 2,6 %.

* 14 Éric Jeansannetas, rapport d'information fait au nom de la commission spéciale chargée du contrôle des comptes et de l'évaluation interne (n° 608, 2022-2023).

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