N° 586

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 mai 2024

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires économiques (1) sur la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif,

Par Mme Sylviane NOËL,

Sénatrice

(1) Cette commission est composée de : Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente ; MM. Alain Chatillon, Daniel Gremillet, Mme Viviane Artigalas, MM. Franck Montaugé, Franck Menonville, Bernard Buis, Fabien Gay, Pierre Médevielle, Mme Antoinette Guhl, M. Philippe Grosvalet, vice-présidents ; MM. Laurent Duplomb, Daniel Laurent, Mme Sylviane Noël, M. Rémi Cardon, Mme Anne-Catherine Loisier, secrétaires ; M. Jean-Pierre Bansard, Mme Martine Berthet, MM. Yves Bleunven, Michel Bonnus, Denis Bouad, Jean-Marc Boyer, Jean-Luc Brault, Frédéric Buval, Henri Cabanel, Alain Cadec, Guislain Cambier, Mme Anne Chain-Larché, MM. Patrick Chaize, Patrick Chauvet, Mme Evelyne Corbière Naminzo, MM. Pierre Cuypers, Daniel Fargeot, Gilbert Favreau, Stéphane Fouassin, Mmes Amel Gacquerre, Annick Jacquemet, Micheline Jacques, MM. Yannick Jadot, Vincent Louault, Mme Marianne Margaté, MM. Serge Mérillou, Jean-Jacques Michau, Sebastien Pla, Mme Sophie Primas, M. Christian Redon-Sarrazy, Mme Évelyne Renaud-Garabedian, MM. Olivier Rietmann, Daniel Salmon, Lucien Stanzione, Jean-Claude Tissot.

Voir les numéros :

Assemblée nationale (16ème législ.) :

1176, 1928 et T.A. 231

Sénat :

292, 579 et 587 (2023-2024)

L'ESSENTIEL

Réunie le mardi 7 mai, la commission des affaires économiques a adopté la proposition de loi, dans une version enrichie de 20 amendements. Elle a également adopté les articles 3 et 4, délégués à la commission des finances, dans leur version modifiée.

Cette proposition de loi ne traite que d'un sujet : celui du développement de la location meublée touristique et ses effets d'éviction sur le marché de la location permanente. Ce phénomène, concentré sur certains territoires, est loin de résumer l'ampleur du déséquilibre du marché locatif actuel.

La commission a donc veillé à donner aux élus locaux qui le souhaitent les outils pour réguler cette activité au plus près de leurs besoins, sans obérer son développement dans les communes dans lesquelles elle est indispensable à l'activité économique. Pour ce faire, elle a mené une consultation des élus locaux qui a suscité plus de 1 200 réponses.

I. UNE PROPOSITION DE LOI EN DÉCALAGE AVEC SON OBJECTIF AFFICHÉ

Cette proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale en janvier, porte l'ambition de remédier aux déséquilibres du marché locatif : or, ses sept articles concernent exclusivement la location meublée touristique, un phénomène dont l'essor peut engendrer des déséquilibres mais qui ne saurait résumer à lui seul les causes profondes de l'attrition du marché locatif.

A. LE DÉSÉQUILIBRE DU MARCHÉ LOCATIF EST MULTIFACTORIEL

La commission est consciente du phénomène d'éviction du logement locatif permanent auquel font face certaines communes - et notamment des grandes villes - en raison d'un essor de la location meublée touristique, source de revenus complémentaires pour les propriétaires mais qui est longtemps demeurée non-régulée, entraînant un effet d'aubaine pour des investisseurs pour qui les meublés de tourisme sont devenus un placement financier.

Néanmoins, ce phénomène ne doit pas en éluder d'autres qui ont aussi leur rôle à jouer dans les déséquilibres du marché locatif, à l'instar des vacances de logements, de la détérioration de la rentabilité locative ou de la réduction du soutien au logement social. Pour la rapporteure, seule une réflexion globale incluant notamment le statut du propriétaire bailleur, permettra de renforcer l'attractivité de la location permanente. Elle rappelle les recommandations formulées à ce sujet par la mission d'information de la commission sur la crise du logement, sur la contribution économique et sociale du bailleur privé et la présence de garanties suffisantes encourageant à s'engager davantage dans la location longue durée.

À l'initiative de la rapporteure, la commission a donc adopté un amendement modifiant le titre de la proposition de loi, en cohérence avec son dispositif, qui fait d'elle non pas une proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif mais une proposition de loi visant à renforcer les outils de régulation des meublés de tourisme à l'échelle locale.

B. L'ENCADREMENT DES MEUBLÉS TOURISTIQUES, LÉGITIME DANS CERTAINS CAS, N'EST PAS UN REMÈDE MAGIQUE

1. La location meublée touristique recouvre une diversité de pratiques

· La commission tient à rappeler que la location d'une partie d'un logement (« chambre chez l'habitant »), n'est, à raison, pas visée par la proposition de loi : il s'agit d'une pratique relevant de l'économie collaborative, permettant à des particuliers d'obtenir un complément de revenu.

· Il convient de distinguer la location ponctuelle d'une résidence principale (limitée à 120 jours par an, conformément à la définition d'une résidence principale, et représentant pour les loueurs une source de revenu d'appoint) et la location répétée d'une résidence secondaire, qui elle-même englobe des réalités différentes : elle est tantôt un produit financier pour un investisseur louant toute l'année sur un territoire touristique en zone tendue, tantôt le moyen pour une famille d'amortir les frais liés à l'entretien d'un lieu de retrouvailles familiales...

Un meublé touristique n'est donc pas toujours substituable à du logement permanent.

2. La location meublée touristique recouvre aussi des réalités différentes selon les territoires

· Pour des représentants de stations de montagne ou de stations thermales auditionnés par la rapporteure, l'essor de la location meublée touristique depuis une dizaine d'années a permis de « réchauffer les lits froids », ce qu'aucune politique publique n'était parvenue à faire avant. En l'absence d'un parc hôtelier aussi développé que sur le littoral, les meublés de tourisme sont un levier indispensable du dynamisme économique de ces communes.

· Pour des communes très touristiques, parfois de taille modeste, la location meublée touristique a été un levier de développement mais son essor incontrôlé entraîne aujourd'hui de grandes difficultés de logement pour les résidents permanents : outre la hausse des prix sur le marché locatif et les phénomènes décrits ci-dessus, les élus locaux sont nombreux à déplorer des pratiques telles que des baux mobilité illégaux où les occupants sont contraints de quitter les lieux pour la période estivale.

· Pour toutes les communes touchées par l'intensification du phénomène, la location meublée touristique peut engendrer des nuisances sonores, des dégradations, une modification de l'offre commerciale d'un quartier, des surfréquentations...autant d'effets délétères que certains élus locaux souhaitent limiter parce qu'ils nuisent à la qualité de vie des résidents et réduisent la qualité de l'expérience des touristes.

La commission a donc été soucieuse de répondre aux attentes de communes souhaitant limiter la location meublée touristique au profit du logement permanent, tout en préservant les conditions de développement économique propres d'autres communes - thermales, touristiques ou de montagne - dont le tourisme dépend en partie de cette activité.

II. UN RAPPROCHEMENT DES RÈGLES DE DÉCENCE ÉNERGÉTIQUE DES LOGEMENTS PERMANENTS ET DES MEUBLÉS TOURISTIQUES

Le calendrier de décence énergétique issu de la loi Climat et résilience de 2021 ne s'applique aujourd'hui qu'à la location nue de résidences principales. Maintenir une exception pour les meublés de tourisme pourrait nourrir un effet d'éviction à proximité des échéances d'interdiction de location. Une telle exception n'est pas non plus justifiée au regard des objectifs de logements et bâtiments basse consommation fixés à horizon 2050.

L'esprit de l'article premier de la proposition de loi est donc de réduire progressivement l'écart d'exigences entre ces deux catégories de locations.

La commission a simplifié et modifié le dispositif adopté à l'Assemblée nationale.

Pour la transformation de logement en meublé de tourisme nécessitant une autorisation, la commission a prévu qu'une étiquette classée E soit exigée pour obtenir l'autorisation de changement d'usage, qu'elle soit temporaire ou non. L'objectif est triple :

· éviter que les « passoires thermiques » classées F et G, interdites à la location nue en 2025 et 2028, ne soient redirigées vers la location meublée touristique ;

· ne pas viser les résidences principales louées quelques jours ou semaines par an ;

· cibler seulement les meublés situés dans des territoires en tension locative.

Par ailleurs, tous les meublés de tourisme devront se conformer aux exigences de décence énergétique applicables aux locations nues à compter du 1er janvier 2034, où ils devront ainsi disposer d'une étiquette classée au minimum D :

· le délai de 10 ans retenu par la commission est plus raisonnable que le délai de 5 ans fixé par l'Assemblée nationale : la commission a veillé à laisser un délai convenable aux acteurs pour s'organiser - notamment dans les stations de montagne où les « passoires thermiques » représenteraient 70 % des meublés touristiques ;

· les meublés qui constituent la résidence principale du loueur sont exclus du dispositif car ils ne sont loués qu'un nombre de jours limité par an.

III. UNE BOÎTE À OUTILS BIENVENUE POUR RÉGULER LA LOCATION MEUBLÉE TOURISTIQUE AU PLUS PRÈS DES TERRITOIRES

A. UN « APPEL À L'AIDE » DES ÉLUS LOCAUX FACE À L'INSUFFISANCE DES OUTILS À LEUR DISPOSITION

Malgré les différentes lois adoptées ces dernières années, la rapporteure a été alertée par l'insuffisance des outils dont disposent les élus locaux pour réguler le développement de la location meublée touristique sur leur territoire.

Les auditions menées ont en effet mis en évidence plusieurs « appels à l'aide » d'élus locaux qui, faute de moyens à leur disposition pour réguler la location meublée touristique, ont pu prendre des règlements instaurant des dispositifs que la loi ne prévoit pas, voire illégaux, souvent attaqués devant le juge administratif et parfois suspendus.

B. RENFORCER LES INFORMATIONS ET FACILITER LES CONTRÔLES DE LA COMMUNE SUR LES LOCATIONS MEUBLÉES TOURISTIQUES

La proposition de loi introduit en son article 1er A la généralisation de la déclaration avec enregistrement de toute location meublée touristique. Cette mesure vise à renforcer la fiabilité des données et l'information sur les meublés mis en location sur un territoire, et, surtout, à donner aux communes les moyens de mener des contrôles efficaces.

La commission des affaires économiques a adopté plusieurs amendements visant à renforcer l'effectivité de ces contrôles :

· Elle a précisé les pièces justificatives pouvant être exigées dans le cadre de la déclaration, notamment pour justifier de la qualité de résidence principale d'un meublé de tourisme. Il s'agit d'éviter les fausses déclarations à la résidence principale opérées dans le but de contourner la législation sur le changement d'usage.

· Elle a doté les communes du pouvoir de suspendre la validité des numéros d'enregistrement des annonces de meublés de tourisme, afin de permettre aux élus locaux non seulement de sanctionner les manquements mais surtout de les faire cesser. Cette suspension entraîne l'obligation pour les plateformes de retirer les annonces concernées. Elle sera notamment possible lorsque la commune constate que le meublé de tourisme mis en location est un logement social : il s'agit de rendre plus effective cette interdiction déjà inscrite dans la loi.

· Enfin, la rapporteure a été alertée par des communes touristiques aux centres historiques anciens sur des locations meublées touristiques pratiquées au mépris des règles de sécurité des biens et de personnes, dans des immeubles menaçant de s'effondrer - y compris à cause de travaux visant à renforcer l'attractivité touristique des biens mais inadaptés à la structure des immeubles. La commission a donc précisé que lorsqu'un meublé de tourisme est frappé d'arrêté de péril, la commune peut suspendre la validité de l'enregistrement de l'annonce et que les sommes versées par le locataire lui sont restituées, évitant ainsi l'enrichissement indu du propriétaire.

C. DOTER LES COMMUNES D'OUTILS À LEUR MAIN POUR RÉGULER LES MEUBLÉS DE TOURISME ET FAVORISER L'HABITAT PERMANENT

Pour concilier les préoccupations divergentes de territoires aux dynamiques économiques et locatives différentes, la commission a favorisé à l'article 2 les outils facultatifs et flexibles, aux mains des élus locaux, permettant à ceux qui le souhaitent d'encadrer la location meublée touristique au plus près des besoins de leur commune.

1. L'extension des outils de régulation aux communes qui le souhaitent

La commission a salué l'extension et la facilitation du recours par la commune au régime d'autorisation préalable au changement d'usage, notamment via la suppression de l'autorisation préfectorale. De même, elle a conservé la faculté donnée aux élus locaux de décider d'un régime d'autorisation préalable à la location d'un local professionnel en tant que meublé de tourisme : cela répond au report des investisseurs sur cette catégorie de biens, face aux régimes d'autorisations pour les locaux à usage d'habitation et à usage commercial.

2. La sécurisation d'outils mis en oeuvre par les communes et attaqués devant le juge

L'article 2 consacre également plusieurs outils déjà connus des élus, qui étaient jusqu'alors mis en oeuvre dans le silence de la loi, générant insécurité juridique et contentieux.

Pour éviter tout effet de bord, notamment dans les communes mettant en oeuvre l'autorisation de changement d'usage avec compensation, la commission a rendu facultative l'extension aux personnes morales du régime d'autorisation temporaire de changement d'usage.

L'article permet également aux communes de délimiter des zones où s'appliquent des quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage : cette mesure qui permet un pilotage du nombre de meublés et une adaptation en fonction des évolutions du parc locatif est plébiscitée par de nombreux élus. La commission a adopté deux amendements :

- un amendement sécurisant le recours des communes à des quotas, non pas en nombre maximal, mais en part maximale de logements pouvant faire l'objet d'une autorisation temporaire, afin d'autoriser un pilotage dynamique du parc ;

- un amendement de Mmes Gatel et Billon et de M. Retailleau permettant aux communes insulaires métropolitaines, dont la singularité a été reconnue par la loi 3DS, de recourir à des quotas sur l'ensemble de leur territoire.

L'article 2 entend aussi répondre aux préoccupations concernant la conformité de la location meublée touristique au bail ou au règlement de copropriété. De récentes délibérations d'Annecy, Strasbourg ou Nice ont été annulées ou suspendues parce qu'elles subordonnaient la délivrance de l'autorisation de changement d'usage à l'autorisation de la copropriété, ce qui est contraire à la Constitution. Face à l'impossibilité d'exiger une telle autorisation, la solution proposée est une déclaration sur l'honneur du demandeur de l'autorisation sur l'absence de clause interdisant la location meublée touristique. En outre, l'information sur les activités de location meublée touristique dans l'immeuble, renforcée par l'article 5, permettra aux copropriétaires d'exercer des recours.

Enfin, l'article 2 simplifie les modalités d'administration de la preuve de l'usage d'habitation d'un local, qui incombe à la commune souhaitant démontrer un usage illicite. La commission a amendé le dispositif pour concilier sécurité juridique des transactions et assouplissement des conditions de la charge de la preuve.

3. La création d'une servitude de résidence principale

Par ailleurs, l'article 2 instaure une servitude de résidence de principale pour les constructions nouvelles dans certaines zones délimitées. La commission a rendu plus effective l'obligation d'occupation à titre de résidence principale, en permettant au maire de mettre en demeure de régularisation aussi bien le locataire que le propriétaire et en autorisant une clause de résiliation unilatérale du bail en cas de non-respect de l'obligation.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er A
Généralisation de la déclaration préalable
avec enregistrement de la location d'un meublé de tourisme

Cet article, introduit par amendement des rapporteurs en commission à l'Assemblée nationale, vise à généraliser la déclaration préalable avec enregistrement de la location d'un meublé de tourisme à l'aide d'un téléservice national.

Actuellement, cette déclaration avec enregistrement n'est possible que dans les communes appliquant un régime d'autorisation préalable au changement d'usage des locaux d'habitation1(*). Or elle permet un meilleur suivi des meublés de tourisme loués sur un territoire : sa généralisation renforce donc l'information et la capacité de contrôle par les communes du respect des conditions d'encadrement de la location meublée touristique. 78 % des élus locaux consultés sur la plateforme de consultation du Sénat ont déclaré être en faveur de ce dispositif.

L'introduction d'un téléservice national, en conformité avec le règlement concernant la collecte et le partage des données relatives aux services de location de courte durée2(*), poursuit ce même objectif en permettant aux communes de recouper les données d'enregistrement et les données d'activité transmises par les plateformes dans le cadre de la généralisation de l'expérimentation « API Meublés » prévue par ailleurs par le projet de loi visant à sécuriser et réguler l'espace numérique3(*).

Pour garantir et renforcer l'effectivité des contrôles des communes, la rapporteure souligne la nécessité d'articuler ces deux dispositifs, en désignant le même organisme unique pour la gestion des deux interfaces.

La rapporteure a donc proposé l'adoption de quatre amendements :

- un amendement COM-45 visant à garantir le caractère opérationnel du téléservice national et sa conformité au droit européen en supprimant la référence à un téléservice corse ;

- un amendement COM-47 visant à préciser la nature des pièces justificatives exigées dans le cadre de l'enregistrement ;

- un amendement COM-46 prévoyant l'accès des communes, et le cas échéant des établissements publics de coopération intercommunale compétents en matière de tourisme, aux données d'enregistrement collectées par le téléservice national ;

- un amendement COM-48 visant à prévoir un mécanisme de suspension de la validité des numéros de déclaration par les communes lorsque les informations transmises sont erronées ou incomplètes ; lorsque le meublé de tourisme est visé par un arrêté de péril ou lorsque le meublé de tourisme est un logement social. Les plateformes auront l'obligation de retirer les annonces dont la validité des numéros a été suspendue.

La commission a adopté ces quatre amendements de la rapporteure ainsi que les deux amendements suivants :

- l'amendement COM-26 de M. Brisson prévoyant l'incomplétude de la déclaration en cas de non-fourniture de la preuve de la qualité de résidence principale du meublé ;

- l'amendement COM-24 de M. Brisson prévoyant des exigences minimales de sécurité électrique et de sécurité incendie à respecter dans le cadre de la déclaration de la location d'un meublé de tourisme, dans des conditions fixées par décret.

I. La situation actuelle - un recours limité à la déclaration préalable avec enregistrement malgré son utilité

A. Une procédure ouverte à un nombre restreint de communes

Le II de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme prévoit que toute location d'un meublé touristique fait l'objet d'une « déclaration préalable » auprès du maire de la commune - sauf s'il s'agit de la résidence principale du loueur.

Depuis la loi pour une République numérique de 20164(*), certaines communes peuvent décider, par une délibération du conseil municipal, de soumettre à enregistrement la déclaration préalable de toute location de meublés de tourisme. Cette possibilité est ouverte aux communes mettant en oeuvre le régime d'autorisation préalable au changement d'usage des locaux d'habitation prévu par les articles L. 631-7 à L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation.

Ce régime d'autorisation préalable est :

obligatoire dans les communes de plus de 200 000 habitants et des départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne5(*) ;

facultatif dans les autres communes, avec un distinguo entre les communes situées en zones dites « tendues » et les autres :

i) dans les communes éligibles à la taxe sur les logements vacants, dont la liste est fixée par décret6(*), il peut être rendu applicable par une délibération de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière de plan local d'urbanisme ou, à défaut, du conseil municipal ;

ii) dans les autres communes, il peut être mis en place après autorisation préfectorale, sur proposition du maire.

La procédure de déclaration avec enregistrement de la location d'un meublé de tourisme est donc ouverte à un nombre restreint de communes. Selon l'Union nationale pour la promotion de la location de vacances (UNPLV), seules 251 communes avaient mis en place cette déclaration avec enregistrement en 2023. Dans l'étude d'impact du projet de loi visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique, le Gouvernement retenait quant à lui une estimation proche de 350 communes. Ces estimations soulignent l'absence de dispositif permettant, à l'échelle nationale, de disposer d'une vision globale sur les outils mis en oeuvre par les collectivités pour réguler la location meublée touristique.

B. Une procédure qui renforce l'information de la commune et facilite les contrôles

La déclaration avec enregistrement, lorsqu'elle est mise en oeuvre, concerne les locations de résidence secondaire mais aussi les locations de résidence principale, contrairement à la déclaration « simple » mentionnée au II de l'article L. 324-1-1.

Le principal intérêt de l'enregistrement est d'associer à chaque local mis en location un numéro de déclaration, délivré immédiatement après l'enregistrement par la commune. Ce numéro doit obligatoirement figurer sur l'annonce de mise en location, conformément à l'article L. 324-2 du code du tourisme et doit obligatoirement être publié par les intermédiaires de location conformément à l'article L. 324-2-1 du même code.

Les informations exigées par l'enregistrement sont déterminées par l'article D.324-1-1 du code de tourisme7(*). La déclaration indique :

- l'identité, l'adresse postale et l'adresse électronique du déclarant ;

- l'adresse du meublé de tourisme, précisant, le cas échéant, le bâtiment, l'escalier, l'étage et le numéro d'appartement - ou alors, lorsque cela est possible, le numéro invariant identifiant le logement tel qu'il ressort de l'avis de taxe d'habitation du déclarant ;

- son statut de résidence principale ou non ;

- le nombre de pièces composant le meublé, le nombre de lits et, le cas échéant, la date de la décision de classement et le niveau de classement ou de toute autre reconnaissance de qualité des meublés de tourisme.

Pour contrôler le respect de la limitation à 120 jours par an de la location d'une résidence principale comme meublé de tourisme ainsi que de l'obtention, le cas échéant, d'une autorisation de changement d'usage, les communes mettant en oeuvre l'enregistrement disposent de plusieurs moyens :

- en vertu de l'article L. 324-1-1, elles peuvent demander à un loueur de leur transmettre le nombre de jours de location d'un meublé de tourisme, accompagné de l'adresse du meublé et de son numéro de déclaration ;

- en vertu de l'article L. 324-2-1 du code de tourisme, elles peuvent s'adresser à chaque intermédiaire de location - notamment les plateformes numériques - pour obtenir des informations sur le nombre de jours de location d'un meublé de tourisme sur son territoire précisant notamment, le nom du loueur, l'adresse du meublé et son numéro de déclaration ainsi que, le cas échéant, le fait que ce meublé constitue ou non la résidence principale du loueur.

Le projet de loi visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique (SREN) a entendu simplifier ce dernier dispositif, en généralisant une expérimentation appelée « API Meublés » : ce projet de loi prévoit la création d'un guichet unique où les communes pourront avoir accès aux données relatives aux meublés touristiques loués sur leur commune. Ces données seront collectées auprès des plateformes numériques sans que la commune ait à formuler une demande par plateforme numérique. La comparaison et le recoupement des données avec celles de l'enregistrement seraient donc facilités.

II. Le dispositif envisagé - une généralisation à toutes les communes de la procédure de déclaration préalable avec enregistrement

Cet article 1er A a été introduit par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, sur amendement des rapporteurs.

Il généralise à toutes les communes la procédure de déclaration préalable avec enregistrement de toute location meublée touristique. L'enregistrement se déroulerait via un téléservice national.

A. La mise en place d'un téléservice national, en conformité avec le droit européen

Afin de généraliser le dispositif de déclaration avec enregistrement, l'article 1er A supprime le régime de déclaration « simple » de la location d'un meublé de tourisme qui ne concerne que les résidences secondaires.

Il modifie l'article L. 324-1-1 du code du tourisme afin que la déclaration avec enregistrement soit désormais la règle et ne soit plus conditionnée à la mise en oeuvre par la commune du régime d'autorisation préalable au changement d'usage. Ainsi, toute location d'un meublé de tourisme serait subordonnée à une déclaration préalable soumise à enregistrement, auprès d'un téléservice national et non plus auprès de la commune. Néanmoins, un sous-amendement a précisé que l'enregistrement aurait lieu en Corse sur un téléservice géré par la collectivité de Corse8(*).

La mise en place d'un téléservice national répond à la fois à un objectif de meilleure information des pouvoirs publics concernant la location meublée touristique mais aussi de mise en conformité avec le droit européen : l'article 10 du règlement short term renting (STR) impose ainsi la création, dans chaque État membre mettant en place une procédure d'enregistrement, d'un point d'entrée numérique unique pour la réception et la transmission des données relatives aux meublés de tourisme. Ce point d'entrée unique se substituerait à tous les téléservices mis en oeuvre au niveau communal par les 250 à 350 communes mettant aujourd'hui en oeuvre l'enregistrement de la déclaration de location d'un meublé de tourisme.

B. Des contrôles facilités pour les communes grâce à un recoupement plus simple d'informations

Comme cela est le cas actuellement, la déclaration indiquerait si le meublé est une résidence principale ou non, ce qui permet de lui appliquer ou non la limite de 120 jours de location par année civile. De même, après enregistrement, le téléservice délivrerait un avis de réception avec numéro de déclaration : ce numéro devra, comme actuellement, être présent sur toute annonce de location d'un meublé de tourisme.

Les informations exigées pour l'enregistrement seraient, comme actuellement, déterminées par décret. Néanmoins, l'article 1er A ouvre la possibilité de prévoir des pièces justificatives lors de l'enregistrement - possibilité également rappelée par le règlement STR.

Selon la Direction générale des entreprises (DGE), l'organisme unique chargé de collecter les données d'enregistrement via le téléservice national devrait logiquement être le même que l'organisme unique chargé de collecter les données d'activité auprès des plateformes afin de les mettre à la disposition des communes dans le cadre de la généralisation de l'expérimentation « API Meublés ». Si tel est bien le cas, alors les communes pourront plus facilement confronter les données relatives aux meublés enregistrés sur leur territoire et les données sur les meublés effectivement mis en location dans leur commune.

Pour mettre en place le téléservice national pour l'enregistrement, l'entrée en vigueur de l'article est différée à une date définie par décret, au plus tard le 1er janvier 2026. Cette date d'entrée en vigueur est justifiée par le volume de données à gérer découlant de la généralisation à toutes les communes d'une procédure qui n'en concerne actuellement que quelques centaines. La DGE a indiqué à la rapporteure que le calendrier suivant pourrait être retenu :

- d'ici 2025, priorité serait donnée à la montée en puissance de l'organisme unique collectant les données de location auprès des plateformes et les mettant à disposition des communes auprès des plateformes via un guichet unique ;

- la généralisation de l'enregistrement serait préparée en parallèle afin que le téléservice soit opérationnel au plus tard le 1er janvier 2026.

IV. La position de la commission - une généralisation bienvenue de l'enregistrement dont le caractère opérationnel peut encore être renforcé, au bénéfice des contrôles des communes

La commission des affaires économiques est favorable à la généralisation de la procédure de déclaration avec enregistrement :

- elle permettra aux communes de disposer d'informations plus précises sur les meublés mis en location sur leur territoire. En effet, de nombreuses communes auditionnées par la rapporteure ont souligné que les données fournies sur la base de la déclaration « simple » sont très souvent incorrectes et imprécises et ne concernent que les résidences secondaires, ce qui facilite l'exercice non déclaré d'activités de location meublée touristique. Selon la commune d'Annecy par exemple, « l'attribution d'un numéro d'enregistrement a permis de disposer d'une cartographie plus précise et d'un suivi en temps réel de l'évolution du nombre de meublés de tourisme », permettant de disposer d'une « autre source de données différentes de celles des plateformes de logements », facilitant les contrôles ;

- elle réduira les risques d'erreur pour les loueurs, liés à la méconnaissance de réglementations locales différenciées ;

- elle permettra aux communes de disposer d'une base de données sur les meublés enregistrés sur leur commune, pouvant être comparées avec les données d'activité sur les meublés effectivement loués.

La commission est également favorable à la mise en oeuvre du téléservice national, qui constitue une simplification bienvenue pour les communes :

- il s'agit d'une part d'assurer la conformité du dispositif au droit européen : le règlement STR commande en effet la création d'un point d'entrée unique à l'échelle nationale ;

- il s'agit d'autre part de mutualiser les moyens de collecte en simplifiant la mise en oeuvre de l'enregistrement : la généralisation de l'enregistrement sans téléservice national aurait conduit les communes, y compris celles n'ayant qu'un intérêt faible pour la régulation des meublés de tourisme, à mettre en place une interface dédiée à l'échelle communale, générant complexité et coûts de gestion.

Une large majorité d'élus locaux ayant répondu à la consultation lancée sur la plateforme du Sénat s'est positionnée en faveur de la généralisation de la déclaration avec enregistrement (78 %). La minorité d'élus réticents a exprimé des craintes liées à une surcharge administrative : ces craintes découlent plutôt d'un manque d'informations sur le dispositif proposé, qui ne prévoit pas de laisser aux communes la charge de mettre en oeuvre le téléservice de déclaration.

Néanmoins, pour la rapporteure, le dispositif peut encore être sécurisé et rendu plus opérationnel, notamment dans le but de faciliter les contrôles exercés par les communes :

- il est indispensable de garantir l'articulation entre le dispositif issu du projet de loi SREN et le dispositif prévu par le présent article, en précisant, une fois la loi SREN promulguée, que l'organisme unique gérant le guichet unique opère également le téléservice national ;

- afin de permettre la comparaison effective des déclarations avec les données d'activité, l'accès des communes aux données d'enregistrement collectées par le téléservice national doit pouvoir être assuré. Cela permettra d'identifier les pratiques frauduleuses de loueurs pouvant s'identifier comme loueur d'une résidence principale au sein du téléservice mais comme loueur d'une résidence secondaire sur les plateformes afin d'éviter le blocage de son annonce à compter de 120 jours de location par an ;

- afin de sécuriser les données d'enregistrement, plusieurs communes ont fait part à la rapporteure de leur souhait de voir la déclaration accompagnée de pièces justificatives permettant d'attester de la véracité des informations transmises ;

- enfin, au-delà de faciliter les contrôles, il importe de prévoir des mécanismes permettant aux communes de voir cesser les manquements des loueurs lorsqu'ils sont identifiés. La commune d'Annecy a notamment fait part à la rapporteure de cas de locations meublées touristiques persistant dans des immeubles pourtant frappés d'arrêtés de péril.

La commission a donc adopté six amendements :

- un amendement COM-45 de la rapporteure de précision rédactionnelle visant aussi à garantir le caractère opérationnel du téléservice national et sa conformité au droit européen en supprimant la référence à un téléservice corse ;

- un amendement COM-26 de M. Brisson visant à préciser que le loueur apporte, lors de la déclaration, la preuve de la qualité de résidence principale de son meublé de tourisme, à défaut de quoi la déclaration est considérée comme incomplète ;

- un amendement COM-47 de la rapporteure visant à préciser la nature des pièces justificatives exigées dans le cadre de l'enregistrement : en conformité avec le règlement STR, l'article 1er A prévoit déjà que des pièces justificatives puissent être exigées lors de l'enregistrement, dont la liste serait précisée par décret. Pour la commission, ces pièces justificatives doivent faciliter les contrôles des communes : dès lors, elles doivent inclure des documents permettant d'attester, le cas échéant, la qualité de résidence principale du local, comme mentionné ci-dessus, et le respect des exigences de décence énergétique fixées à l'article 1er de la présente proposition de loi ;

- un amendement COM-24 de M. Brisson prévoyant que la déclaration inclut une attestation de conformité du meublé à des règles minimales de sécurité incendie et de sécurité électrique, dont les modalités sont fixées par décret ;

- un amendement COM-46 de la rapporteure prévoyant l'accès des communes aux numéros de déclaration, aux informations et aux pièces justificatives transmises dans le cadre de la déclaration avec enregistrement. Le cas échéant, ces informations sont également transmises à l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de tourisme ;

- un amendement COM-48 de la rapporteure visant à prévoir un mécanisme de suspension de la validité des numéros d'enregistrement par les communes, en conformité avec le futur règlement STR. Ce mécanisme permettra aux communes de faire cesser les infractions en suspendant la validité d'un numéro d'enregistrement lorsqu'elle constate que des informations ou pièces justificatives sont erronées, manquantes ou qu'il existe un doute sérieux sur leur authenticité. En outre, la validité d'un numéro d'enregistrement pourra être suspendue lorsque le bâtiment accueillant le meublé touristique a été frappé d'un arrêté de péril ou lorsque le meublé de tourisme est un logement social - la sous-location étant interdite par la loi. Pour assurer l'effectivité du dispositif, les plateformes numériques intermédiaires de location auront l'obligation de retirer les annonces dont le numéro d'enregistrement n'est plus valide.

La commission a adopté l'article ainsi modifié.

Article 1er B (nouveau)
Interdiction de louer en tant que meublé de tourisme
un local ciblé par un arrêté de péril
et remboursement au locataire des sommes indûment versées

Cet article, adopté par amendement ( COM-58) portant article additionnel de la rapporteure, vise à adapter les dispositions présentes au code de la construction et de l'habitat concernant le non-versement du loyer d'un local frappé d'arrêté de péril aux spécificités de la location meublée touristique.

Il répond à des alertes de certains élus locaux sur la persistance de locations meublées touristiques en dépit de la prise d'arrêtés de péril, entraînant des risques pour les occupants, des dégradations du patrimoine et un enrichissement indu du propriétaire.

La commission a adopté l'article ainsi rédigé.

I. La situation actuelle - La cessation du versement des loyers en cas de local frappé d'un arrêté de péril

A. Le pouvoir du maire de prendre un arrêté de péril

Dans le cas de logements insalubres, menaçant de s'effondrer, le maire peut adopter un arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité dans les conditions prévues à l'article L. 511-11 du code de la construction et de l'habitation. Cet arrêté prescrit les mesures nécessitées par les circonstances, parmi la réalisation de travaux permettant de préserver la solidité ou la salubrité des bâtiments, la démolition de tout ou partie de l'immeuble, la cessation de la mise à disposition du local à des fins d'habitation ou l'interdiction d'habiter, d'utiliser ou d'accéder aux lieux à titre temporaire ou définitif.

La personne tenue de réaliser ces mesures - en l'occurrence, le propriétaire ou le syndic - est redevable d'une astreinte par jour de retard en cas d'inexécution.

L'arrêté est notifié au propriétaire ou au syndic. Il est également notifié aux occupants.

Une procédure d'urgence prévue par l'article L. 511-19 du même code, permet au maire d'ordonner par arrêté et sans procédure contradictoire préalable les mesures indispensables pour faire cesser le danger dans un délai qu'elle fixe en cas de danger imminent, manifeste ou constaté sur le rapport des autorités compétentes.

B. Les conséquences financières

Les conséquences financières aux situations d'insalubrité ou d'insécurité ont pour objectif la protection des occupants.

Ainsi, l'article L. 521-2 du code de la construction et de l'habitation prévoit que les loyers ou les sommes versées en contrepartie de l'occupation du local cessent d'être dus à compter du premier jour du mois qui suit l'envoi de la notification de l'arrêté ou de son affichage à la mairie et sur la façade de l'immeuble, jusqu'au premier jour du mois qui suit l'envoi de la notification ou l'affichage de l'arrêté de mainlevée.

Les sommes versées indûment au propriétaire sont soit restituées à l'occupant, soit déduites des loyers dont il devient à nouveau redevable.

L'article 48 de la loi n° 2024-322 du 9 avril 2024 visant à l'accélération et à la simplification de la rénovation de l'habitat dégradé et des grandes opérations d'aménagement a précisé que cette disposition n'est pas seulement applicable aux locaux à usage d'habitation, mais aussi aux locaux à usage professionnel et commercial.

II. Le dispositif proposé - L'adaptation du dispositif au cas spécifique de la location meublée touristique

Plusieurs communes aux centres historiques anciens ont alerté la rapporteure sur des pratiques préoccupantes, à l'instar de la ville d'Annecy qui a signalé qu'une vingtaine d'immeubles dans le centre ancien de la ville faisait l'objet d'arrêtés de péril, parfois en raison de travaux de loueurs ayant mis à mal la structure des immeubles.

Pour autant, dans certains cas, ces arrêtés de péril n'empêchent pas la location meublée touristique de se poursuivre, les loueurs continuant à percevoir les paiements des locataires.

Bien que la loi du 9 avril 2024 relative à l'habitat dégradé ait précisé que la protection financière du locataire en cas d'arrêté de péril s'applique quel que soit l'usage du local, il semble que le cas de la location meublée touristique, qui n'entraîne ni un usage d'habitation ni un usage commercial, mériterait d'être précisé.

De plus, les modalités de cessation du versement des loyers, à compter du premier jour du mois suivant l'envoi de la notification de l'arrêté, conviennent peu à la location meublée touristique, définie comme « le fait de louer un local meublé destiné à l'habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n'y élit pas domicile »9(*), ces durées étant bien souvent limitées à quelques jours.

Une adaptation de la loi est donc nécessaire afin de rendre plus effective la protection des locataires - et donc leur remboursement - lorsque le meublé de tourisme qu'ils louent, ont loué ou entendent louer est insalubre ou compromet leur sécurité.

À l'initiative de la rapporteure, la commission a donc adopté un amendement COM-58 portant article additionnel après l'article 1er A, précisant que dans le cas de la location meublée touristique, ces dispositions s'appliquent dans les mêmes conditions que pour la location permanente à ceci près que les sommes versées par le locataire cessent d'être dues à compter du jour suivant l'envoi de la notification de l'arrêté. Les sommes indûment versées au propriétaire ne peuvent être déduites du prochain loyer mais sont nécessairement restituées au locataire.

La commission a adopté l'article ainsi rédigé.

Article 1er
Application des obligations de décence énergétique
aux locations meublées de tourisme

Cet article vise à soumettre les locations meublées de tourisme aux obligations de décence énergétique dans les communes ayant instauré une autorisation de changement d'usage.

La commission a adopté une nouvelle rédaction complète de l'article pour que, d'une part, un local, pour lequel un changement d'usage est demandé, respecte a minima la classe E du DPE et que, d'autre part, les meublés de tourisme déjà en activité se conforment à compter du 1er janvier 2034 aux normes de décence énergétique fixées par la loi « Climat et résilience » pour les locations nues.

I. La situation actuelle - Les obligations de décence énergétique ne s'imposent pas aux meublés de tourisme de la même manière qu'aux logements en location nue de longue durée ou aux hôtels

A. Les obligations de décence énergétique s'imposant aux logements d'habitation

· L'intégration de la performance énergétique dans les critères de décence du logement locatif

La réglementation relative à la décence du logement locatif est ancienne et portait sur les questions de risque pour la sécurité et la santé, l'infestation par des espèces nuisibles ou parasites et visait à s'assurer que le local n'était pas impropre à un usage d'habitation.

C'est la loi n° 2019-1147 relative à l'énergie et au climat du 8 novembre 2019 qui a ajouté à son article 17 qu'un logement décent répondrait désormais « à un critère de performance énergétique minimale ».

Cette disposition a notamment entraîné l'indécence des logements dits « G + » consommant plus de 450 kwh/m²/an au 1er janvier 2023 et donc l'interdiction de les proposer à la location.

· Le calendrier de la loi « Climat et résilience »

La loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience par rapport à ses effets a édicté plusieurs nouvelles obligations qui s'appliqueront progressivement.

Tout d'abord, un an après la promulgation de la loi, le loyer des logements classés F et G par le diagnostic de performance énergétique (DPE) ne peut plus être augmenté en dehors des revalorisations annuelles sur la base de l'indice de référence de loyers (IRL) (article 159 de la loi).

Ensuite, la loi a prévu de rehausser progressivement l'exigence de décence énergétique. Seront considérés comme indécents les logements G au 1er janvier 2025, F au 1er janvier 2028 et E au 1er janvier 2034. Un calendrier décalé est mis en oeuvre dans les départements d'outre-mer mais la validation d'un DPE spécificique y a été reportée à 2028.

L'objectif général est d'éliminer les logements considérés comme des « passoires énergétiques », c'est-à-dire ceux classés G et F, d'ici à 2028 et d'atteindre l'objectif d'un parc de logements conformes aux objectifs climatiques de notre pays d'ici à 2050, c'est-à-dire essentiellement composés de logements classés A, B et marginalement C (article 173-2 du code de la construction et de l'habitation).

Par ailleurs, le DPE doit être communiqué à l'acquéreur en cas de vente et au locataire en cas de location d'un logement (article L. 126-8 CCH). Il figure obligatoirement sur l'annonce, éventuellement avec une mention spécifique s'il s'agit d'un logement classé F ou G (L. 126-33 CCH).

B. Obligations énergétiques s'imposant aux hôtels

Les bâtiments tertiaires, dont les hôtels, sont soumis par la loi (article L. 174-1 CCH) à des objectifs de réduction de leur consommation d'énergie finale. Ces objectifs sont définis par un décret en Conseil d'État dit « décret tertiaire » qui décline l'obligation législative générale d'une diminution de 40 % en 2030, 50 % en 2040 et 60 % en 2050 par rapport à 2010.

C. L'absence d'obligation s'imposant aux meublés de tourisme et les risques qu'elle présente

Les lois « Énergie climat » puis « Climat et résilience » n'ont pas imposé de telles obligations aux meublés de tourisme.

En effet, leur objectif était à la fois de lutter contre la précarité énergétique des locataires et de focaliser l'effort de rénovation sur la partie la plus significative du parc. Un locataire séjournant quelques jours ou semaines pour des congés n'est en effet pas exposé de la même manière à un logement mal chauffé ou isolé qu'un locataire à l'année et ce parc est numériquement moins important.

Néanmoins, l'essor toujours plus important des meublés de tourisme et l'effet d'éviction qu'ils peuvent exercer localement vis-à-vis du logement à l'année en location ou non a conduit un nombre de plus en plus important d'acteurs à pointer cette différence de traitement et à craindre que les obligations de décence énergétique ne soient un argument supplémentaire au détriment de la location traditionnelle conduisant à réduire encore l'offre locative.

À ce stade, on doit toutefois parler de crainte puisqu'aucun élément chiffré établissant formellement un lien entre les deux n'a pu être apporté au rapporteur. Cela semblerait d'ailleurs difficile, ces obligations étant au début de leur mise en oeuvre. L'évaluation de leur impact sur le marché immobilier n'en est qu'à leurs débuts, les notaires notant une recrudescence des ventes des passoires thermiques et une baisse de leur valeur toutefois dépendante de la tension du marché.

Les hôteliers pointent, quant à eux, un élément supplémentaire de concurrence déloyale au regard des contraintes qui leur sont imposées et de leur coût.

Ceci étant, et plus largement, l'ensemble du secteur touristique met en avant son engagement à lutter contre le changement climatique, d'une part, et à proposer un hébergement de qualité, d'autre part, offrant un mode de chauffage ou de rafraîchissement performant et doté d'une bonne isolation. Plusieurs ont d'ailleurs souhaité le verdissement des critères de classement des meublés de tourisme mis en oeuvre par Atout France.

II. Le dispositif envisagé - Respect du calendrier de la loi « Climat et résilience » sauf exception locale

A. DPE obligatoire et respect des critères de décence

L'article 1er de la proposition de loi, dans sa rédaction initiale, prévoyait de soumettre l'ensemble des meublés de tourisme à l'établissement d'un DPE.

Il obligeait également l'ensemble des meublés à respecter le calendrier de décence énergétique édicté par la loi « Climat et résilience » pour les locations et donc interdisait ceux classés G en 2025, F en 2028 et E en 2034.

Par ailleurs, le conseil municipal pouvait soumettre l'autorisation de mise en location à la production du DPE.

S'il n'avait pas fait ce choix, le maire pouvait toutefois exiger du loueur la production du DPE et ainsi prouver qu'il respectait la législation.

B. Exceptions décidées par le conseil municipal

Toutefois, le conseil municipal, sous réserve d'une délibération motivée par les circonstances locales, pouvait déroger à ces obligations.

Il s'agissait notamment d'éviter un impact trop important sur le parc d'hébergement touristique des communes qui ne sont pas confrontées à une concurrence entre le logement permanent et les meublés de tourisme comme dans les stations de ski, les villes thermales, les communes rurales et même certaines zones littorales dont le parc est ancien et mal classé au regard du DPE.

III. Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

A. En commission : une nouvelle rédaction adossée au changement d'usage

En commission, les rapporteurs de l'Assemblée nationale ont proposé une nouvelle rédaction complète de l'article.

Cette rédaction a cherché à conserver le souhait d'étendre les obligations de décence énergétique aux meublés de tourisme et celui de préserver des exceptions au regard des circonstances locales. Mais elle a voulu corriger les fragilités juridiques de la version initiale notamment la motivation des circonstances locales et la création d'une nouvelle autorisation de mise en location qui pouvaient créer des inégalités difficilement justifiables.

Les rapporteurs ont retenu l'idée de lier l'application des obligations de décence énergétique au changement d'usage auquel un plus grand nombre de communes pourront avoir recours si la proposition de loi est adoptée. Il est à noter que, de ce fait, cette rédaction exclut les résidences principales qui sont d'ores et déjà soumises à la loi « Climat et résilience » mais pas au changement d'usage.

Cette rédaction crée un nouvel article L. 631-10 du code de la construction et de l'habitation qui prévoit que :

- pour une autorisation temporaire de changement d'usage (un an renouvelable cinq fois), les propriétaires doivent respecter le calendrier de la loi « Climat et résilience » ;

- pour une autorisation définitive, les propriétaires doivent se conformer au niveau le plus élevé, c'est-à-dire un classement minimum en D, qui n'est indispensable qu'en 2034 pour la location longue durée ;

- dans ces communes ayant instauré un changement d'usage et pour les logements ayant déjà bénéficié d'une autorisation définitive, l'obligation d'atteindre a minima la lettre D s'imposera cinq ans après la promulgation de la loi.

Par ailleurs, l'article 1er prévoit d'étendre l'amende civile d'un montant maximum de 50 000 euros pour non-respect de l'obligation d'obtenir une autorisation de changement d'usage définitif (article L. 631-7 CCH) aux conditions relatives au changement d'usage temporaire (article L. 631-7-1 A CCH).

B. En séance

L'article 1er a été adopté sans modification à l'exception d'une coordination juridique.

IV. La position de la commission - Des ajustements à la soumission des meublés de tourisme aux obligations de décence énergétique

A. Lorsqu'il y a changement d'usage

Le rapporteur approuve le rattachement au changement d'usage qui permet à chaque commune d'ajuster l'application de la réglementation en tenant compte des situations locales et notamment du risque d'un effet d'éviction au détriment de la location de longue durée pour l'habitation permanente.

Toutefois, il lui paraît disproportionné d'imposer aux logements proposés en meublés de respecter un classement D au minimum alors que cette obligation ne s'imposera pour les locations nues qu'en 2034.

Elle a donc proposé de maintenir cette barrière à l'entrée pour les seuls logements passoires thermiques, c'est-à-dire les F et G, dont l'exigence de mise aux normes est proche (2025 et 2028).

Par souci de simplicité, elle a aussi proposé que cette règle s'applique que le changement soit temporaire ou définitif.

B. Pour l'ensemble des meublés de tourisme

Pour l'ensemble des meublés de tourisme déjà existants, il ne paraît pas logique de traiter la question de leur soumission ou non aux normes de décence énergétique à partir du changement d'usage et des communes qui l'auraient mis en place.

La question est plutôt de savoir si l'ensemble des meublés doivent respecter cette norme dans le futur au regard des objectifs climatiques de notre pays et de la montée en gamme souhaitable de l'hébergement touristique.

Votre rapporteur estime, après avoir entendu l'ensemble des acteurs, qu'une telle évolution serait positive dès lors que les délais pour y parvenir seraient réalistes.

Il paraît d'ailleurs utile, notamment pour favoriser les prises de décision dans les copropriétés, que l'ensemble des propriétaires soient soumis progressivement aux mêmes règles qu'il s'agisse de résidences principales, de locations longue durée ou de meublés de tourisme.

Votre rapporteur a donc proposé que l'ensemble des meublés de tourisme soient soumis aux obligations du calendrier de la loi « Climat et résilience » à compter du 1er janvier 2034. Toutes les locations devront alors avoir a minima un DPE de classe D.

Par ailleurs, la commission a supprimé les alinéas 7 à 9 relatifs aux amendes, ceux-ci étant réintroduits avec les autres modifications de l'article L. 651-2 du CCH à l'article 2.

La commission a adopté l'article ainsi modifié.

Article 1er bis
Modifications du code du tourisme visant à renforcer les outils
à la disposition des communes
pour réguler la location meublée touristique

Cet article, introduit en commission à l'Assemblée nationale, prévoit trois mesures :

- il vise à donner la possibilité au conseil municipal d'abaisser le nombre maximal de jours de location d'une résidence principale, de cent vingt jours à quatre-vingt-dix jours par année civile ;

- il vise aussi à inclure les locaux à usage professionnel dans le régime spécifique et facultatif d'autorisation préalable à la location, jusque-là réservé aux locaux à usage commercial ;

- enfin, il dote la commune du pouvoir de prononcer des amendes administratives pour défaut d'enregistrement et pour faux numéro de déclaration. L'amende administrative pour défaut d'enregistrement se substitue à une amende civile tandis que l'amende administrative pour fraude au numéro de déclaration est une nouveauté introduite par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale.

La rapporteure a proposé l'adoption de deux amendements :

- un amendement COM-49 visant à renforcer le montant des amendes pour défaut de déclaration, fausse déclaration et dépassement de la limitation du nombre de jours de location d'une résidence principale ;

- un amendement COM-50 concernant l'entrée en vigueur de l'article.

I. L'encadrement de la location meublée touristique d'une résidence principale

A. La situation actuelle - La limitation à cent vingt jours par année civile de la location d'une résidence principale

L'article L. 324-1-1 du code de tourisme prévoit que dans les communes ayant mis en oeuvre la déclaration avec enregistrement d'un meublé de tourisme, la location d'une résidence principale en tant que meublé de tourisme est limitée à cent vingt jours par année civile. Des exceptions sont prévues en cas d'obligation professionnelle, raison de santé ou cas de force majeure.

La détermination de ce seuil découle de la définition de la résidence principale telle qu'issue de l'article 2 de la loi du 6 juillet 198910(*), qui prévoit qu'une résidence principale est celle occupée au moins huit mois par an. La location d'une résidence principale plus de quatre mois par an - ou plus de cent vingt jours - est donc incompatible avec cette définition.

Lorsqu'une commune met en oeuvre un régime d'autorisation préalable au changement d'usage d'un local d'habitation, il n'est donc pas nécessaire, en vertu de l'article L. 631-7-1 du code de la construction et de l'habitation, pour louer une résidence principale en tant que meublé de tourisme.

Néanmoins, au-delà de cent-vingt jours par an, la qualification de « résidence principale » ne tient plus et le loueur doit théoriquement demander une autorisation préalable au changement d'usage.

Cette limitation est contrôlée par les communes via deux moyens :

- le deuxième alinéa de l'article L. 324-1-1 du code de tourisme prévoit que la commune peut demander au loueur de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels ce meublé a été loué dans l'année ;

- le deuxième alinéa du II de l'article L. 324-2-1 du même code prévoit que la commune peut demander à toute plateforme intermédiaire de location de lui transmettre le nombre de jours au cours desquels un meublé de tourisme a fait l'objet d'une location par son intermédiaire sur le territoire de la commune. Ce même II oblige les plateformes à retirer les annonces de meublés de tourisme dont elles ont connaissance qu'ils sont loués plus de cent vingt jours par année civile.

B. Le dispositif envisagé - La possibilité pour les communes d'abaisser ce plafond du nombre de jours de location d'une résidence principale

Lors de l'examen en commission à l'Assemblée nationale, un amendement porté par des députés socialistes11(*) créant un article additionnel donnant la possibilité aux communes d'abaisser le plafond du nombre de jours de location d'une résidence principale a été adopté.

Il insère un nouvel alinéa à l'article L. 324-1-1 afin de prévoir que la commune peut, sur délibération motivée, abaisser le nombre maximal de jours de location d'une résidence principale, jusqu'à quatre-vingt-dix jours par année civile.

Cette prérogative du conseil municipal serait donc facultative, accessible aux communes qui le souhaitent.

Cet abaissement du seuil maximal de nombre de jours de location d'une résidence principale n'emporte pas de conséquences sur la définition de la résidence principale posée par la loi de 1989 : le changement d'usage ne reste requis que pour les locations de résidences principales au-delà de quatre mois par an.

C. La position de la commission - Une faculté à renforcer pour tenir compte des spécificités locales

Bien qu'elle ne soit pas plébiscitée par tous les élus locaux, l'abaissement du seuil est une faculté bienvenue en ce qu'elle est facultative, aux mains des élus locaux. D'après les résultats de la consultation menée sur la plateforme du Sénat, 43 % des élus répondants souhaiteraient néanmoins utiliser cette faculté. La commission des affaires économiques, attentive à ne pas alourdir le cadre juridique de la location meublée touristique mais au contraire, à donner des outils de régulation au plus près des préoccupations locales, y est donc favorable.

Cette possibilité ne constitue certes pas un instrument de lutte contre les pénuries de logements puisqu'elle concerne exclusivement les résidences principales et non un stock de logement pouvant venir compléter le parc résidentiel existant. Néanmoins, elle constitue une demande d'élus locaux, notamment de grandes villes et de communes très touristiques, pour deux raisons principales :

- d'une part, la location d'une résidence principale en tant que meublé de tourisme, si elle n'aggrave pas la pénurie de logements, peut néanmoins engendrer des nuisances sonores, des dégradations à l'échelle de la copropriété et du voisinage, voire des bouleversements de l'offre commerciale ou de l'équilibre social d'un quartier liés à une surfréquentation touristique. Une limitation plus importante de la location de résidences principales permettrait donc de réduire ces nuisances ;

- d'autre part, plusieurs communes ont alerté la rapporteure sur le fait que le plafond de cent vingt jours de location par an, particulièrement élevé, est rarement atteint par les loueurs qui louent leur véritable résidence principale : l'atteinte de ce plafond suppose en effet une absence du domicile quatre mois par an. Néanmoins, certains loueurs malhonnêtes déclarent frauduleusement leur meublé en tant que résidence principale afin d'échapper au régime d'autorisation préalable au changement d'usage. Ces pratiques sont préjudiciables aux communes non seulement parce qu'elles les rendent impuissantes à réguler la location meublée touristique mais aussi parce qu'elles modifient artificiellement le taux de résidences principales dans leur commune, emportant pour les communes de graves conséquences - par exemple, une réduction des recettes fiscales liées à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires (THRS) ou une hausse des obligations de taux de logements sociaux. La réduction du plafond permettrait donc de limiter l'attrait d'une déclaration frauduleuse de résidence principale et les nuisances associées, sans pour autant être un frein pour les particuliers souhaitant louer leur résidence principale de manière ponctuelle durant leurs absences.

La commission est donc favorable à la nouvelle possibilité donnée aux élus locaux, par une délibération motivée, d'abaisser ce nombre de jours maximal de jours de location d'une résidence principale.

II. Le régime d'autorisation préalable à la location des locaux qui ne sont pas à usage d'habitation

A. La situation actuelle - Un régime d'autorisation préalable à la location des locaux à usage commercial

Depuis la loi « Engagement et proximité » de 201912(*), l'article L. 324-1-1 du code de tourisme prévoit que les communes ayant mis en oeuvre la procédure d'enregistrement peuvent décider, via une délibération du conseil municipal, de soumettre à autorisation la location d'un local à usage commercial en tant que meublé de tourisme.

Cette disposition répondait à un besoin d'endiguer le contournement de certains investisseurs se tournant vers l'immobilier commercial afin d'échapper au régime d'autorisation préalable au changement d'usage des locaux d'habitation.

À titre d'exemple, pour y faire face, la ville de Paris a adopté fin 202113(*) un règlement sur la location de locaux commerciaux en tant que meublés de tourisme - en particulier les locaux de pieds d'immeuble, tels que dans le quartier du Marais.

B. Le dispositif envisagé - L'élargissement du régime d'autorisation de location des locaux commerciaux en tant que meublés de tourisme à tous les locaux à usage autre qu'habitation

Lors de l'examen en commission de la proposition de loi, un amendement de députés du groupe Renaissance14(*) a modifié le IV bis de l'article L. 324-1-1 afin que le régime d'autorisation préalable à la location d'un local commercial en tant que meublé de tourisme puisse être mis en oeuvre pour tous les locaux qui ne sont « pas à usage d'habitation ». Cette nouvelle formulation permet d'inclure, outre les locaux commerciaux aujourd'hui concernés, les locaux professionnels.

Cela répond à une préoccupation d'éviter les contournements du cadre juridique de l'autorisation préalable par certains investisseurs, ciblant de plus en plus les locaux professionnels au-delà des locaux commerciaux.

En effet, des grandes communes touristiques connaissant également des tensions très fortes sur leur parc locatif et sur l'immobilier commercial, à l'instar de Paris, soulignent un nouveau phénomène de report des investisseurs souhaitant échapper à l'autorisation préalable et à l'obligation de compensation.

C. La position de la commission - Un élargissement bienvenu du régime d'autorisation aux locaux professionnels pour éviter tout contournement

Cette possibilité répond à une demande grandissant d'élus locaux souhaitant disposer d'outils pour agir face aux reports d'investisseurs sur la location meublée touristique de locaux qui ne sont pas à usage d'habitation.

À Paris, où une autorisation préalable pour la location des locaux commerciaux en tant que meublés touristiques a été mise en place en 2021, il a été souligné à la rapporteure que de nombreux investisseurs commencent à se tourner vers la transformation d'entrepôts ou de garages en meublés touristiques.

La prise en compte du seul immobilier commercial au détriment de l'immobilier de bureaux laisse en effet une brèche ouverte au contournement.

La commission est donc favorable à cet élargissement.

III. Les amendes en cas de manquement aux obligations de déclaration soumise à enregistrement de la location meublée touristique

A. La situation actuelle - Le non-respect de la procédure d'enregistrement est passible d'amendes civiles

Conformément au V de l'article L. 324-1-1 du code de tourisme, le défaut de déclaration préalable avec enregistrement est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 5 000 euros.

Le non-respect par les loueurs de la limitation à cent vingt jours par année civile de la location de leur résidence principale est passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 10 000 euros, de même que pour le défaut de transmission d'informations demandées par la commune pour vérifier le respect de cette limitation.

Ces amendes civiles sont prononcées par le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, sur demande de la commune dans laquelle est situé le meublé de tourisme. Le produit de l'amende est versé à la commune. Le tribunal judiciaire compétent est celui dans le ressort duquel est situé le meublé de tourisme.

B. Le dispositif envisagé - La création d'amendes administratives prononcées par la commune en cas de manquements aux obligations d'enregistrement

Le V de l'article L. 324-1-1 du code de tourisme a été modifié lors de l'examen en commission à l'Assemblée nationale par un amendement de députés du groupe Gauche Démocratique et Républicaine15(*) afin d'introduire des amendes administratives prononcées par la commune en lieu et place des amendes civiles :

- le défaut de déclaration préalable avec enregistrement, aujourd'hui passible d'une amende civile dont le montant ne peut excéder 5 000 euros, serait passible d'une amende administrative - du même montant maximal - prononcée par la commune ;

- une nouvelle amende administrative prononcée par la commune et pouvant atteindre 15 000 euros est créée pour sanctionner « toute personne qui effectue de fausses déclarations » « ou qui utilise un faux numéro de déclaration ».

Le non-respect par les loueurs de la limitation à cent vingt jours par année civile de la location de leur résidence principale reste passible d'une amende civile de 10 000 euros.

C. La position de la commission - Des amendes dissuasives dont le montant doit être renforcé et qui doivent être associées à des outils permettant de faire cesser les infractions

La commission des affaires économiques souscrit à l'objectif de mettre fin le plus rapidement possible aux locations illicites en se soustrayant à l'intervention du juge judiciaire. À titre d'exemple, à date de publication du rapport, la ville de Nice indiquait à la rapporteure que le tribunal judicaire de Nice n'avait toujours pas statué sur plusieurs affaires engagées depuis deux ans. De même, la ville de Paris indiquait qu'il fallait environ un an au tribunal judiciaire de Paris pour traiter ces dossiers. Le remplacement de l'amende civile par une amende administrative permettrait aussi de désengorger les tribunaux de dossiers qui ne sont pas d'une grande complexité.

Néanmoins, compte tenu de la rentabilité afférente à la location meublée touristique, la commission estime que ces amendes devraient être renforcées pour être véritablement dissuasives. La rapporteure a donc proposé un amendement visant à augmenter de 5 000 euros les amendes administratives et civiles fixées par l'article L. 324-1-1 ou prévues par le présent article en cas de défaut d'enregistrement, de fausse déclaration, de dépassement de la limitation à cent vingt jours de la location d'une résidence principale.

Le rehaussement de ces sanctions répond à une volonté d'accroître leur rôle dissuasif, afin notamment de réduire le report des loueurs vers la location non déclarée et de limiter les cas de fraudes à la résidence principale opérés dans le but de contourner la règlementation sur le changement d'usage tout en louant le local plus de cent vingt jours par an.

Au total, la commission des affaires économiques a donc adopté deux amendements à l'initiative de la rapporteure :

- un amendement COM-49 visant à augmenter de 5 000 euros les montants des amendes pour défaut de déclaration, fausse déclaration et dépassement de la limitation du nombre de jours de location d'une résidence principale afin de les porter respectivement à 10 000, 20 000 et 15 000 ;

- un amendement COM-50 concernant l'entrée en vigueur du présent article : afin de permettre aux élus locaux de disposer de ces outils rapidement tout en évitant les effets d'aubaine liés à une entrée en vigueur différée, la rapporteure a proposé une entrée en vigueur différée au 15 septembre 2024. Cette date d'entrée en vigueur permet de ne pas affecter les locations meublées touristiques de résidences principales prévues pendant l'été 2024, si le texte était promulgué d'ici là.

La commission a adopté l'article ainsi modifié.

Article 2
Modifications du code de la construction et de l'habitation
et du code de l'urbanisme visant à doter les communes de nouveaux outils pour réguler la location meublée touristique

Cet article, largement modifié en commission à l'Assemblée nationale, vise à opérer plusieurs modifications du code de la construction et de l'habitation :

- il étend le périmètre des communes pouvant mettre en oeuvre un régime d'autorisation préalable au changement d'usage des locaux d'habitation ;

- il entend simplifier la charge de la preuve de l'usage habitation d'un local, qui doit être fournie par les communes souhaitant démontrer un usage illicite dans le cadre de contentieux ;

- il rend applicable aux personnes morales le régime d'autorisation temporaire de changement d'usage, actuellement réservé aux propriétaires personnes physiques ;

- il donne la possibilité aux communes, par délibération motivée, de délimiter des zones où s'appliquent des quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage ;

- il conditionne l'autorisation de changement d'usage d'un local d'habitation pour la location meublée touristique à sa conformité aux stipulations contractuelles prévues dans le bail et le règlement de copropriété, ce dont le demandeur atteste via une déclaration sur l'honneur ;

- il crée de nouvelles amendes civiles pour les infractions des intermédiaires de location et donne compétence à l'autorité organisatrice de l'habitat et à l'établissement public de coopération intercommunale pour assigner en justice les personnes enfreignant les dispositions du code de la construction et de l'habitat relatives aux autorisations de changement d'usage.

Modifiant le code de l'urbanisme, il crée par ailleurs la possibilité pour le règlement d'urbanisme de délimiter, dans les zones urbaines ou à urbaniser, des secteurs dans lesquels toutes les constructions nouvelles de logements sont à usage exclusif de résidence principale.

La commission a adopté neuf amendements, dont sept à l'initiative de la rapporteure :

- un amendement COM-51 visant à garantir la sécurité juridique de la preuve de l'usage d'habitation d'un local ;

- un amendement COM-52 visant à rendre facultatif le dispositif d'extension aux personnes morales de l'autorisation temporaire de changement d'usage ;

- un amendement COM-56 visant à permettre aux communes de définir des quotas d'autorisations temporaires en fonction du nombre total de logements afin de sécuriser les pratiques futures des communes, les protéger de contentieux et leur donner un outil de pilotage dynamique du parc de meublés de tourisme ;

- un amendement COM-53 de coordination juridique ;

- un amendement COM-40 de M. Salmon abaissant le taux minimal de résidences secondaires permettant aux communes de délimiter des zones où les constructions nouvelles sont à occupation exclusive de résidences principales ;

- un amendement COM-57 rendant plus effective l'obligation d'occupation à titre de résidence principale d'un logement dans les zones délimitées par le plan local d'urbanisme ;

- un amendement COM-54 de coordination juridique visant à donner la possibilité aux communes corses de définir des zones où les constructions nouvelles sont dédiées à l'usage d'habitation dans les mêmes conditions que les communes de métropole ;

- un amendement COM-17 de Mme Billon et M. Retailleau permettant aux communes métropolitaines insulaires de définir des quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage sur l'ensemble de leur territoire et non au sein de zones délimitées par une délibération ;

un amendement COM-55 fixant l'entrée en vigueur du présent article au 15 septembre 2024.

I. L'extension du régime d'autorisation préalable au changement d'usage des locaux d'habitation

A. La situation actuelle - Un régime d'autorisation préalable au changement d'usage applicable dans un nombre limité de communes

Les communes ne sont pas toutes concernées de la même manière par le régime d'autorisation préalable au changement d'usage des locaux d'habitation. Actuellement, ce régime d'autorisation préalable est :

- obligatoire dans les communes de plus de 200 000 habitants et dans celles des trois départements de la petite couronne francilienne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne)16(*) ;

- facultatif, pouvant être rendu applicable dans les autres communes17(*) :

i) sur décision de l'organisme délibérant de l'EPCI ou par défaut, du conseil municipal dans les communes situées en zones tendues (telles que définies par la liste des communes dans lesquelles la taxe sur les logements vacants est applicable18(*)) ;

ii) sur décision préfectorale sur proposition du maire dans les autres communes.

B. Le dispositif envisagé initialement - Une simplification du recours au changement d'usage pour un périmètre plus large de communes

Dans sa rédaction initiale, l'article 2 prévoyait de rendre obligatoire le régime d'autorisation préalable dans l'ensemble des communes situées en zones tendues, selon le zonage de l'article L. 31-10-2 du code de la construction et de l'habitation, c'est-à-dire le zonage utilisé pour déterminer les communes éligibles à l'octroi de prêts ne portant pas intérêt pour financer la primo-accession (prêts à taux zéro dits « PTZ »). Ces zones dites « tendues », caractérisées par un déséquilibre important entre l'offre et la demande de logements s'entendent de celles classées dans les zones A et B1.

Néanmoins, cet article ne modifiait pas l'article L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation donnant la possibilité à d'autres communes de mettre en oeuvre ce régime de changement d'usage.

C. Les modifications apportées à l'Assemblée nationale - L'élargissement du recours facultatif au régime d'autorisation préalable au changement d'usage

Lors de l'examen en commission à l'Assemblée nationale, la commission des affaires économiques a conservé19(*) le principe d'un élargissement des communes mettant en oeuvre le régime d'autorisation préalable au changement d'usage mais en a considérablement modifié les modalités :

l'obligation de le mettre en oeuvre dans les communes « tendues » conformément au zonage dit « PTZ » a été remplacée par une faculté, sur décision du conseil municipal, ouverte aux communes situées dans les zones tendues conformément au zonage des communes éligibles à la taxe sur les logements vacants20(*) ;

pour les autres communes, pour lesquelles les conditions de mise en oeuvre de ce régime n'étaient pas modifiées dans le texte initial, l'autorisation du préfet est supprimée : la mise en place du régime de changement d'usage est rendue possible pour toutes les communes par une délibération motivée de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme ou, à défaut, du conseil municipal. Cette délibération est motivée par un déséquilibre entre l'offre et la demande de logements entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement sur l'ensemble du parc résidentiel existant.

Les modifications apportées à cette disposition sont donc principalement de deux ordres :

une simplification : seules deux catégories de communes subsisteraient ce qui concerne le régime d'autorisation de changement d'usage : les communes situées en zone tendue et les autres, au lieu des trois catégories de communes auparavant ;

un surcroît de pouvoirs donnés aux communes : le régime d'autorisation de changement d'usage n'est plus obligatoire, mais devient une faculté ouverte à toutes les communes sans autorisation préfectorale.

D. La position de la commission - Une simplification bienvenue du recours au changement d'usage pour un périmètre plus large de communes

La commission des affaires économiques est favorable à l'élargissement du champ des communes pouvant recourir au régime d'autorisation préalable au changement d'usage, considérant qu'il est souhaitable de laisser le choix aux élus locaux de recourir ou non à cet outil.

La référence au zonage correspondant aux communes éligibles à la taxe sur les logements vacants (« TLV ») plutôt qu'au zonage ABC déterminant le droit à plusieurs aides et notamment au « prêt à taux zéro » (PTZ) est justifiée par l'élargissement, par le décret du 25 août 2023, des communes situées en zones tendues :

le zonage « TLV » incluait auparavant les communes des zones d'urbanisation continue de plus de 50 000 habitants dans lesquelles il existe un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements ;

le nouveau zonage « TLV » instauré par le décret du 25 août 2023 inclut désormais ces mêmes communes ainsi que des communes « tendues et touristiques », ne respectant pas les critères des premières mais présentant un déséquilibre marqué entre l'offre et la demande de logements entraînant des difficultés sérieuses d'accès au logement qui se caractérisent notamment par le niveau élevé des loyers, des prix d'acquisition des logements anciens ou la proportion élevée de résidences secondaires.

Il en résulte 3 697 communes couvertes contre 1 140 dans le zonage en vigueur jusqu'en août 2023.

La commission des affaires économiques est donc favorable à cette disposition permettant d'élargir le champ des communes susceptibles d'être concernées « de droit » et l'ouvrant à toutes les communes sur délibération motivée.

II. La modification de la charge de la preuve de l'usage d'habitation d'un local

A. La preuve de l'usage d'habitation d'un local est souvent difficile à apporter pour la commune

L'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation prévoit qu'un local est réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970 - date précise choisie en raison de la révision foncière intervenue en 1970 qui a nécessité l'émission de fiches de révision foncière, souvent sous la forme d'un formulaire « H2 », permettant de recenser les constructions nouvelles et d'établir leur valeur cadastrale.

Lorsqu'une autorisation administrative subordonnée à une compensation a été accordée après le 1er janvier 1970 pour changer l'usage d'un local mentionné à l'alinéa précédent, le local autorisé à changer d'usage et le local ayant servi de compensation sont réputés avoir l'usage résultant de l'autorisation.

Cela signifie qu'il faut, pour la commune, obtenir une « photo » de la situation de 1970, ou de la situation après compensation. Peu importe que le local ait ensuite été occupé à usage autre qu'habitation : si son usage au 1er janvier 1970 est d'habitation, alors il demeure d'habitation - et inversement - sauf dans le cas d'autorisation délivrée postérieurement à cette date.

Tous les accords ou conventions conclus en violation de ces dispositions sont nuls de plein droit : la sécurisation de la charge de la preuve est donc une question de sécurité juridique importante.

En cas de contentieux sur le changement d'usage, c'est à la personne souhaitant démontrer un usage illicite de supporter la charge de la preuve.

Pour prouver l'usage d'habitation d'un bien, les collectivités s'appuient donc généralement sur le formulaire « H2 », qui n'est pas toujours disponible en date du 1er janvier 1970. Plusieurs communes, et notamment Paris, ont fait part de leurs difficultés à remonter précisément au 1er janvier 1970 pour apporter la preuve de l'usage d'habitation d'un local et fait part de leur désarroi face à l'interprétation restrictive du juge. La jurisprudence récente de la Cour de cassation en témoigne : un document datant de quelques mois après le 1er janvier 1970 ne constitue pas une preuve suffisante de l'usage habitation au sens de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation21(*).

B. Le dispositif envisagé - La simplification de la charge de la preuve qui incombe aux communes concernant l'usage d'habitation d'un local

Face aux difficultés des communes à apporter la preuve de l'usage d'habitation au 1er janvier 1970 précisément, la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale22(*) a également introduit une modification de l'article L. 631-7 du code de la construction afin que la commune n'ait pas à remonter à la date précise du 1er janvier 1970 mais que la preuve de l'usage d'habitation puisse émaner d`une date ultérieure au 1er janvier 1970.

L'article L. 631-7 du code de la construction a donc été modifié en commission afin de disposer non plus qu'« un local est réputé à usage d'habitation s'il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970 » mais plutôt que « tout local ayant un usage d'habitation depuis le 1er janvier 1970 conserve cet usage ».

C. La position de la commission - Une réforme proposée à la sécurité juridique incertaine

Tous les accords ou conventions conclus en violation des dispositions de l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation sur l'usage des locaux d'habitation sont nuls de plein droit : la sécurisation de la charge de la preuve est donc une question de sécurité juridique importante aussi bien pour les communes que pour les propriétaires et autres investisseurs.

Face à la difficulté des communes d'apporter une preuve de l'usage d'habitation datant précisément du 1er janvier 1970, la rapporteure partage l'objectif poursuivi par les rapporteurs de l'Assemblée nationale de simplifier cette charge de la preuve en permettant aux communes d'apporter des éléments de preuve à une date ultérieure. La ville de Paris a notamment indiqué à la rapporteure que deux tiers des infractions constatées par les agents assermentés ne peuvent être poursuivies en l'absence d'archives permettant d'apporter une preuve au 1er janvier 1970. Lorsque les infractions sont poursuivies, la ville de Paris est déboutée dans environ 15 % des dossiers pour la même raison.

Cependant, il est apparu que la rédaction issue de l'Assemblée nationale23(*) emporte deux risques :

- d'abord, le risque d'être interprétée comme imposant à la commune d'apporter la preuve de l'usage d'un local « pendant toute la période postérieure au 1er janvier 1970 » et non pas « à n'importe quel moment après le 1er janvier 1970 ». Cela reviendrait à considérer que la commune doit prouver l'usage d'habitation de manière continue, de 1970 à la date du contentieux. Cette solution serait encore plus contraignante que la situation actuelle pour les communes ;

- ensuite, le fait de pouvoir apporter la preuve « à n'importe quel moment après le 1er janvier 1970 » est susceptible d'être aussi facteur d'insécurité juridique puisqu'il nécessiterait de faire défiler un « film » de l'usage du local depuis le 1er janvier 1970 dans le but de vérifier s'il a ou non été utilisé comme habitation, même de manière très limitée, depuis le 1er janvier 1970.

Les dispositions du code de la construction et de l'habitation sur la preuve de l'usage d'habitation portent en effet sur tous les changements d'usage et non seulement sur ceux concernant la location meublée touristique : il importe donc que le dispositif n'emporte pas d'insécurité juridique pouvant entraîner la nullité de transactions immobilières concernant des locaux à usage commercial ou professionnel. Or l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation mentionne explicitement que toute convention ou tout contrat conclu en violation de ses dispositions est nul.

La rapporteure propose donc une solution alternative permettant de concilier sécurité juridique et facilitation de la charge de la preuve pour les communes : il s'agit d'instituer une période de référence à l'intérieur de laquelle un usage d'habitation constituerait une preuve de l'usage d'habitation du local.

Elle propose de fixer cette période entre le 1er janvier 1970 et le 31 décembre 1976, période permettant à la fois de couvrir l'établissement de la très grande majorité des fiches de révision foncière et d'intervenir avant l'instauration du permis de construire de changement de destination avec travaux en 1977. Cette période permettra aux communes de s'appuyer sur des fiches postérieures au 1er janvier 1970 (ou tout autre document de preuve) sans se voir opposer une jurisprudence restrictive du juge et sans compromettre la sécurité juridique des investisseurs et utilisateurs de locaux de bureaux ou de commerces.

III. L'extension du régime d'autorisation temporaire de changement d'usage aux personnes morales

A. La situation actuelle - Le régime d'autorisation temporaire de changement d'usage est réservé aux propriétaires personnes physiques

L'article 16 de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, dite « Alur », a introduit un article L. 631-7-1 A au code de la construction et de l'habitation créant un régime d'autorisation temporaire de changement d'usage destiné aux seules personnes physiques. Les personnes morales doivent quant à elles avoir recours à une demande d'autorisation de changement d'usage « définitif », parfois assortie d'une compensation.

Le régime d'autorisation temporaire se distingue du régime d'autorisation préalable au changement d'usage de l'article L. 631-7 sur plusieurs points :

- il s'agit d'un régime d'autorisation dédié à la transformation de logements en meublés de tourisme, contrairement au régime de l'article L. 631-7 qui concerne le changement d'usage en général ;

- il s'agit d'un régime d'autorisation temporaire accordée pour une durée déterminée par la commune contrairement à l'autorisation préalable au changement d'usage, accordée à titre personnel : de nombreuses communes estiment que l'autorisation temporaire, plus flexible, est un outil permettant de s'adapter aux évolutions socio-économiques et démographiques d'un territoire ;

temporaire, elle ne fait donc pas l'objet d'une compensation contrairement à l'autorisation de l'article L. 631-7 qui peut être assortie d'une compensation dans des conditions déterminées par la commune - et qui est dans ce cas attachée au local.

Ce régime réservé aux propriétaires personnes physiques induit plusieurs conséquences :

- les communes souhaitant spécifiquement encadrer les meublés de tourisme ne peuvent le faire que pour les personnes physiques et non pour les personnes morales qui constituent pourtant de très nombreux investisseurs dans des meublés de tourisme substituables à de l'habitation longue durée ;

- dans les communes mettant en oeuvre le changement d'usage, des résidences secondaires appartenant à des familles constituées en sociétés civiles immobilières (SCI) ne peuvent se voir appliquer ce régime d'autorisation temporaire mais sont soumises au régime d'autorisation de changement d'usage « réel » éventuellement adossé à une compensation ;

- néanmoins, certains outils, comme la limitation du nombre d'autorisations temporaires octroyée à un propriétaire, sont davantage adaptés aux personnes physiques qu'aux personnes morales : si une limitation portait sur le nombre d'autorisations accordées à une personne morale, elle serait aisément contournable par les personnes morales.

B. Le dispositif envisagé - Élargir le régime d'autorisation temporaire de changement d'usage aux personnes morales

Afin d'élargir le régime d'autorisation temporaire de changement d'usage aux personnes morales, l'article L. 631-7-1 A a été modifié par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale24(*) : les termes « personne physique » sont remplacés par « un propriétaire », ce qui permet d'englober les personnes physiques comme les personnes morales.

C. La position de la commission - Un élargissement aux personnes morales qui doit demeurer à la main des élus locaux pour éviter tout effet contre-productif

Pour certains territoires, le régime d'autorisation temporaire est un bon outil pour assurer le pilotage sur la durée du nombre de meublés de tourisme sur un territoire : dès lors, il leur semble bienvenu de pouvoir adapter le traitement réservé aux personnes morales en fonction des évolutions du parc et du contexte socio-économique au lieu d'appliquer un régime d'autorisation attaché à leur personne - ou à leur local en cas de compensation - jusqu'à cessation d'activité. L'agglomération du Grand Annecy avait ainsi soumis les personnes morales à un régime d'autorisation temporaire de changement d'usage avant de voir son règlement suspendu par le juge des référés avant sa mise en application prévue au 1er juin 2023.

À l'inverse, pour les communes mettant en oeuvre un régime d'autorisation définitive assortie d'une compensation et réservant le régime d'autorisation temporaire, conformément à la loi, aux personnes physiques, la situation est toute autre : celles-ci anticipent que l'extension de l'autorisation temporaire aux personnes morales ne soit contre-productive, entraînant un effet d'aubaine de personnes morales délivrées de l'obligation de compenser leur changement d'usage.

Il paraît donc opportun à la rapporteure d'introduire de la flexibilité dans le dispositif en ouvrant ce régime aux personnes morales dans les communes qui le souhaitent, sans pour autant priver d'autres communes de la possibilité de conserver un régime d'autorisation temporaire réservé aux personnes physiques et de soumettre les personnes morales au changement d'usage avec compensation si elles l'estiment plus adapté.

De plus, il semble important de prévoir une possibilité de différenciation des critères de délivrance des autorisations temporaires pour les personnes morales et pour les personnes physiques.

La rapporteure a donc proposé un amendement visant à assurer la flexibilité du dispositif et éviter qu'il ne soit contre-productif.

IV. Les quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage

A. La situation actuelle - Certaines communes ont mis en place des quotas d'autorisations temporaires dans le silence de la loi

Aujourd'hui, l'autorisation temporaire de changement d'usage peut être mise en oeuvre par une délibération du conseil municipal conformément à l'article L. 631-7-1 A du code de la construction et de l'habitation.

Cette délibération fixe les conditions et les critères de délivrance de l'autorisation temporaire, qui peuvent porter sur :

- la durée des contrats de location ;

- les caractéristiques physiques du local ;

- sa localisation en fonction notamment des caractéristiques des marchés de locaux d'habitation et de la nécessité de ne pas aggraver la pénurie de logements.

Ces critères peuvent être modulés en fonction du nombre d'autorisations accordées à un même propriétaire personne physique.

Des règlements municipaux mettant en place des quotas d'autorisation temporaire, comme à Saint-Malo, ont ainsi suscité des contentieux dont certains sont toujours en attente d'un jugement au fond.

L'agglomération du Grand Annecy a également mis en oeuvre un système de quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage dans son règlement du 23 février 2023. Celui-ci a été suspendu par le juge des référés de Grenoble avant sa mise en application. Néanmoins, les motifs d'illégalité soulevés tenaient à d'autres points que les quotas - exigence de l'autorisation de la copropriété et soumission des personnes morales à une autorisation temporaire de changement d'usage.

B. Le dispositif envisagé - La possibilité de mettre en place des quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage

Cette disposition a été introduite en commission, sur amendement des rapporteurs25(*), afin de sécuriser les communes ayant mis en place ce type de dispositifs, et ayant vu leur règlement contesté devant le juge administratif - à l'instar de La Rochelle, Val d'Europe ou du Grand Annecy.

L'article L. 631-7-1 A du code de la construction et de l'habitation serait donc modifié pour préciser, qu'outre des critères relatifs à la durée de la location ou au nombre d'autorisations par propriétaire, la délibération pourrait également fixer un nombre maximal d'autorisations pouvant être délivrées dans des zones géographiques qu'elle délimite.

Dans ce cas, dans les zones concernées par ces quotas, aucune autorisation de changement d'usage en vertu de l'article L. 631-7 du même code (autorisation dite « permanente », attachée à la personne) ne pourrait être délivrée, sauf contre compensation équivalente.

Afin de garantir l'égalité des propriétaires face au dispositif et notamment entre les renouvellements et les nouvelles demandes, toutes les demandes seraient délivrées pour une durée identique inférieure à cinq ans. La délibération prévoirait une procédure de sélection entre les candidats avec des garanties de publicité et de transparence s'appliquant de manière identique aux demandes initiatives et aux renouvellements.

C. La position de la commission - La possibilité de quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage : un dispositif à sécuriser

La commission des affaires économiques est favorable à l'instauration facultative de quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage. Face à l'intérêt que suscite ce dispositif - Saint-Malo, Val d'Europe et le Grand Annecy ayant pris des délibérations en ce sens, suspendues pour les deux derniers -, il apparaît pertinent de leur donner une base légale solide afin d'épuiser les risques de contentieux.

De plus, les autorisations temporaires de changement d'usage permettent aux élus de disposer d'un outil dynamique pour piloter le nombre de meublés de tourisme sur un territoire, en alternative à une interdiction pure et simple des changements d'usage lorsque la compensation est difficile.

Certaines communes ont souligné à la rapporteure l'intérêt de pouvoir définir une part maximale d'autorisations temporaires de changement d'usage pouvant être délivrées par rapport au parc total de logements - permettant ainsi de fixer des quotas « en pourcentage » et non en valeur absolue, afin de mieux adapter la régulation meublée touristique aux évolutions économiques locales.

Sensible à l'idée de donner aux élus locaux des outils de pilotage « dynamique », la rapporteure a proposé un amendement visant à donner également la possibilité aux communes de déterminer des parts maximales de logements pouvant faire l'objet d'une autorisation de changement d'usage temporaire. Une telle précision au niveau de la loi permettra en outre de sécuriser les futures pratiques des communes et d'épuiser le risque de contentieux.

V. La conformité des autorisations de changement d'usage au bail ou au règlement de copropriété

A. La situation actuelle - L'inconstitutionnalité de subordonner l'autorisation de changement d'usage à une autorisation de la copropriété

À l'instar des autorisations d'urbanisme, les autorisations de changement d'usage sont aujourd'hui délivrées sous réserve du droit des tiers.

Concernant la location meublée touristique, cette situation suscite parfois l'incompréhension de copropriétaires ou bailleurs s'étonnant de voir la commune délivrer des autorisations de changement d'usage de locaux d'habitation vers la location meublée touristique alors même que le bail ou le règlement de copropriété prohibe cette activité. Les bailleurs ou copropriétaires engagent alors des recours contre les autorisations délivrées par la commune.

À la suite de l'adoption de la loi dite « Alur » en 2014, une disposition visant à remédier à cette situation avait été déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel26(*) : elle prévoyait de soumettre à l'accord de l'assemblée générale des copropriétaires toute demande d'autorisation de changement d'usage d'un local destiné à l'habitation aux fins de la location meublée touristique. Le Conseil constitutionnel avait estimé qu'elle méconnaissait les exigences de l'article 2 de la Déclaration de 1789 relatives aux conditions d'exercice du droit de propriété.

Plus récemment, des décisions du juge administratif ont appliqué cette jurisprudence constitutionnelle à des délibérations du conseil municipal :

- le juge des référés du tribunal administratif de Grenoble a suspendu le règlement du 23 février 2023 de l'agglomération du Grand Annecy27(*) en raison notamment d'un motif d'illégalité tiré de ce que les demandeurs des autorisations devaient prouver que le changement d'usage était autorisé par le règlement de copropriété ;

- statuant au fond, le juge administratif du tribunal de Nancy a annulé28(*) la délibération du 29 novembre 2019 modifiant le règlement de la commune de Strasbourg concernant les conditions de délivrance des autorisations de changement d'usage de locaux d'habitation, en ce qu'elle mentionnait que le demandeur de l'autorisation de changement d'usage « bénéficie de l'autorisation écrite de la copropriété » ;

- enfin, par un jugement du 31 janvier 2024, le tribunal administratif de Nice a annulé29(*) un article de la délibération de la commune de Nice qui mentionnait que le propriétaire, au moment du dépôt de leur autorisation de changement d'usage, devait prouver que celui-ci était autorisé dans la copropriété en fournissant « une déclaration sur l'honneur, l'extrait du règlement de copropriété attestant que celui-ci ne s'oppose pas au changement d'usage, à défaut l'accord de la copropriété ». Le tribunal a estimé que cette disposition conduisant à soumettre discrétionnairement cette autorisation à l'accord de l'assemblée générale des copropriétaires alors même que le règlement de la copropriété serait muet à ce sujet, permettant ainsi « à l'assemblée générale des copropriétaires de porter une atteinte disproportionnée aux droits de chacun des copropriétaires en méconnaissance de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ».

Néanmoins, le règlement actuel de la ville de Marseille, auditionnée par la rapporteure, prévoit en son article 10-2 que « Dès lors qu'aucune stipulation contractuelle prévue dans le bail ou le règlement de copropriété ne s'y oppose et que le demandeur bénéficie de l'autorisation écrite de la copropriété, le changement d'usage d'un local d'habitation peut être autorisé à condition que l'activité n'engendre ni nuisance, ni danger pour le voisinage et qu'elle ne conduise à aucun désordre pour le bâti et les parties communes. »

B. Le dispositif envisagé - Une attestation sur l'honneur de la conformité de la demande d'autorisation de changement d'usage au bail ou au règlement de copropriété

L'article 2 a aussi été modifié afin de préciser que les autorisations de changement d'usage sont délivrées « dès lors qu'aucune stipulation contractuelle prévue dans le bail ou le règlement de copropriété ne s'y oppose ».

Cette disposition a été introduite à la suite de l'adoption d'un amendement des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR)30(*).

Afin d'éviter tout risque d'inconstitutionnalité, il insère à l'article 2 une disposition prévoyant que le demandeur de l'autorisation de changement d'usage fournit une déclaration sur l'honneur de la conformité dudit changement d'usage avec le règlement de copropriété ou avec le bail.

C. La position de la commission - Un dispositif aux effets modestes

Les communes auditionnées par la rapporteure ont souligné l'insuffisance d'une déclaration sur l'honneur du demandeur pour assurer la conformité de l'activité de location meublée touristique au bail ou au règlement de copropriété. Néanmoins, un dispositif plus exigeant ne serait pas non plus opérant pour les communes :

- compte tenu de la jurisprudence constitutionnelle, il n'est pas raisonnable pour le législateur de proposer un dispositif exigeant une autorisation de la copropriété : une telle disposition serait susceptible d'être considérée comme contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel, tout comme les délibérations déjà prises en ce sens sont fréquemment annulées par le juge administratif ;

- exiger une copie du règlement de copropriété ou du bail ne semble pas non plus pertinent, une telle disposition revenant à transférer aux communes la charge d'interpréter les clauses du règlement de copropriétés sans pour autant épuiser les contentieux à l'égard des autorisations de changement d'usage délivrées :

i) les règlements de copropriété sont parfois très anciens et difficiles à interpréter ;

ii) la jurisprudence sur la compatibilité des clauses d'habitation bourgeoise avec l'exercice d'une activité meublée touristique est complexe et évolutive : elle dépend notamment de l'assimilation de la location meublée touristique à une activité civile ou à une activité commerciale, elle-même dépendant en partie des caractéristiques de l'activité de location (location d'une résidence principale ou d'une résidence secondaire, présence ou non de prestations de services para-hôteliers, aménagement ou non des parties communes, etc.)

À titre d'exemple, deux arrêts de la Cour de cassation en 2018 et 202031(*) ont ainsi qualifié l'activité de location meublée touristique d'activité commerciale, de ce fait incompatible avec une clause d'habitation bourgeoise. Néanmoins, par un arrêt du 25 janvier 2024, la Cour de cassation a jugé que l'activité de location en meublé de courte durée « qui n'est accompagnée d'aucune prestation de services accessoires ou seulement de prestations mineures » n'est pas de nature commerciale.

iii) enfin, le contrôle de la conformité de l'activité de location meublée touristique avec les règlements et des baux transmis nécessiterait une mobilisation importante de ressources pour les communes.

Dans la situation actuelle, une déclaration sur l'honneur semble donc constituer une solution dont l'utilité n'est pas démontrée mais qui a le mérite de rappeler aux loueurs honnêtes le cadre contractuel de leur bail ou de leur règlement de copropriété. Faute d'alternative, la commission des affaires économiques souhaite donc maintenir cette disposition tout en soulignant l'importance de l'obligation d'information du syndic en cas de location meublée touristique au sein d'un immeuble, prévue par l'article 5 de la présente proposition de loi, qui permettra justement aux copropriétaires d'exercer leurs éventuels recours en temps utile.

VI. Les sanctions pour manquement au régime d'autorisation de changement d'usage

A. Les sanctions pour manquement au régime de l'autorisation de changement d'usage

Les sanctions pour manquement aux dispositions encadrant l'autorisation préalable au changement d'usage sont régies par l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation.

Toute personne qui enfreint les dispositions de l'article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 euros par local irrégulièrement transformé.

Cette amende est prononcée par le président du tribunal judiciaire statuant selon la procédure accélérée au fond, sur assignation de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l'Agence nationale de l'habitat. Le produit de l'amende est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé ce local. Le tribunal judiciaire compétent est celui dans le ressort duquel est situé le local.

Sur assignation de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l'Agence nationale de l'habitat, le président du tribunal ordonne le retour à l'usage d'habitation du local transformé sans autorisation, dans un délai qu'il fixe. À l'expiration de celui-ci, il prononce une astreinte d'un montant maximal de 1 000 euros par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé. Le produit en est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé.

Passé ce délai, l'administration peut procéder d'office, aux frais du contrevenant, à l'expulsion des occupants et à l'exécution des travaux nécessaires.

B. Le dispositif envisagé - Renforcer les sanctions en cas de manquement au régime d'autorisation de changement d'usage

1) Inclure les intermédiaires de location

De nombreuses communes ont souligné que, si les propriétaires sont bien concernées par les amendes civiles mentionnées à l'article L. 651-2 du code de la construction et de l'habitation, les intermédiaires de location ne le sont pas.

Or, de plus en plus d'intermédiaires, y compris des conciergeries, se présentant comme des « professionnels », encouragent les propriétaires à méconnaître les dispositions législatives encadrant le changement d'usage afin d'augmenter leur activité et ainsi percevoir davantage de commissions.

Lors de l'examen en commission, les députés32(*) ont donc souhaité insérer un article L. 651-2-1 au code de la construction et de l'habitation afin de pouvoir condamner toute personne qui se livre ou prête son concours à la commission de l'infraction prévue à l'article L. 651-2, contre rémunération ou à titre gratuit, par une activité d'entremise ou de négociation ou par la mise à disposition de services, à une amende civile pouvant atteindre 50 000 euros par local irrégulièrement transformé.

2) Élargir les personnes publiques pouvant assigner en manquement devant le tribunal judiciaire

Par ailleurs, l'article 2 donne compétence à l'autorité organisatrice de l'habitat et à l'EPCI pour assigner devant le tribunal judiciaire la personne en situation de manquement par rapport au régime de changement d'usage - en sus de la compétence de la commune et de l'Agence nationale de l'habitat (Anah).

C. La position de la commission - Des sanctions bienvenues

La commission des affaires économiques est favorable à l'application aux intermédiaires de location de l'amende civile pour infraction aux autorisations de changement d'usage. De nombreux élus auditionnés ont en effet alerté la rapporteure sur l'existence de conciergeries ou autres intermédiaires se présentant comme « experts » et profitant de la complexité de la réglementation pour inciter les propriétaires à louer leur bien en tant que meublé de tourisme alors même que le règlement municipal ne le permet pas.

VII. La création d'une servitude de résidence principale

A. La situation actuelle - L'absence de cadre juridique malgré les besoins

De nombreux élus locaux auditionnés par la rapporteure ont souligné que les outils en leurs mains pour réguler la location meublée touristique sont insuffisants pour favoriser l'habitat permanent - d'autant plus dans des communes ne souhaitant pas mettre un coup d'arrêt au marché de la location meublée touristique dont le développement de leur tourisme dépend en partie.

Compte tenu de l'atteinte aux conditions d'exercice du droit de propriété que cela entraîne, la délimitation de zones dédiées à la résidence principale n'est pas juridiquement possible à l'heure actuelle pour les communes.

B. Le dispositif envisagé initialement - L'introduction de zones où les constructions nouvelles sont dédiées à l'usage habitation

Le texte initial introduisait également une possibilité pour les communes d'encadrer, dans le plan local d'urbanisme, l'usage des nouvelles opérations de construction situées dans les zones urbaines et à urbaniser afin de les destiner exclusivement à l'usage d'habitation et de les soumettre au régime d'autorisation de changement d'usage.

C. Les modifications apportées à l'Assemblée nationale - L'introduction d'une servitude de résidence principale

Lors de l'examen en commission, les rapporteurs ont modifié l'article 2 afin d'introduire de nouveaux articles L. 151-14 et suivants au code de l'urbanisme, créant une nouvelle « servitude de résidence principale ».

Le règlement d'urbanisme pourrait ainsi délimiter, dans les zones urbaines et à urbaniser, des secteurs dans desquels toutes les constructions nouvelles de logements sont à usage exclusif de résidence principale.

Cette délimitation serait possible selon deux critères :

- lorsque les résidences secondaires représentent plus de 20 % du nombre total d'immeubles à usage d'habitation ;

- ou lorsque dans le périmètre du règlement d'urbanisme, est applicable la taxe annuelle sur les logements vacants mentionnée à l'article 232 du code général des impôts (c'est-à-dire que le périmètre inclut des communes situées en zone tendue) - ce second critère ayant été introduit lors de l'examen en séance publique afin d'élargir le champ des communes concernées.

La définition de critères et d'une délimitation stricts poursuit l'objectif de proportionner le dispositif, notamment au regard de l'atteinte aux conditions d'exercice du droit de propriété qu'il entraîne.

Cette servitude de résidence principale pour les constructions nouvelles doit faire l'objet d'une mention expresse dans toute promesse de vente, tout contrat de vente ou de location ou tout contrat constitutif de droits réels, à peine de nullité.

Ainsi, compte tenu de l'obligation d'occuper ces nouvelles constructions en tant que résidence principale, seule la location meublée touristique dans la limite de cent vingt jours par année civile, conformément au IV de l'article L. 324-1-1 du code de tourisme, serait autorisée.

Des sanctions sont prévues en cas de méconnaissance de cette servitude d'urbanisme. Un article L. 481-4 est ainsi inséré au chapitre Ier du titre VIII du livre IV du code de l'urbanisme permettant au maire de mettre en demeure le propriétaire d'un logement occupé en méconnaissance de la servitude de résidence principale de régulariser la situation - après avoir invité l'intéressé à présenter ses observations.

Le délai de mise en demeure ne peut excéder un an et peut être prorogé pour une durée maximale d'un an compte tenu des difficultés de l'intéressé à s'exécuter. Il peut assortir la mise en demeure d'une astreinte d'un montant ne pouvant dépasser 1 000 euros par jour de retard, dans la limite de 100 000 euros au total.

Enfin, la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986 est modifiée afin de prévoir que la méconnaissance de cette servitude de résidence principale, faisant l'objet d'une clause dans le bail, entraîne la résiliation de plein droit du bail.

D. La position de la commission - Un dispositif bienvenu dont le caractère opérationnel et l'effectivité du contrôle doivent être renforcés

La commission est favorable à la création de cet outil aux mains des maires.

Pour des raisons opérationnelles et tenant aussi à l'intelligibilité de la norme, la rapporteure a néanmoins proposé que les critères permettant d'instaurer ce zonage soient les mêmes dans toutes les communes de France : dans la rédaction issue de l'examen par les députés, seules les communes dont le taux de résidences secondaires est supérieur à 20 % peuvent le mettre en oeuvre, alors que les communes situées en zones tendues sont également concernées sur le reste du territoire. Bien qu'en pratique, toutes les communes de zone tendue de Corse aient un taux élevé de résidences secondaires, il n'est pas exclu que ce taux évolue.

La commission a également souhaité renforcer l'effectivité de cette obligation d'occupation exclusive à titre de résidence principale en prévoyant que le maire puisse mettre en demeure non seulement le propriétaire, mais aussi le locataire, de régulariser la situation. Il s'agit d'éviter que le propriétaire ne pâtisse de manière injustifiée du comportement fautif de son locataire, d'autant plus que la mise en demeure du maire peut être assortie d'une astreinte dont les sommes peuvent atteindre 100 000 euros en tout. Enfin, afin de permettre effectivement la régularisation de la situation, la rapporteure a proposé d'inclure les cas de non-respect par le locataire de l'obligation d'occupation exclusive à titre de résidence principale dans la liste des clauses pouvant faire l'objet d'une résiliation de plein droit du bail prévue à l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989.

Au total, la commission des affaires économiques a adopté neuf amendements, dont sept à l'initiative de la rapporteure :

- un amendement COM-51 visant à garantir la sécurité juridique de la preuve de l'usage d'habitation d'un local tout en facilitant l'apport de la preuve en ne la restreignant pas à la date précise du 1er janvier 1970 ;

- un amendement COM-52 visant à sécuriser le dispositif d'extension aux personnes morales de l'autorisation temporaire de changement d'usage en permettant aux seules communes qui le souhaitent d'appliquer le régime d'autorisation temporaire aux personnes morales, évitant ainsi tout effet d'aubaine lié au contournement des obligations de compensation dans les communes où elles existent ;

- un amendement COM-56 visant à permettre aux communes de définir des quotas d'autorisations temporaires en fonction du nombre total de logements - et donc en pourcentage - afin de tenir compte de certaines pratiques et demandes de communes souhaitant pouvoir piloter de manière dynamique les autorisations de location meublée touristique ;

- un amendement COM-53 de coordination juridique ;

- un amendement COM-40 de M. Salmon visant à abaisser de 20 % à 15 % le taux de résidences secondaires permettant aux communes de délimiter des zones à occupation exclusive de résidence principale ;

- un amendement COM-54 visant à donner la possibilité aux communes corses de définir des zones où les constructions nouvelles sont dédiées à l'usage d'habitation dans les mêmes conditions que les communes de métropole, en retenant également un critère de situation dans une zone tendue ;

- un amendement COM-57 visant à renforcer l'effectivité de l'obligation d'occupation exclusive à titre de résidence principale d'un logement faisant l'objet d'une servitude de résidence principale, en prévoyant notamment que son non-respect par le locataire entraîne la résiliation de droit du bail par le propriétaire ;

- un amendement COM-17 de Mme Billon et M. Retailleau permettant aux communes métropolitaines insulaires de définir des quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage sur l'ensemble de leur territoire et non au sein de zones délimitées par une délibération ;

- un amendement COM-55 fixant l'entrée en vigueur de l'article 2 au 15 septembre 2024 afin de donner rapidement aux élus qui le souhaitent la possibilité de mettre en oeuvre les outils proposés et d'éviter tout effet d'aubaine lié à une entrée en vigueur différée à une date trop tardive, le tout sans remettre en cause les locations prévues cet été.

La commission a adopté l'article ainsi modifié.

Article 3
Modification du régime fiscal applicable à la location meublée touristique

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté l'amendement COM-37 de son rapporteur M. Jean-François Husson.

La commission a adopté l'article 3 ainsi modifié.

Article 4 (supprimé)
Suppression de la double déductibilité des amortissements
dans le cadre du régime fiscal de la location meublée non professionnelle

L'examen de cet article a été délégué au fond à la commission des finances.

Lors de sa réunion, la commission des finances a adopté l'amendement de suppression COM-38 de son rapporteur M. Jean-François Husson.

La commission a supprimé l'article 4.

Article 5 (non modifié)
Information du syndic des copropriétaires en cas de déclaration
et d'enregistrement d'un lot comme meublé de tourisme

Cet article vise à créer une obligation d'information du syndic et des copropriétaires lorsqu'un logement est transformé en meublé de tourisme et fait l'objet d'une déclaration préalable soumise à enregistrement à cette fin.

L'article a été adopté sans modification.

I. La situation actuelle - L'absence d'obligation d'information

Dans une copropriété, le propriétaire d'un logement ou éventuellement son locataire, s'il y est autorisé, n'a aucune obligation d'information des autres copropriétaires sur l'usage qu'il fait de son bien dans la mesure où celle-ci est conforme au règlement de copropriété.

De ce fait, il est complexe pour les copropriétaires de disposer dans les délais de recours des informations sur les meublés de tourisme dans leur copropriété ainsi que de recueillir la preuve des faits s'ils veulent intenter une action en justice contre un meublé de tourisme.

En revanche, les propriétaires ont des obligations déclaratives à l'égard de la commune ou peuvent être dans l'obligation de demander une autorisation (cf. commentaire des articles 1er A, 1er bis et 2).

En effet, l'article 9 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis dispose que : « Chaque copropriétaire dispose des parties privatives comprises dans son lot ; il use et jouit librement des parties privatives et des parties communes sous la condition de ne porter atteinte ni aux droits des autres copropriétaires ni à la destination de l'immeuble ».

Par ailleurs, l'article 8 de la même loi précise que : « Un règlement conventionnel de copropriété (...) détermine la destination des parties tant privatives que communes, ainsi que les conditions de leur jouissance. (...) Le règlement de copropriété ne peut imposer aucune restriction aux droits des copropriétaires en dehors de celles qui seraient justifiées par la destination de l'immeuble, telle qu'elle est définie aux actes, par ses caractères ou sa situation ».

À cette fin, le règlement de copropriété spécifie habituellement l'affectation et la destination des lots privatifs. Il peut ainsi contenir des clauses dites « d'habitation bourgeoise », strictes ou non, autoriser ou interdire l'exercice des professions libérales ou des activités commerciales.

Au cours des dernières années, des copropriétaires ont esté en justice à l'encontre d'autres copropriétaires qui exploitaient un meublé de tourisme sur le fondement de ces clauses. La jurisprudence n'est pas stabilisée mais tend à les interpréter de manière libérale.

La Cour de cassation a ainsi jugé (Cass 3e civ, 8 juin 2011, n° 10-15 891) que « devait être réputée non écrite la clause du règlement de copropriété soumettant la possibilité de louer son lot en meublé à l'autorisation de l'assemblée générale dès lors que l'exercice de professions libérales était permis expressément dans l'immeuble » estimant que les deux activités entraînaient des nuisances identiques.

Pour autant, la même 3e chambre civile a jugé à plusieurs reprises que la mise en location meublée, au-delà de 120 jours, avait un caractère commercial incompatible avec une clause d'occupation bourgeoise (8 mars 2018, n° 14-15 864 et 27 février 2020, n° 18-14 305).

Mais, récemment, la 3e chambre civile de la Cour de cassation, lors d'un arrêt du 25 janvier 2024, est venue préciser que la caractérisation de la nature commerciale de l'activité relevait de l'appréciation du juge du fond au cas par cas et n'était pas automatique. Elle a considéré qu'un meublé de tourisme n'était une activité commerciale que s'il proposait des services para-hôteliers, permettant à la plupart des meublés de tourisme de ne pas être en violation de la clause bourgeoise33(*). Elle confirmait ainsi un mouvement de jurisprudence des juges du fond en ce sens (Nice, Grenoble, Lisieux...).

Si les dispositions du règlement de copropriété ne permettent pas de faire cesser l'activité de meublé de tourisme au sein d'une copropriété, il est possible d'intenter une action en justice sur la base de l'article 9 de la loi du 10 juillet 1965 en invoquant des troubles anormaux de voisinage.

La Cour de cassation a pu rappeler que « nul ne doit créer à autrui un trouble anormal de voisinage » (Cass. 2e civ., 19 nov. 1986, n° 84-16 379) et celui-ci peut être constitué même si l'activité est conforme à la destination de l'immeuble. Selon l'ampleur des désagréments, un copropriétaire ou l'ensemble du syndicat peut porter plainte.

Il pourrait en être ainsi des activités de meublés de tourisme en raison des allées et venues des locataires des meublés, des dégâts aux parties communes, du bruit occasionné par exemple à l'occasion de fêtes tardives et répétées.

II. Le dispositif envisagé et les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale

A. Au stade de la commission

L'article 5 ne figurait pas dans la rédaction initiale de la proposition de loi. Il résulte de l'adoption de l'amendement CE68 de M. Stéphane Peu et des membres du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, après avis de sagesse des rapporteurs et un avis défavorable du Gouvernement.

Le dispositif envisagé introduit une obligation d'information des copropriétaires sur l'existence de meublés de tourisme au sein de leur copropriété, qui ne faisaient jusqu'alors l'objet d'aucune communication.

L'article prévoit que tout propriétaire, ou éventuellement locataire autorisé, doit informer le syndic que son lot fait l'objet d'une déclaration préalable de transformation en meublé de tourisme en application de l'article L. 324-1-1 du code du tourisme, sachant que l'article 1er A de la proposition de loi dispose que tous les meublés de tourisme feront désormais l'objet d'une telle déclaration préalable. À noter, au regard de la jurisprudence, que cette disposition inclut les résidences principales louées en meublé moins de 120 jours par an.

Le syndic aura alors la charge d'organiser un point d'information relatif à l'activité de location de meublés touristiques au sein de la copropriété lors de la prochaine assemblée générale.

Les auteurs ont souligné que cet article pourra limiter les conflits entre copropriétaires en levant l'anonymat du loueur, qui sera dès lors incité à prendre toutes les mesures nécessaires afin de limiter les nuisances, prenant l'exemple de fiches d'information pour les occupants ou de communiquer un numéro d'urgence pour le syndic. En revanche, une association de propriétaires de meublés de tourisme a souligné le fait que cette disposition serait à même d'encourager la stigmatisation des propriétaires au sein des immeubles voire d'encourager les conflits.

Dans un second temps, l'intention des auteurs est aussi de faciliter les procédures judiciaires intentés par les copropriétaires contre les meublés de tourisme notamment parce que la jurisprudence estime qu'une commune n'est pas fondée à refuser l'autorisation de changement d'usage sur le fondement d'un règlement de copropriété qui est un contrat auquel elle n'est pas partie et qui est un acte de droit privé34(*).

B. Au stade de la séance publique

Cet article a fait l'objet de l'amendement n° 71 des rapporteurs avec pour objet de supprimer la disposition, qui prévoyait que le syndic procède à l'affichage, dans les parties communes de l'immeuble, d'une information concernant les meublés de tourisme ayant fait l'objet d'une déclaration préalable.

Les rapporteurs ont considéré qu'il pourrait s'agir d'une atteinte à la vie privée dans le sens où cette obligation d'affichage concernait également les résidences principales qui faisaient l'objet d'une location quelques jours dans l'année. Ils ont ainsi voulu sécuriser juridiquement un dispositif par ailleurs équilibré et consensuel.

IV. La position de la commission

Partageant l'objectif d'améliorer l'information sur l'existence de meublés de tourisme au sein de la copropriété, la commission a approuvé le principe de l'obligation pour un opérateur de meublé de tourisme d'en informer le syndic, ainsi que l'organisation d'un point d'information lors de l'assemblée générale qui suit.

La rédaction issue de l'Assemblée nationale se révèle ainsi équilibrée entre le souhait d'une meilleure information et par là même d'un meilleur contrôle et d'éviter au moins deux écueils clairement établis par la jurisprudence :

- le changement d'usage d'un lot de copropriété pour le transformer en meublé de tourisme ne peut pas être soumis à une décision de l'assemblée générale (cf. DC n° 2014-691 du 20 mars 2014 censurant l'article 631-7-1 B issu de la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové) ;

- seuls les copropriétaires, ou le syndicat, sont fondés à se plaindre des nuisances ou du non-respect du règlement de copropriété par l'un d'entre eux car il s'agit d'une relation contractuelle à laquelle la commune n'est pas partie.

La commission a donc adopté l'article sans modification.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 7 mai 2024, la commission a examiné le rapport pour de Mme Sylviane Noël sur la proposition de loi n° 292 (2023-2024) visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Mes chers collègues, une semaine après avoir examiné notre rapport sur la crise du logement, notre commission examine une proposition de loi dont l'ambition est de remédier aux déséquilibres du marché locatif, sur le rapport de notre collègue Sylviane Noël. Je la remercie, ainsi que toutes les équipes, du travail effectué. Ce sujet, que nous traiterons en séance dans la semaine du 21 mai prochain, préoccupe au plus haut point nos concitoyens, comme nos élus locaux.

Je rappelle que les articles 3 et 4 relatifs à la fiscalité de la location meublée touristique ont été délégués au fond à la commission des finances. À ce titre, je salue la présence du rapporteur général Jean-François Husson, qui nous présentera tout à l'heure les modifications adoptées par sa commission ce matin.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Madame la présidente, mes chers collègues, le contenu de la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif est en décalage avec son ambition. Le texte ne traite que d'un sujet : le développement de la location meublée touristique et ses effets d'éviction sur le marché de la location permanente.

On compterait aujourd'hui près d'un million de meublés de tourisme en France. C'est un phénomène récent, qui accompagne l'essor du tourisme dans notre pays, un secteur au poids non négligeable dans notre économie, puisqu'il représente environ 4 % du PIB.

Bien sûr, le phénomène d'éviction du logement locatif permanent en raison de la location meublée touristique existe dans certaines communes, majoritairement dans les grandes villes et dans les communes touristiques. L'essor des meublés de tourisme y est longtemps resté non régulé, entraînant des effets d'aubaine pour des propriétaires qui souhaitent dégager des revenus complémentaires et pour des investisseurs qui y voient un véritable placement financier. Mais ce phénomène est loin de résumer l'ampleur du déséquilibre du marché locatif actuel, qui est multifactoriel.

Comme le propose le rapport sur la crise du logement que nous avons récemment examiné, seule une réflexion globale, notamment sur la contribution économique et sociale du bailleur privé et les garanties à lui apporter, permettra de renforcer l'attractivité de la location longue durée. Je proposerai donc un amendement visant à corriger l'intitulé de la proposition de la loi, afin de rétablir la cohérence entre son titre et son dispositif.

L'article 1er tend à aligner progressivement les exigences de décence énergétique des meublés de tourisme sur les locations nues. Les articles 1er A, 1er bis et 2 constituent une « boîte à outils » de régulation de la location meublée touristique au service des maires. Les articles 3 et 4 concernent la fiscalité des revenus tirés de la location meublée touristique ; ils ont été délégués à la commission des finances, qui a approuvé ce matin le rapport de Jean-François Husson. Enfin, l'article 5 traite de l'information du syndic de copropriété lors de la déclaration de la location d'un meublé de tourisme dans l'immeuble.

Tout l'enjeu de la préparation de l'examen de cette proposition de loi a été de concilier des points de vue très différents sur la location meublée touristique. Je le disais, des grandes villes et des communes très touristiques font face à un phénomène d'éviction du logement permanent par la location meublée touristique : nous avons tous en tête les alertes sur l'abus de « baux mobilité » destinés à libérer les logements en période estivale, poussant les résidents permanents à vivre plusieurs mois dans des caravanes, dans leur véhicule ou chez des proches. À l'inverse, pour d'autres territoires, la location meublée touristique est un levier indispensable de développement économique. Pour des stations de montagne ou thermales, l'essor de la location meublée touristique et des plateformes de ces dix dernières années a permis ce qu'aucune politique publique n'avait réussi jusqu'alors, « réchauffer les lits froids ». Nous ne pouvons que nous en réjouir.

Compte tenu de ces réalités extrêmement différentes, une consultation a été menée sur la plateforme du Sénat et a recueilli plus de 1 200 contributions. Au cours de mes auditions, j'ai aussi entendu des élus de grandes villes, de montagne, de communes thermales, du littoral ou encore de stations touristiques.

Vous l'aurez compris, ma boussole a été de donner aux élus locaux qui le souhaitent des outils pour réguler cette activité au plus près de leurs besoins sans obérer son développement dans les communes dans lesquelles elle est indispensable.

L'article 1er porte sur le calendrier de décence énergétique issu de la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite Climat et résilience. Ce calendrier ne s'applique aujourd'hui qu'à la location nue de résidences principales : maintenir une exception pour les meublés de tourisme pourrait nourrir un effet d'éviction à proximité des échéances d'interdiction de location des passoires thermiques : 2025 pour les logements G, 2028 pour les F et 2034 pour les E. L'esprit de cet article est donc de réduire progressivement l'écart d'exigence entre ces deux catégories de locations et d'éviter le basculement de la location nue vers la location touristique là où les difficultés de logement sont les plus grandes. Parmi les élus ayant répondu à la consultation en ligne, 76 % sont favorables à ce que ces locations soient soumises à des calendriers similaires à terme.

Il en résulte deux dispositifs. Le premier concerne le flux des nouveaux meublés, dans les communes exigeant une autorisation de changement d'usage. Le second concerne le stock des meublés existants, pour lequel le délai de mise en oeuvre de la loi Climat et résilience serait de cinq ans.

Il me paraît important de conserver un dispositif barrière pour éviter la transformation des passoires thermiques en meublés de tourisme dans les zones en tension, où les communes auront mis en place l'autorisation de changement d'usage. Mais je crois qu'il faut un dispositif plus simple et réaliste. J'ai donc souhaité réintégrer les logements classés E, pour lesquels la loi Climat et résilience ne s'appliquera qu'à compter de 2034. L'Assemblée nationale a introduit une distinction qui risque de laisser glisser les logements classés F vers la location meublée touristique d'ici à 2028.

Ensuite, en dehors des autorisations de changement d'usage, je vous propose de prévoir que tous les meublés de tourisme se conforment aux exigences de décence énergétique applicables aux locations nues à compter du 1er janvier 2034, date à laquelle ils devront disposer d'une étiquette D au minimum. Ce délai de dix ans est plus raisonnable que celui de cinq ans qui avait été fixé par l'Assemblée nationale : il permettra de réaliser les travaux, notamment dans les copropriétés de montagne. Les meublés qui constituent la résidence principale du loueur sont exclus du dispositif, n'étant loués qu'un nombre de jours limité par an.

Les articles 1er, 1er bis et 2 constituent notre « boîte à outils ». Mes auditions et la consultation sur le site du Sénat conduisent à ce constat particulièrement frappant : les outils dont disposent les élus locaux souhaitant réguler l'activité de location meublée touristique sont clairement insuffisants. Ainsi, 38 % des élus consultés estiment que leur commune fait face à un déséquilibre du marché locatif nécessitant une régulation des meublés de tourisme, mais ils sont autant à affirmer que les outils à leur disposition pour ce faire sont insuffisants ! Prenons les délibérations prises par Saint-Malo, Annecy, Nice, Strasbourg, Val d'Europe, qui ont été attaquées devant le juge administratif : ces délibérations instaurant de nouveaux outils de régulation dans le silence de la loi sont de véritables appels à l'aide que nous devons prendre au sérieux.

L'article 1er A généralise la déclaration avec enregistrement de toute location d'un meublé de tourisme. Près de 80 % des élus locaux consultés sont en faveur de cette généralisation : elle leur permettra de disposer de davantage d'informations sur les locations dans leur commune. J'ai néanmoins identifié des améliorations afin de rendre le dispositif plus opérationnel et faciliter les contrôles pour les communes. Je vous proposerai des amendements visant à préciser les pièces justificatives pouvant être exigées dans le cadre de la déclaration, notamment pour justifier de la qualité de résidence principale d'un meublé. Des loueurs malhonnêtes multiplient en effet les fausses déclarations pour contourner la législation sur le changement d'usage.

Pour permettre aux communes non seulement de mener des contrôles, mais aussi de faire cesser les manquements, il m'a semblé important de les doter du pouvoir de suspendre la validité des numéros de déclaration des annonces. Cette suspension sera aussi possible lorsque la commune constatera que le meublé mis en location est un logement social : il s'agit de rendre plus effective cette interdiction déjà inscrite dans la loi.

J'ai par ailleurs été alertée par des communes aux centres historiques anciens, comme Annecy, sur des locations pratiquées au mépris des règles de sécurité des personnes et des biens, dans des immeubles menaçant de s'effondrer. Je vous proposerai donc un amendement visant à préciser que lorsqu'un meublé de tourisme est frappé d'arrêté de péril, la commune peut suspendre la validité de l'enregistrement et que les sommes versées par les locataires lui sont restituées.

L'article 1er bis donne la possibilité aux élus locaux d'abaisser à 90 jours le plafond du nombre de jours de location d'une résidence principale, actuellement fixé à 120 jours par an. Bien sûr, il ne s'agit pas de pénaliser les propriétaires occupants qui souhaitent arrondir leurs fins de mois. Je précise à cette occasion que la location d'une chambre chez l'habitant n'est pas du tout concernée par les dispositions de cette proposition de loi : la définition d'un meublé de tourisme au sens du code du tourisme précise qu'il s'agit de locaux « à l'usage exclusif du locataire ».

La faculté d'abaisser à 90 jours le plafond de location d'une résidence principale répond aux besoins de certains élus locaux. Dans le cadre de la consultation, ils sont 43 % à avoir indiqué être intéressés par ce dispositif, à mon sens pour plusieurs raisons. J'ai ainsi été alertée sur des cas de « fausses résidences principales ». Or la hausse artificielle du taux de résidences principales dans une commune induit de graves conséquences : cela augmente les obligations de construction de logements sociaux tout en réduisant les recettes fiscales tirées de la taxe d'habitation sur les résidences secondaires. À cet égard, il m'a semblé pertinent de conserver ce dispositif facultatif demandé par plusieurs communes. Je souligne que 120 jours par an, c'est déjà quatre mois d'absence du domicile !

Pour les communes touchées par l'intensification du phénomène, la location meublée touristique peut engendrer des nuisances sonores, des dégradations, une modification de l'offre commerciale d'un quartier, des surfréquentations... Autant d'effets délétères que certains élus locaux souhaitent limiter, parce qu'ils nuisent à la qualité de vie des résidents et réduisent la qualité de l'expérience des touristes. Des résidents du centre-ville d'Annecy m'ont illustré cette situation en qualifiant certains quartiers de « Rungis le matin, parc Astérix l'après-midi et Ibiza le soir » !

L'article 1er bis introduit aussi des amendes administratives pour défaut d'enregistrement et pour fausse déclaration dans le cadre de l'enregistrement. À cet article, je vous proposerai d'augmenter de 5 000 euros les montants des amendes pouvant être prononcées : ces amendes seront ainsi proportionnées, en lien avec la rentabilité de la location meublée touristique. Elles seront également en cohérence avec le reste du texte : dès lors que la déclaration avec enregistrement est généralisée, il est normal de dissuader les loueurs de se reporter sur la location non déclarée. Face aux nombreux élus me rapportant des cas de fausses résidences principales louées 120 jours sur plusieurs plateformes à la fois, je vous propose aussi d'augmenter les amendes pour dépassement de ce plafond.

L'article 2 inclut sept mesures différentes. Parmi elles figure l'extension du champ des communes pouvant recourir au régime d'autorisation préalable au changement d'usage. L'article supprime notamment l'autorisation préfectorale aujourd'hui nécessaire pour les communes situées en dehors des zones tendues. Dans le cadre de la consultation, près d'une vingtaine d'élus a indiqué avoir souhaité mettre en oeuvre ce régime, mais avoir essuyé un refus de la part du préfet. Cette extension est donc saluée par les élus locaux.

L'article 2 consacre également plusieurs outils déjà connus des élus, qui étaient jusqu'alors mis en oeuvre dans le silence de la loi, ce qui engendrait insécurité juridique et contentieux. Je pense notamment aux quotas d'autorisations temporaires institués par la ville de Saint-Malo. Sur ce sujet, je vous proposerai un amendement sécurisant le recours des communes à des quotas en part maximale de logements, exprimée en pourcentage et non en valeur absolue, afin d'autoriser un pilotage dynamique du parc. Une quasi-majorité d'élus consultés estime en effet que les quotas d'autorisations temporaires seraient un bon outil.

L'article 2 entend aussi répondre aux préoccupations concernant la conformité de la location meublée touristique au bail ou au règlement de copropriété. De récentes délibérations du conseil municipal d'Annecy, Strasbourg ou Nice ont été annulées ou suspendues parce qu'elles subordonnaient la délivrance de l'autorisation de changement d'usage à l'autorisation de la copropriété, ce qui est contraire à la Constitution. La solution proposée par ce texte est une déclaration sur l'honneur du loueur sur l'absence de clause interdisant la location meublée touristique. Cela n'est certes pas complètement satisfaisant, mais il est constitutionnellement impossible d'aller plus loin. Par ailleurs, les règlements de copropriété sont souvent anciens et leur interprétation par le juge fait l'objet d'une jurisprudence évolutive : il ne me semble donc pas pertinent de donner aux communes la charge de les contrôler. En outre, l'information sur les activités de location meublée touristique dans l'immeuble, renforcée par l'article 5, qui prévoit une information du syndic et un point lors de l'assemblée générale des copropriétaires, permettra aux copropriétaires d'exercer des recours.

Par ailleurs, l'article 2 instaure une servitude de résidence principale pour les constructions nouvelles dans des zones délimitées. C'est là encore un dispositif qui intéresse les élus locaux : ils sont 54 % à être en faveur d'une telle faculté. Il m'a semblé ici pertinent de rendre plus effective l'obligation d'occupation de résidence principale. Je vous proposerai donc un amendement en ce sens.

Enfin, je vous proposerai des amendements fixant l'entrée en vigueur des articles relatifs aux pouvoirs des communes au 15 septembre 2024 : il s'agit de ne pas affecter les locations prévues cet été, tout en envoyant un signal fort sur le fait que les communes pourront se saisir rapidement des outils de régulation, en évitant tout effet d'aubaine.

Voilà, mes chers collègues, le résultat de mes travaux : il s'agit, à mon sens, d'un équilibre entre les attentes d'élus démunis face à une activité facteur de déséquilibres sur leur territoire et les attentes d'autres communes soucieuses de préserver un modèle de développement économique et touristique, qui est une richesse pour notre pays.

Je terminerai en remerciant notre collègue Jean-François Husson, rapporteur général du budget et rapporteur pour avis sur ce texte, pour la qualité des échanges que nous avons eus au sujet des articles fiscaux délégués à la commission des finances. Je souligne que la qualité du modèle touristique de notre pays tient notamment à des démarches engagées d'acteurs locaux, qui encouragent le classement dans leur commune, et qu'il est important de les appuyer dans leurs efforts grâce à un effet incitatif au classement des meublés de tourisme.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Merci, ma chère collègue, de ce rapport très complet, qui vient enrichir le texte voté à l'Assemblée nationale.

M. Jean-François Husson, rapporteur pour avis de la commission des finances. - J'adresse également mes remerciements à Mme la rapporteure Sylviane Noël pour son travail, pour la fluidité de nos relations et pour sa confiance. Nous avons partagé des préoccupations communes, et la principale mesure fiscale, à l'article 3, n'aurait pas dû faire l'objet d'une nouvelle réforme si le Gouvernement avait fait preuve d'une plus grande vigilance.

Les articles 3 et 4, qui portent sur la fiscalité et dont s'est saisie la commission des finances, apportent des ajustements n'ayant que très peu d'impacts sur l'offre de logements à l'année. Le premier de ces deux articles vise à rendre moins favorable fiscalement le régime micro-BIC applicable aux meublés de tourisme. La commission des finances a voulu rendre ce dispositif plus juste et plus équilibré et les propositions que j'ai faites ce matin ont été largement adoptées.

Alors que le régime micro-BIC est un régime simplifié, la commission des finances a notamment supprimé le zonage fiscal contenu dans le texte initial. Au-delà de la nécessité d'éviter une complexité excessive, la seule proposition que les associations d'élus sont parvenues à nous faire a été de modifier ce zonage. Son maintien aurait présenté en outre une difficulté au regard de l'égalité devant l'impôt : nous aurions pu mettre en place des dérogations sans lien avec le régime micro-BIC.

En tenant compte du fait qu'il devait s'appliquer à l'ensemble du territoire, nous avons donc élaboré et adopté un dispositif fiscal que je qualifierai d'équilibré. Ce dernier maintient d'abord l'alignement proposé par le texte transmis au Sénat entre le régime microfoncier et le régime micro-BIC des locations de meublés touristiques, avec un niveau d'abattement identique, à savoir 30 % du chiffre d'affaires pour les deux régimes.

Par ailleurs, nous avons conservé - certains y étaient très attachés - un écart de 20 points entre les hébergements classés et ceux qui ne le sont pas. Cet écart permet de favoriser la montée en gamme de l'offre touristique sans pour autant créer un avantage fiscal disproportionné. En outre, le dispositif aligne le plafond du régime micro-BIC des meublés non classés sur celui des loueurs de meublés non professionnels - soit 23 000 euros de chiffre d'affaires -, de manière à ce que les contribuables soient soumis non pas à plusieurs seuils sans véritable justification, mais à un seul et même seuil.

Le plafond applicable aux hébergements classés serait aligné sur le plafond actuellement applicable au régime micro-BIC des hébergements non classés et s'élèverait donc à 77 700 euros. Par souci de cohérence et de simplicité, nous n'avons pas voulu créer de catégorie supplémentaire.

Enfin, nous proposons de maintenir le régime préférentiel des chambres d'hôtes qui, parce qu'elles ont des charges plus élevées, pourront continuer de bénéficier de l'abattement de 71 % sur leur chiffre d'affaires.

J'en viens à l'article 4, qui prévoit de réintégrer au calcul de la plus-value de cession des loueurs de meublés touristiques non professionnels les amortissements déduits du revenu de la location de ces biens. Ce dispositif a été introduit en commission à l'Assemblée nationale par amendement. Il n'a fait l'objet d'aucune étude d'impact et lors des auditions, l'administration fiscale n'a pas été en mesure d'apporter le moindre élément sur les conséquences de sa mise en oeuvre. J'ai donc proposé de supprimer cet article et d'examiner le dispositif en question dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025.

Je remercie à mon tour les équipes, qui ont fait un travail remarquable. Ce sujet peut paraître secondaire, mais il a tout de même donné lieu à quelques tensions. La fiscalité ne fait pas tout. Les outils juridiques et réglementaires sont aussi des leviers intéressants. Nous l'avons notamment ressenti dans le Pays basque, où la pression est fortement retombée.

Mme Viviane Artigalas. - Je remercie la rapporteure pour ce travail réalisé en un temps record. Cette loi est très attendue par les élus locaux comme par nos concitoyens. Elle permettra aux communes qui le souhaitent de s'emparer de nouveaux outils pour agir sur le marché locatif local et prendre les mesures de régulation nécessaires, tout en laissant le choix aux autres de ne pas intervenir dans le développement touristique de leur territoire.

La question n'est pas seulement la remise de logements sur le marché à l'année ; c'est aussi celle du niveau d'acceptabilité du « surtourisme » dans certaines communes. Cette loi n'agit pas sur le stock, certes, mais elle agira sur le flux, du moins dès la saison prochaine.

Ses détracteurs doutent de son effet sur la remise de logements sur le marché. Le problème est en réalité plus large, car la crise du logement est accentuée par le surtourisme : quand des salariés ou des saisonniers ne trouvent plus à se loger là où ils travaillent, cela devient véritablement problématique. Les deux questions sont liées. À cet égard, je suis tout à fait favorable à la proposition de changement d'intitulé de la loi. Ne confondons pas les moyens que l'on se donne et l'objectif que l'on se fixe. Les débats se poursuivront en séance, notamment sur les questions fiscales. Nous y reviendrons le moment venu.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Si notre rapporteure est allée très vite en effet, le Gouvernement a beaucoup tardé à inscrire cette proposition de loi à l'ordre du jour du Sénat. Rappelons que ce texte a été voté à l'Assemblée nationale à la fin du mois de janvier dernier et qu'il a fallu, en conférence des présidents, que nous interpellions la ministre des relations avec le Parlement pour qu'elle nous donne l'assurance qu'il serait transmis au Sénat. Après un nouveau flottement, le ministre du logement est à son tour monté au créneau pour obtenir son inscription à l'ordre du jour.

Mme Viviane Artigalas. - Je précise que la proposition de loi avait déjà été examinée à l'Assemblée nationale à l'automne, mais que faute de temps, son examen avait été interrompu, je serais tentée de dire « volontairement ».

M. Daniel Salmon. - Je remercie à mon tour Mme la rapporteure. Nous sommes très satisfaits, nous aussi, de voir arriver cette proposition au Sénat. Ce texte est une première réponse qu'il faudra sans doute compléter.

En tant qu'élu breton, je suis alerté très régulièrement sur ce problème des locations touristiques de courte durée. La ville de Saint-Malo a été à la pointe de la réflexion pour essayer d'encadrer ce phénomène. Nous arrivons à une forme de perversion d'un système plutôt louable à l'origine : il conduit aujourd'hui à écarter les habitants permanents et à les reléguer dans des univers qui ne sont plus ceux d'une ville ou d'un village. J'ai rencontré en particulier des membres d'un collectif de Saint-Malo. Ils m'ont expliqué qu'ils n'avaient plus de voisins et que, comme le disait la rapporteure, c'était un peu Ibiza tous les soirs. Le système conduit aussi les saisonniers et les salariés à résider parfois à trente, quarante ou cinquante kilomètres de leur lieu de travail. La situation n'est plus tenable.

Le sujet est d'ailleurs assez transpartisan : les commerçants et les entrepreneurs eux-mêmes voient bien que ces locations touristiques de courte durée posent de sérieux problèmes. Il s'agit non pas de tout jeter, mais de réglementer et d'encadrer. Cette proposition de loi va dans le bon sens, de même que les amendements de la rapporteure. Nous défendrons bien sûr quelques amendements - nous avons toujours tendance à vouloir aller plus loin sur ces sujets -, mais nous sommes déjà satisfaits de cette première étape.

Mme Martine Berthet. - Je tiens à féliciter notre collègue d'avoir su trouver le juste milieu entre les attentes des uns et des autres, et surtout d'avoir proposé des outils à la main des maires, de façon à adapter les réponses des communes.

Je remercie également M. le rapporteur général : en tant que vice-présidente de l'Association nationale des élus des territoires touristiques (Anett), j'estime qu'il était absolument nécessaire de maintenir une différence de fiscalité entre les meublés classés et non classés. En dépendent le titre de commune classée touristique et tout ce qui va avec. Certaines communes doivent renouveler leur classement et craignaient de ne plus pouvoir y prétendre.

Mme Amel Gacquerre. - Je salue à mon tour le travail réalisé, notamment par Sylviane Noël. L'actualité parlementaire liée au logement est très intense, tant mieux !

Je salue en particulier l'approche « boîte à outils ». Le texte contient des outils qui pourront être utilisés en fonction des besoins des territoires et, en définitive, apporte la sécurisation qu'attendaient les élus, dont certaines initiatives s'étaient trouvées bloquées.

Si je ne suis pas convaincue de l'impact de cette loi sur la crise du logement que nous traversons, il n'en reste pas moins qu'il s'agit d'un signal fort : la représentation nationale souhaite encadrer le développement exponentiel des locations touristiques que l'on a pu connaître dans certains territoires. Rien qu'en cela, c'est intéressant.

Enfin, ce texte est une belle initiative législative, car elle vise à corriger l'injustice sociale que vivent les habitants de ces territoires tendus : celle de ne pas pouvoir vivre sur le lieu de leur choix. Pour insuffisant qu'il soit, le signal qui est envoyé présente de l'intérêt : le problème est identifié, les revendications sont entendues et on essaye d'y apporter des solutions.

Mme Marianne Margaté. - Je salue également le travail réalisé. Il est utile d'envoyer ce signal fort auprès des élus. J'ai eu l'occasion pour ma part de rencontrer le maire de Serris, en Seine-et-Marne, commune située à proximité immédiate de Disneyland Paris. Il assiste, démuni, à un phénomène de tache d'huile : l'afflux de touristes a de nombreux impacts sur les écoles ou sur les transformations de sa ville, complètement accaparée par les logements Airbnb.

Ce texte montre clairement que les parlementaires que nous sommes se sont saisis de la question et sont à l'écoute des maires. Il sécurise les outils mis à leur disposition. C'est également un signal envoyé aux habitants : on a le droit de vivre et d'habiter non loin de son lieu de travail. Il faut bien que les salariés de Disney habitent dans les environs et que la ville à proximité les accueille ! Ce texte est une bonne chose pour les élus, pour les salariés, et pour envoyer un signal fort à ceux qui profitent de cet effet d'aubaine : ils n'ont pas leur place partout. Il est important de réguler et d'encadrer leur présence.

M. Bernard Buis. - Je remercie à mon tour Mme la rapporteure et les équipes pour leur travail. Ce texte a le mérite de la clarification, en particulier en matière de fiscalité.

M. Jean-Marc Boyer. - Je m'associe aux remerciements et remercie particulièrement Sylviane Noël d'avoir auditionné et écouté les représentants des villes thermales. Bien souvent, ils sont oubliés dans ce genre de discussion.

Mme Micheline Jacques. - Je me joins à ce qui a été dit et j'aurai une pensée pour les territoires ultramarins et les petits territoires insulaires, où tous ces problèmes sont exacerbés. Ici, dans l'Hexagone, il suffit parfois de faire trente ou quarante kilomètres ; là-bas, il n'y a guère d'autre solution que de prendre le bateau ou l'avion pour aller un peu plus loin. Merci pour ces pistes qui, j'en suis certaine, seront très utiles aux élus ultramarins.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Sachez que j'ai rencontré voilà une semaine le ministre, qui serait tenté de fixer la date d'entrée en vigueur de cette loi au 1er janvier 2025. Cette date lointaine créerait un effet d'aubaine qui ne me paraît pas du tout opportun. Nous avons bien compris qu'il ne souhaitait pas parasiter les jeux Olympiques et Paralympiques. Pour autant, sous réserve d'une promulgation de la loi d'ici là, une entrée en vigueur au 15 septembre prochain serait tout à fait envisageable. J'ai donc plaidé en ce sens.

Par ailleurs, nous ignorons quand pourrait se tenir la commission mixte paritaire sur ce texte. Là encore, j'ai alerté le ministre sur le fait que l'échéance de la rentrée, dont il a été question, me paraissait trop éloignée.

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des présidents, je vous propose d'arrêter le périmètre indicatif de la proposition de loi visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif.

Sont susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions relatives aux modalités de suivi et d'encadrement par les collectivités des meublés de tourisme offerts à la location sur leur territoire, prévues par les articles L. 324-1-1 à L. 324-2-1 du code du tourisme et L. 631-7 à L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation ; aux obligations des loueurs de meublés de tourisme et des intermédiaires de location prévues par le code du tourisme et le code de la construction et de l'habitation ainsi qu'aux modalités de contrôle et de sanction de ces obligations ; aux prérogatives des élus locaux pour favoriser la location longue durée de résidences principales dans le cadre du plan local d'urbanisme ; à l'application aux meublés de tourisme d'exigences de décence énergétique issues de la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ainsi que d'exigences de sécurité propres à d'autres catégories de locaux prévues par le code de la construction et de l'habitation ; aux mesures relatives la fiscalité des meublés de tourisme ; à l'information des copropriétaires sur l'activité de location meublée touristique menée dans l'immeuble.

Il en est ainsi décidé.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 1er A (nouveau)

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-45 vise à clarifier la rédaction et à garantir l'unicité du téléservice national, sans téléservice propre à la collectivité de Corse. Il s'agit de garantir la conformité du dispositif au droit européen : le règlement européen « short term renting », actuellement en négociation, prévoit la mise en place d'un point d'entrée unique au niveau national pour l'enregistrement des meublés touristiques. Si nous conservons un téléservice propre à la collectivité de Corse, il faudra le notifier à la Commission européenne, avec toutes les conséquences en termes d'allongement des délais... Or ce n'est pas justifié au regard des caractéristiques du dispositif : le téléservice n'a qu'un rôle de délivrance automatique des numéros de déclaration. Les données sont ensuite mises à disposition des communes et de leur établissement public de coopération intercommunale (EPCI) compétent en matière de tourisme, pour effectuer les contrôles. C'est donc plutôt une mesure de simplification opérationnelle que d'avoir un téléservice unique au niveau national.

M. Daniel Fargeot. - La compétence en matière de tourisme a été transférée à l'Agence du tourisme de la Corse en 2002 pour des raisons bien précises. Je pense que cette dernière souhaiterait conserver cette capacité de gérer ce téléservice.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Le maintien d'un service spécifique à la Corse devra être notifié à la Commission européenne, ce qui me semble à la fois lourd et injustifié dans la mesure où cette solution n'apportera aucun avantage par rapport au téléservice national.

M. Daniel Fargeot. - Il s'agissait de permettre à l'Agence de conserver cette compétence.

Mme Viviane Artigalas. - Sommes-nous certains que les données seront transmises aux élus ? Il existe une inquiétude de leur part à ce sujet.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Ce point fait l'objet d'un de mes amendements.

L'amendement COM-45 est adopté.

Mme Marianne Margaté. - L'amendement COM-11 vise à prévoir que la déclaration de mise en location d'un logement comme meublé de tourisme est accompagnée de la preuve qu'il s'agit bien de la résidence principale, si le meublé est ainsi présenté dans la déclaration.

Le loueur aura obligation de produire la partie de son dernier avis d'imposition, ou de non-imposition, faisant apparaître l'adresse du meublé, au sens de l'article 10 du code général des impôts. En effet, en France, il n'est établi qu'un seul avis d'imposition par contribuable au titre de l'impôt sur le revenu et ce document fait donc foi quant au domicile fiscal du contribuable et, en pratique, quant au lieu de sa résidence principale.

Exiger une telle preuve est essentiel pour lutter contre la fraude massive à laquelle donne actuellement lieu la déclaration de meublé comme résidence principale.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Le problème de la fraude à la résidence principale a effectivement été évoqué de manière récurrente au cours des auditions que j'ai menées. De nombreux loueurs déclarent leur meublé de tourisme comme résidence principale, notamment afin de contourner la législation sur le changement d'usage, mais le mettent en ligne sur les plateformes numériques comme résidence secondaire afin d'échapper au blocage au bout de 120 jours. Mon amendement à l'alinéa 8 précise d'ailleurs que le décret fixant la liste des pièces justificatives doit inclure celles qui concernent la preuve de résidence principale.

L'amendement COM-26 est conforme à l'esprit de cet amendement, car il apporte une précision sur l'incomplétude de la déclaration, d'où un avis favorable. En revanche, il ne me semble pas opportun de préciser dans la loi la nature exacte de la preuve de la résidence principale, qui est du ressort du domaine réglementaire. Je demande donc le retrait de l'amendement COM-11 : à défaut, l'avis sera défavorable.

L'amendement COM-11 est retiré. L'amendement COM-26 est adopté.

Mme Marianne Margaté. - Les signataires de l'amendement COM-9 souhaitent ajouter des justificatifs complémentaires à la déclaration préalable, soumise à enregistrement, d'un meublé de tourisme, notamment en exigeant du déclarant qu'il joigne le diagnostic de performance énergétique (DPE) dont le local aura fait l'objet, en excluant de la location de meublé de tourisme les logements considérés comme des passoires thermiques, c'est-à-dire ayant une classification E ou supérieure.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Je partage votre souci de demander des pièces justifiant le respect des exigences de décence énergétique, afin de faciliter les contrôles des communes. Mon amendement à l'alinéa 8 précise que les pièces justificatives définies par décret incluent celles qui permettent d'attester du respect des exigences posées à l'article 1er.

Néanmoins, il ne me semble pas raisonnable d'exiger dès aujourd'hui un DPE avec une classe allant de A à D - je souhaite y intégrer la classe E -, car une telle règle serait plus exigeante que les dispositions de la loi Climat et résilience relatives aux locations nues de longue durée. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

L'amendement COM-9 n'est pas adopté.

Mme Marianne Margaté. - Il est proposé, à travers l'amendement COM-10, que soit jointe à la déclaration la preuve de l'absence, dans le règlement de copropriété, de dispositions s'opposant à l'usage du lot de copropriété en tant que meublé de tourisme.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - À mon sens, cet amendement pose plusieurs difficultés.

D'une part, exiger une copie du règlement de copropriété dans le cadre de la déclaration avec enregistrement conduira à charger les communes de vérifier la conformité de l'activité de location avec les clauses de ce règlement ; or les règlements de copropriété sont souvent anciens, difficiles à interpréter et la conformité de la location meublée touristique aux différentes clauses d'habitation bourgeoise fait l'objet d'une jurisprudence complexe et évolutive : c'est donc faire porter à la commune une charge de travail importante alors que les contentieux entre copropriétaires sont des contentieux entre personnes privées ne devant pas impliquer les communes.

D'autre part, contrairement à ce qui est indiqué dans l'objet de l'amendement, la location meublée touristique n'est pas toujours considérée comme une activité commerciale : en l'absence de services para-hôteliers, il s'agit d'une activité civile, compatible avec une clause d'habitation bourgeoise. Cela prouve bien que la diversité des situations entraîne une diversité d'interprétations du juge judiciaire.

Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

L'amendement COM-10 n'est pas adopté.

Mme Marianne Margaté. - L'amendement COM-15 clôt la liste des justificatifs à joindre pour offrir un local à la location comme meublé de tourisme. Tel que cela s'applique au secteur hôtelier, il est ici exigé le bon état des installations électriques et de chauffage, ainsi que l'équipement d'un dispositif de détection du risque d'incendie et d'extincteurs prêts à l'usage, dont le nombre sera fonction de la surface et de la capacité d'accueil du meublé.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Je partage l'objectif de garantir un niveau minimal de sécurité pour les meublés de tourisme. Je m'en remets donc à la sagesse de la commission s'agissant de l'amendement COM-24. En revanche, l'avis est défavorable à cet amendement COM-15 car il précise que les documents sont exigés chaque année, ce qui me semble excessif.

L'amendement COM-15 est retiré. L'amendement COM-24 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-46 vise à mettre à disposition de la commune et de l'EPCI des données d'enregistrement collectées par le téléservice national. Il s'agit d'inclure les informations déclarées ainsi que les pièces justificatives, qui seront précisées pour les contrôles de la commune. Elles seront aussi transmises à l'EPCI compétent en matière de tourisme.

L'amendement COM-46 est adopté.

L'amendement COM-25 n'est pas adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - J'en viens à l'amendement COM-47. Comme mentionné précédemment, il me semble important de préciser que doivent figurer, parmi les pièces justificatives demandées lors de l'enregistrement, une preuve de résidence principale, ainsi qu'une preuve de l'atteinte des objectifs de décence énergétique fixés par l'article 1er de cette proposition de loi - que je propose d'amender par ailleurs. La nature exacte de ces pièces justificatives sera précisée par décret.

L'amendement COM-8 est satisfait. Il instaure en outre un comité qui, selon moi, alourdit trop le dispositif. L'amendement COM-27 est également satisfait. Concernant la désignation de l'organisme unique gérant le téléservice, je comptais articuler le dispositif avec celui qui figure dans le projet de loi visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique (SREN), une fois qu'il sera promulgué. J'ai donc choisi de ne pas mentionner d'organisme à ce stade. Cela pourra peut-être fait en séance publique si la promulgation survient entretemps.

Je demande donc le retrait de ces deux amendements ; à défaut, l'avis sera défavorable.

L'amendement COM-47 est adopté. En conséquence, les amendements COM-8 et COM-27 deviennent sans objet.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-48 vise à doter les communes du pouvoir de suspendre la validité d'un numéro de déclaration d'un meublé de tourisme, et ce dans plusieurs cas.

Ce n'est pas tout que de permettre aux communes d'exercer leurs contrôles, encore faut-il leur donner les moyens de faire cesser les manquements lorsqu'elle les constate. Aussi je vous propose de donner aux communes le pouvoir de suspendre la validité d'un numéro de déclaration lorsqu'elles constatent que les informations ou les pièces justificatives fournies lors de la déclaration sont erronées, incomplètes ou lorsqu'elle a un doute sérieux sur leur authenticité. Cette suspension interviendra bien sûr après un délai où la commune donne l'opportunité au loueur de bonne foi de régulariser sa situation.

Compte tenu des préoccupations partagées par les élus locaux au cours des auditions, il m'a semblé important de préciser que cette suspension peut avoir lieu lorsque le meublé est frappé d'arrêté de péril ou alors qu'il est un logement social. En effet, il est interdit de continuer à percevoir des loyers pour la location d'un local frappé d'arrêté de mise en sécurité ou de traitement de l'insalubrité. De même, il est interdit de mettre en location son logement social.

L'effectivité du dispositif est assurée par l'inscription dans la loi, d'une part, que les plateformes sont informées par les communes de la suspension d'un numéro de déclaration ; d'autre part, que les plateformes ont l'obligation de retirer les annonces dont les numéros de déclaration ont été suspendus par la commune.

Ce dispositif me semble plus opérationnel que celui de l'amendement COM-13, relatif à la mise en location d'un logement social. Il repose effectivement sur la suspension d'un numéro par la commune constatant un manquement à la suite d'un contrôle, et non sur une simple déclaration sur l'honneur du loueur. Par conséquent, je demande le retrait de l'amendement COM-13.

L'amendement COM-13 est retiré. L'amendement COM-48 est adopté.

L'article 1er A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Après l'article 1er A (nouveau)

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-58 prévoit une interdiction de louer en tant que meublé de tourisme un local ciblé par un arrêté de péril, avec remboursement des sommes indûment versées au locataire.

Plusieurs communes aux centres historiques anciens m'ont alertée sur des pratiques préoccupantes. La ville d'Annecy, notamment, a signalé qu'une vingtaine d'immeubles dans le centre ancien de la ville faisait l'objet d'arrêtés de péril, parfois en raison de travaux de loueurs ayant mis à mal la structure des immeubles. Pour autant, dans certains cas, ces arrêtés de péril n'empêchent pas la location meublée touristique de se poursuivre.

La loi du 9 avril 2024 relative à l'habitat dégradé a précisé que la protection financière du locataire en cas d'arrêté de péril s'applique quel que soit l'usage du local : c'est une avancée, mais il semble que le cas de la location meublée touristique, qui n'entraîne ni un usage d'habitation ni un usage commercial, mériterait d'être précisé.

De plus, les modalités de cessation du versement des loyers, à compter du premier jour du mois suivant l'envoi de la notification de l'arrêté, conviennent peu à la location meublée touristique, dont la durée de location est souvent de seulement quelques jours.

Une adaptation de la loi est donc nécessaire afin de rendre plus effective la protection des locataires - et donc leur remboursement - lorsque le meublé de tourisme est insalubre ou compromet leur sécurité. Je propose de préciser que dans le cas d'une location meublée touristique, les sommes versées par le locataire cessent d'être dues à compter du jour suivant l'envoi de la notification de l'arrêté, et non à partir du mois suivant. De même, pour la location meublée touristique, les sommes indûment versées au propriétaire sont obligatoirement remboursées, et non déduites du prochain loyer.

L'amendement COM-58 est adopté et devient article additionnel.

Article 1er

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-60 propose une nouvelle rédaction de l'article 1er, autour de deux mesures.

Tout d'abord, les meublés de tourisme existants, à l'exception des résidences principales, devront se conformer aux règles de décence énergétique établies par la loi Climat et résilience pour les locations nues à compter du 1er janvier 2034, date à laquelle celles-ci devront au minimum disposer de l'étiquette D selon le DPE. Cette disposition laisse donc un délai de dix ans pour organiser cette mise en conformité. Le délai de cinq ans retenu par l'Assemblée nationale a en effet été jugé beaucoup trop court par les professionnels, notamment dans les zones de montagne et les stations thermales.

Je rappelle que dans la consultation que nous avons organisée, 74 % des élus se sont déclarés favorables à un alignement des réglementations, éventuellement avec un décalage dans le temps. Une telle mesure répond aux souhaits d'éviter tout décalage réglementaire entre la location nue et la location meublée de tourisme pouvant nourrir des effets d'éviction ; d'atteindre les objectifs d'un parc de logements bâtiments basse consommation en 2050, quel que soit leur usage ; d'augmenter la qualité de l'hébergement touristique tout en étant réaliste quant à la possibilité financière et matérielle d'y parvenir ; enfin, de faciliter les décisions de travaux de rénovation dans les copropriétés en rapprochant les obligations et les intérêts de l'ensemble des propriétaires.

Pour ces raisons, la date de 2034 est préférable à celle de 2037 ou à un calendrier progressif.

Ensuite, dans les communes où des difficultés de logement existent, les nouveaux meublés de tourisme, pour lesquels une autorisation de changement d'usage définitive ou temporaire doit être demandée, devront être au moins classés E au regard du DPE afin d'éviter toute fuite de passoires thermiques - logements classés G et F soumis à interdiction de louer en 2025 et 2028 - vers la location saisonnière. Cette obligation ne s'appliquera donc ni aux résidences principales, ni aux anciens meublés, ni aux communes dans lesquelles cette autorisation n'est pas exigée.

La rédaction proposée est plus simple que la version votée à l'Assemblée nationale : la règle est la même, que le changement soit temporaire ou définitif. Elle est aussi plus cohérente, car il n'est ni nécessaire ni juste d'exiger d'atteindre la classe D dès aujourd'hui pour les meublés de tourisme, alors que cette obligation ne sera imposée qu'en 2034 aux locations nues.

L'amendement COM-60 est adopté. En conséquence, les amendements identiques COM-18 rectifié, COM-21 rectifié, COM-28 rectifié et COM-36, les amendements identiques COM-19 et COM-22 rectifié, les amendements identiques COM-20 et COM-23 rectifié, les amendements COM-2 rectifié et COM-3 rectifié bis deviennent sans objet.

L'article 1er est ainsi rédigé.

Article 1er bis (nouveau)

Mme Anne Chain-Larché. - L'amendement COM-4 rectifié bis tend à supprimer la possibilité de réduire de 120 à 90 le nombre maximal de nuitées autorisées pour la location d'une résidence principale.

Cette réduction repose sur une hypothèse infondée consistant à établir un lien présumé entre la pénurie de logements et la pratique de location temporaire par des propriétaires occupants : l'abaissement de ce plafond, applicable aux seules résidences principales, n'aura aucune incidence sur le marché du logement de long terme, les résidences principales ne pouvant, par définition, être mises sur le marché de la location de longue durée puisque leurs occupants y habitent au moins huit mois.

De surcroît, une telle restriction au droit de propriété serait en contradiction avec le droit interne et le droit européen. Nous proposons donc de maintenir le seuil de location des résidences principales à 120 jours, seuil qui correspond à la distinction entre résidence principale et résidence secondaire dans l'ensemble de la législation, notamment fiscale.

Mme Marianne Margaté. - À l'inverse, l'amendement COM-12 offre aux communes la possibilité d'abaisser de 120 à 60 jours le plafond de jours de location d'une résidence principale en tant que meublé de tourisme. Ces dernières semblent les mieux placées pour prendre une telle décision, qui permettrait de limiter les effets d'éviction pour d'autres locataires. Cet amendement tend également à supprimer l'obligation de motivation de la délibération.

M. Daniel Salmon. - L'amendement COM-39 vise aussi à supprimer l'obligation de motivation de la délibération, afin que les communes puissent agir sans appréhender une multiplication des recours.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - À mon sens, le seuil de 90 jours est un bon équilibre, sur lequel nous pourrions nous accorder au stade de l'examen en commission. Je le rappelle, près de la moitié des élus consultés ont indiqué souhaiter utiliser cet outil permettant de limiter à 90 jours la location meublée touristique : il existe une vraie demande en ce sens.

De plus, de nombreuses communes touristiques, notamment au Pays basque, nous ont fait part des cas de fausses résidences principales déclarées sur leur territoire pour contourner le changement d'usage, ce qui a des conséquences graves pour la commune.

Je vous propose donc de conserver cet équilibre à 90 jours pour l'instant et d'avoir un débat plus nourri en séance publique.

S'agissant de l'amendement COM-39, il ne me semble pas raisonnable de supprimer l'exigence de motivation de la délibération, car il s'agit d'une garantie constitutionnelle. L'abaissement du seuil de nombre de jours de locations d'une résidence principale porte en effet atteinte, dans une certaine mesure, aux conditions d'exercice du droit de propriété. Cette atteinte doit être justifiée. Sans cela, le dispositif pourrait ne pas être constitutionnel.

L'avis est défavorable aux trois amendements.

M. Pierre Médevielle. - Il me paraît très malaisé d'édicter une règle générale compte tenu des disparités existant entre les territoires. J'estime qu'il convient de distinguer la ruralité la plus profonde au sein de la ruralité en général, ainsi que les villes nouvelles au sein de l'ensemble que constitue le monde urbain.

J'aurais pour ma part maintenu la règle des 120 jours, là où vous proposez de laisser à la collectivité la faculté de choisir entre 120 jours et 90 jours. Il importe de ne pas aller plus loin et de laisser des marges de manoeuvre aux collectivités territoriales. Nous parlons, je le rappelle, de 3 900 euros bruts par an, soit un montant utile à titre de complément de revenus.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - C'est ce qui est proposé, les élus étant libres de fixer à 90 jours ou à 120 jours la durée de location touristique d'une résidence principale. Néanmoins, une très large majorité de communes devrait conserver un seuil à 120 jours afin de ne pas amoindrir leurs recettes fiscales. Je fais confiance au bon sens des élus locaux.

Mme Viviane Artigalas. - Je rappelle que ces deux durées concernent les seules résidences principales, et que la loi permet à chaque commune, en fonction de ses spécificités, de conserver une période de 120 jours. Les élus locaux souhaitent disposer d'outils dont ils peuvent s'emparer en fonction de leurs besoins : le dispositif envisagé me semble donc raisonnable dès lors qu'ils ont le choix. S'il n'aboutira pas à remettre des logements sur le marché, puisqu'il est question de résidences secondaires, le mécanisme devrait permettre de limiter le temps de location dans les territoires affectés par le surtourisme et par une suroccupation des résidences principales.

M. Daniel Salmon. - Il existe bien des disparités entre les territoires. Justement, qui est mieux placé que le maire, au fait des particularités de son territoire, pour décider de réduire la durée de location de 120 jours à 90 jours ? Il faut lui laisser cette possibilité, car certaines zones sont exposées à une très forte pression.

L'amendement COM-4 rectifié bis n'est pas adopté, non plus que les amendements COM-12 et COM-39.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-49 vise à augmenter de 5 000 euros les amendes pouvant être prononcées, leur montant étant proportionné à la rentabilité de la location meublée touristique. Elles sont également en cohérence avec le reste du texte puisqu'à partir du moment où la déclaration avec enregistrement est généralisée, il est normal de dissuader les loueurs de se reporter sur la location non déclarée.

Face aux nombreux élus me rapportant des cas de fausses résidences principales louées 120 jours sur plusieurs plateformes à la fois, je vous propose aussi d'augmenter les amendes pour dépassement de ce plafond. Un particulier souhaitant arrondir ses fins de mois est rarement absent de sa résidence principale plus de quatre mois par an.

L'amendement COM-49 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Par l'amendement COM-50, je vous propose une entrée en vigueur différée de l'article au 15 septembre 2024, afin de ne pas affecter les locations prévues cet été tout en envoyant un signal fort à nos élus locaux qui souhaiteraient se saisir rapidement de ces outils, notamment lorsqu'ils ont vu leur délibération annulée ou suspendue par le juge. Par ailleurs, nous éviterons des effets d'aubaine par rapport à une entrée en vigueur différée au 1er janvier 2025.

En revanche, pour les sanctions à la déclaration d'enregistrement, la date d'entrée en vigueur serait la même que celle de l'enregistrement prévu à l'article 1er A.

L'amendement COM-50 est adopté.

L'article 1er bis est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 2

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-51 vise à faciliter et à sécuriser juridiquement la charge de la preuve de l'usage d'habitation d'un local. Aujourd'hui, la preuve fournie doit dater précisément du 1er janvier 1970 et l'interprétation qu'en fait le juge est très restrictive. Des communes comme Paris ont perdu des contentieux car la preuve de l'usage d'habitation datait de quelques mois plus tard ! Ce n'est pas acceptable !

Néanmoins, le dispositif prévu à l'Assemblée nationale est porteur de risques pour la sécurité juridique des transactions. En effet, le cadre juridique de la charge de la preuve de l'usage d'habitation ne trouve pas seulement à s'appliquer dans le cas de la location meublée touristique, mais dans tous les cas de changement d'usage. La faculté donnée à la commune de prouver un usage d'habitation « à n'importe quel moment depuis le 1er janvier 1970 » rendrait nécessaire, pour toute personne souhaitant acquérir un bien à usage professionnel ou commercial, de vérifier qu'à aucun moment, depuis le 1er janvier 1970, il n'a fait l'objet d'un usage d'habitation, même de manière très passagère, à peine de nullité de la transaction. Cela ne me semble pas raisonnable.

Aussi je vous propose d'amender le dispositif dans un sens qui facilite la charge de la preuve par rapport à la situation actuelle, mais qui reste sécurisant juridiquement, grâce à une période de référence.

Cette période de référence irait du 1er janvier 1970 au 31 décembre 1976 : grâce à cela, la principale difficulté identifiée actuellement par les communes, c'est-à-dire le caractère trop restrictif de la date, serait résolue sans pour autant compromettre la sécurité juridique des transactions immobilières.

L'amendement COM-51 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-52 vise à introduire de la flexibilité dans l'extension du régime d'autorisation temporaire de changement d'usage aux personnes morales.

Pour certains élus, c'est une bonne nouvelle. Ils souhaitent mieux piloter le développement de la location meublée touristique dans le temps et, à ce titre, des autorisations temporaires sont plus pertinentes que des autorisations définitives s'attachant au bénéficiaire jusqu'à cessation d'activité.

Pour d'autres élus, ce serait contre-productif : pour ceux qui mettent en oeuvre un régime d'autorisation avec compensation, le fait d'ouvrir le régime d'autorisation temporaire aux personnes morales permettrait d'échapper à l'obligation de compensation.

Je vous propose donc, par cet amendement, d'introduire de la flexibilité et de laisser les élus libres de recourir ou non à ce dispositif.

L'amendement COM-52 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-17 vise à offrir la possibilité aux communes insulaires métropolitaines de délimiter des quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage sur tout leur territoire. J'y suis favorable.

L'amendement COM-17 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-56 a trait à la possibilité de délimiter des quotas d'autorisations temporaires en part de logements concernés par rapport au parc total : j'ai été sensibilisée par des collectivités sur la nécessité d'introduire de la souplesse dans le dispositif.

Ainsi, des communes pourraient mettre en oeuvre un pilotage « dynamique » des autorisations de changement d'usage délivrées grâce, non pas à un nombre absolu d'autorisations pouvant être délivrées, mais grâce à un taux maximal de logements faisant l'objet d'une autorisation temporaire simultanément. Le fait de le mentionner explicitement permettra aussi de sécuriser les futurs règlements des communes et de les protéger de contentieux. 

L'amendement COM-56 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-42 vise à encadrer davantage la création d'un quota d'autorisations temporaires de changements d'usage en précisant qu'elles sont délivrées à titre personnel et de manière incessible dans la limite d'une seule demande par propriétaire.

Il ne me semble pas raisonnable de lier les élus locaux dans leurs modalités de détermination des quotas d'autorisation temporaire, toutes les communes ne souhaitant peut-être pas réguler autant la location meublée touristique que Saint-Malo. Il me semble donc plus pertinent de laisser à leurs mains les critères de détermination de la délivrance de ces autorisations.

L'amendement COM-42 n'est pas adopté.

L'amendement de précision rédactionnelle COM-53 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-40 vise à abaisser le taux minimal de résidences secondaires permettant aux communes de délimiter des zones exclusives de résidences principales. Il me semble pertinent de donner la possibilité aux élus locaux de délimiter de telles zones si nécessaire. Selon nos estimations, passer le taux à 15 % permettrait tout de même de toucher 2 444 communes hors zones tendues qui comptent entre 15 % et 20 % de résidences secondaires.

Néanmoins, la constitutionnalité de la mesure pose question : avec un seuil de 15 %, il n'est pas exclu que la possibilité de délimiter des zones dédiées exclusivement à l'usage de résidence principale soit une atteinte disproportionnée au droit de propriété. En effet, la moyenne nationale est inférieure à 10 %.

Aussi, je rappelle que les communes pouvant mettre en oeuvre ce zonage sont définies selon deux critères alternatifs : soit être situées dans une zone tendue, soit avoir plus de 20 % de résidences secondaires. Par ailleurs, Aix-les-Bains ou La Ciotat, que vous mentionnez dans l'objet, sont toutes deux des communes situées en zone tendue et donc déjà incluses dans le dispositif.

J'émets un avis de sagesse sur cet amendement.

M. Daniel Salmon. - Nous avons reçu des alertes concernant le fait que certaines communes, qui ne comptaient jusqu'à présent que 15 % de résidences secondaires, voyaient cette proportion augmenter. L'objectif de l'amendement consiste à anticiper la dynamique et à intervenir en amont, sans attendre un taux de 20 % pour réagir.

Mme Martine Berthet. - La commune d'Aix-les-Bains est citée dans la liste, mais les élus ne portent pas, à ma connaissance, une demande de ce type. La ville, qui est une des plus grandes stations thermales de France, compte effectivement de nombreux meublés de tourisme : ces logements sont nécessaires à l'économie locale, d'où une incompréhension par rapport à cette mention dans la liste. Pour cette raison, je m'abstiendrai.

L'amendement COM-40 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-57 vise à rendre effective l'obligation d'occuper un logement à titre de résidence principale, lorsqu'il est situé dans une zone dédiée à cet usage conformément au plan local d'urbanisme.

Il ne me semblait pas juste que la mise en demeure du maire de régulariser la situation en cas de manquement ne puisse s'adresser qu'au propriétaire : celui-ci subirait donc les conséquences du comportement fautif de son locataire, et ce jusqu'à 100 000 euros d'astreinte.

Pour renforcer les possibilités d'agir du propriétaire mis en demeure, il me semble aussi opportun de prévoir la possibilité de clauses de résiliation de droit du bail, lorsque cette obligation n'est pas respectée.

L'amendement COM-57 est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-54 vise à corriger un oubli survenu lors de l'examen à l'Assemblée nationale : s'agissant de la Corse, seul le critère de 20 % de résidences secondaires a été retenu pour permettre aux communes de mettre en oeuvre des zones à usage exclusif de résidence principale.

Même si, dans le cas de la Corse, toutes les communes répondant à ce critère de taux sont, de fait, en zone tendue, il me semble préférable d'avoir les mêmes critères pour toutes les communes, d'autant que le taux peut évoluer.

Je vous propose, en outre, de rectifier cet amendement en mentionnant un taux de résidences secondaires de 15 %, afin de tenir compte de l'adoption de l'amendement COM-40.

L'amendement COM-54, ainsi modifié, est adopté.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-55 vise à différer l'entrée en vigueur de cet article au 15 septembre 2024 afin de ne pas affecter les locations prévues cet été, tout en envoyant un signal fort à nos élus locaux qui souhaiteraient se saisir rapidement de ces outils.

L'amendement COM-55 est adopté.

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Je rappelle que l'article 3 a été délégué au fond à la commission des finances, qui a adopté l'amendement de rédaction globale COM-37 du rapporteur pour avis Jean-François Husson.

L'amendement COM-37 est adopté. En conséquence, l'amendement  COM-43, les amendements identiques COM-29 rectifié, COM-33 rectifié et COM-61, les amendements identiques  COM-30, COM-32 rectifié et COM-34 rectifié, les amendements identiques  COM-31 rectifié et COM-35 rectifié, les amendements  COM-6 rectifié, COM-7, COM-14 rectifié et COM-16 rectifié deviennent sans objet.

L'article 3 est ainsi rédigé.

Après l'article 3

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - La commission des finances n'a pas adopté l'amendement COM-44.

L'amendement COM-44 n'est pas adopté.

Article 4 (nouveau)

Mme Dominique Estrosi Sassone, présidente. - Je rappelle que l'article 4 a été délégué au fond à la commission des finances, qui a adopté l'amendement de suppression COM-38 du rapporteur pour avis.

L'amendement COM-38 est adopté.

L'article 4 est supprimé.

Article 5 (nouveau)

Mme Anne Chain-Larché. - L'article 5 prévoit une information obligatoire du syndic lorsqu'un lot de copropriété fait l'objet de la déclaration préalable prévue à l'article L. 324-1-1 du code du tourisme. Le syndic doit, dans ce cas, organiser un point d'information sur les meublés de tourisme à la prochaine assemblée générale de copropriété.

Ce dispositif est complexe. Il relève davantage de mesures propres aux différentes copropriétés et de leur règlement intérieur, sans nécessiter l'intervention du législateur. Il s'ajoute en outre à la déclaration préalable, qui fait déjà l'objet d'un renforcement à l'article 1er A du présent texte. Enfin, il pourrait être constitutif d'une atteinte à la vie privée et au droit de propriété.

Au regard de ces éléments, il est préférable de garantir la bonne application des mesures préexistantes, d'où cet amendement de suppression COM-5 rectifié.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Il me semble, au contraire, que cette formalité est bien proportionnée et ne présente aucune complexité spécifique.

Le respect du règlement de copropriété et un usage paisible du logement, sans trouble du voisinage, sont du ressort de la copropriété et des autres copropriétaires. Ce sont les seuls à pouvoir éventuellement s'en plaindre. Il ne s'agit nullement de soumettre la location à une décision de l'assemblée générale ; il ne s'agit que d'une simple information.

Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

Mme Anne Chain-Larché. - Le sens de cet amendement est de laisser le réglementaire à la copropriété.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Les règlements de copropriété sont le plus souvent très anciens et ont été édictés à des époques où la location touristique n'existait pas. Ils sont donc, pour la plupart, muets sur le sujet. En outre, la jurisprudence a censuré toute décision des communes visant à conditionner ces locations de meublés à l'autorisation des copropriétaires. Nous essayons donc de trouver un juste milieu. Cette attestation sur l'honneur est imparfaite - nous en avons bien conscience -, mais nous ne pouvons pas aujourd'hui aller moins loin ni plus loin.

Mme Anne Chain-Larché. - Dans ce cas, avec le consentement de mon collègue Pierre Cuypers, nous retirons notre amendement.

L'amendement COM-5 rectifié est retiré.

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - L'amendement COM-41 tend à rétablir l'obligation d'affichage dans les parties communes par le syndic qu'un logement de la copropriété est enregistré comme meublé de tourisme.

Cette obligation a été supprimée en séance publique à l'Assemblée nationale. Elle a été considérée comme trop intrusive dans la vie privée des copropriétaires, car portant également sur la location meublée de la résidence principale.

Outre le fait que je ne suis pas persuadée de l'efficacité d'une telle mesure, il me semble préférable, pour des raisons de sécurité juridique, de nous en tenir à l'équilibre trouvé à l'Assemblée nationale visant à permettre l'information des copropriétaires via le syndic et l'assemblée générale, sans aller au-delà.

Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

Mme Antoinette Guhl. - Vous parlez d'intrusion... Le fait d'avoir des valises à roulettes en permanence dans son immeuble est aussi une forme d'intrusion, qui vient troubler la sérénité de la copropriété. L'affichage sur un panneau me semble moins intrusif que le phénomène lui-même. Nous maintenons donc cet amendement.

L'amendement COM-41 n'est pas adopté.

L'article 5 est adopté sans modification.

Intitulé de la proposition de loi

Mme Sylviane Noël, rapporteure. - Je le disais en discussion générale, le contenu de cette proposition de loi est en décalage avec son ambition. Elle ne traite que du développement de la location meublée touristique et de ses effets d'éviction sur le marché de la location permanente. Bien sûr, ce phénomène d'éviction existe, mais il est loin de résumer l'ampleur du déséquilibre actuel du marché locatif. Ce déséquilibre, multifactoriel, justifie une véritable réflexion d'ensemble sur la contribution économique et sociale du propriétaire bailleur et les contreparties que nous pouvons lui apporter.

Je vous propose donc un nouvel intitulé, insistant sur le fait que la régulation des meublés de tourisme passe par des mesures aux mains des élus locaux. Les incitations fiscales jouent un rôle, certes, mais j'ai constaté au cours de mes auditions que, dans les territoires où la location meublée touristique pose de sérieux problèmes, ce sont les régimes d'autorisations mis en place par les collectivités qui ont vraiment eu une incidence sur le marché. À l'inverse, dans les territoires où les meublés sont un levier important de développement du tourisme, les démarches de classement qu'accompagnent les élus et les offices du tourisme sont gages de qualité.

Dans un sens ou dans un autre, c'est en donnant des outils à nos collectivités que nous permettrons une régulation adaptée de ce phénomène aux multiples facettes.

L'amendement COM-59 est adopté.

L'intitulé de la proposition de loi est ainsi modifié.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Les sorts de la commission sont repris dans le tableau ci-dessous :

Article 1er A (nouveau)

Auteur

N° 

Objet

Sort de l'amendement

Mme NOËL, rapporteure

45

Unicité du téléservice national d'enregistrement de la déclaration préalable

Adopté

Mme MARGATÉ

11

Exigence d'une preuve de la qualité de résidence principale du meublé lors de la déclaration avec enregistrement de la location

Retiré

M. BRISSON

26

Exigence d'une preuve de la qualité de résidence principale du meublé lors de la déclaration avec enregistrement de la location

Adopté

Mme MARGATÉ

9

Exigence d'un diagnostic de performance énergétique compris entre les classes A et D pour la déclaration de la location d'un meublé de tourisme

Rejeté

Mme MARGATÉ

10

Exigence d'une preuve de conformité de l'activité de location meublée touristique avec le règlement de copropriété

Rejeté

Mme MARGATÉ

15

Exigence d'une attestation de conformité à des règles de sécurité électrique et de sécurité incendie dans le cadre de la déclaration avec enregistrement de la location meublée touristique

Retiré

M. BRISSON

24

Exigence d'une attestation de conformité à des règles de sécurité électrique et de sécurité incendie dans le cadre de la déclaration avec enregistrement de la location meublée touristique

Adopté

Mme NOËL, rapporteure

46

Mise à disposition de la commune et de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) des données d'enregistrement collectées par le téléservice

Adopté

M. BRISSON

25

Mise à disposition de la commune et de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) des données d'enregistrement collectées par le téléservice

Rejeté

Mme NOËL, rapporteure

47

Précision de la liste des pièces justificatives demandées lors de l'enregistrement pour inclure une preuve du respect exigences de décence énergétique et une preuve de résidence principale

Adopté

Mme MARGATÉ

8

Mise à disposition de la commune et de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) des données d'enregistrement collectées par le téléservice

Satisfait ou sans objet

M. BRISSON

27

Renvoi à un décret la désignation de l'organisme unique gérant le téléservice, les informations demandées et les modalités d'accès à ces informations

Satisfait ou sans objet

Mme NOËL, rapporteure

48

Mécanisme de suspension de la validité des numéros de déclaration par la commune en cas de déclaration incomplète ou frauduleuse, en cas de meublé frappé d'arrêté de péril et en cas de sous-location d'un logement social

Adopté

Mme MARGATÉ

13

Exigence par les plateformes d'une déclaration sur l'honneur du loueur concernant l'interdiction de louer un logement social en tant que meublé de tourisme

Retiré

Article(s) additionnel(s) après Article 1er A (nouveau)

Mme NOËL, rapporteure

58

Interdiction de louer en tant que meublé de tourisme un local ciblé par un arrêté de péril et remboursement des sommes indûment versées au locataire

Adopté

Article 1er

Mme NOËL, rapporteure

60

Obligation de décence énergétique : simplification et allègement des exigences en cas de changement d'usage et application de la loi climat et résilience au stock à compter du 1er janvier 2034

Adopté

Mme ESPAGNAC

18 rect.

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et décalage de 3 ans du calendrier de la loi « Climat et résilience »

Satisfait ou sans objet

M. BAZIN

21 rect.

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et décalage de 3 ans du calendrier de la loi « Climat et résilience »

Satisfait ou sans objet

Mme BERTHET

28 rect.

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et décalage de 3 ans du calendrier de la loi « Climat et résilience »

Satisfait ou sans objet

M. CANÉVET

36

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et décalage de 3 ans du calendrier de la loi « Climat et résilience »

Satisfait ou sans objet

Mme ESPAGNAC

19

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et définition par décret d'un calendrier ad hoc

Satisfait ou sans objet

M. BAZIN

22 rect.

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et définition par décret d'un calendrier ad hoc

Satisfait ou sans objet

Mme ESPAGNAC

20

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et décalage de 3 ans du calendrier prévu par décret

Satisfait ou sans objet

M. BAZIN

23 rect.

Obligation de décence énergétique : suppression du lien avec le changement d'usage et décalage de 3 ans du calendrier prévu par décret

Satisfait ou sans objet

Mme CHAIN-LARCHÉ

2 rect.

Laisser à la décision de la commune l'exigence de règles de décence énergétique lors de la demande de changement d'usage

Satisfait ou sans objet

Mme CHAIN-LARCHÉ

3 rect. bis

Appliquer aux meublés de tourisme les exigences de la loi climat et résilience à compter du 1er janvier 2034

Satisfait ou sans objet

Article 1er bis (nouveau)

Mme CHAIN-LARCHÉ

4 rect. bis

Suppression de la faculté de la commune d'abaisser à 90 jours le plafond de jours de location d'une résidence principale en tant que meublé de tourisme

Rejeté

Mme MARGATÉ

12

Possibilité pour la commune d'abaisser à 60 jours le plafond de jours de location d'une résidence principale en tant que meublé de tourisme

Rejeté

M. SALMON

39

Suppression de l'exigence de motivation de la délibération motivée de la commune pour l'abaissement du plafond de jours de location d'une résidence principale

Rejeté

Mme NOËL, rapporteure

49

Relèvement des sanctions prévues en cas de défaut de déclaration, de fausse déclaration ou de dépassement du plafond de jours de location d'une résidence principale en meublé de tourisme

Adopté

Mme NOËL, rapporteure

50

Entrée en vigueur de l'article 1er bis

Adopté

Article 2

Mme NOËL, rapporteure

51

Facilitation et sécurisation juridique de la charge de la preuve de l'usage d'habitation d'un local

Adopté

Mme NOËL, rapporteure

52

Caractère facultatif de l'extension de l'autorisation temporaire de changement d'usage aux personnes morales

Adopté

Mme BILLON

17

Possibilité pour les communes insulaires métropolitaines de délimiter des quotas d'autorisations temporaires de changement d'usage sur tout leur territoire

Adopté

Mme NOËL, rapporteure

56

Possibilité de délimiter des quotas d'autorisations temporaires en part de logements concernés par rapport au parc total

Adopté

M. SALMON

42

Précision du caractère incessible de l'autorisation dans le cas de la mise en place de quotas et limitation à une autorisation par propriétaire

Rejeté

Mme NOËL, rapporteure

53

Précision rédactionnelle

Adopté

M. SALMON

40

Abaissement du taux minimal de résidences secondaires permettant aux communes de délimiter des zones exclusives de résidences principales

Adopté

Mme NOËL, rapporteure

57

Clause de résiliation de droit du bail en cas de non-respect de l'obligation d'occupation à titre de résidence principale et possibilité de mise en demeure du locataire

Adopté

Mme NOËL, rapporteure

54

Précision juridique quant aux zones à usage exclusif de résidences principales en Corse

Adopté avec modification

Mme NOËL, rapporteure

55

Entrée en vigueur de l'article 2

Adopté

Article 3

M. HUSSON, rapporteur pour avis

37

Fixation de l'abattement du régime micro-BIC pour les meublés de tourisme classés à 50 %, et à 30 % pour les non classés, adaptation des plafonds et suppression du zonage

Adopté

Mme GUHL

43

Exclusion de la location de logements meublés du régime d'imposition des bénéfices industriels et commerciaux

Satisfait ou sans objet

Mme ESPAGNAC

29 rect.

Maintien d'un abattement de 71 % pour les meublés classés jusqu'à 91 900 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

M. BAZIN

33 rect.

Maintien d'un abattement de 71 % pour les meublés classés jusqu'à 91 900 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

M. CANÉVET

61

Maintien d'un abattement de 71 % pour les meublés classés jusqu'à 91 900 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

Mme ESPAGNAC

30

Maintien d'un abattement de 50 % pour les meublés classés jusqu'à 91 900 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

Mme BERTHET

32 rect.

Maintien d'un abattement de 50 % pour les meublés classés jusqu'à 91 900 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

M. BAZIN

34 rect.

Maintien d'un abattement de 50 % pour les meublés classés jusqu'à 91 900 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

Mme ESPAGNAC

31 rect.

Maintien d'un abattement de 50 % pour les meublés classés jusqu'à 50 000 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

M. BAZIN

35 rect.

Maintien d'un abattement de 50 % pour les meublés classés jusqu'à 50 000 euros de chiffre d'affaires, en supprimant la référence à un zonage

Satisfait ou sans objet

Mme CHAIN-LARCHÉ

6 rect.

Relèvement du plafond du régime micro-BIC de 15 000 euros à 23 000 euros, et extension du zonage aux zones tendues

Satisfait ou sans objet

Mme ARTIGALAS

7

Remplacement de la référence aux zones très peu denses par celle des gîtes ruraux tels que définis par un décret en Conseil d'État

Satisfait ou sans objet

Mme BERTHET

14 rect.

Extension du bénéfice d'un abattement majoré de 71 % aux hébergements situés dans des communes et stations classés de tourisme

Satisfait ou sans objet

Mme BERTHET

16 rect.

Maintien d'un abattement de 71 % pour l'ensemble des hébergements classés

Satisfait ou sans objet

Article(s) additionnel(s) après Article 3

Mme Maryse CARRÈRE

44

Exonération de cotisation foncière des entreprises des biens déjà soumis à la taxe d'habitation sur les résidences secondaires, dès lors que les revenus locatifs sont inférieurs à 30 000 euros

Rejeté

Article 4 (nouveau)

M. HUSSON, rapporteur pour avis

38

Suppression de l'article

Adopté

Article 5 (nouveau)

Mme CHAIN-LARCHÉ

5 rect.

Suppression de l'article

Retiré

Mme GUHL

41

Affichage dans les parties communes de la copropriété qu'un logement est enregistré comme meublé de tourisme

Rejeté

Intitulé de la proposition de loi

Mme NOËL, rapporteure

59

Modification de l'intitulé de la proposition de la loi

Adopté

RÈGLES RELATIVES À L'APPLICATION DE L'ARTICLE 45 DE LA CONSTITUTION ET DE L'ARTICLE 44 BIS
DU RÈGLEMENT DU SÉNAT

Si le premier alinéa de l'article 45 de la Constitution, depuis la révision du 23 juillet 2008, dispose que « tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis », le Conseil constitutionnel estime que cette mention a eu pour effet de consolider, dans la Constitution, sa jurisprudence antérieure, reposant en particulier sur « la nécessité pour un amendement de ne pas être dépourvu de tout lien avec l'objet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie » 35(*).

De jurisprudence constante et en dépit de la mention du texte « transmis » dans la Constitution, le Conseil constitutionnel apprécie ainsi l'existence du lien par rapport au contenu précis des dispositions du texte initial, déposé sur le bureau de la première assemblée saisie36(*). Pour les lois ordinaires, le seul critère d'analyse est le lien matériel entre le texte initial et l'amendement, la modification de l'intitulé au cours de la navette restant sans effet sur la présence de « cavaliers » dans le texte37(*). Pour les lois organiques, le Conseil constitutionnel ajoute un second critère : il considère comme un « cavalier » toute disposition organique prise sur un fondement constitutionnel différent de celui sur lequel a été pris le texte initial38(*).

En application des articles 17 bis et 44 bis du Règlement du Sénat, il revient à la commission saisie au fond de se prononcer sur les irrecevabilités résultant de l'article 45 de la Constitution, étant précisé que le Conseil constitutionnel les soulève d'office lorsqu'il est saisi d'un texte de loi avant sa promulgation.

En application du vademecum sur l'application des irrecevabilités au titre de l'article 45 de la Constitution, adopté par la Conférence des Présidents, la commission des affaires économiques a arrêté, lors de sa réunion du mardi 7 mai 2024, le périmètre indicatif de la proposition de loi n° 292 (2023-2024) visant à remédier aux déséquilibres du marché locatif.

Sont susceptibles de présenter un lien, même indirect, avec le texte déposé, les dispositions relatives :

- aux modalités de suivi et d'encadrement par les collectivités des meublés de tourisme offerts à la location sur leur territoire, prévues par les articles L. 324-1-1 à L. 324-2-1 du code de tourisme et L. 631-7 à L. 631-9 du code de la construction et de l'habitation ;

- aux obligations des loueurs de meublés de tourisme et des intermédiaires de location prévues par le code de tourisme et le code de la construction et de l'habitation ainsi qu'aux modalités de contrôle et de sanction de ces obligations ;

- aux prérogatives des élus locaux pour favoriser la location longue durée de résidences principales dans le cadre du plan local d'urbanisme ;

- à l'application aux meublés de tourisme d'exigences de décence énergétique issues de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets ainsi que d'exigences de sécurité propres à d'autres catégories de locaux prévues par le code de la construction et de l'habitation ;

- aux mesures relatives à la fiscalité des meublés de tourisme ;

- à l'information des copropriétaires sur l'activité de location meublée touristique menée dans l'immeuble.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mercredi 3 avril 2024

- Conseil supérieur du notariat (CSN) : M. François DEVOS, directeur des affaires juridiques, Mme Camille STOCLIN-MILLE, administratrice - relations institutionnelles, et M. Guillaume DAUDRE, notaire.

Mardi 9 avril 2024

- Table-ronde des élus de montagne :

- Association nationale des maires des stations de montagne (ANMSM) : MM. Arnaud MATHIEU, maire de Villard-de-Lans, et Didier THEVENET, maire de La Clusaz.

- Ville de Chamonix : M. Éric FOURNIER, maire.

- Ville de Megève : Mme Catherine JULLIEN-BRÈCHES, maire, M. Mickaël RUYSSCHAERT, directeur général des services et Mme Fabienne CORDET, directrice de cabinet / communication institutionnelle.

- Association nationale des élus de la montagne (Anem) : M. Jean-Pierre VIGIER, secrétaire général et député de la Haute-Loire, Mmes Marie-Annick FOURNIER, déléguée générale, Raphaëlle POURADIER-DUTEIL, conseillère technique et M. Grégoire CHEVALIER, stagiaire.

- Table-ronde des élus des communes littorales et touristiques :

- Association nationale des élus du littoral (Anel) : MM. Yannick MOREAU, président, Alain BLANCHARD, délégué général, et Walter SCHOEPFER, chargé de communication et de mobilisation

- Association nationale des élus des territoires touristiques (Anett) : M. Philippe SUEUR, président, Mme Géraldine LEDUC, directrice générale, M. Simon LEBEAU, chargé de mission.

- Charentes tourisme : M. Olivier AMBLARD, directeur général.

- Table-ronde sur le thermalisme :

- Association nationale des maires de communes thermales (ANMCT) : M. Paul AUDAN, président.

- Fédération thermale et climatique française : M. Jean-François BÉRAUD, président.

- Fédération thermale d'Occitanie : M. Guillaume DALERY, président et maire de Lamalou-Les-Bains.

- Office de tourisme de Gréoux : M. Jean-Frédéric GONTHIER, directeur et Président du club des offices de tourisme des stations thermales.

Mercredi 10 avril 2024

- Ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires - Direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages : M. Luc-André JAXEL-TRUER, sous-directeur législation de l'habitat.

Jeudi 11 avril 2024

- Table-ronde des élus des grandes villes :

- France urbaine : Mme Louise CORNILLÈRE, conseillère finances, MM. Lionel DELBOS, conseiller économie territoriale et tourisme, Johann SANDLER, conseiller logement, politique de la ville et urbanisme, et Mme Sarah BOU SADER, chargée des relations avec le Parlement

- Ville de Marseille : M. Patrick AMICO, adjoint au maire en charge de la politique du logement et de la lutte contre l'habitat indigne.

- Ville de La Rochelle : Mme Marie NEDELLEC, adjointe au maire.

- Ville de Paris : Mme Emmeline DE KERRET, cheffe du bureau de la protection des locaux d'habitation, et Mme Alice VEYRIÉ, sous-directrice de l'habitat à la direction du logement et de l'habitat.

- Ville d'Annecy : Mme Sophie GARCIA, conseillère déléguée en charge du logement abordable et de la mixité sociale.

- Direction générale des entreprises - Sous-direction du Tourisme : MM. Christophe STROBEL, sous-directeur du tourisme, Christian ZARAGOCI, expert juridique et Romain PRIOL, chargé de mission économie.

- Collectif national des habitants permanents : Mme Roxane BERGET, spécialiste des questions juridiques, MM. Jean-Paul LEBAS, Franck ROLLAND, et Hugues TALLON, membres de la direction collégiale.

- Domaines skiables de France : M. Alexandre MAULIN, président, Mme Anne MARTY, présidente déléguée, et M. Laurent REYNAUD, délégué général.

Vendredi 12 avril 2024

- Union des métiers et des industries de l'hôtellerie (Umih) : Mme Véronique SIEGEL, présidente de l'UMIH hôtellerie.

- Confédération des acteurs du tourisme (Cat) : MM. Jean-Virgile CRANCE, président, et M. Guillaume LEMIÈRE, coordinateur.

- Association pour un tourisme professionnel (Atop) : MM. Patrick HAYAT, président, Quentin MICHELON, délégué général, et Patrick STEFANINI, conseil de l'Atop.

- Union nationale pour la promotion et le développement de la location de vacances (UNPLV) : MM. Dominique DEBUIRE, président et vice-président de Clévacances, Philippe BAUER, vice-président, et Pierre SELLIN, conseil de l'UNPLV.

- Gîtes de France : Mmes Sylvie PELLEGRIN, présidente, Solange ESCURE, directrice, et M. Marc DE MONTALEMBERT, juriste-fiscaliste.

- Airbnb France : M. Clément EULRY, directeur général.

Mercredi 24 avril 2024

- ADN Tourisme : M. Christophe MARCHAIS, directeur général adjoint.

- Innovation & développement tourisme (I&D Tourisme) : M. François de VIRY, président, Mmes Amélie SEDITA, directrice, et Régine DUBLET, responsable du pôle qualification de l'offre.

- Grand Annecy : Mme Frédérique LARDET, présidente.

Jeudi 2 mai 2024

- Direction générale des finances publiques : M. Aulne ABEILLE, sous-directeur « Fiscalité directe des entreprises ».

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, visualiser les apports de chaque assemblée, comprendre les impacts sur le droit en vigueur, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

https://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl23-292.html

ANNEXE
L'ENCADREMENT DES MEUBLÉS DE TOURISME

À la demande de la commission des affaires économiques, la division de la Législation comparée du Sénat a effectué des recherches sur l'encadrement juridique des meublés de tourisme dans trois villes européennes : Barcelone, Florence et Lisbonne.

1. Barcelone

Au niveau régional, le décret-loi 3/2023 du 7 novembre 202339(*) de la communauté autonome de Catalogne prévoit l'obligation de disposer d'un permis, valable cinq ans, pour proposer un meublé de tourisme (viviendas de uso turístico (VUT)) dans 262 villes catalanes connaissant des problèmes d'accès au logement, dont Barcelone. Les villes concernées ne peuvent octroyer des permis que dans la limite de 10 meublés de tourisme pour 100 habitants.

La ville de Barcelone s'est dotée dès 2017 d'un Plan spécial d'urbanisme des hébergements touristiques40(*) (PEUAT). Même s'il vise surtout à enrayer la hausse du nombre de meublés de tourisme, il concerne également les hôtels, pensions et auberges de jeunesse. Initialement proposé et mis en place en 2017, ce plan avait été annulé par le tribunal supérieur de justice de la Catalogne en raison de l'absence d'étude d'impact économique41(*). Le PEUAT, complété par l'étude d'impact, est définitivement entré en vigueur le 26 janvier 2022.

Afin d'éviter une concentration excessive des hébergements touristiques dans un quartier de la ville, le plan établit une répartition selon différentes zones. Lorsqu'il y a une diminution du nombre d'hébergements touristiques dans les zones saturées, il est en principe possible d'en créer dans une autre zone. Depuis la mise en place de la première version du plan en 2017, le nombre de meublés de tourisme est en légère diminution42(*).

Le PEUAT distingue quatre zones43(*), chacune soumise à des règles propres :

Zone 1 (zone de décroissance) : aucun nouvel hébergement touristique (de quelque type que ce soit) ne peut être créé, ni la capacité d'accueil des hébergements existants augmentée. Plus de 60 % des lits disponibles à Barcelone sont situés dans cette zone. Concernant spécifiquement les meublés de tourisme, lorsqu'il y a une diminution de leur nombre dans la zone 1, une nouvelle autorisation peut être accordée uniquement dans la zone 344(*).

Zone 2 (zone de stabilité) : aucune augmentation du nombre de lits dans les hébergements touristiques existants n'est permise. Comme pour la zone 1, lorsqu'il y a une diminution du nombre de meublés de tourisme dans la zone 2, il est possible d'accorder une nouvelle autorisation de création ou d'augmentation de la capacité de meublés de tourisme dans la zone 345(*).

Zone 3 (zone de croissance limitée) : de nouveaux hébergements sont admis à condition de ne pas dépasser une certaine densité. De nouveaux meublés de tourisme peuvent être autorisés en cas de diminution dans les autres zones (1, 2 et 4), dans la limite de 370 meublés. Ces meublés de tourisme ne peuvent être situés que dans des ilots où la densité ne dépasse pas un ratio de 1,48 % entre le nombre des meublés de tourisme et le nombre de logements à usage d'habitation, ou dans la limite de dix meublés dans un même bâtiment46(*).

Zone 4 (grands quartiers en transformation) : de façon similaire aux zones 1 et 2, aucun nouveau meublé de tourisme n'est admis dans cette zone qui comprend notamment le quartier de la gare de Sants. Cependant, la radiation d'un meuble de tourisme existant permet une ouverture dans la zone 347(*).

En résumé, la création de nouveaux meublés de tourisme à Barcelone est autorisée uniquement dans la zone 3, à condition d'être compensée par une diminution des meublés dans les autres zones et en respectant les limites de densité applicables dans la zone 3.

Par ailleurs, l'implantation des hébergements touristiques (y compris les meublés de tourisme) est soumise à certains critères de distance, définis en fonction de la taille des établissements, spécifiques à chaque zone. L'objectif est d'empêcher que certains quartiers touristiques ne deviennent des quartiers « fantômes » hors saison touristique.

2. Florence

La situation des locations touristiques de courte durée à Florence constitue un défi majeur pour la municipalité, avec une concentration de 75 % de ces activités sur 5 % du territoire communal48(*). Cette répartition inégale exerce une pression importante sur les zones centrales et historiques de la ville, affectant directement le niveau des loyers et la qualité de vie des résidents locaux.

Depuis 2022, la mairie a manifesté sa volonté que soit instauré un cadre réglementaire plus strict au niveau national, estimant que les mesures en vigueur sont insuffisantes pour aborder efficacement ce problème croissant. Dans cette optique, le décret-loi n° 145/2023 du 18 octobre 202349(*), adopté comme tentative de réguler les locations touristiques à l'échelle nationale, n'a pas réussi à répondre pleinement aux besoins spécifiques de Florence. Le maire et les autorités locales considèrent que le texte n'apporte pas les solutions nécessaires pour atténuer les effets néfastes des locations touristiques sur la ville, notamment en termes d'impact sur le marché immobilier et la qualité de vie50(*). Par ailleurs, Florence ne bénéficie pas des mesures d'urgence mises en place pour Venise, qui visent à réguler les locations à court terme dans son centre historique51(*). En outre, la loi régionale toscane ne propose qu'une obligation d'information pour les propriétaires de biens immobiliers destinés à des locations touristiques, sans mettre en place de mesures concrètes pour limiter ces activités52(*).

Face à cette situation, le conseil municipal, dans une délibération adoptée en octobre 2023, a pris la décision de réviser le plan d'urbanisme afin d'interdire les nouvelles installations de locations touristiques dans le noyau historique classé au patrimoine mondial de l'Unesco.

Plus précisément, la version révisée du règlement d'urbanisme, d'une part, établit une distinction pour les logements entre « l'usage résidentiel » et « l'usage temporaire », comprenant les locations touristiques de courte durée, ainsi que les structures d'accueil extra-hôtelières et, d'autre part, interdit spécifiquement l'installation d'usages résidentiels temporaires dans le périmètre du centre historique (zone A).

Plusieurs associations professionnelles, de consommateurs ainsi que des entreprises ont déposé un recours auprès du Tribunal administratif régional afin d'annuler la délibération53(*). Le juge, qui n'a pas suspendu la délibération, devrait prendre sa décision au fond le 9 mai 2024.

Au niveau national, le cadre législatif vise à encadrer les locations touristiques sans pour autant limiter cette activité. Avant l'adoption du décret-loi n° 145/2023 du 18 octobre 202354(*), il n'existait pas de régime de licence ou d'enregistrement. Le décret-loi vise principalement à assurer la protection de la concurrence et de la transparence du marché, ainsi que la sécurité du territoire, à travers différentes mesures, définies dans l'article 13-ter du décret-loi :

- le ministère du tourisme attribue, par le biais d'une procédure automatisée appropriée, un code d'identification national (CIN) aux unités immobilières à usage d'habitation destinées aux contrats de location à des fins touristiques, aux unités immobilières à usage d'habitation destinées aux locations à court terme et aux établissements touristiques d'hébergement hôteliers et non hôteliers ; ce CIN est attribué par le ministère du tourisme, sur présentation en ligne d'une demande par le locateur ou le titulaire de la structure touristique d'hébergement, accompagnée d'une déclaration sur l'honneur attestant des données cadastrales de l'unité immobilière ou de la structure et, pour les locateurs, de la conformité aux normes de sécurité des installations ;

- des sanctions administratives pécuniaires sont prévues : pour le titulaire d'une structure touristique d'hébergement hôtelière ou non hôtelière sans CIN, ainsi que pour toute personne proposant ou louant à des fins touristiques ou des unités immobilières ou des parties de celles-ci sans CIN ; pour le défaut d'affichage et d'indication du CIN par les parties concernées ; pour toute personne louant des unités immobilières à usage d'habitation, à des fins touristiques ou sans les exigences de sécurité ; pour l'exercice des mêmes activités en l'absence de SCIA ;

- le contrôle et la vérification, ainsi que l'application des sanctions administratives indiquées, sont assurés par la commune où est située la structure touristique d'hébergement hôtelière ou non hôtelière ou l'unité immobilière louée, par le biais des organes de police locale.

Par ailleurs, les intermédiaires qui interviennent dans le paiement ou l'encaissement des loyers/redevances relatifs aux contrats de location de courte durée doivent effectuer, sur ces sommes, une retenue à la source de 21 %, à titre d'acompte.

Enfin, le décret prévoit une série d'obligations pour les personnes qui louent des unités immobilières à des fins touristiques ou à court terme, pour les propriétaires d'établissements d'hébergement touristique, ainsi que pour ceux qui exercent des activités d'intermédiation immobilière ou qui gèrent des portails en ligne, notamment l'obligation d'afficher le CIN à l'extérieur du bâtiment où se trouve l'appartement ou la structure, en assurant le respect des éventuelles contraintes urbanistiques et paysagères, ainsi que de le mentionner dans chaque annonce publiée et communiquée.

Certaines dispositions initialement prévues dans le projet de loi de légalisation du décret n'ont pas été retenues, telles que l'obligation d'un minimum de 2 nuits par voyageur dans les meublés touristiques. Ces aspects montrent que la volonté nationale est davantage d'encadrer cette activité plutôt que de la limiter, laissant aux municipalités la responsabilité de prendre des mesures plus contraignantes si nécessaire.

3. Lisbonne

À Lisbonne, le « règlement municipal du logement local » 55(*), entré en vigueur le 8 novembre 2019, encadre les règles concernant les locations de courte durée, dont les meublés de tourisme (alojamento local56(*)). Ce règlement vise à maintenir le stock de logements à usage d'habitation permanente et à limiter les locations de courte durée dans les quartiers où leur implantation est jugée excessive par rapport au nombre total de logements disponibles.

Ce règlement crée deux zones de restriction :

- une zone de restriction absolue concernant les quartiers touristiques où le ratio entre les locations de courte durée et les résidences permanentes est égal ou supérieur à 20%57(*). Dans cette zone, il est interdit de créer de nouvelles locations de courte durée. Exceptionnellement, l'enregistrement de locations de courte durée dans cette zone peut être autorisée lorsque ces biens font partie d'opérations de réhabilitation depuis plus de trois ans et que ces opérations présentent un intérêt spécial pour la ville58(*) ;

- une zone de restriction relative qui s'applique dans les quartiers où le ratio entre les locations de courte durée et les résidences permanentes est égal ou supérieur à 10% mais inférieur à 20%59(*). Dans cette zone, il est possible de faire enregistrer de nouvelles locations de courte durée, à titre exceptionnel, sur autorisation explicite de la mairie de Lisbonne (Câmara Municipal de Lisboa), et sous réserve de remplir l'une des trois conditions suivantes60(*) : i) lorsque la totalité de l'immeuble est déclarée en ruine ou totalement inoccupée depuis plus de trois ans ; ii) lorsqu'une partie de l'immeuble est déclarée inoccupée depuis plus de trois ans ou quand un immeuble est dans un mauvais état de conservation et qu'en conséquence il a dû faire l'objet de travaux de réhabilitation au cours des deux dernières années ; iii) lorsque la totalité ou une partie de l'immeuble a changé d'usage, au cours des deux dernières années, passant de la logistique, de l'industrie ou des services à un usage d'habitation.

Cependant, même si les conditions énoncées ci-dessus sont remplies, le projet ne peut être autorisé s'il concerne la totalité d'un immeuble ou une partie ayant fait objet d'un contrat de location à usage d'habitation depuis moins de cinq ans61(*).

Les autorisations exceptionnelles de locations de courte durée sont valables pendant cinq ans dans la zone de restriction relative, voire dix ans au maximum pour les locations situées dans des immeubles en réhabilitation62(*).

Par ailleurs, dans le cadre du plan gouvernemental « Mais Habitação », le Parlement portugais a adopté, le 6 octobre 2023 63(*), une loi contenant des dispositions visant à limiter le développement de nouvelles locations de courte durée et à inciter les propriétaires à les transformer en locations à usage d'habitation. Sont ainsi prévus, aux articles 18 à 22 de cette loi :

- la limitation de la durée d'enregistrement des locations de courte durée à cinq ans, renouvelable pour la même durée ;

- la suspension de l'enregistrement de nouveaux logements de locations de courte durée sur tout le territoire, à l'exception des zones rurales moins peuplées (plus précisément, les territoires dits « intérieurs » figurant en annexe de l'arrêté n° 208 du 13 juillet 2017). Cette suspension peut être levée si la commune approuve une charte du logement définissant l'équilibre approprié en matière de logement (sauf dans les zones où une commune a déclaré une pénurie de logements) ;

- le réexamen en 2030 des locations de courte durée autorisées avant l'entrée en vigueur de la loi ;

- la mise en place d'une contribution extraordinaire dénommée CELA (contribuição extraordinária sobre os apartamentos e estabelecimentos de hospedagem integrados numa fração autónoma de edifício em alojamento local), correspondant à 15 % d'une assiette qui varie en fonction du revenu d'exploitation, de l'évolution des loyers et du poids des locations de courte durée dans la région, payée par les propriétaires souhaitant poursuivre leur location de courte durée.

Par ailleurs, ce plan prévoit une exonération totale de l'imposition des revenus fonciers jusqu'au 31 décembre 2029 (au titre de l'impôt sur le revenu des personnes physiques et de l'impôt sur les sociétés) pour les propriétaires titulaires d'une licence de location de courte durée qui choisissent de transférer leur bien en location à usage d'habitation64(*).


* 1 L'Union nationale pour la promotion de la location touristique (UNPLV) estime que 251 communes avaient mis en oeuvre cette déclaration avec enregistrement en 2023.

* 2 Règlement dit STR, en cours de négociation au niveau européen.

* 3 Loi non promulguée à date de la publication du rapport.

* 4 Loi n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique.

* 5 Article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation.

* 6 Décret n° 2023-822 du 25 août 2023 modifiant le décret n° 2013-392 du 10 mai 2013 relatif au champ d'application de la taxe annuelle sur les logements vacants instituée par l'article 232 du code général des impôts.

* 7 Modifié par le décret n° 2019-1325 du 9 décembre 2019.

* 8 Sous-amendement CE188 de M. Jean-Félix Acquaviva, M. Benjamin Saint-Huile et M. Jean-Louis Bricout.

* 9 Article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation.

* 10 Loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-190 du 23 décembre 1986.

* 11 Amendement CE88.

* 12 Loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique.

* 13 Conformément au décret du 11 juin 2021 n° 2021-757.

* 14 Amendement CE80 sous-amendé par le sous-amendement CE187 du Gouvernement.

* 15 Amendement CE59

* 16 Article L.631-7 du code de la construction et de l'habitation.

* 17 Article L.631-9 du code de la construction et de l'habitation.

* 18 Liste de communes figurant en annexe du décret du 25 août 2023 mentionné au I de l'article 232 du code général des impôts.

* 19 Amendements identiques CE178 des rapporteurs et CE161 de M. Antoine Armand et des membres du groupe Renaissance.

* 20 Ibid.

* 21 Cass. Civ IIII : 7.9.23.

* 22 Amendements identiques CE34 de M. Stéphane Delautrette et des membres du groupe Socialistes et apparentés et CE78 de M. Antoine Armand et des membres du groupe Renaissance.

* 23 « Tout local ayant un usage d'habitation depuis le 1er janvier 1970 inclus conserve cet usage sauf autorisation ultérieure mentionnée au quatrième alinéa du présent article. ».

* 24 Amendements CE81 de M. Antoine Armand et de membres du groupe Renaissance, CE101 de M. Jean-Félix Acquaviva et des membres du groupe LIOT et CE150 de M. Xavier Roseren (RE).

* 25 Amendement CE177.

* 26 Décision n° 2014-691 DC du 20 mars 2014, Loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové.

* 27 Décision du 11 juillet 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Grenoble.

* 28 Décision du 25 avril 2023 du tribunal administratif de Nancy, Nos 2002 980, 2002 982 et 2003 217.

* 29 Décision du 31 janvier 2024 du tribunal administratif de Nice, N° 2104 077.

* 30 Amendement CE69.

* 31 3e Chambre civile de la Cour de cassation du 8 mars 2018 (RG n° 14-15 864) et du 27 février 2020 (RG n° 18-14.305).

* 32 Plusieurs amendements de M. Stéphane Delautrette et des membres du groupe Socialistes et apparentés, de M. Stéphane Peu et des membres du groupe GDR, de M. Antoine Armand et des membres du groupe Renaissance de M. Christophe Plassard et des membres du groupe Horizons et apparentés, de M. Jean-Félix Acquaviva et des membres du groupe LIOT.

* 33 Cour de cassation, troisième chambre civile, 25 janvier 2024, n° 22-21.455.

* 34 Tribunal administratif de Strasbourg, 4e chambre, 15 juin 2023, n° 2301 395.

* 35 Cf. commentaire de la décision n° 2010-617 DC du 9 novembre 2010 - Loi portant réforme des retraites.

* 36 Cf. par exemple les décisions n° 2015-719 DC du 13 août 2015 - Loi portant adaptation de la procédure pénale au droit de l'Union européenne et n° 2016-738 DC du 10 novembre 2016 - Loi visant à renforcer la liberté, l'indépendance et le pluralisme des médias.

* 37 Décision n° 2007-546 DC du 25 janvier 2007 - Loi ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 38 Décision n° 2020-802 DC du 30 juillet 2020 - Loi organique portant report de l'élection de six sénateurs représentant les Français établis hors de France et des élections partielles pour les députés et les sénateurs représentant les Français établis hors de France.

* 39  Decreto ley 3/2023, de 7 de noviembre, de medidas urgentes sobre el régimen urbanístico de las viviendas de uso turístico.

* 40  Plan Especial Urbanístico de Alojamientos Turísticos. Pour une meilleure compréhension du PEUAT, il convient de consulter le «  Manuel opérationnel » qui contient les articles du Plan, les études menées et les formulaires de demande d'autorisation. Le terme « logement touristique » est utilisé ici pour désigner l'ensemble des établissements hôteliers, de séjours, locations saisonnières et meublés de tourisme concernés par le PEUAT.

* 41 Pour une analyse des décisions sur le PEUAT de Barcelone voir : https://www.uv.es/catedra-economia-colaborativa-transformacion-digital/es/novedades/analisis-sentencias-peuat-barcelona-razones-ha-sido-declarado-ilegal-elementos-son-cambio-compatibles-directiva-servicios-1286057015758/Novetat.html?id=1286097939946..

* 42 Un instrument de gestion des meublés de tourisme. Disponible sur https://ajuntament.barcelona.cat/pla-allotjaments-turistics/es. Consulté le 19 avril 2024.

* 43 Voir la carte sur le site internet de la municipalité de Barcelone : https://ajuntament.barcelona.cat/pla-allotjaments-turistics/es

* 44 Ibid., article 15, §2, page 6. OU Manuel opérationnel, point 4.1, page 6.

* 45 Ibid., article 16, §2, alinéas a et b, page 6. OU point 4.2, alinéas a et b, page 6.

* 46 Ibid., article 23, page 11. OU point 5.2, alinéa b, page 8.

* 47 Ibid., article 18, §2, page 8. OU point 4.4, page 7.

* 48 Affitti turistici brevi, comincia l'iter formale per bloccarli in area Unesco | Città di Firenze (comune.fi.it)

* 49 DECRETO-LEGGE 18 ottobre 2023, n. 145

* 50 https://regolamentourbanistico.comune.fi.it/

* 51 Le décret-loi n° 50 du 17 mai 2022 met en place, spécifiquement et uniquement pour la commune de Venise, des mesures visant à réguler la location à court terme de logements dans le centre historique de Venise afin de préserver son caractère résidentiel tout en garantissant la protection de son patrimoine histoire et environnemental. Toutefois, la commune de Venise ne l'a pas mis en oeuvre.

* 52 LEGGE REGIONALE 20 dicembre 2016, n. 86

* 53 Draghi e Gandolfo (FdI): "Appello a Nardella, non si voti l'approvazione della delibera sugli affitti brevi prima del Tar" | Città di Firenze (comune.fi.it)

* 54 Voir supra.

* 55 Regulamento municipal do alojamento local : https://www.lisboa.pt/fileadmin/download_center/normativas/regulamentos/comercio/RAlojamentoLocal_DR_n214_2s_ParteH_Aviso17706_C_2019.pdf

* 56 Le terme “alojamento local” désigne au Portugal un établissement qui fournit des services d'hébergement temporaire, notamment à des touristes, moyennant paiement, à condition qu'il ne remplisse pas les conditions requises pour être considéré comme une entreprise de tourisme. https://eportugal.gov.pt/fichas-de-enquadramento/alojamento-local

* 57 Regulamento municipal do alojamento local, article 4, §1, alinéa a, page 5.

* 58 Ibid., article 5, §§ 1 et 2, page 6.

* 59 Ibid., article 4, §1, alinéa b, page 6.

* 60 Ibid., article 6, §1, page 6.

* 61 Ibid., §2, page 6.

* 62 Ibid., article 7, §4, page 7.

* 63 Loi n° 56/2023 Aprova medidas no âmbito da habitação, procedendo a diversas alterações legislativas. : https://files.diariodarepublica.pt/1s/2023/10/19400/0000200050.pdf.

* 64 https://www.portugal.gov.pt/pt/gc23/comunicacao/noticia?i=alojamento-local-perguntas-e-respostas

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