PREMIÈRE PARTIE
LES CRÉDITS DE LA MISSION
« JUSTICE » EN 2025
La mission « Justice » comprend l'ensemble des moyens budgétaires du ministère de la justice. Elle est composée de six programmes, qui recoupent les différentes directions « métier » du ministère de la justice :
- le programme 166 « Justice judiciaire », qui regroupe les crédits relatifs aux juridictions judiciaires ;
- le programme 107 « Administration pénitentiaire », relatif au service public pénitentiaire ;
- le programme 182 « Protection judiciaire de la jeunesse », piloté par la direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ), qui est chargée de l'ensemble des questions intéressant la justice des mineurs ;
- le programme 101 « Accès au droit et à la justice », mis en oeuvre par le secrétariat général du ministère de la justice et qui dispose surtout des crédits relatifs à l'aide juridictionnelle ;
- le programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la justice », placé sous la responsabilité du secrétariat général du ministère de la justice et qui regroupe les moyens de l'état-major, du secrétariat général, des directions législatives, de l'inspection générale de la justice, des délégations interrégionales du secrétariat général et des opérateurs de la mission, ainsi que les crédits alloués aux politiques transversales telles que l'informatique et la gestion des ressources humaines ;
- le programme 335 « Conseil supérieur de la magistrature » (CSM) qui porte les crédits nécessaires à l'activité du CSM.
La mission « Justice » ne retrace pas les crédits relatifs à la justice administrative, qui relèvent de la mission « Conseil et contrôle de l'État ».
Répartition
par programme des crédits de paiement
de la mission « Justice » en 2025
(en millions d'euros et en %)
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
La nouvelle hausse des crédits demandés sur la mission « Justice » en 2025 s'inscrit dans le cadre de l'adoption par le Parlement de la loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027, mais reste inférieure à la trajectoire fixée par cette loi.
I. LES CRÉDITS DEMANDÉS SUR LA MISSION « JUSTICE » CONNAISSENT UNE AUGMENTATION LIMITÉE ET SÉLECTIVE
La mission « Justice » représente, dans le projet de loi de finances, 3,0 % des crédits du budget général alloués aux dépenses des ministères1(*).
En incluant les moyens de l'État ne relevant pas de crédits budgétaires2(*), la justice, qui ne dispose pratiquement pas de dépenses fiscales ni de ressources affectées, représente 1,6 % des moyens globaux alloués par l'État aux politiques relevant du budget général.
A. EN 2024, L'EXÉCUTION EST RENDUE PLUS DIFFICILE PAR UN DÉCRET D'ANNULATION ET DES SURGELS DE CRÉDITS
Le 21 février, le Gouvernement a annulé par décret 10 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 10,2 milliards d'euros en crédits de paiement, dont 327,9 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur le périmètre de la mission « Justice »3(*).
Les annulations portent à hauteur de 23,6 millions d'euros sur les dépenses de personnel (titre 2), nécessitant un « pilotage resserré des emplois et des dépenses de masse salariale »4(*), et à hauteur de 304,3 millions d'euros sur les autres dépenses.
Crédits annulés par le décret
du 21 février 2024
sur la mission
« Justice »
(en euros)
AE = CP |
|
107 - Administration pénitentiaire |
117 598 514 |
dont titre 2 |
14 566 711 |
166 - Justice judiciaire |
129 196 532 |
dont titre 2 |
4 778 445 |
182 - Protection judiciaire de la jeunesse |
37 904 655 |
dont titre 2 |
787 470 |
310 - Conduite et pilotage de la politique de la justice |
42 978 821 |
dont titre 2 |
3 492 382 |
335 - Conseil supérieur de la magistrature |
199 068 |
Total mission « Justice » |
327 877 590 |
Source : décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits
Les annulations ont porté sur une partie de la réserve de précaution, qui a toutefois été reconstituée dès le mois d'avril à l'occasion d'un « surgel », puis renforcée au mois d'août.
Les annulations et surgels ont tout particulièrement concerné les crédits hors titre 2 des programmes 166 « Justice judiciaire » (- 14,2 %) et 107 « Administration pénitentiaire » (- 12,6 %)5(*).
Selon les témoignages reçus en audition, ces annulations et surgels ont impacté le fonctionnement courant et les dépenses immobilières.
S'agissant de la protection judiciaire de la jeunesse, des recrutements ou des renouvellements de contrats ont dû être reportés. Dans le secteur associatif habilité (SAH), le lancement des appels à projets pour trois structures d'internat socio-éducatif médicalisé pour adolescents (ISEMA), dédiées à la prise en charge de jeunes en situations complexes, initialement prévu en 2024, a dû être différé en fin d'année.
Les crédits disponibles sont, à début novembre, inférieurs de 5,3 % au montant approuvé en loi de finances initiale, en prenant en compte les reports, annulations et gels, soit - 1,1 % pour les crédits de personnel et - 11,2 % pour les autres crédits, alors que, au cours d'une année normale, ces crédits subissent seulement une mise en réserve à hauteur de 0,5 % pour les crédits de personnel et de 3 à 4 % pour les autres crédits.
Mouvements de crédits sur la mission « Justice »
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, à partir du décret d'annulation et du fichier de données publié avec le projet de loi de finances de fin de gestion
Or le projet de loi de finances de fin de gestion, déposé le 6 novembre 2024, prévoit des annulations supplémentaires de crédits sur chacun des programmes de la mission « Justice ».
Ces annulations sont beaucoup plus importantes en autorisations d'engagement qu'en crédits de paiement. Elles portent principalement sur des crédits mis en réserve. Selon les explications annexées au projet de loi, elles tirent les conséquences de besoins moindres que prévu sur les crédits de personnel (programme 166) et opèrent un réajustement des dépenses en matière d'immobilier propriétaire (programmes 166 et 107) ou sur des dépenses de fonctionnement (programme 107).
Annulations de crédits prévues par le projet de loi de finances de fin de gestion
(en millions d'euros)
Source : commission des finances, à partir du projet de loi de finances de fin de gestion
* 1 Crédits du budget général mesurés sur le périmètre des dépenses de l'État défini par la loi de programmation des finances publiques 2023-2027, c'est-à-dire hors contributions au compte d'affectation « Pensions », hors charge de la dette et hors remboursements et dégrèvements.
* 2 Crédits budgétaires, dépenses fiscales, prélèvements sur recettes et ressources affectées, tels que retracés à l'état F du projet de loi de finances.
* 3 Décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.
* 4 Rapport relatif au décret n° 2024-124 du 21 février 2024 portant annulation de crédits.
* 5 Rapport entre le montant des crédits mis en réserve et les crédits totaux ouverts (loi de finances initiale et mouvements, dont reports et annulations).