TRAVAUX DE LA COMMISSION - AUDITIONS

Mmes Zaynab Riet, déléguée générale, et
Cécile Chevance, responsable du pôle Offres,
de la Fédération hospitalière de France

Réunie le mercredi 29 janvier 2025, sous la présidence de M. Philippe Mouiller, président, la commission procède à l'audition de Mmes Zaynab Riet, déléguée générale, et Cécile Chevance, responsable du pôle Offres, de la Fédération hospitalière de France.

M. Philippe Mouiller, président. - Pour conclure cette matinée, nous recevons Mmes Zaynab Riet, déléguée générale, et Cécile Chevance, responsable du pôle offre de soins, finances, FHF data, recherche et e-santé (Offres), de la Fédération hospitalière de France (FHF) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025.

Je vous précise que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo. Elle est diffusée en direct sur le site internet du Sénat et sera consultable en vidéo à la demande.

Mesdames, je vous remercie de votre disponibilité pour cette audition, que les incertitudes relatives au calendrier de la nouvelle lecture du PLFSS pour 2025 au Sénat nous ont conduits à organiser dans de brefs délais.

Il m'a paru utile que la commission puisse entendre votre Fédération, alors même que, dans le cadre de la nouvelle lecture du PLFSS, le Gouvernement a annoncé une augmentation significative de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) - tout particulièrement de l'Ondam hospitalier, dont la hausse atteindrait désormais 3,6 % en 2025. Pour mémoire, dans le cadre de la navette et en réponse à une initiative du Sénat, le Gouvernement avait déjà annoncé un étalement sur quatre ans, au lieu de trois, de l'augmentation du taux de cotisation à la charge des employeurs à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL).

Vous pourrez nous préciser dans quelle mesure ces évolutions permettront aux établissements, dont nous connaissons la situation financière, de répondre à leurs missions dans de bonnes conditions.

Je vous laisse sans plus attendre la parole pour un propos liminaire. Les membres de la commission pourront ensuite vous interroger, en commençant par notre rapporteure générale, Élisabeth Doineau, et notre rapporteure pour la branche maladie, Corinne Imbert.

Mme Zaynab Riet, déléguée générale de la Fédération hospitalière de France. - En vous remerciant de votre invitation, je souhaite partager avec vous les priorités de la Fédération hospitalière de France dans le cadre du PLFSS pour 2025.

Nous avons salué l'enveloppe supplémentaire de 1 milliard d'euros annoncée par la ministre. Nous demandons que celle-ci soit fléchée, à la fois, vers des activités médicales dites « en dette de santé publique » et pour cibler prioritairement la recherche, l'accompagnement de 50 millions d'euros par an pendant huit ans acté dans le cadre du Ségur de la santé n'ayant malheureusement pas pu être mis en oeuvre.

S'agissant des activités dites « en dette de santé publique », nous avons réalisé un baromètre en mars 2024, mettant en lumière un retard dans les séjours d'hospitalisation. On aurait pu s'en réjouir, si ce retard ne témoignait pas d'un moindre recours à l'hospitalisation, notamment dans le domaine de la chirurgie lourde - les greffes - ou pour certaines disciplines médicales avec nuitées, comme la neurologie.

À cela s'ajoute le sous-financement au cours des dernières années - du fait de l'effort mis, à juste titre, sur la valorisation des soins ambulatoires - de certaines activités médicales avec nuitées : soins critiques, réanimation, pédiatrie, obstétrique, soins palliatifs et psychiatrie - les dotations pour cette discipline n'ayant jamais évolué à hauteur de l'évolution de l'Ondam.

Tout cela explique notre demande d'un fléchage de l'enveloppe supplémentaire.

Nous avons par ailleurs posé deux autres demandes.

S'agissant de la CNRACL, dont vous connaissez la situation, il a été décidé d'abonder l'Ondam pour assurer une première étape de financement de la caisse. Nous avons demandé, avec l'ensemble des fédérations, que les dépenses de santé ne soient pas sacrifiées sur l'autel des caisses de retraite. Nous souhaitons également qu'une véritable discussion soit engagée sur le sujet, car les propositions avancées ne permettront pas de résoudre à terme les difficultés. Celles-ci sont plurifactorielles : la CNRACL, pendant longtemps excédentaire, a restitué 100 milliards d'euros à d'autres régimes ; elle est aussi victime d'une évolution démographique qui pose un réel enjeu.

Enfin, cela va au-delà du PLFSS, nous demandons à pouvoir nous inscrire dans un protocole pluriannuel couvrant les années 2025 à 2027, afin de donner une visibilité aux acteurs sur la planification des investissements et la structuration des filières de soins, avant d'entamer, nous l'espérons, l'élaboration d'une véritable loi de programmation en santé. Celle-ci permettrait, partant des objectifs de santé à atteindre, de fixer un certain nombre de priorités en matière de disciplines médicales. Nous pouvons, par exemple, nous féliciter de former des dermatologues : sur Paris, ils sont installés essentiellement en secteur 3. Cela pose question ! Parallèlement, alors que nous avons besoin de pédiatres, de gynécologues, de psychiatres et de gériatres, ces disciplines ne sont pratiquement pas choisies par les étudiants. Il me semble donc qu'il nous faut fixer des formations à privilégier au regard des projections de besoins sur les dix ans à venir. Il en va de même pour les professions paramédicales, et il faut bien sûr retenir la prévention parmi les axes de travail.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Ma première série de questions concerne la demande d'un cadrage budgétaire pluriannuel.

La FHF sollicite en effet depuis de nombreuses années une loi de programmation en santé, qui viserait notamment à fixer un cadre budgétaire pluriannuel contraignant. Elle est d'ailleurs rejointe sur cette demande par les autres fédérations d'établissements. Des amendements ont été déposés en ce sens lors de l'examen en séance du PLFSS. On voit pourtant, cette année encore, à quel point l'exercice de prévision budgétaire annuel est fragile. L'exécution budgétaire est, pour diverses raisons, rarement conforme aux prévisions initiales.

Pensez-vous vraiment qu'une telle loi de programmation permettrait de dessiner un cadrage budgétaire fiable et réaliste ? Quel serait, selon vous, l'apport d'un tel objet par rapport aux trajectoires votées en loi de programmation des finances publiques et, chaque année, en annexe de la loi de financement de la sécurité sociale ?

Compte tenu des incertitudes pesant sur la réalité de l'exécution budgétaire, ne pensez-vous pas qu'un cadrage pluriannuel contraignant serait excessivement rigide et complexe à piloter ? Ne faudrait-il pas plutôt privilégier le renforcement du cadre de discussion actuel, qui met autour de la table les fédérations d'établissements et l'État, et permet de fixer dans un protocole de financement les grandes orientations budgétaires pour les trois années suivantes ?

Je souhaite par ailleurs vous interroger sur la situation financière des établissements de santé et la dynamique d'activité.

À l'heure de la clôture des comptes de l'année 2024, à combien s'élèverait exactement le déficit sur cet exercice ? Quelles sont vos projections pour 2025 ? Comment expliquer, en dépit de la dynamique retrouvée depuis 2023, la dégradation continue de la situation financière des établissements et le nouveau déficit record, par exemple, de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) ?

Depuis la crise sanitaire, les dynamiques d'activité ont profondément divergé entre catégories d'établissements de santé. Pouvez-vous faire un point sur l'évolution de l'activité des établissements publics par rapport à celle des établissements privés commerciaux et privés d'intérêt collectif ? Pouvez-vous nous décrire les éventuels changements dans le case-mix des établissements ? Une restructuration à bas bruit est-elle en train d'émerger entre secteurs hospitaliers ?

Mme Zaynab Riet. - Je distinguerai protocole pluriannuel et loi de programmation.

Nous avions, toutes fédérations confondues, signé un protocole pluriannuel avec les pouvoirs publics entre 2018 et 2020. C'était très opérationnel : il s'agissait d'arrêter un niveau minimal d'Ondam et des engagements de la part des fédérations. Mais, après avoir traversé la crise sanitaire et constatant la crise générale du système de santé, nous jugeons opportun d'élaborer une loi de programmation, à l'instar de ce qui a été fait pour la défense et la justice. Nous pourrions ainsi nous fixer des objectifs de santé publique et dessiner une trajectoire claire.

Celle-ci pourrait d'ailleurs s'avérer moins coûteuse que les évolutions constatées depuis plus d'une décennie. Faire de la prévention un axe prioritaire, par exemple, donnerait rapidement des retours sur investissement. Je l'illustrerai avec le déploiement, sur une dizaine de territoires, de ce que nous avons appelé « la responsabilité populationnelle » autour de deux pathologies. Sur cinq de ces territoires, nous obtenons en trois ans les mêmes résultats : une réduction de 33 % des hospitalisations de malades atteints de diabète de type 2 pour complications via les urgences, contre une augmentation de 50 % de leur prise en charge en ambulatoire, avec des organisations permettant un suivi plus efficace. Le coût est inférieur de 6 % à la moyenne nationale.

Le but, ce n'est pas de dépenser plus, c'est de dépenser mieux. Notre pays consacre beaucoup d'argent à la santé. Le cap que nous devons tenir est celui de dépenses de santé permettant de continuer à faire progresser l'espérance de vie en bonne santé et favoriser l'excellence de notre médecine. Ce pourquoi nous pensons qu'il faut une loi de programmation en santé.

Mme Cécile Chevance, responsable du pôle Offres de la Fédération hospitalière de France. - Nous notons, en effet, une amplification de la reprise d'activité constatée en 2023, mais avec des variations. En 2023, l'activité était essentiellement portée par un accroissement des actes de chirurgie et des soins ambulatoires, qui constituent le coeur de l'activité des établissements privés à but lucratif. En 2024, on note un changement, avec, comme mentionné, un rattrapage sur les disciplines « en dette de santé publique » - médecine lourde et médecine avec nuitées -, plutôt porté par les établissements publics. En volume économique, c'est-à-dire en valeur, mais à tarifs équivalents, la progression pour les hôpitaux publics est de 4 %, tandis que les établissements privés, après une forte évolution, atteignent logiquement un plateau.

La reprise des activités concernées est facilitée par celle des recrutements, même si des métiers demeurent en tension, et par la réouverture de lits ainsi permise. Toutefois, la situation est très hétérogène selon les catégories d'établissements - avérée sur les établissements de grande taille, l'évolution est moindre sur les établissements de taille intermédiaire ou de petite taille - et à l'intérieur même de ces catégories.

Malgré ces tendances positives en termes d'activité, les établissements publics de santé continuent à voir leur situation financière se dégrader. Les chiffres de 2024 sont à prendre avec précaution, les clôtures de compte n'étant pas achevées à ce stade, mais selon les projections, le déficit hors activités médico-sociales devrait passer de 1,9 milliard d'euros en 2023 à 3,5 milliards d'euros.

Plusieurs facteurs expliquent cette dégradation : d'une part, un sous-financement cumulé de l'inflation, estimé à 1,3 milliard d'euros pour les seuls établissements publics et à 1,8 milliard d'euros sur l'ensemble des établissements de santé ; d'autre part, une interrogation autour du juste financement et de la juste ventilation des mesures de ressources humaines et des mesures liées au Ségur de la santé.

On peut donc parler d'un problème de couverture de charges, plus que d'un problème d'activité.

En 2023, plus de huit établissements sur dix étaient en déficit sur l'ensemble des activités sanitaires et médico-sociales ; plus de huit établissements sur dix étaient soit en capacité d'autofinancement net négative, soit carrément en insuffisance d'autofinancement. Dans le premier cas, il s'agit d'une capacité constatée après paiement des dettes antérieures ; dans le second, avant - ce qui signifie que l'hôpital n'arrive même pas à dégager de quoi rembourser ses dettes et doit emprunter pour le faire.

Mme Zaynab Riet. - S'agissant des causes, gardons en mémoire que le déficit des hôpitaux publics était, en 2019, de 500 millions d'euros. L'impact de la crise sanitaire n'a pas non plus été neutre. Plus de 80 % des patients atteints de covid-19 ont été hospitalisés à l'hôpital public, ce qui a conduit les centres hospitaliers universitaires (CHU) et de grande taille à déprogrammer leurs activités.

M. Philippe Mouiller, président. - Avant de laisser la parole à Corinne Imbert, permettez-moi de m'étonner : à aucun moment, vous n'évoquez l'idée d'efforts à mener ou de réflexions sur de possibles réorganisations. Je comprends bien que les recettes sont insuffisantes, qu'il y a de l'inflation... Mais, comme dans toute structure déficitaire, on pourrait s'interroger sur les moyens de rendre les dépenses plus efficientes !

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour la branche assurance maladie. - La demande d'inscrire la LFSS dans un cadre pluriannuel dépasse la FHF ou même l'ensemble des fédérations d'établissements ; elle émane aussi d'autres acteurs du monde de la santé. La crise du système de santé impose en effet une recherche d'efficience - le président vient de l'évoquer, mais l'exemple des patients atteints de diabète l'illustre également très bien. C'est une réflexion qu'il faudra avoir, y compris en vue d'inscrire, dans ce cadre pluriannuel, les politiques de prévention.

Cette remarque étant faite, vous avez salué l'enveloppe de 1 milliard d'euros octroyée sur l'Ondam 2025. Un rythme de progression durablement supérieur à 3 % - taux représentant un accroissement de 8,5 milliards d'euros à l'année - vous paraît-il souhaitable et, surtout, compatible avec les exigences de retour à l'équilibre de la branche assurance maladie ? Inversement, retrouver un rythme de croissance inférieur à 3 %, ce qui était le cas lors de la décennie précédente, vous semble-t-il possible et crédible ?

Par ailleurs, l'organisation de la permanence des soins en établissements de santé repose principalement sur les hôpitaux publics. Dans un souci de rééquilibrage de cette charge, la loi du 27 décembre 2023 visant à améliorer l'accès aux soins par l'engagement territorial des professionnels a prévu que les établissements de santé soient collectivement responsables de cette permanence des soins. Quel regard portez-vous sur le premier état des lieux réalisés sur le sujet et les conclusions de l'enquête nationale 2024 ? Quelle suite attendez-vous des bilans territoriaux communiqués aux agences régionales de santé (ARS) ? Quelles mesures concrètes espérez-vous de la part du Gouvernement pour engager un rééquilibrage effectif ?

La LFSS pour 2024 a entériné une réforme du financement des hôpitaux. Le Sénat en avait soutenu le principe, mais estimant que son application rapide était délicate, voire risquée, la commission avait proposé une phase d'expérimentation préalable. Cette proposition n'a pas été retenue. Depuis la mise en oeuvre officiellement affichée au 1er janvier 2024, quels chantiers ont pu aboutir ? Quelles activités ont vu leurs modalités de financement évoluer ? Comment est préparé le changement du calendrier des négociations tarifaires ? Enfin, la question de la transformation du modèle de financement vous semble-t-elle satisfaisante ? S'appuie-t-elle sur des constats et données partagés par tous ? Quel premier bilan tirez-vous, sur le terrain, de la mise en oeuvre de la réforme ? Faut-il prévoir des ajustements ?

M. Philippe Mouiller, président. - Avant de passer aux réponses, je laisse la parole à notre rapporteur pour la branche autonomie.

Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour la branche autonomie. - Vous n'avez pas abordé le volet de la prise en charge du grand âge et de l'autonomie, alors que vous représentez aussi des Ehpad. On sait la situation financière catastrophique de ces structures, en particulier dans le secteur public. Un décret datant du 1er janvier 2025 permet aux établissements de majorer jusqu'à 35 % les tarifs pour les nouveaux résidents ne pouvant pas prétendre à l'aide sociale à l'hébergement (ASH). Dans le contexte financier difficile, on peut comprendre que l'on module ces tarifs, mais le taux de 35 % semble tout de même excessif, représentant plusieurs centaines d'euros d'augmentation. Que pensez-vous de ce dispositif ? Envisagez-vous de l'appliquer dans vos établissements ?

Mme Zaynab Riet. - Je réponds tout d'abord bien volontiers à la remarque de M. le président sur le défaut de propositions en matière de restructuration et de réorganisation. Si nous demandons une loi de programmation, c'est précisément pour pouvoir nous inscrire dans la logique d'un système de santé responsable, performant et durable.

Responsable, parce que tout acteur de santé sur le territoire doit avant tout couvrir des besoins de santé, de manière sécurisée et organisée, et sans jamais oublier qu'il est financé, directement ou indirectement, par des deniers publics. Cela suppose une organisation efficiente sur les territoires, au service des populations. Cette observation nous ramène à la question de la permanence des soins, étant précisé que, selon une enquête de la direction générale de l'offre de soins (DGOS), le secteur public assure plus de 83 % des lignes de garde, alors qu'il pèse pour 69 % dans le système.

Performant, parce que les ruptures de prise en charge, ou encore les hospitalisations qui étaient évitables, au-delà du mal-être qu'elles représentent pour le patient, entraînent aussi un coût pour le système de santé.

Durable, parce que nous devons sortir de la surenchère parfois constatée en termes de rémunération et que nous sommes engagés dans la transition écologique - laquelle permet d'ailleurs de dégager des économies -tout cela sans compter l'engagement des professionnels de santé dans le domaine de l'éco-soin.

Mme Cécile Chevance. - Je précise les chiffres donnés sur la permanence des soins : l'enquête citée, ayant suscité une forte mobilisation des établissements, montre que l'hôpital public représente 69 % des lignes de garde et d'astreinte, pour 85 % de l'activité de permanence des soins - soit les nouveaux patients - et de continuité des soins - soit les patients déjà hospitalisés, dont l'état nécessite une intervention aux horaires de permanence des soins. La continuité des soins représente 50 % de la charge de travail dans ces horaires.

Le rééquilibrage souhaitable ne consiste pas à démultiplier les lignes, surtout si, derrière, il n'y pas les plateaux techniques ou les compétences en termes de discipline médicale. Il s'agit, une fois encore, de rechercher l'efficience, en mutualisant là où se trouvent les besoins. Nous réfléchissons donc, dans ce domaine, en termes de patients pris en charge, non de lignes.

J'en viens aux réformes de financement. Certaines ont été mises en oeuvre récemment : sur les urgences, les soins médicaux et de réadaptation (SMR) et la psychiatrie. Certains chantiers sont ouverts et n'ont pas encore abouti : sur les soins critiques, les soins non programmés, la radiothérapie et la dialyse.

Pour nous, il est essentiel que les réformes de financement accompagnent l'adaptation et l'organisation de l'offre sur les territoires. Par exemple, s'agissant des soins critiques, nous regardons comment la réforme des autorisations qui se met en oeuvre répond aux besoins de santé, comment les leviers financiers permettent d'accompagner les transformations de l'offre, notamment la transformation des unités de surveillance continue (USC) en unités de soins intensifs polyvalents (Usip).

Il est également essentiel que nous ayons une vision d'ensemble. Nous traitons - nous l'avons vu avec les SMR - des sujets extrêmement techniques et complexes. De ce fait, nous nous noyons parfois dans des détails techniques, en perdant de vue l'objectif global en termes d'offres de soins. C'est le cas pour les soins critiques : nous devons réfléchir selon une logique d'ensemble, de plateau technique, orientée autour de l'organisation et de l'adaptation de l'offre, avant d'aborder les sujets techniques. C'est le cas, également, sur le secteur de la dialyse, où deux réformes sont en cours, l'une sur les autorisations et l'autre sur le financement : l'objectif principal est d'amener le plus de patients vers la greffe ; les leviers financiers servent à atteindre cet objectif.

Mme Zaynab Riet. - Sur le volet relatif à l'autonomie, 85 % des Ehpad publics sont aujourd'hui en difficulté. On constate par ailleurs un recul de l'offre médico-sociale publique et les centres hospitaliers ayant des activités médico-sociales rattachées voient leur situation financière aggravée de ce fait.

Cela s'explique par les tarifs pratiqués dans le secteur public : ils sont nettement inférieurs aux tarifs du secteur privé. La possibilité qui a été donnée de les moduler vise précisément à alléger ce fardeau et pourrait constituer un levier pour renforcer les effectifs. Pour autant, le taux de 35 % est un plafond et les tarifs d'hébergement sont arrêtés au niveau du département, ce qui donne lieu à des négociations.

Le PLFSS pour 2025 fait apparaître un effort important sur le volet autonomie, effort qui s'inscrit dans l'objectif des 50 000 équivalents temps plein (ETP) créés en Ehpad et des 50 000 solutions trouvées dans le champ du handicap. Mais cette évolution risque d'être masquée par le sous-financement via les tarifs d'hébergement et de dépendance, la remise en cause de l'expérimentation de la fusion des forfaits soins et dépendance, et la non-compensation pour le secteur médico-social public de l'augmentation de la cotisation employeur à la CNRACL - laquelle représente une hausse de 3 % de la masse salariale.

Nous demandons donc, pour 2025, le maintien de l'expérimentation de la fusion des forfaits et la compensation intégrale de la hausse des cotisations CNRACL pour les établissements publics. Nous demandons aussi que l'on ouvre enfin le chantier des inégalités socio-fiscales qui affectent le secteur public, engendrant un surcoût de 20 % de ses coûts salariaux. Une mission devrait être mise en oeuvre pour, au moins, objectiver la réalité de cette injustice. Nous demandons par ailleurs une véritable stratégie d'investissement et de transformation, des questions se posant sur le ciblage des actions de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA).

M. Bernard Jomier. - J'étais très content d'entendre le président poser la question des réformes structurelles de l'hôpital. Je sais que vous êtes auditionnées dans le cadre du PLFSS, mais il est intéressant de vous entendre, aussi, sur les évolutions structurelles.

Je me satisfais de la hausse de l'Ondam et du budget des hôpitaux, faisant partie de ceux qui l'ont réclamée. En revanche, je ne crois pas que le seul accroissement des moyens résoudra les problèmes. De nombreux chantiers sont à mener. Or on nous parle beaucoup, en ce moment, de chantiers au ralenti... Certes, vous n'êtes pas responsables du défaut actuel de portage politique, mais pouvez-vous nous en dire plus ?

S'agissant du financement, nous avions rédigé un rapport, avec Catherine Deroche, qui mettait en lumière la nécessité d'un financement sain et pérenne, et ce bien au-delà d'un cadre pluriannuel. Les établissements publics comme privés ont besoin de visibilité, mais les limites de l'examen budgétaire nous interdisent de contraindre les exercices suivants et, par ailleurs, ce sont surtout les objectifs de santé que nous avons besoin de connaître. La logique actuelle de l'Ondam est épuisée. Cela n'a rien de dramatique, il faut juste changer de façon de faire, c'est-à-dire identifier, sur une base territoriale, des objectifs de santé avant de voter l'Ondam.

Le déploiement des groupements hospitaliers de territoire (GHT) fait apparaître des résultats pour le moins contrastés. Qu'en pensez-vous ?

Par ailleurs, personne n'a encore parlé de l'efficience des soins, qui n'est pas satisfaisante et induit des surcoûts importants. Un exemple : dans la plupart des urgences hospitalières, les personnels n'ont pas accès au dossier médical des patients, et donc aux résultats de biologie ou d'imagerie récents, car ils ne disposent pas du logiciel adéquat.

Certaines propositions de loi ont été adoptées sur la question de la gouvernance hospitalière - c'est le cas d'un texte que j'ai cosigné et qui vient d'être définitivement adopté par l'Assemblée nationale. Toutes portent un même objectif de rééquilibrage vers la logique soignante. Où en êtes-vous sur la tarification à l'activité (T2A), ainsi que sur les hôpitaux de proximité ?

Quelle est la dette cumulée des hôpitaux publics ? J'entends des directeurs m'expliquer que leur établissement doit emprunter pour rembourser ses dettes. On marche sur la tête ! Voilà quelques années, un grand plan avait été annoncée par Édouard Philippe, alors Premier ministre ; il est partiellement appliqué. Où en est-on ?

Enfin, l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (Anap) est censée apporter un appui aux établissements de santé. Cette agence vous semble-t-elle pertinente et doit-elle continuer d'exister ?

M. Daniel Chasseing. - Je me réjouis aussi de l'évolution de l'Ondam hospitalier, qui était déjà sous-doté dans les années 2010.

Vous avez pris l'exemple du diabète pour évoquer la prévention. On pourrait également mentionner, dans l'une des activités médicales - la psychiatrie - que vous souhaitez voir fléchées, le suivi des psychotiques qui ne reviennent pas en consultation.

S'agissant du grand âge, il est tout de même important que l'on ait essayé, à travers l'Ondam, d'augmenter le nombre de formations et d'emplois d'infirmiers, d'infirmiers en pratique avancée (IPA) ou d'aides-soignants pour arriver progressivement à 40 000 créations d'emplois dans les Ehpad, et ce afin de prendre en charge de manière décente la dépendance.

Vous n'avez pas évoqué le fait que les difficultés dans les services d'urgences, notamment les plaintes de la part de patients restés sur les brancards, sont liées aux déficits de lits d'aval. Ne faudrait-il pas accroître les capacités des services de soins polyvalents (SSP) ?

Mme Frédérique Puissat. - Le Parlement a voté une loi spéciale en décembre dernier, afin que l'État puisse assumer ses fonctions essentielles. Un premier président de cour d'appel me faisait part, récemment, des limites de cette loi et des retards de paiement qu'elle entraînait. Avez-vous un état des lieux de ces limites pour votre secteur et des engagements financiers induits pour les hôpitaux de notre pays ?

Mme Nadia Sollogoub. - S'agissant de l'organisation des GHT, je souhaite rappeler l'existence d'un problème de dialogue entre établissements publics et privés. Notamment dans les départements ruraux, nous aurions besoin d'une instance dans laquelle les deux secteurs se parlent. Or, dans le cadre des GHT, on fait toujours comme si le secteur privé n'existait pas... Ne faudrait-il pas le réintégrer ?

En matière de gouvernance, quel est votre avis sur des modèles innovants, comme celui de l'hôpital de Valenciennes ? Y a-t-il des enseignements à en tirer ?

On parle souvent du poids du travail administratif. Avez-vous l'impression que ce poids s'accroît ? Avez-vous des pistes d'amélioration dans ce domaine, que ce soit pour vos personnels administratifs ou pour vos personnels soignants ?

Mme Céline Brulin. - Je comprends que vous voyiez d'un bon oeil le milliard d'euros supplémentaire annoncé pour l'Ondam. Mais, si je ne me trompe pas, l'accroissement du taux de cotisation à la CNRACL correspond à peu près à ce montant. D'où l'intérêt que vous demandiez à ce que ces sommes soient fléchées sur les activités médicales. Mais comment cette demande se traduira-t-elle concrètement pour les hôpitaux, confrontés à une dépense supplémentaire, quand bien même on l'étale sur quatre ans, au lieu de trois ?

Vous avez indiqué que la reprise des recrutements était moindre dans les plus petits établissements. Dans ce contexte, que pensez-vous du décret relatif aux contrats pour motif de type 2 ? Je suis de celles et ceux qui jugent nécessaire de contrôler l'intérim médical, mais faut-il le faire brutalement, avec des conséquences sur certains hôpitaux déjà confrontés à des difficultés d'ouverture de services par intermittence ?

Mme Annie Le Houérou. - Vous avez souligné dans votre présentation des difficultés d'adéquation entre besoins et spécialistes formés en gériatrie, pédiatrie, ou encore psychiatrie. Quelles sont vos propositions pour une meilleure adéquation ? Dans la continuité de cette question, comment favoriser une meilleure répartition territoriale de ces spécialistes ?

Mme Zaynab Riet. - Nous constatons une baisse de moitié des effectifs vacants d'infirmiers diplômés d'État (IDE) : le taux des postes vacants passe de 6 % à 3 %, la réduction étant moindre pour les aides-soignants. Nous constatons également une chute de l'ordre de 2 points de l'absentéisme. Malgré le constat de morosité permanente que l'on relaie partout, beaucoup aiment encore l'hôpital public et s'orientent vers ces métiers. Je ne prétends pas pour autant, monsieur Jomier, que cela soit suffisant...

Sur l'organisation effective des soins à l'hôpital, jamais le GHT n'a été autant mis en lumière que par la crise du covid. L'installation de 100 supercongélateurs pour conserver les vaccins, la réactivité pour transformer des lits en lits de soins de réanimation : cela a été permis par une organisation et une gradation des soins, partant de l'hôpital de proximité, en passant par les centres parties, jusqu'au centre hospitalier support, voire au CHU. C'est en réalité le GHT qui a permis, comme on l'a entendu, que l'hôpital public soit le « bouclier sanitaire » de la Nation !

Ce GHT structure le territoire sur lequel il rayonne et permet aussi de répondre aux difficultés de démographie médicale, par l'organisation de filières sécurisées et de parcours de soins sans rupture. Parfois, ce n'est pas suffisant... À ce titre, invoquons la complémentarité, plutôt que l'opposition, des secteurs public et privé. Dès lors que chacun est bien organisé, dès lors qu'il existe un interlocuteur public, un interlocuteur privé et un interlocuteur de ville, tous clairement identifiés, le travail se passe très bien. Le cadre législatif et réglementaire a permis une évolution supplémentaire pour favoriser encore ce travail en commun, au travers des projets territoriaux de santé (PTS). Il s'agit de partager des diagnostics, entre acteurs de la santé et avec les élus, et ensemble trouver les moyens d'apporter des réponses aux besoins.

Les labellisations d'hôpitaux de proximité ont été encouragées, la ministre de l'époque, Agnès Buzyn, s'étant appuyée sur un modèle que je connais très bien : l'hôpital de Pont-Audemer. Un hôpital de proximité peut avoir un service d'urgences, de la petite chirurgie, de la biologie délocalisée. L'hôpital de proximité permet de répondre aux besoins de proximité en santé, mais aussi d'assurer la gradation des soins, en faisant le lien avec les équipes renforcées qui peuvent se trouver au sein de l'établissement support. De mémoire, nous sommes à plus de 300 ou 350 établissements labellisés, et nous travaillons à l'atteinte des objectifs.

L'efficience a été évoquée... Les professionnels exerçant à l'hôpital public, qu'ils soient administratifs ou soignants, ne se lèvent pas tous les matins pour gaspiller l'argent public ! Tous s'attellent à apporter le bon et le juste soin. C'est pourquoi nous ne demandons rien de plus que le financement nécessaire à l'accomplissement de nos missions.

Il faudrait effectivement pouvoir dégager plus de temps clinique pour les médecins et les soignants. Certains outils le permettent, mais il faut aussi travailler à la simplification. Par ailleurs, le taux de personnel administratif à l'hôpital public s'élève à 10 %, et les secrétaires médicales constituent 50 % de ce personnel administratif. Si on les enlève, le taux tombe à 5 %, alors que le secteur privé enregistre un taux situé entre 11 % et 12 %. Autrement dit, l'hôpital public est le plus efficient sur le plan administratif.

La multiplication par deux du nombre de passages aux urgences depuis vingt ans traduit, à la fois, des difficultés d'accès aux soins en amont - 20 % à 30 % des passages aux urgences n'ont pas lieu d'être - et des difficultés en aval. Le constat sur l'aval rejoint la discussion sur le volet autonomie : notre crainte est de voir réduire cette offre et de ne plus pouvoir accueillir correctement les patients. Faut-il, pour cela, ouvrir plus de lits ? Dans certains territoires, c'est indéniable. Mais il faut examiner la question en tenant compte de l'évolution des prises en charge - je vous renvoie à mon exemple sur le diabète de type 2 - et du recours aux nouvelles technologies, qui facilite les prises en charge ambulatoires.

S'agissant du secteur médico-social, nous avions obtenu auprès d'Aurore Bergé l'établissement d'un protocole pluriannuel. Nous avons réitéré notre demande.

J'en viens à la proposition de loi dite « ratios » qui a été citée. Si l'on demande à la FHF s'il faut augmenter les effectifs auprès du patient, nous répondrons bien évidemment par l'affirmative - personne ne ferait le contraire. Mais il y a un principe de réalité : d'une part, il faut pouvoir se projeter et bâtir les appareils de formation qui conviennent ; d'autre part, il faut voir l'accroissement de l'Ondam que ces mesures représentent. Nous sommes donc d'accord pour adapter les effectifs, mais nous pensons qu'il faut le faire dans le cadre d'une loi de programmation.

M. Bernard Jomier. - La proposition de loi est votée. Cessez de la combattre !

Mme Zaynab Riet. - Je ne la combats pas. Je dis simplement que, pour qu'elle devienne réalité, il nous faut une loi de programmation en santé. Sans cette loi, je suis désolée de vous le dire, l'évolution se fera, mais en sacrifiant le capacitaire.

La psychiatrie constitue un vrai sujet. Je rappelle que les patients atteints de troubles ou de maladies psychiatriques pris en charge par l'hôpital public le sont, à 80 %, en ambulatoire. Il faudrait pouvoir maintenir ce taux et ne pas être contraints, à terme, d'augmenter le taux d'hospitalisation. Mais, pour cela, il faut garantir un parcours de soin complet : une entrée plus rapide en centre médico-psychologique (CMP) ; un accès à l'hôpital de jour et au centre d'accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) ; un suivi au plus près avec des visites à domicile. Il y a fort à faire, et c'est pourquoi nous sommes ravis que le Premier ministre ait entériné le projet de faire de la psychiatrie et de la santé mentale une grande cause nationale.

Mme Cécile Chevance. - Dette et déficit ne sont pas la même chose, même si les deux s'alimentent et que le cumul des déficits fragilise la capacité d'autofinancement des établissements.

Aujourd'hui, la dette se monte à 30 milliards d'euros. Elle est assez stable depuis des années, avec un léger désendettement constaté - ce qui peut être aussi un indicateur d'une non-reprise des investissements. En revanche, le cumul des déficits est problématique. J'ai donné les statistiques des établissements publics en déficit ou en difficultés d'autofinancement. Cela complique les politiques d'investissement, mais aussi, comme je l'ai déjà dit, contraint certains établissements à s'endetter pour rembourser des dettes antérieures, ce qui est d'ailleurs illégal. Pour autant, quand on est en rupture de trésorerie, il faut bien payer ses fournisseurs - nous constatons, d'ailleurs, un allongement des délais de paiement, ainsi qu'un accroissement des dettes socio-fiscales.

La situation est donc préoccupante, d'autant qu'à cela s'ajoutent d'autres dettes, comme, par exemple, des dettes liées aux provisions pour comptes épargne-temps.

M. Philippe Mouiller, président. - Vu la liste que vous dressez, à quoi correspondent précisément les 30 milliards d'euros de dette ?

Mme Cécile Chevance. - Ils représentent la dette financière pour financer l'investissement, tous établissements publics confondus. Si vous souhaitez connaître le montant incluant l'ensemble des dettes que je cite, je ne peux pas vous répondre immédiatement ; je dois examiner la question.

M. Bernard Jomier. - Mais vous confirmez que des établissements sont obligés d'emprunter pour rembourser leurs dettes...

Mme Cécile Chevance. - Quand on est en situation d'insuffisance d'autofinancement et que l'on n'a plus de trésorerie, on est bien obligé de le faire !

La loi spéciale a au moins permis d'éviter les ruptures de paiement et de trésorerie, mais les acteurs ont besoin d'une LFSS. La moitié des recettes des hôpitaux publics se font sous forme de dotation et, pour l'instant, nous sommes sur des douzièmes reconduits de l'année précédente, ce qui impose aux établissements d'avancer les sommes en cas de nouvelles missions ou d'augmentation de charges. Cette situation ne peut donc pas durer trop longtemps. Il en va de même pour les tarifs : nous évoquons un dynamisme de l'activité, mais si celui-ci se poursuit en 2025, il se fera, pour l'heure, sur la base des tarifs de 2024.

Enfin, l'enveloppe supplémentaire pour l'Ondam est constituée de 750 millions d'euros attribués réellement à la hausse de l'Ondam et 230 millions d'euros liés à l'étalement sur quatre ans, au lieu de trois, de l'augmentation des cotisations CNRACL.

Mme Zaynab Riet. - Les remontées de terrain font état d'une généralisation importante des contrats pour motif de type 2, ce qui entraîne des inégalités de traitements entre praticiens hospitaliers - à juste titre, très mal vécues. Nous avons donc demandé une régularisation de ces contrats dans la durée et au niveau territorial.

De telles solutions ne sont pas durables, et cela nous renvoie à la question des spécialités. Ce que nous devons faire, c'est former et attirer suffisamment de futurs médecins vers les disciplines médicales en tension et les disciplines médicales exigeant d'assurer des gardes et des astreintes. Avons-nous des solutions à proposer ? Nous y travaillons, chantier par chantier, en essayant d'alimenter une possible loi de programmation pour les dix ans à venir. Mais il faudra des mesures incitatives. Et il faudra comprendre, aussi, que tout ne dépend pas des établissements, lesquels n'ont parfois le choix - pardonnez-moi l'expression - qu'entre la peste et le choléra : fermer une activité ou faire appel à des médecins mieux payés que les autres. Il était question tout à l'heure de restructurations... Là, il y a des marges importantes, mais cela demande du courage et de la pédagogie. Cela étant, je crois possible d'organiser des parcours de soins sécurisés pour toutes et tous, tout en assumant de maintenir une offre, même si elle n'est pas totalement équilibrée, dans certains territoires de santé.

C'est pour l'ensemble de ces raisons que nous militons pour une loi-cadre. Les enjeux sont là !

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo, qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail,
de la santé, des solidarités et des familles, et
M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l'accès aux soins

Réunie le mercredi 5 février 2025, sous la présidence de M. Philippe Mouiller, président, la commission procède à l'audition de Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, et M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l'accès aux soins.

M. Philippe Mouiller, président. - Mes chers collègues, nous recevons ce matin Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles et M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l'accès aux soins.

Je vous précise que cette audition fait l'objet d'une captation vidéo. Elle est diffusée en direct sur le site internet du Sénat et sera consultable en vidéo à la demande.

Madame la ministre, monsieur le ministre, l'Assemblée nationale est saisie, en nouvelle lecture, du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. Le Gouvernement a engagé lundi sa responsabilité sur l'article liminaire et la première partie de ce texte. Si la motion de censure examinée cet après-midi n'est pas adoptée, il est vraisemblable que le Gouvernement procède de la même façon sur les deuxième puis troisième parties du PLFSS. Dès lors, le Gouvernement dispose dès à présent d'une vision claire du texte dont devrait être saisi le Sénat la semaine prochaine si aucune motion de censure n'est adoptée d'ici là.

Madame la ministre, monsieur le ministre, je vais sans plus attendre vous laisser la parole pour nous présenter l'équilibre de ce PLFSS. Vous pourrez notamment nous préciser en quoi il se rapproche ou diffère des conclusions de la commission mixte paritaire du 27 novembre dernier. Les membres de la commission pourront ensuite vous interroger, en commençant par Élisabeth Doineau, rapporteure générale, et les rapporteurs de branche qui le souhaiteront.

Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles. - Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je crois que nous pouvons dire que ce PLFSS a vécu un parcours quelque peu inédit. Vous aviez pu adopter ce texte, qui a ensuite fait l'objet d'un accord en commission mixte paritaire, ce qui est suffisamment rare pour être souligné. La censure a conduit l'Assemblée nationale à réexaminer ce texte à partir de la copie issue du Sénat. L'ensemble du PLFSS devrait faire l'objet d'un recours au 49.3.

Nous sommes le 5 février et nous avons besoin que notre pays se dote des documents financiers dont il a besoin pour fonctionner. Plutôt que de faire un long propos introductif, il me semble important de retracer avec vous les apports et les évolutions qui sont intervenus tout au long de ces différentes étapes. Yannick Neuder abordera plus particulièrement la partie santé.

Nous gardons une partie très substantielle de vos travaux. Pour ne citer que cinq points importants, je mentionnerai d'abord la taxe soda : vous aviez adopté un barème plus incitatif et inspiré de ce qui fonctionne au Royaume-Uni ; nous conservons cette logique.

Ensuite, si nous voulons préserver notre modèle, il est important de lutter contre la fraude. Vous avez adopté de nombreux amendements - je pense notamment à ceux de la sénatrice Goulet -, et nous en retenons plusieurs. La carte Vitale sera sécurisée avec une accélération du déploiement de l'application électronique « carte Vitale sécurisée » d'ici au 31 octobre 2025.

Par ailleurs, les contrôles liés au versement de pension de retraite à l'étranger seront renforcés, et les échanges de données entre l'assurance maladie et les complémentaires santé seront simplifiés. Les professionnels des établissements de santé seront fortement incités à l'utilisation du dossier médical partagé et nous conservons l'amendement de Mme la rapporteure Corinne Imbert sur ce sujet.

Vous avez porté plusieurs réformes clés, en soutien des acteurs de l'autonomie que sont les départements et les Ehpad, notamment la réforme des concours d'allocation personnalisée d'autonomie (APA) et de prestation de compensation du handicap (PCH). Nous franchissons une première étape de simplification et de convergence des concours de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) aux départements. Nous réduisons le nombre de concours de 13 à 9, l'objectif étant d'alléger la charge administrative de 200 millions d'euros supplémentaires en 2025, afin de maintenir le taux de compensation de l'APA et de la PCH et d'accompagner la dynamique démographique, ainsi que le soutien aux aides à domicile. Nous prévoyons un effort particulier sur les outre-mer, avec une hausse du taux de compensation de l'APA de 5 % dès 2025 pour faire face au défi du vieillissement. Nous poursuivons les discussions avec les départements pour fixer dès 2026 un taux cible de convergence qui tienne compte des spécificités de chaque territoire.

J'en viens à la fusion des sections soins et dépendance en Ehpad. Nous savons combien cette réforme est importante pour harmoniser le financement de ces structures et assurer un traitement égal des résidences sur l'ensemble du territoire. La censure a repoussé son application, initialement prévue en janvier 2025, mais le Gouvernement s'engage à la mettre en oeuvre dès juillet 2025. En d'autres termes, nous maintenons une expérimentation de deux ans avant la généralisation en 2027. C'est donc la durée de l'expérimentation qui sera un peu réduite.

Vous aviez souhaité rendre plus progressive l'augmentation nécessaire des cotisations employeurs à la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). Nous vous suivons, avec une augmentation lissée sur quatre ans et non plus sur trois ans. Cela donne un peu d'air aux hôpitaux, aux Ehpad et aux collectivités locales concernées.

Vous avez identifié des niches sociales à réformer pour rendre l'effort de chacun plus juste. Je pense aux attributions gratuites d'actions. Nous retenons la disposition.

Le travail que vous avez mené conduisait à un déficit de sécurité sociale pour 2025 inférieur à 16 milliards d'euros.

Lors de la réunion de la commission mixte paritaire (CMP), au-delà d'un certain nombre d'ajustements partagés, il y a eu deux évolutions importantes que nous conservons. Sur les allégements généraux de cotisations, vous aviez proposé une réforme conduisant à un rendement de 3 milliards d'euros. La commission mixte a abouti à un compromis, avec un rendement de 1,6 milliard d'euros. Nous n'avons pas touché à cette approche, compte tenu de la situation actuelle du marché de l'emploi.

Vous aviez en outre proposé sept heures de travail supplémentaires par mois pour financer la branche autonomie. Je comprends évidemment l'esprit de cette proposition, mais le débat n'est pas mûr et nous ne la reprendrons donc pas. Le financement de l'autonomie à long terme reste néanmoins un sujet majeur sur lequel nous avons à travailler.

Toutes ces évolutions conduisaient, à l'issue de la CMP, à un déficit pour 2025 autour de 18 milliards d'euros.

Mais c'était au début du mois de décembre, nous sommes au début du mois de février et la censure a eu un coût. D'abord, les retraites ont été revalorisées au 1er janvier dernier à hauteur de 2,2 %, pour un coût de 2,5 milliards d'euros. Il avait été acté juste avant la censure l'abandon du ticket modérateur sur les médicaments, pour un coût de 500 millions d'euros. Un certain nombre de mesures d'économie ou de freinage de la dépense devaient intervenir au 1er janvier, mais elles ont été décalées, ce qui explique une partie de l'augmentation mécanique de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) que vous aviez adopté. Compte tenu de ce que je viens de décrire, cette augmentation aurait dû mécaniquement se situer entre 2,9 % et 3 %, mais nous avons, comme vous le savez, mené des discussions pour mettre en place un texte de compromis qui nous a conduits à vous proposer des évolutions supplémentaires.

L'ensemble des ministres du pôle santé et Amélie de Montchalin ont écouté chacun des groupes représentés à l'Assemblée nationale et au Sénat. Nous avons décidé d'abandonner la hausse du ticket modérateur sur les consultations médicales, pour un coût de 400 millions d'euros. Cela nous conduira à demander une contribution aux organismes complémentaires qui ont augmenté leurs tarifs en anticipant légitimement cette hausse prévue à l'origine. Cette demande ne sera pas dans le PLFSS à cause de la règle de l'entonnoir, mais elle devrait faire l'objet d'un texte ad hoc. Nous avons également décidé d'augmenter l'Ondam pour donner davantage de moyens aux hôpitaux et aux Ehpad : il sera ainsi en hausse de 3,4 %, soit 9 milliards d'euros supplémentaires par rapport à 2024, l'Ondam hospitalier augmentant, lui, de 3,8 %.

Cette augmentation des moyens de 1 milliard d'euros permettra d'améliorer la situation financière des hôpitaux et leur capacité à offrir les soins de qualité que nos concitoyens attendent. Vous aviez fait le premier pas avec le lissage de l'augmentation des cotisations à la CNRACL et nous allons un peu plus loin avec ce milliard supplémentaire. Nous avons également renforcé l'effort que vous aviez engagé en faveur des Ehpad en proposant 300 millions d'euros. Vous le savez tous, 66 % des Ehpad sont en déficit en 2023, contre 27 % en 2020. C'est un signal d'alerte très fort.

J'ajoute que, avec le rapporteur général de l'Assemblée nationale, et en lien avec votre président et Mme la rapporteure générale, j'ai fait porter un effort supplémentaire sur un certain nombre d'opérateurs et d'agents sanitaires dans une logique de gel des dépenses par rapport à 2024.

En 2024, le déficit de la sécurité sociale était de 18 milliards d'euros. Avec ce texte, compte tenu des effets de la censure et compte tenu des compromis que nous avons collectivement faits, le déficit devrait se situer aux alentours de 22,1 milliards d'euros. Évidemment, je ne vais pas vous dire que nous pouvons nous satisfaire de cette situation, mais si nous ne votions pas le PLFSS, nous aurions 30 milliards d'euros de déficit.

Nous devons collectivement trouver des solutions pour pérenniser le financement de notre système de protection sociale. Aussi, dès ce PLFSS définitivement adopté, je vous proposerai d'engager un travail de fond sur le virage démographique, de la naissance à la fin de vie. Alors que nous venons de célébrer le quatre-vingtième anniversaire de la sécurité sociale, de grands défis se présentent devant nous.

M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins. - J'ai eu la grande chance de participer à la commission mixte paritaire en tant que rapporteur général du budget de la sécurité sociale à l'Assemblée nationale, ce qui me donne une bonne vision de l'évolution de ce texte.

Il y a pour moi un sujet fondamental, qui a été évoqué dans le discours de politique générale du Premier ministre, c'est la pluriannualité. Nous avons tous bien conscience que le trou de la sécu ne va pas pouvoir se résorber sur un seul exercice budgétaire. Il en faudra plusieurs, si et seulement si nous réussissons à mener un certain nombre de réformes structurelles aussi compliquées les unes que les autres. J'espère néanmoins que nous allons pouvoir assez rapidement décliner cette pluriannualité avec les établissements de santé.

Par ailleurs, en tant que sénateurs, vous êtes sensibles, je le sais, au rôle d'employeurs des collectivités locales et des structures hospitalières. L'allongement du délai pour la réforme des cotisations CNRACL permettra de ne pas trop affecter les soins. Le milliard d'euros supplémentaires constituera une vraie bouffée d'oxygène pour le système hospitalier.

Il faut néanmoins faire des économies : à cet égard, les sénateurs sont en général plus raisonnables que les députés. Mais prenons garde de créer des usines à gaz, notamment avec les prescriptions. Nous aurons une loi de simplification, d'ici à l'été, qui aura vocation à simplifier la vie des professionnels, pour un meilleur accès aux soins de nos concitoyens.

Nous devrons porter une attention particulière au problème des transports, mais la question ne se pose pas dans les mêmes termes pour la ruralité et pour la ville. Dans un certain nombre de territoires, le transport est fondamental pour l'accès à la chimiothérapie, à la radiologie, à la dialyse. Soyons vigilants et n'hésitons pas à mener des expérimentations avec les collectivités, car le budget de la sécurité sociale ne peut supporter à lui seul ces coûts induits.

Toujours en ce qui concerne la territorialisation des actions, il y a un travail à mener sur les laboratoires de biologie et la radiologie de proximité, avec en filigrane les risques de financiarisation. Votre commission a fait un rapport sur le sujet qui nous a beaucoup inspirés. Nous travaillons avec la Caisse nationale d'assurance maladie sur la territorialisation de ces structures en prenant l'exemple des pharmacies, qui peuvent jouer un rôle structurant important dans certains territoires.

Je regrette pour ma part l'abandon de l'Ondam prévention, qui nous permettrait d'avoir une vision précise de ce que nous consacrons à la prévention. Il est bien évident que les retours sur investissements ne seront pas visibles demain, mais il faut s'inscrire, encore une fois, dans le temps long, dans la pluriannualité. C'est valable pour les grandes pathologies cardiovasculaires, mais également pour la santé mentale ou le cancer, qui représentent deux tiers de nos dépenses d'assurance maladie.

La journée mondiale contre le cancer a rappelé hier ces axes stratégiques. Nous poursuivons ces efforts avec la vaccination contre le papillomavirus - il faut porter le fer contre tous les obscurantismes à cet égard -, et la prise en charge à 100 % pour le cancer du sein. Il faut bien entendu trouver les financements adéquats. Je pense aussi à la prise en charge de la maladie de Charcot, qui concerne plus le médico-social, mais qui reste un sujet fondamental.

Il y a enfin le sujet des ratios : 2027, c'est demain, et ces trois ans correspondent au temps de formation d'une promotion d'infirmiers. Ne perdons pas de temps pour travailler avec les régions sur la formation paramédicale.

Sur la prévention, nous devons engager les mutuelles, en distinguant ces dernières et le système assurantiel. Il faut être prudent pour que ce ne soit pas un grand fourre-tout. Il s'agit d'identifier précisément les structures les plus à même d'exercer ce rôle de prévention.

Les élus locaux sont également conscients de l'importance de l'accès aux soins pour l'attractivité de leurs territoires. On ne trouve pas un maire ou un président d'établissement public de coopération intercommunale qui s'en désintéresse.

Vous le savez, certains envisagent d'appréhender le grand âge dans le cadre assurantiel. Cela fait partie des pistes de travail de la Mutualité française.

Nous avons abandonné l'idée de toucher aux tickets modérateurs, renonçant à 1 milliard d'euros d'économies sur la santé des Français. En contrepartie, nous nous engageons à être beaucoup plus efficaces dans la lutte contre les fraudes. Le Haut Conseil pour le financement de la protection sociale évalue le coût du phénomène à 13,5 milliards d'euros. Avec un fort engagement des caisses primaires d'assurance maladie et des caisses d'allocations familiales, il s'agit de déployer dans tous les territoires des pôles d'appui pour s'attaquer à ces fraudes. L'idée est non pas d'embêter les professionnels de santé, mais de traquer les filières organisées sur internet qui proposent des ordonnances ou des bons de transport falsifiés.

L'option biométrique n'a pas été retenue pour la carte Vitale. Peut-être devons-nous nous inspirer de ce qui a été fait pour les cartes bancaires avec les applications pour smartphones, un dispositif assez sécurisé. Une expérimentation de carte Vitale digitalisée est déjà menée dans certains territoires.

Le sujet de la santé mentale avait été mis en avant par Michel Barnier. Nous souhaitons poursuivre cet engagement en trouvant des financements, là encore sur une base pluriannuelle.

Enfin, le Premier ministre a affirmé sa volonté de développer les soins palliatifs. Dans un premier temps, une enveloppe de 1 milliard d'euros sur dix ans sera débloquée. Mais les moyens financiers ne sont pas tout : il faut une véritable politique de formation des professionnels en appui. L'accent sera particulièrement mis sur les outre-mer, qui vivent une situation difficile à cet égard.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Ma première question porte sur l'atterrissage. On devait être à 16 milliards d'euros avec Michel Barnier ; en sortie de commission mixte paritaire, on était à 18,3 milliards d'euros. Madame la ministre, à combien évaluez-vous le déficit prévisible aujourd'hui ?

Ensuite, estimez-vous que le mécanisme de l'Ondam est encore crédible ? L'Ondam est censé être un outil de pilotage, mais nous ne pilotons rien en réalité. À la veille de nous pencher sur ce PLFSS en novembre au Sénat, on nous annonçait même une hausse supplémentaire de dépenses de 1 milliard d'euros sur les médicaments.

Enfin, quelle est votre analyse du déficit global des hôpitaux, qui continue à se creuser ? La Fédération hospitalière de France (FHF) nous a encore alertés sur ce point la semaine dernière.

Mme Corinne Imbert, rapporteure pour la branche maladie. - Comment justifier auprès des Français cette augmentation de l'Ondam pour 2025 ? Comment faire en sorte que ces dépenses supplémentaires soient réellement efficaces ? Vous avez parlé d'efficience, il y a des dispositions dans ce texte pour la ville : peut-on envisager plus d'efficience à l'hôpital ?

Sur la situation financière des établissements de santé, entendez-vous réétudier les modalités de compensation des charges, qui pèsent chaque année à hauteur de 11 milliards d'euros sur les établissements de santé et qui alimentent un déficit hospitalier jamais vu ?

L'évolution du déficit de la branche maladie montre que le Ségur de la santé n'a pas été financé et continue de peser sur les équilibres. Quelle stratégie de redressement envisagez-vous ?

Sur la régulation, comment comptez-vous faire appliquer les mesures portées par l'article 15 du texte, environ 600 millions d'euros, sur les secteurs de l'imagerie médicale et du transport, alors que la période pour la mettre en oeuvre est plus réduite ? En clair, est-ce que les baisses de prix risquent d'être plus importantes que prévu ?

Par ailleurs, à la veille de la discussion du PLFSS, vous avez découvert que nous aurions moins de recettes sur les remises de médicaments, à hauteur de 1,2 milliard d'euros. Est-ce que les discussions ont repris avec les industriels ? Où en est-on à ce sujet ?

Enfin, y a-t-il des mesures réglementaires cachées dans ce PLFSS ?

Mme Pascale Gruny, rapporteur pour la branche vieillesse. - La participation des retraités à l'effort budgétaire, initialement prévue dans ce PLFSS, a finalement été rejetée du fait de l'adoption de la motion de censure. Avez-vous définitivement renoncé à toute mesure en ce sens ?

Est-ce que le Gouvernement compte revenir sur la réforme des retraites de 2023 après la mission flash annoncée par le Premier ministre ? Quelles marges de manoeuvre avons-nous avec ce niveau de déficit ?

Enfin, concernant la retraite des agriculteurs, il faut avoir en tête la date du 1er janvier 2026. La clause de sauvegarde pour le mois de mars 2028 ne doit être que très exceptionnelle.

M. Olivier Henno, rapporteur pour la branche famille. - Ce n'est pas parce que la branche famille ne connaît pas de déficit qu'il faut éluder toute réforme structurelle. Au-delà du PLFSS, quel est votre agenda sur la réforme des modes de garde, sur l'attractivité du métier d'assistante maternelle, sur le recrutement dans les crèches ?

Mme Chantal Deseyne, rapporteur pour la branche autonomie. - Quelle date envisagez-vous désormais pour la fusion des sections soins et dépendance des Ehpad, qui devait intervenir le 1er janvier 2025 ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. - Pour être très concrète sur les questions de Mme Doineau, l'atterrissage est à 22,1 milliards d'euros, même s'il faut toujours rester prudent sur les grands équilibres.

En ce qui concerne l'Ondam, tout est fait pour qu'il soit le plus sincère possible. Comme l'a dit Yannick Neuder, il faut se placer dans une logique de pluriannualité. C'est absolument indispensable.

La FHF a raison de vous alerter sur les déficits hospitaliers importants, avec notamment 1 milliard d'euros pour l'oxygène.

Soyez rassurée, madame Imbert, il n'y a pas de mesures réglementaires cachées. Le décret sur la CNRACL a été pris et le décret sur les indemnités journalières interviendra bientôt. Nous sommes totalement transparents. Par ailleurs, nous sommes en discussion avec Les entreprises du médicament (Leem), car nous avons clairement un problème avec les prix.

En ce qui concerne la retraite des agriculteurs, madame Gruny, nous sommes très vigilants. Nous avons bien pris soin d'intégrer le coût de la loi du 13 février 2023 visant à calculer la retraite de base des non-salariés agricoles en fonction des vingt-cinq années d'assurance les plus avantageuses, dite Dive, dans le PLFSS. L'achèvement de la mise en oeuvre de cette réforme est bien prévu pour 2028.

Sur la branche famille, l'enfance, les modes de garde, nous devons nous atteler à une réforme d'ensemble. J'en profite pour dire un mot sur le décret concernant les microcrèches. Nous souhaitons qu'elles obéissent aux mêmes règles que les crèches de petite taille et je m'insurge contre le communiqué de presse qui laisse entendre qu'il y aurait des licenciements. Il n'y aura aucun licenciement, puisque ces mesures ne concernent que les nouvelles recrues à partir de 2026.

Enfin, madame Deseyne, la fusion des sections se mettra en place le 1er juillet 2025, ce qui occasionnera, je le reconnais, quelques difficultés de double comptabilité.

M. Yannick Neuder, ministre. - Cette revalorisation de l'Ondam répond à une exigence de sincérité. Les efforts potentiels à hauteur de 10 milliards d'euros auraient sans doute été trop durs à digérer, notamment pour les assurés. Il faut toujours avoir à l'esprit l'acceptabilité des réformes que nous proposons.

J'ai un autre chiffre à vous donner : sans PLFSS depuis le 1er janvier, ce sont quelque 30 millions d'euros que nous perdons chaque jour. Plus vite nous aurons un PLFSS, mieux ce sera, même si certaines mesures ont dû être repoussées dans le temps. Il faut que le dialogue puisse se mettre en place, notamment avec la Cnam.

Le déficit hospitalier cumulé se monte à 3,5 milliards d'euros. Ne revenons pas sur le Ségur, qui est arrivé à un moment opportun, en pleine crise du covid-19. Grâce à ces revalorisations de nos professionnels, nous avons rattrapé notre retard par rapport à nos partenaires européens, mais la compensation a été probablement insuffisante, ce qui explique en grande partie ces déficits structurels. Et quand le taux de marge est dégradé, c'est toute la capacité d'investissement qui en pâtit.

Enfin, les discussions vont naturellement reprendre avec les industriels et le Leem, en lien avec Matignon, qui souhaite s'impliquer fortement sur ces sujets. Vous avez raison, le dépassement de 1,2 milliard d'euros pour les médicaments que nous avons appris en pleine discussion du PLFSS est tout à fait anormal. Aussi, une mission conjointe de l'inspection générale des affaires sociales et l'inspection générale des finances a été diligentée pour faire la lumière sur ce dérapage et la fiabilité des chiffres et des projections dont nous disposons. Sans cela, aucun pilotage n'est possible.

M. Khalifé Khalifé. - Le Ségur a été étendu à beaucoup de structures du médico-social. Où en êtes-vous de vos discussions avec les départements pour compenser ces coûts ?

Par ailleurs, la prévention a un coût astronomique pour des résultats par définition peu visibles. Il importe sans doute de remettre ce sujet à plat et d'imaginer une politique que la population puisse s'approprier.

Mme Christine Bonfanti-Dossat. - Je veux revenir sur les soins palliatifs. Une stratégie décennale est mise en place avec, à terme, la présence d'une unité de soins par département. Nous partons de loin : des dizaines de personnes meurent chaque jour sans avoir pu bénéficier de tels soins. Pensez-vous avoir les moyens de vos ambitions ?

Mme Anne-Sophie Romagny. - Où en est la revalorisation des actes infirmiers libéraux ?

Mme Raymonde Poncet Monge. - Vous avez des objectifs de dépenses revus à la baisse pour vous caler sur des données macroéconomiques différentes en matière d'inflation. Avez-vous également révisé la donnée macroéconomique de croissance et tenu compte de l'effet récessif des deux budgets sur celle-ci ?

Est-ce que le milliard d'euros supplémentaires dont vous parlez intègre les 300 millions d'euros libérés par l'étalement des paiements à la CNRACL ? Il faut bien voir qu'il s'agit juste d'un décalage de trésorerie sur quatre ans.

Par ailleurs, nous nous félicitons vraiment de l'augmentation de l'aide pour les Ehpad en grande difficulté financière. C'est beaucoup plus réaliste par rapport à la situation. Cependant, vous le dites vous-même, ceux qui ne sont pas encore en grande difficulté aujourd'hui le seront certainement demain. Le problème est devant nous. J'aimerais en outre savoir si vous avez estimé les besoins des services à domicile. À ce sujet, avez-vous un calendrier pour une loi de programmation pour l'autonomie ?

Mme Brigitte Micouleau. - J'aimerais savoir si une réflexion pourrait être menée sur un abattement supplémentaire sur la clause de sauvegarde des médicaments.

Mme Laurence Muller-Bronn. - Pour faire suite à ma question d'actualité au Gouvernement, mercredi dernier, sur les crédits covid, pouvez-vous me dire quels crédits seront consacrés aux covid longs sur l'ensemble des crédits et m'indiquer la manière dont ils seront ventilés sur le territoire ?

Mme Céline Brulin. - Quand le coût des exonérations de cotisations sociales atteint quatre fois le déficit que vous annoncez, est-ce que vous pensez soutenable que l'effort demandé aux entreprises ne soit que de 1,6 milliard d'euros ? J'ai des arguments pour récuser ce que vous expliquez sur le coût du travail, mais le temps imparti ne me permet pas de les développer.

Vous avez déclaré souhaiter que l'augmentation du taux de cotisation de la CNRACL pour les hôpitaux ne vienne pas en conflit avec le soin. Pensez-vous que cela soit possible compte tenu des déficits que connaissent nos établissements hospitaliers ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. - Sur le sujet du Ségur et du coût de l'accord, soit 600 millions d'euros, 300 millions sont pris sur l'objectif général de dépenses (OGD), 130 millions sont versés par l'État et 170 millions relèvent des départements, avec lesquels nous discutons dans le cadre d'un comité des financeurs à venir. Nous comprenons leurs difficultés, mais cette discussion doit se dérouler dans le cadre plus global des relations de l'État avec les départements.

Sur la question des soins palliatifs, j'assume totalement l'engagement du Gouvernement, à savoir 1 milliard d'euros sur dix ans, soit 100 millions d'euros par an. Effectivement, nous souhaitons qu'il y ait une unité de soins palliatifs pour adultes par département. Très concrètement, voilà quinze jours, j'étais à l'hôpital de Flers, dans l'Orne, qui n'a pas de service spécifique et où nous avons un projet de création de dix lits de soins palliatifs. Yannick Neuder est très engagé sur ce sujet. Quinze départements supplémentaires seront concernés en 2025.

Madame Poncet Monge, vous avez raison, il y a bien 250 millions d'euros en plus grâce à l'étalement des versements CNRACL.

Enfin, madame Brulin, vous ouvrez un débat de fond qui traverse le champ politique. Nous sommes plutôt partisans d'un allégement des charges pour aider les entreprises. Par ailleurs, nous ne sommes pas là pour opposer la CNRACL et le soin. Je suis à l'origine de l'enquête Igas-IGF qui a mis en lumière ce problème de ressources pour les retraites des agents des hôpitaux et de la fonction publique territoriale. C'est le minimum que nous leur devons et, j'y insiste, cela n'enlève rien au problème structurel de financement de l'hôpital. Une enquête récente nous montre que les petits hôpitaux, c'est-à-dire à moins de 20 millions d'euros de chiffre d'affaires, n'ont pas retrouvé la situation d'avant-covid, quand ceux à plus de 150 millions d'euros l'ont retrouvée voire dépassée. Nous devons mener un travail de fond sur cette question.

Je le répète, le bien-vieillir ne doit pas être notre seule préoccupation ; nous devons mener une réflexion d'ensemble sur tout le cycle de la vie, de la naissance à la mort.

M. Yannick Neuder, ministre. - Monsieur Khalifé, on peut estimer le coût annuel de la prévention à 8 milliards d'euros, mais, là encore, les effets des grands programmes, par exemple sur le risque cardiovasculaire, et les économies réalisées ne peuvent se mesurer que sur la durée.

Sur les soins palliatifs, il y a un engagement financier, mais un effort doit être fait sur la formation, notamment la formation continue, avec des passerelles à créer. Je ne pense pas que ces métiers apparaissent comme une vocation chez les jeunes, donc il faut réussir à attirer progressivement les professionnels dans cette voie. C'était l'objet d'une proposition de loi que j'avais déposée en 2023 et qui avait été adoptée par l'Assemblée nationale.

En ce qui concerne les revalorisations, nous sommes globalement sur un montant de 10,9 milliards d'euros. Nous travaillons plus spécifiquement avec les syndicats sur les revalorisations des infirmières et infirmiers libéraux. C'est absolument indispensable si nous voulons réussir les virages domiciliaires et ambulatoires et diminuer ainsi les durées moyennes d'hospitalisation. N'oublions pas les exigences du maillage territorial. Nous devons être transparents avec cette profession. La loi de 2023 sur l'accès direct aux soins infirmiers ne servira à rien si elle ne s'accompagne pas de revalorisation des tarifs. Par exemple, la prise de sang à domicile est à 6,90 euros, la deuxième étant à 50 % et la troisième gratuite. C'est trop peu attractif, et cela peut expliquer que 50 % des infirmières libérales envisagent de changer de métier dans les cinq ans.

Sur la croissance, madame Poncet Monge, nous avons retenu un taux de 0,9 %.

Sur les covid longs, nous apprenons en marchant. Il y a plus de 200 symptômes et la physiopathologie de cette maladie est encore mal connue. Il y a des enveloppes d'amorçage et des dispositifs d'appui à la coordination (DAC) ont été créés. Chacune des ARS s'est emparée du sujet pour assurer un juste accès aux soins. Ces dispositifs tendent à s'éteindre, mais normalement, chaque patient ou chaque professionnel de santé trouve une solution a minima dans son département pour une prise en charge du covid long, qui est une prise en charge pluridisciplinaire compte tenu de ses symptômes, multiples et variés.

Au niveau de la prise en charge, j'ai interrogé précisément le centre hospitalier universitaire (CHU) de Nancy. Le patient est hospitalisé sous le régime de la tarification à l'activité (T2A) et selon le principe du groupe homogène de séjours (GHS). Il n'y a pas besoin de tarification particulière. C'est le droit commun qui s'applique. Après, il faut sans doute former des professionnels sur cette pathologie spécifique, mais c'est un autre sujet.

Mme Florence Lassarade. - Avez-vous un budget pour communiquer auprès de la population sur le PLFSS ? Je crois que nos concitoyens n'appréhendent pas la santé de façon financière et ont besoin de voir comment tout cela s'articule.

Par ailleurs, je me réjouis que la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss) travaille sur la iatrogénie médicamenteuse. À ce sujet, envisagez-vous d'harmoniser les logiciels hospitaliers, dont l'hétérogénéité est dangereuse ? Je l'ai constaté à titre personnel.

Enfin, c'est aussi en tant que pédiatre que je vous adresse ma troisième question : peut-on se résoudre à figurer au vingt-deuxième rang européen en matière de mortalité infantile ? En d'autres termes, ne trouvez-vous pas dangereux d'abandonner peu à peu le recrutement et la formation de spécialistes de la néonatologie et de la petite enfance ? Cette dernière question ne concerne pas le PLFSS, mais elle me paraît essentielle.

Mme Monique Lubin. - Quid du projet de transformation du service du contrôle médical, très contesté par les salariés ? Bien que cette mesure ait été rejetée par l'Assemblée nationale, elle semble faire sa réapparition.

Faites-vous vôtres les propos de la ministre du travail sur la fiscalisation de la sécurité sociale ? Nous y sommes fortement opposés, car cela tendrait à revenir sur le travail des partenaires sociaux et serait très dangereux en « période de vaches maigres ».

Faites-vous vôtre la théorie de la dette cachée de notre régime de retraite ? Le danger vient du vieillissement de la population, qui augmentera les dépenses de santé. Tout le monde parle de ce déficit depuis des années, mais aucune mesure n'est prise !

Mme Émilienne Poumirol. - La durée prévue pour cette audition me paraît un peu juste compte tenu des enjeux du texte.

M. Philippe Mouiller, président. - L'examen par l'Assemblée nationale d'une motion de censure aujourd'hui même a emporté l'audition prévue cet après-midi...

Mme Émilienne Poumirol. - Il me semble regrettable d'examiner des sujets comme la santé, l'autonomie ou le vieillissement uniquement sous l'angle du PLFSS. Il faudrait pouvoir discuter sur le fond. Quant à la censure du précédent gouvernement évoquée trois fois par Mme la ministre, elle n'aurait pas eu lieu sans la dissolution !

Sur le déficit de la sécurité sociale, des négociations ont bien eu lieu et nous avons obtenu quelques avancées. Nous n'y aurions pas participé si nous n'avions eu aucun espoir à cet égard... La réduction de la trajectoire financière ne se profile pas pour les années à venir, car vous n'envisagez jamais de recettes nouvelles. Comme je l'ai dit à la commission mixte paritaire, je regrette que l'on n'ait pas tenu l'objectif des 4 milliards d'euros d'allégements de cotisations, qui a été ramené à 1,6 milliard d'euros. Quand abordera-t-on vraiment le problème essentiel, à savoir l'équilibre entre les dépenses et les recettes ?

Mme Annick Petrus. - Lors de l'examen du PLFSS au Sénat, j'ai porté un amendement visant à protéger le régime Lodeom d'exonération des charges sociales patronales en outre-mer, des effets indirects de la refonte des allégements généraux. Pouvez-vous nous garantir que cette disposition sera maintenue au cours de la discussion parlementaire ? Sinon, quelles solutions envisagez-vous pour protéger les entreprises ultramarines d'un choc économique non anticipé ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. - Madame Lassarade, nous avons évidemment une direction de la communication au ministère. Mais pour le PLFSS proprement dit, les informations proviennent de la sécurité sociale. Je suis prête à faire le relais à ce sujet.

J'avais pris un engagement sur les métiers du « Prendre soin » - vous êtes plusieurs à l'avoir abordé en filigrane -, car nous manquons de bras. À ce propos, j'ai été interpellée par des professionnels, qui réclamaient la mise en valeur de leurs missions.

Le recrutement des internes en médecine soulève des difficultés. Lors de mon déplacement à Strasbourg dans un service consacré à la natalité et à l'infertilité - je suis, tout comme vous, très soucieuse de la mortalité infantile -, le personnel a notamment évoqué l'épineux problème du choix des étudiants sur des spécialités qui exigent des gardes.

Madame Lubin, les propos de la ministre chargée du travail et de l'emploi concernant la fiscalisation lui appartiennent ; il n'y a pas de fiscalisation. Au demeurant, nous devons engager une vraie réflexion de fond sur notre modèle. Avec tout le respect que j'ai pour votre commission, une audition d'une heure trente ne suffit pas... Je veux que nous travaillions sur tous les aspects qui nous intéressent, de la natalité au vieillissement. À ceux qui dénoncent notre immobilisme, je rappellerai qu'une vaste consultation sur le grand âge a été organisée en 2020. Or, sur les 13 milliards d'euros attendus à l'échéance de 2030, nous sommes à 11 milliards d'euros. Figurent notamment dans la trajectoire actuelle les équivalents temps plein (ETP) en Ehpad, la fusion des sections, la réforme des concours, la hausse des salaires, etc. Il faut évidemment aller plus loin, en commençant par apporter dès maintenant des réponses et en s'attelant au sujet de fond.

En ce qui concerne les retraites, nous avons confié la mission aux partenaires sociaux. Si d'aucuns commencent à dire qu'il faudrait faire ceci ou cela...

Mme Monique Lubin. - Ce n'est pas ce que j'ai dit.

Mme Catherine Vautrin, ministre. - J'entends bien, mais je me permets de vous répondre. La Cour des comptes rendra ses conclusions le 19 février, puis nous travaillerons sur le sujet.

Madame Petrus, nous garderons votre amendement sur le dispositif Lodeom, qui est important.

Pour ce qui est des allégements de charges des entreprises, le Gouvernement a opté pour les 1,6 milliard d'euros au lieu des 4 milliards d'euros.

Mme Raymonde Poncet Monge. - Plus exactement 3 milliards d'euros.

Mme Catherine Vautrin, ministre. - C'est ce que vous avez voté.

M. Yannick Neuder, ministre. - Sur la formation, il ne faut surtout pas entrer dans une compétition entre la médecine générale et les autres spécialités, et entre celles-ci en fonction de la lourdeur de la spécialité, la permanence des soins et les gardes. Comme l'ont montré mes travaux à la fin de 2023, les gouvernements successifs n'ont jamais pris conscience que le rapport au travail avait changé dans le monde médical et paramédical. Pour remplacer un généraliste, il faut désormais 2,3 nouveaux médecins. Or le nombre de professionnels formés n'a pas changé depuis 1970.

Par conséquent, former plus et mieux fait partie des travaux que je mène depuis longtemps avec Philippe Mouiller. J'espère que nous pourrons faire bouger les lignes en fonction des besoins des territoires et des capacités de nos universités. À cet égard, nous travaillons en collaboration avec Élisabeth Borne et Philippe Baptiste.

Sur la mortalité infantile et néonatale, nous ne pouvons nous satisfaire de la situation. Je serai très vigilant sur l'accès aux soins pour les plus jeunes - y compris les enfants à naître - et les plus âgés. Des marges de progression existent, notamment pour le diagnostic néonatal. Les demandes des différentes associations sont toutes légitimes, mais il faudra mettre en oeuvre des réformes structurelles pour envisager les financements.

La mesure qui porte sur les CPAM, en particulier leurs services médicaux, avait été adoptée par le Sénat. Nombre de mes confrères m'ont ensuite alerté, craignant que leur dépendance à l'égard d'un directeur de caisse ne nuise à leur libre arbitre. Or un rapport de l'Igas a montré qu'un tel risque n'était pas fondé. De plus, ce modèle existe déjà pour les MSA. Cela nous permettra d'apporter une meilleure réponse aux usagers et d'effectuer des contrôles plus efficaces ; la fraude s'élève tout de même à 13,5 milliards d'euros et provient de filières très organisées. Pourquoi recentraliser le dispositif alors que nous voulons tous plus de services publics dans les territoires ?

Mme Catherine Vautrin, ministre. - Je conclurai en abordant le handicap, à quelques jours du 11 février et du vingtième anniversaire de la loi de 2005. Une communication en conseil des ministres portera sur le bilan des actions menées et sur le long chemin qui reste à parcourir. En fin de semaine, le Gouvernement fera une annonce sur la prise en charge des fauteuils roulants.

M. Philippe Mouiller, président. - Merci à tous ! Nous entendons vos regrets concernant la durée de cette audition. Sachez que les ministres sont d'accord pour revenir après le PLFSS afin de réaborder un certain nombre de sujets.

Cette audition a fait l'objet d'une captation vidéo, qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.

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