EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 3 décembre, sous la présidence de M. Cédric Perrin, président, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du rapport de M. Loïc Hervé sur projet de loi n° 853 (2024-2025) autorisant la ratification de plusieurs conventions-cadres relatives aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés, aux contrôles en cours de route et aux gares communes ou d'échange.
M. Loïc Hervé, rapporteur. - Monsieur le président, mes chers collègues, nous examinons aujourd'hui un projet d'accord autorisant la ratification de six conventions-cadres relatives aux bureaux à contrôles nationaux juxtaposés - dits « BCNJ » - aux contrôles en cours de route et aux gares communes ou d'échange. Il s'agit en fait d'une régularisation législative a posteriori, lesdites conventions ayant été conclues au tout début de la Ve République, de 1958 à 1965. En effet, au lieu d'une ratification par voie législative, conformément à l'article 53 de la Constitution, elles ont à l'époque fait l'objet - par erreur, oubli ou négligence - d'une ratification par décret. Depuis lors, elles ont été appliquées par 48 gouvernements successifs sans fondement juridique valide, soit une situation pour le moins baroque que vient corriger le texte que je vous présente aujourd'hui.
Les BCNJ sont des plates-formes douanières partagées entre deux pays frontaliers, constituant physiquement le point de passage des frontières : la grande majorité d'entre eux sont routiers, mais ils possèdent également des variantes ferroviaires, fluviales et aéroportuaires. Ils peuvent être complétés par des contrôles « en cours de route », c'est-à-dire à bord des trains.
Au sein de ces infrastructures mutualisées, les douaniers de la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) réalisent des contrôles ciblés de personnes et de marchandises lors du franchissement de la frontière, dans le cadre de leurs différentes missions, à savoir la lutte contre les trafics, contre la criminalité organisée et le financement du terrorisme, mais aussi le contrôle de la conformité des marchandises et la perception des droits et taxes applicables. Les agents de la direction nationale de la police aux frontières (PAF) y sont également déployés, et ont quant à eux compétence pour prononcer des refus d'entrée ainsi que pour interpeller des personnes recherchées.
Je profite de cette intervention pour saluer la très bonne collaboration unissant les personnels douaniers et policiers, ainsi que le travail remarquable qu'ils accomplissent, notamment avec la saisie en 2023 de 92 tonnes de stupéfiants, 521 tonnes de tabac de contrebande, 20,4 millions d'articles de contrefaçon et 163,5 millions d'euros.
Outre leur intérêt opérationnel manifeste, les BCNJ sont aussi des vitrines permettant d'afficher la collaboration entre la France et ses voisins, ce qui contribue à la bonne image des services douaniers.
On compte en tout 137 BCNJ sur nos frontières, créés via des « arrangements spécifiques » sur le fondement de conventions-cadres conclues avec les pays frontaliers. Or, six d'entre elles - celles qui ont été conclues avec l'Allemagne, la Suisse, la Belgique, l'Italie, le Luxembourg et l'Espagne -, ce qui correspond à 123 BNCJ des 137 BCNJ, n'ont pas fait l'objet d'une ratification par le législateur.
Ce défaut de ratification crée une faille juridique majeure, qui mettrait la France dans une situation inconfortable en cas de contentieux, puisqu'elle encourrait l'annulation des décrets de ratification, ainsi que la remise en question des contrôles effectués par les BCNJ et des actes juridiques réalisés sur leur fondement. Par bonheur, cette situation ne s'est jamais présentée, mais le risque demeure jusqu'à la ratification législative de ces conventions-cadres, régularisation a posteriori que le Conseil d'État a préconisée dans un avis de 2022.
Au-delà de cet enjeu de sécurisation juridique, ces six conventions-cadres, de rédaction largement similaire, présentent l'intérêt de fournir un cadre simple et harmonisé. Elles définissent les grands principes d'établissement et de fonctionnement des BCNJ, et notamment les modalités régissant les contrôles frontaliers juxtaposés : objet, périmètre, lieux, pouvoirs et responsabilités. Elles emporteront l'« autorisation implicite » globale des BCNJ existants ; elles en permettront aussi la modification, comme il en existe le projet pour plusieurs BCNJ franco-suisses ; elles constitueront enfin un support juridique valide, dans l'éventualité où de nouveaux BCNJ viendraient à être créés.
Mes chers collègues, compte tenu de ces éléments, il est difficile de ne pas approuver ce texte qui corrige une anomalie de longue date, et je vous propose de l'adopter, comme l'a fait l'Assemblée nationale le 10 juillet dernier, sans débat en séance publique.
Il est cependant possible de s'émouvoir de cette situation et de ce qui paraît être une négligence de l'exécutif vis-à-vis de l'application de l'article 53 de la Constitution... Faute corrigée est cependant pardonnée, et l'adoption de ce texte permettra à nos BCNJ de poursuivre leurs missions avec une sécurité juridique renforcée. À cet égard, je salue l'initiative de notre président, le 29 octobre dernier, qui a souhaité que notre commission effectue un travail d'inventaire et de suivi des conventions en vigueur, ce qui pourrait permettre de repérer d'autres anomalies.
L'examen de ce projet de loi est inscrit en séance publique à l'ordre du jour du mercredi 10 décembre prochain selon la procédure simplifiée, ce à quoi la Conférence des Présidents, ainsi que votre rapporteur, a souscrit. Je précise que nous avons organisé une audition dense sur ce sujet avec des fonctionnaires appartenant aux différents services concernés.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1er
M. Cédric Perrin, président. - Je vous propose de vous donner lecture de ce premier article, la rédaction des autres articles étant quasiment identique : « La ratification de la convention-cadre entre la République française et la République fédérale d'Allemagne relative aux bureaux de contrôles nationaux juxtaposés et aux gares communes ou d'échange à la frontière franco-allemande, signée à Paris le 18 avril 1958, et dont le texte est annexé à la présente loi, est autorisée à compter de cette date. »
L'article 1er est adopté.
Article 2
M. Cédric Perrin, président. - Cet article concerne la convention-cadre du 28 septembre 1960, conclue avec la Suisse.
L'article 2 est adopté.
Article 3
M. Cédric Perrin, président. - L'article 3 a trait à la convention-cadre avec la Belgique, en date du 30 mai 1962.
L'article 3 est adopté.
Article 4
M. Cédric Perrin, président. - Cet article porte sur la convention-cadre avec la République italienne, en date du 11 octobre 1963.
L'article 4 est adopté.
Article 5
M. Cédric Perrin, président. - L'article 5 concerne la convention-cadre du 21 mai 1964 passée avec le Grand-Duché du Luxembourg.
L'article 5 est adopté.
Article 6
M. Cédric Perrin, président. - Enfin, l'article 6 porte sur la convention-cadre avec le Royaume d'Espagne, en date du 7 juillet 1965.
L'article 6 est adopté.
Je mets au vote l'ensemble du projet de loi.
Le projet de loi est adopté sans modification.