2. Les conséquences de cette crise
a) L'ampleur de la crise
La perte globale de chiffre d'affaires des producteurs de bovins, compte tenu des variations très importantes et peu prévisibles est difficilement évaluable pour 1996.
Les mouvements très fluctuants de la consommation ne permettent pas de prévoir réellement l'impact de cette crise sur le revenu des éleveurs.
Cependant, avec les dernières mesures prises à la demande de la France par la Communauté, on peut espérer que cette perte soit compensée pour partie.
L'équarrissage et les abattoirs, après avoir subi une baisse d'activité ensuite corrigée par la mise en oeuvre de l'intervention communautaire, souffrent de la non valorisation et des coûts de destruction du cinquième quartier et des cadavres d'animaux, ce qui pourrait représenter un coût global d'un milliard de francs en rythme annuel ; les abattoirs ont également dû adapter leurs chaînes à l'élimination des « abats spécifiés » interdits et les fabricants de farines animales vont être contraints de se mettre à la nouvelle norme communautaire (cela pourrait coûter à ces derniers 150 à 200 millions de francs) ;
En aval de la filière, les boucheries traditionnelles semblent avoir jusqu'à présent moins souffert de la baisse d'activité que les grandes surfaces ; mais, pour ces dernières, la baisse d'activité sur un rayon peut être compensée par ailleurs.
b) Une nécessaire réforme en profondeur de la filière bovine
La crise de l'ESB nécessitera dans les années à venir de prendre mieux en considération l'identification des viandes et provoquera une réforme de structure de la filière .
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Une impérative démarche de
qualité
L'identification des viandes est aujourd'hui la demande prioritaire des consommateurs . La France doit en effet valoriser l'avance qu'elle a prise en matière de traçabilité de la viande bovine en prévoyant un étiquetage informatif allant au-delà du logo « viande bovine française ».
Par ailleurs, les consommateurs s'orientent de plus en plus vers une labellisation, qui ajoute à l'identification des exigences qualitatives. Une crise dont les mode d'élevage « industriels » sont présentés comme la cause ne peut cependant que la renforcer. La filière bovine a du retard dans une démarche où « il y a tout à gagner et rien à perdre », puisque la segmentation du marché se fait alors vers le haut.
En outre, on peut tout de même s'interroger sur certains choix de production manifestement inadaptés à la demande et motivés par l'organisation actuelle des soutiens ; les femelles ne représentent que 48 % de la production française de viande bovine (veaux compris), mais 82 % de la consommation... Bien sur, les broutards sont exportés, mais non sans des difficultés qui ne remontent pas à l'année en cours. La prime au bovin mâle, qui favorise la production de taurillons plutôt que de vaches ou de veaux est ici en cause.
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Une réforme structurelle
nécessaire
Au delà des différentes mesures conjoncturelles imposées par l'urgence il est nécessaire d'envisager mesures de nature plus structurelle pour l'avenir du secteur bovin, la crise actuelle ayant accentué les déséquilibres latents entre l'offre et la demande.
A cette fin, le Gouvernement a confié à un groupe de réflexion stratégique la mission de définir les aménagements que réclame l'avenir de la filière bovine. Sur la base de ces travaux, la France a demandé et obtenu qu'une réforme de l'organisation commune des marchés de la viande bovine soit mise en oeuvre sans délai au niveau des instances communautaires.
La commission européenne a émis, en juillet, des propositions d'adaptation de l'organisation commune de marché (OCM) actuelle de la viande bovine ; il s'agirait de renforcer les mécanismes de maîtrise de la production de celle-ci sans en changer fondamentalement la nature : réduction des contingents nationaux de « droits à prime », modulation du « complément extensification » au profit des élevages les plus extensifs, abattage obligatoire des veaux laitiers, limitation des aides aux investissements dans l'élevage... Les mesures suggérées auparavant par le ministre français de l'agriculture recoupaient en partie ces propositions, s'y ajoutant notamment la demande d'un « plan social » pour les éleveurs de plus de 55 ans.
Une réflexion globale prenant en compte l'ensemble des opérations entre les différentes branches de la production agricole doit permettre à la filière de la viande bovine de se restructurer et d'affronter la concurrence internationale.