III. QUEL AVENIR POUR LE STATUT SOCIAL DE L'ÉTUDIANT ?
A. L'ACTION SOCIALE DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR
1. Les aides directes
a) Les bourses sur critères sociaux
Les bourses d'enseignement supérieur sur
critères sociaux destinées aux étudiants de premier et de
second cycles sont accordées par les recteurs d'académie, par
l'intermédiaire des CROUS, en fonction des ressources et des charges de
la famille appréciées au regard d'un barème national
établi chaque année. Les textes réglementaires servant de
base à l'attribution de ces aides sont le décret du 9 janvier
1925, le décret du 26 mai 1954 ainsi que la circulaire du 28 avril 1982
modifiée. Une loi du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur
a confirmé le rôle de l'État dans l'attribution des aides
financières aux étudiants afin de réduire les
inégalités sociales.
Ces bourses sont attribuées en fonction de trois critères :
L'âge
Les candidats doivent être âgés de moins de 26 ans pour une
première attribution même s'ils ont interrompu leurs études
supérieures avant cet âge. A partir de 26 ans, ils ne doivent
compter aucune nouvelle interruption des études supérieures. Ces
délais sont reculés de la durée du service national et,
pour les étudiantes, d'un an par enfant élevé.
Cette limite d'âge n'est pas opposable :
- aux étudiants qui ont déjà été
boursiers au titre d'études supérieures ;
- aux étudiants handicapés atteints d'une incapacité
permanente (non pris en charge à 100 % dans un internat) ou ceux
souffrant d'un handicap physique nécessitant l'aide permanente d'une
tierce personne.
La nationalité
Il faut être français mais le droit à bourse est
également ouvert aux étudiants étrangers suivants :
- andorrans ;
- ressortissants ou enfants de ressortissants d'un Etat membre de l'Union
européenne dont l'un des parents (père, mère ou tuteur
légal) travaille ou a travaillé en France ou qui eux-mêmes
ont précédemment travaillé en France à temps plein
ou à temps partiel (emploi permanent non saisonnier et non occasionnel
en qualité de salarié ou de non salarié).
L'étudiant doit en outre résider effectivement en France ;
- réfugiés politiques (carte de l'Office français de
protection des réfugiés et apatrides, OFPRA) ;
- résidents en France avec leur famille (père, mère et
éventuellement autres enfants à charge) depuis au moins deux ans.
Les autres candidats étrangers relèvent du ministère des
affaires étrangères, du ministère
délégué à la coopération ou de leur propre
gouvernement.
La scolarité
- possession du baccalauréat ou d'un titre admis en dispense ou en
équivalence pour l'inscription en université, satisfaction des
conditions exigées pour l'admission en section de techniciens
supérieurs ou en classe préparatoire aux grandes écoles ;
- inscription en France dans une formation d'enseignement supérieur
publique ou privée habilitée à recevoir des boursiers du
ministère chargé de l'enseignement supérieur. Cette
possibilité est étendue à certains établissements
publics de même niveau des autres États membres du Conseil de
l'Europe (étudiants français seulement) ;
- passage dans l'année supérieure d'études.
Des bourses peuvent cependant être accordées aux étudiants
qui se réorientent vers certaines formations technologiques
supérieures, qui sont autorisés à suivre les cours d'une
année supérieure d'études et à se présenter
aux examens correspondants, qui redoublent une classe préparatoire aux
grandes écoles ou, qui suivent une année d'orientation ou de mise
à niveau en vue d'un DEUG, d'un DEUST, ou d'un diplôme
d'université organisés dans le cadre du 1er cycle renforcé
ou en vue d'un BTS.
Il en est de même pour les étudiants dont le redoublement est
consécutif à d'importantes difficultés personnelles ou
familiales.
Les étudiants handicapés et les sportifs de haut niveau peuvent
bénéficier d'une bourse pendant quatre ans maximum sur avis
motivé de leurs enseignants.
Pour l'année universitaire 1996-1997, la répartition des
boursiers par échelon est :
1er échelon |
2ème |
3ème |
4ème |
5ème |
|
Nbre de boursiers |
48.464 |
58.276 |
52.685 |
48.902 |
165.912 |
pourcentage |
12,9 % |
15,6 % |
14,1 % |
13,1 % |
44,3 % |
taux de la bourse |
7.164 F |
10.746 F |
13.842 F |
16.948 F |
19.314 F |
L'évolution du montant des bourses sur critères
sociaux est la suivante :
Echelon |
1992-1993 |
1993-1994 |
1994-1995 |
1995-1996 |
1996-1997 |
1997-1998 |
1er échelon |
6.390 F |
6.588 F |
6.912 F |
7.020 F |
7.164 F |
7.308 F |
2ème échelon |
17.244 F |
17.756 F |
18.648 F |
18.936 F |
19.314 F |
19.692 F |
Les ressources et charges prises en compte sont celles des
parents (ressource figurant à la ligne "revenu brut global" de l'avis
fiscal de l'année N-2 par rapport au dépôt de la demande),
même si l'étudiant est majeur, qui sont retenues. En effet, en
application de l'article 203 du Code civil et de la jurisprudence de la Cour de
Cassation, la famille est tenue d'assurer l'entretien de ses enfants tant que
ceux-ci ne peuvent subvenir à leurs propres besoins. Des
dérogations sont toutefois prévues dans les cas suivants :
- étudiant marié dont le conjoint assure l'indépendance
financière du couple,
- étudiant ayant la charge d'un ou de plusieurs enfants,
- étudiant ayant rompu tout lien avec ses parents à la suite de
leur divorce ou de leur séparation,
- étudiant orphelin de père et de mère,
- étudiant majeur de 18 à 21 ans bénéficiaire des
prestations de l'aide sociale à l'enfance,
- étudiant détenu placé sous le régime de la
semi-liberté.
Dans ces situations, les ressources et charges de l'étudiant ou de son
conjoint sont retenues sous réserve de l'établissement d'une
déclaration fiscale distincte de celle des parents.
CHARGES DE
L'ETUDIANT
:
|
2
|
Par ailleurs, l'attribution d'une bourse d'enseignement supérieur ne
peut intervenir que si le candidat accède chaque année à
un niveau d'études supérieur à celui déjà
atteint. Dans le cas contraire, l'étudiant ne peut
bénéficier de cette aide. Toutefois, dans la limite des
crédits prévus à cet effet, le recteur a la
possibilité d'accorder une
aide individualisée exceptionnelle
(AIE).
Intégrées dans les crédits des bourses, les AIE
permettent dans des conditions fixées par la réglementation et en
fonction de crédits contingentés, à des étudiants
redoublants ou en situation de réorientation de continuer à
bénéficier d'une aide financière. Elles sont
attribuées sur l'initiative du recteur d'académie compte tenu de
critères universitaires et au regard de la situation sociale et
familiale de l'étudiant.
Enfin, dans certains cas, les étudiants boursiers peuvent
bénéficier d'un
complément de bourse.
Ainsi, les étudiants retardant le début de leurs
études supérieures ou les interrompant sur un succès pour
accomplir leur service national peuvent, s'ils reprennent leurs études
l'année qui suit leur libération, bénéficier d'un
complément de bourse. Il en est de même pour les étudiants
boursiers, après une maternité, un séjour en cure ou
postcure ou qui, originaires de Corse poursuivent leurs études dans une
autre académie (taux annuel de 1.800 francs en 1997-1998).
Un complément de bourse est aussi accordé aux étudiants
dont la famille réside en Guyane et qui poursuivent leurs études
en Guadeloupe ou en Martinique et, inversement, aux étudiants dont la
famille réside en Guadeloupe ou Martinique et qui poursuivent leurs
études en Guyane (taux annuel de 4.014 francs en 1997-1998).
Les étudiants boursiers des académies de Créteil, Paris
et Versailles perçoivent un complément de bourse annuel de
1.008 francs (taux en 1997-1998) destiné à couvrir une
partie de leurs frais de transport.
b) Les bourses sur critères universitaires
Les bourses sur critères universitaires
sont
destinées aux étudiants du troisième cycle. Ces bourses,
dont un contingent annuel est attribué à chaque académie,
sont accordées par les recteurs sur proposition des présidents
d'université, en fonction de critères universitaires et sociaux.
Il existe quatre catégories de bourses sur critères
universitaires :
- les bourses de diplôme d'études approfondies (DEA) au taux de
18.936 francs ;
- les bourses de diplôme d'études supérieures
spécialisées (DESS) au taux de 20.718 francs ;
- les bourses d'agrégation, au taux de 20.718 francs ;
- et les bourses de service public au taux de 22.734 francs.
Pour compléter ce système de bourses, plus de 4.000 prêts
d'honneur sont attribués aux étudiants.
Depuis 1992, le nombre de boursiers a évolué comme suit :
2. Les aides indirectes
En complément de ces aides directes, l'accroissement
des capacités d'hébergement et de restauration se poursuit depuis
cinq ans, portant, pour l'année universitaire 1996-1997, à
150.000 le nombre d'étudiants logés en résidences
universitaires (ou foyers agréés) et à 181.000 le nombre
de places dans les restaurants universitaires (73 millions de repas servis).
Le potentiel d'accueil des étudiants en matière de
logement
est constitué :
- d'une part de logements traditionnels dont l'entretien et le fonctionnement
font l'objet d'une subvention de l'Etat (environ 98.500 chambres
classiques et près de 1.500 logements dans les foyers
agréés),
- d'autre part de studios et d'appartements nouvellement construits (en
application de la loi du 18 juillet 1985) et répondant aux normes
actuelles de confort.
L'équilibre financier de cette dernière catégorie de
logements, qui ouvrent droit à l'aide personnalisée au logement,
est assuré par les seules recettes provenant des étudiants.
La première colonne du tableau ci-après prend en compte la
totalité des logements offerts par les oeuvres universitaires, en
revanche la redevance et les coûts de fonctionnement sont ceux des seuls
logements traditionnels gérés par les CROUS. La diminution
régulière de leur nombre est due à la restructuration de
cités traditionnelles en logements répondant aux nouvelles normes
(surface, isolation thermique et phonique, équipements, sanitaires et
individuels).
|
|
|
Subvention hébergement et accueil chap. 46-11 |
Subvention par lit (base 9,5 mois) |
|
Coût de fonction-nement |
|
1990 |
119.690 |
108.603 |
191.085.825 F |
185,21 F |
548 F |
726,22 F |
187,15 F |
1991 |
121.444 |
107.566 |
191.085.825 F |
186,99 F |
564 F |
760,25 F |
183,18 F |
1992 |
127.246 |
105.503 |
203.582.825 F |
203,12 F |
586 F |
786,00 F |
190,80 F |
1993 |
136.932 |
105.136 |
210.085.825 F |
210,34 F |
604 F |
810,04 F |
203,17 F |
1994 |
143.034 |
104.285 |
214.458.133 F |
216,47 F |
622 F |
825,66 F |
215,86 F |
1995 |
146.712 F |
102.082 |
217.232.843 F |
223,09 F |
641 F |
860,90 F |
286,51 F |
1996 |
148.267 |
100.579 |
201.232.843 F |
209,73 F |
661 F |
878,12 F |
297,97 F |
1997(*) |
149.941 |
100.202 |
201.232.843 F |
210,77 F |
682 F |
895,68 F |
309,89 F |
1998(*) |
152.000 |
100.000 |
194.232.843 F |
204,46 F |
702 F |
904,64 F |
322,28 F |
(*) Evaluation au 01.08.97
Outre cette subvention attribuée au titre du fonctionnement des
résidences universitaires, il convient de souligner que 252 millions de
francs, affectés à la maintenance ainsi qu'au fonds de
contractualisation créé en 1996, sont consacrés pour leur
plus grande partie à la rénovation du patrimoine immobilier des
oeuvres universitaires (résidences et restaurants).
La restauration universitaire
est prise en charge par les CROUS. Elle
s'adresse à l'ensemble des étudiants.
Dans les restaurants universitaires
Depuis plusieurs années, la restauration étudiante a connu une
véritable révolution. Aujourd'hui presque tous les restaurants
offrent plusieurs formules de repas très diversifiées.
La formule "classique" reste la plus demandée. C'est le repas complet
(hors d'oeuvres, plat garni, fromage ou dessert) à prix fixe, contre un
ticket de restaurant universitaire. Elle est service en self-service, à
midi et le soir.
D'autres formules de repas construites "autour d'un plat", d'un
buffet salades,
d'une viande grillée; d'une assiette de pâtes fraîches ou
d'une pizza, souvent préparées devant le client, sont
également proposées. Le paiement s'effectue
généralement en numéraire.
Des unités de restauration légères fonctionnent
également tout au long de la journée en dehors des restaurants
universitaires, dans les résidences ou les universités :
cafétéria, brasserie, viennoiserie, sandwicherie, crêperie
ou vente à emporter.
Dans les restaurants agréés
Les CROUS ont recours à un réseau de près de 400
restaurants agréés. Ils sont le plus souvent implantés
dans des établissements d'enseignement secondaire et permettent aux
étudiants éloignés des restaurants universitaires de
bénéficier des mêmes avantages.
L'aide financière apportée par l'Etat correspond à une
participation aux frais engendrés par l'accueil de ces étudiants.
D'autres restaurants dépendant d'administration ou de
collectivités publiques, dont les conditions de fonctionnement
identiques aux restaurants universitaires, peuvent faire l'objet d'un
agrément par le CNOUS et bénéficier d'une aide.
La situation des restaurants universitaires depuis 1992 est retracée
dans le tableau ci-après :
|
|
|
Prix du ticket au 1er janvier |
1992 |
71.804.619 |
509.200.000 F |
11,50 F |
1993 |
72.490.933 |
527.200.000 F |
12,00 F |
1994 |
72.132.223 |
553.750.000 F |
12,30 F |
1995 |
67.990.715 |
567.020.000 F |
12,70 F |
1996 |
66.605.478 |
564.720.000 F |
13,20 F |
1997 |
66.750.000 |
564.720.000 F |
13,70 F |
1998 |
67.350.000 |
564.720.000 F |
14,10 F |
(*) pour 1997 et 1998, prévisions au 1er août 1997
3. La santé des étudiants
Le ministère de l'éducation nationale, de la
recherche et de la technologie s'efforce d'apporter des réponses aux
difficultés d'adaptation et de santé que les étudiants
peuvent rencontrer au cours de leur scolarité. A cet effet, les services
de médecine préventive et de promotion de la santé
(SMPPS)prennent une part de plus en plus active dans la réalisation de
campagnes de prévention et d'éducation sanitaire portant sur le
SIDA, les MST, le tabagisme et autres toxicomanies, la contraception,
l'information dans les domaines de la nutrition et de la
diététique.
Les stratégies de prévention induites par l'augmentation de la
demande sanitaire de la population étudiante semblent
caractérisées avant tout par le souci des services de
répondre aux besoins des étudiants les plus en difficulté
et qui ont par là même le plus de mal à accéder aux
prestations de santé.
4. L'accueil des étudiants handicapés
Une action de sensibilisation est entreprise auprès des établissements d'enseignement supérieur afin de favoriser l'accueil des étudiants handicapés. Ce travail se traduit par une augmentation très sensible du nombre d'étudiants handicapés recensés. Près de 4.900 étudiants handicapés ont suivi des études supérieures pendant l'année universitaire 1996-1997. Leur nombre a plus que doublé en six ans. Il reste vraisemblablement sous-estimé car un grand nombre d'entre eux ne se font pas connaître.
B. LE RAPPORT CIEUTAT A MIS EN EVIDENCE LE CARACTÈRE ANTIREDISTRIBUTIF DU SYSTEME ACTUEL
En janvier 1997, M. Bernard Cieutat, conseiller à la
Cour des Comptes, a rendu au ministre un rapport dressant un état
précis de l'effort de la nation en direction des étudiants.
Les aides attribuées par le ministère en charge de l'enseignement
supérieur (bourses diverses, prêts d'honneur, financement des
oeuvres universitaires, aides aux associations étudiantes, compensation
aux établissements de l'exonération des droits d'inscription
accordée aux boursiers) ne représentent que 35 % du total.
Les étudiants bénéficient d'aides directes
accordées par d'autres ministères. Ce sont principalement les
aides au logement qui dépendent respectivement du ministère du
logement et du ministère des affaires sociales et les aides fiscales du
ministère du budget (réduction d'impôt et majoration du
quotient familial).
Les prestations versées sous conditions de ressources (bourses, APL et
exonérations des droits d'inscription pour les boursiers) ne
représentent que 30 % de l'ensemble.
A l'inverse, les autres aides profitent soit à l'ensemble des
étudiants (ALS, oeuvres universitaires), soit aux foyers imposables et
donc davantage aux revenus élevés (aides fiscales).
Illustration de ce déséquilibre, l'étudiant issu d'une
famille déclarant plus d'un million de francs de revenus est davantage
aidé que celui d'une famille touchant le SMIC et près de deux
fois plus que celui d'une famille déclarant un salaire net de 140.000
francs.
C. LES SUITES DU RAPPORT
Lors de son discours de politique générale du 19
juin 1997, le Premier Ministre a annoncé la mise en place d'un plan
social étudiant dont l'objectif est de permettre à tous de
travailler dans des conditions matérielles convenables.
Le champ de ce plan social est très large puisqu'il couvre non seulement
les aides financières directes et indirectes mais aussi les
différents secteurs de la vie de l'étudiant : logement,
restauration, santé, citoyenneté, sport, culture...
Des discussions ont commencé avec les organisations étudiantes
représentatives, les mutuelles étudiantes, les présidents
d'universités, les syndicats, les parents d'élèves. Les
autres ministères concernés (économie, finances et
industrie, emploi et solidarité, défense, équipement,
transport et logement, agriculture et pêche) seront associés au
plan social étudiant.
Devant l'importance de la question des aides aux étudiants, le ministre
souhaite associer étroitement le Parlement à la discussion du
plan social étudiant.
Un projet de loi devrait être déposé sur ce sujet au
printemps 1998.