B. UNE DÉCONCENTRATION ACCRUE DES CRÉDITS D'INTERVENTION
Le budget du théâtre pour 1998 se
caractérise également par une plus grande déconcentration
des crédits. Une partie des crédits affectés au
théâtre dramatique et en particulier à certaines compagnies
dramatiques était d'ores et déjà
déconcentrée. Pour 1998, le pourcentage des crédits de la
direction du théâtre et des spectacles effectivement
déconcentrés devrait connaître une croissance sans
précédent en passant de 29 % à 47 %.
Cette évolution correspond à une réforme globale des
moyens d'intervention de l'Etat qui s'est en particulier traduite par
l'adoption du décret n° 97-34 du 15 janvier 1997 relatif
à la déconcentration des décisions administratives
individuelles. Ce décret prévoit qu'à partir du
1er janvier 1998, toutes les décisions individuelles relevant de
l'Etat seront prises par l'autorité déconcentrée
compétente. Cette déconcentration correspond, en outre, à
une volonté propre du ministère de la culture de
déléguer des tâches de gestion aux directions
régionales des affaires culturelles.
Sans nul doute, la proximité permet à certaines conditions une
meilleure administration. Les directions régionales des affaires
culturelles connaissent
a priori
mieux que l'administration centrale les
organismes subventionnés, leurs spécificités et leurs
besoins, car elles entretiennent avec eux des relations constantes. En outre,
dans le domaine du théâtre, les scènes nationales, les
centres dramatiques nationaux, comme les compagnies dramatiques font l'objet de
cofinancements de l'Etat et des collectivités locales. Dans ce cadre,
les services déconcentrés, sous l'autorité des
préfet de régions, sont
a priori
les mieux à
même de préparer en concertation avec les collectivités
locales, les contrats d'objectifs des organismes subventionnés.
L'expérience montre toutefois que la déconcentration ne contribue
à une meilleure gestion que si les services centraux changent
véritablement leur méthode de travail. La déconcentration
suppose, en particulier, la mise en place d'un réel pilotage des
politiques menées par les préfets de régions et les
directeurs régionaux des affaires culturelles. On imagine mal, en effet,
que la déconcentration des crédits se traduise par la mise en
oeuvre d'autant de politiques culturelles qu'il y a de directeurs
régionaux des affaires culturelles ou de préfets de
régions.
La mise en oeuvre de cette réforme devra donc être suivie avec
attention. Un décret relatif à la déconcentration des
crédits d'intervention du ministère de la culture, qui devrait
paraître avant la fin de l'année, permettra de savoir quel sera
l'étendue du pouvoir que conserveront les administrations centrales et
le ministre de la culture. On peut, en effet, se demander si ce dernier
conservera, par exemple, le pouvoir d'approuver les conventions d'objectifs
signées avec les scènes nationales et les contrats de
décentralisation relatifs aux centres dramatiques nationaux ?
Au-delà de ce cadre réglementaire, la réactivation des
conférences budgétaires entre les services centraux et les
services déconcentrés, l'élaboration des circulaires
d'emplois des crédits déconcentrés permettront de mesurer
la portée réelle de la déconcentration et la
qualité du dialogue entre les DRAC, les préfets de régions
et l'administration centrale du ministère de la culture.
Ce dialogue doit pouvoir se fonder sur un travail d'évaluation des
politiques menées. Une fois dégagée d'une partie des
tâches de gestion, la direction du théâtre et des spectacles
doit, en effet, pouvoir recentrer ses activités sur des missions de
conception et d'évaluation. Cela est d'autant plus une
nécessité que l'évaluation doit être la contrepartie
de la marge d'autonomie laissée aux DRAC.
Force est de reconnaître qu'en matière d'évaluation et
d'inspection le ministère de la culture ne dispose que de peu de moyens.
Certes, les travaux du services des études et prospectives du
ministère de la culture permettent aujourd'hui d'avoir une connaissance
générale des différents publics, des dépenses
culturelles des ménages et des collectivités locales. On reste
cependant très loin de pouvoir mesurer, au niveau d'une région,
les besoins des populations et l'impact des décisions prises. Les moyens
d'inspection du ministère de la culture sont également
très limités. On compte pour les domaines de la musique, de la
danse et du théâtre une vingtaine d'inspecteurs pour plus d'une
centaine de structures de diffusion et 600 compagnies subventionnées
pour le seul secteur du théâtre dramatique. Il serait donc
souhaitable que le ministère accompagne la déconcentration des
crédits par un renforcement des moyens d'inspection et
d'évaluation.
Le processus de déconcentration a également pour corollaire une
plus grande globalisation des crédits. Ainsi, cette année, le
ministère de la culture a-t-il procédé à une
simplification de sa nomenclature budgétaire en regroupant dans le
domaine du spectacle, d'une part, les interventions culturelles
d'intérêt national et, d'autre part, les interventions culturelles
déconcentrées. Ces regroupements donnent aux services une plus
grande souplesse dans la gestion de leurs crédits. Ils nuisent cependant
à la lisibilité et à la compréhension du budget
lors de son examen au Parlement. La globalisation des crédits ne permet
pas, en effet, au Parlement d'examiner les choix effectués entre
différents types d'action puisque ces choix seront opérés
après consultation des DRAC. Il y a là une évolution
préoccupante et un nouveau défi pour inventer des
procédures qui permettent d'approfondir la déconcentration sans
nuire à l'information ni au contrôle du Parlement.