CHAPITRE II
DISPOSITIONS RELATIVES AUX ASSOCIATIONS
D'AIDE AUX VICTIMES ET AUX CONSTITUTIONS
DE PARTIE CIVILE

SECTION 1
Dispositions relatives aux associations d'aide aux victimes

Article 28
(Article 41 du code de procédure pénale)
Recours par le procureur à des associations d'aide aux victimes

Comme l'indique l'exposé des motifs du projet de loi , " le rôle des associations d'aide aux victimes est devenu particulièrement important depuis quelques années " .

" Ces associations interviennent désormais, le plus souvent en liaison avec le ministère public, pour assister les victimes dans leurs démarches et pour leur apporter le soutien dont elles ont besoin. Leur action est parfois indispensable, lorsque surviennent des événements catastrophiques ou des attentats. Le législateur a d'ailleurs reconnu à plusieurs reprises le rôle privilégié de certaines associations d'aide aux victimes. Pour autant, aucune disposition du code de procédure pénale n'a encore consacré, de façon générale, l'existence de ces associations ".

L'article 28 du projet de loi a pour objet de consacrer l'existence des associations d'aide aux victimes dans l'article 41 du code de procédure pénale. L'article 41 concerne les prérogatives du procureur et prévoit notamment que le procureur " procède ou fait procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions à la loi pénale ". Le procureur a tous les pouvoirs et prérogatives attachés à la qualité d'officier de police judiciaire. Il peut requérir le comité de probation et d'assistance aux libérés, le service compétent de l'éducation surveillée ou toute personne habilitée à vérifier la situation matérielle, familiale et sociale d'une personne faisant l'objet d'une enquête et de l'informer sur les mesures propres à favoriser l'insertion sociale de l'intéressé.

Cet article serait complété pour prévoir que le procureur de la République peut recourir à une association d'aide aux victimes ayant fait l'objet d'un conventionnement de la part des chefs de la cour d'appel, afin qu'il soit porté aide et assistance à la victime de l'infraction.

Cette disposition peut effectivement présenter une utilité, dans la mesure où certaines victimes, totalement désespérées, ne prennent pas l'initiative de recourir aux associations d'aides aux victimes, alors que celles-ci peuvent leur apporter un soutien précieux.

Depuis un décret du 15 janvier 1997 portant déconcentration des décisions administratives et individuelles, les associations d'aide aux victimes ne sont plus agréées au niveau national par le garde des sceaux, mais font l'objet d'un conventionnement au niveau local par les chefs de cour d'appel.

Le conventionnement, selon l'exposé des motifs, du projet de loi, " constitue une garantie de la qualité des services offerts par les associations et du respect par leurs membres de règles déontologiques, en raison notamment de leur affiliation à l'INAVEM (Institut National d'Aide aux Victimes et de la Médiation) qui propose des actes de soutien et de formation. Ce conventionnement permet également l'attribution de subventions ".

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 28 bis
Conventionnement de droit pour les associations
d'aide aux victimes reconnues d'utilité publique

L'Assemblée nationale a souhaité compléter les dispositions inscrites à l'article 28 du projet de loi en prévoyant que le conventionnement est de droit pour les associations d'aide aux victimes reconnues d'utilité publique.

Le conventionnement a pour objet de garantir la qualité des services offerts par les associations en imposant à celles-ci le respect de quelques conditions. Il est possible d'estimer que les associations reconnues d'utilité publique présentent des garanties suffisantes pour que le conventionnement leur soit accordé de droit.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 28 ter
(Articles 53-1 nouveau et 75 du code de procédure pénale)
Information des victimes par les officiers
et agents de police judiciaire

Le rapport présenté en mars dernier par le groupe interministériel d'aide aux victimes, présidé par Mme Marie-Noelle Liennemann met en particulier l'accent sur la nécessité de développer l'information de la victime à tous les stades d'une procédure pénale .

Les auteurs du rapport ont ainsi présenté une proposition prévoyant qu' " après avoir formellement recueilli l'accord des victimes, la police et la gendarmerie devront systématiquement communiquer leurs coordonnées à l'association d'aide aux victimes la plus proche de leur domicile. Cette dernière contactera les victimes pour leur indiquer les services offerts et leur apporter une information exhaustive sur les droits et la procédure.

" Le formulaire d'information sur les services d'aide aux victimes sera remis aux personnes qui ne souhaitent pas, dans l'immédiat, être contactées directement par ce service ".


L'article 28 ter tend à traduire cette proposition dans le code de procédure pénale, en prévoyant toutefois des formalités moins contraignantes.

Ainsi, en cours d'enquête de flagrance ou d'enquête préliminaire, les officiers et agents de police judiciaire devraient informer les victimes de leur droit d'obtenir réparation du préjudice subi et d'être aidées et assistées par un service ou une association d'aide aux victimes.

Actuellement, il semble que les organismes d'aide aux victimes prennent, pour l'essentiel, la forme associative, même s'il existe également, dans certaines communes, des services municipaux d'aide aux victimes.

Une telle proposition peut faciliter l'exercice de leurs droits par les victimes sans représenter une contrainte insurmontable pour les officiers et les agents de police judiciaire.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 28 quater
(Article 2-17 nouveau du code de procédure pénale)
Exercice des droits reconnus à la partie civile
par les associations de lutte contre les sectes

Un grand nombre d'associations peuvent aujourd'hui exercer les droits reconnus à la partie civile pour certaines infractions en rapport avec leur objet statutaire. Les droits reconnus à la partie civile peuvent ainsi être exercés par les associations de lutte contre le racisme, par les associations de lutte contre les violences sexuelles, par les associations de défense de l'enfance, par les associations d'aide aux personnes malades ou handicapées...

En règle générale, pour pouvoir exercer cette possibilité, l'association doit être régulièrement déclarée depuis au moins cinq ans. Dans un grand nombre de cas, l'association n'est recevable dans son action que si elle justifie avoir reçu l'accord de la victime. Les dispositions relatives à la possibilité pour les associations d'exercer les droits reconnus à la partie civile font actuellement l'objet des articles 2-1 à 2-16 du code de procédure pénale.

L'article 28 quater du projet, adopté à l'initiative de l'Assemblée nationale tend à étendre la possibilité d'exercer les droits reconnus à la partie civile aux associations se proposant par leurs statuts de " défendre et d'assister l'individu ou de défendre les droits et libertés individuels et collectifs ". Ces associations pourraient exercer les droits reconnus à la partie civile " à l'occasion d'actes commis par toute personne physique ou morale, dans le cadre d'un mouvement ou organisation ayant pour but ou pour effet de créer ou d'exploiter une dépendance psychologique ou physique, dès lors que ces actes portent atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales ".

Il s'agit en pratique de permettre aux associations de lutte contre les phénomènes sectaires d'exercer les droits reconnus à la partie civile, afin de renforcer leurs moyens de défendre les personnes victimes des sectes.

La constitution de partie civile serait possible pour un grand nombre d'infractions, parmi lesquelles les tortures, les violences, les menaces, les agressions sexuelles, les enlèvements et séquestrations, le proxénétisme, le vol, l'extorsion, l'escroquerie...

Votre commission partage pleinement l'objectif poursuivi par cet article et estime indispensable le renforcement de l'efficacité de la lutte contre les sectes. En novembre 1998, notre collègue M. Nicolas About a redéposé une proposition de loi (n° 79, 1998-1999) contenant plusieurs dispositions destinées à renforcer les moyens de lutter contre les associations ou groupements à caractère sectaire. Notre collègue proposait notamment de permettre aux associations se proposant, par leurs statuts, de défendre l'individu et la famille contre les dérives sectaires de certaines associations ou groupements de fait et d'exercer les droits reconnus à la partie civile.

Il conviendra vraisemblablement dans un proche avenir d'examiner de manière approfondie la question de l'exercice par les associations des droits reconnus à la partie civile. Il paraît difficile de continuer à allonger la liste des associations pouvant se constituer partie civile sans réfléchir à la possibilité de dispositions plus synthétiques.

Dans un récent rapport préparé au nom de l'office d'évaluation de la législation, M. Pierre Albertini, député, a dressé un bilan très complet de cette question et formulé quelques propositions qui mériteront d'être examinées avec le plus grand soin.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

SECTION 2
Dispositions relatives aux constitutions de partie civile

Article 29 A
(Article 80-2 rétabli du code de procédure pénale)
Information de la victime par le juge d'instruction

Cet article, inséré dans le projet de loi par l'Assemblée nationale, a pour objet de rétablir l'article 80-2 du code de procédure pénale, afin d'obliger le juge d'instruction, dès le début d'une information, à avertir la victime d'une infraction prévue par le livre II du code pénal de l'ouverture d'une procédure, de son droit de se constituer partie civile et des modalités d'exercice de ce droit. En présence d'une victime mineure, l'avis serait donné à ses représentants légaux.

Actuellement, le procureur de la République doit assurer " le plaignant du classement de l'affaire ainsi que la victime lorsque celle-ci est identifiée " (article 40 du code de procédure pénale). En revanche, aucune information particulière de la victime n'est prévue en cas d'ouverture d'une information. Dans la plupart des cas, le juge d'instruction est conduit à entrer en contact avec la victime au cours de l'instruction, mais tel n'est pas toujours le cas. Certaines victimes peuvent avoir intérêt à se constituer partie civile au stade de l'information plutôt que d'attendre l'audience.

L'objectif de cet article est donc louable. Toutefois, il est particulièrement choquant de réserver les informations prévues aux victimes d'infractions mentionnées au livre II du code pénal. Cela conduirait à exclure l'ensemble des victimes d'infractions contre les biens ainsi que les victimes d'infractions contre l'Etat, la nation ou la paix publique.

Souhaitant que le principe d'égalité devant la justice soit pleinement respecté, votre commission vous propose, par un amendement de prévoir que toutes les victimes doivent recevoir les informations prévues par cet article en cas d'ouverture d'une information.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article additionnel après l'article 29 A
(Article 344 et 407 du code de procédure pénale)
Droit de la partie civile à un interprète

Actuellement, le code de procédure pénale prévoit qu'au cours des audiences criminelles ou correctionnelles, les témoins, l'accusé ou le prévenu qui ne parlent pas suffisamment la langue française bénéficient, sur désignation d'office par le président, de l'assistance d'un interprète.

Votre commission propose, conformément à une suggestion du groupe interministériel d'aide aux victimes présidé par Mme Marie-Noëlle Lienemann, que ce droit soit également reconnu à la partie civile.

Article 29
(Article 420-1 du code de procédure pénale)
Modalités de constitution de partie civile

L'article 418 du code de procédure pénale prévoit que toute personne qui prétend avoir été lésée par un délit peut se constituer partie civile à l'audience, si elle ne l'a déjà fait. L'article 419 dispose que la déclaration de constitution de partie civile se fait soit avant l'audience au greffe, soit pendant l'audience par déclaration consignée par le greffier ou par dépôt de conclusions.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 420-1 du code de procédure pénale permet à une personne qui se prétend lésée de se constituer partie civile directement ou par son avocat, par lettre recommandée avec avis de réception parvenue au tribunal 24 heures au moins avant la date de l'audience, lorsqu'elle demande soit la restitution d'objets saisis, soit des dommages-intérêts dont le montant n'excède pas le plafond de la compétence de droit commun des tribunaux d'instance en matière civile, soit 30.000 F (article R. 321-1 du code de l'organisation judiciaire). Dans un tel cas, la personne n'est pas tenue de comparaître.

L'article 29 du projet tend à simplifier les modalités de constitution de partie civile. La déclaration de constitution de partie civile pourrait désormais être faite par télécopie et non plus seulement par lettre recommandée.

Par ailleurs, le seuil maximal de dommages-intérêts au dessus duquel la constitution de partie civile par lettre recommandée n'est pas possible serait supprimé. Ainsi, la victime pourrait se constituer partie civile par lettre recommandée ou par télécopie, quel que soit le montant des dommages-intérêts demandés. Comme l'indique l'étude d'impact jointe au projet de loi " l'existence même d'un seuil n'est pas cohérente. Ou la demande d'indemnité est justifiée, et le tribunal répressif doit y faire droit, ou elle ne l'est pas et la partie civile doit être déboutée. Mais, il n'y a pas de raison que la gravité du dommage oblige la victime à se déplacer, un tel déplacement pouvant précisément être impossible si la victime est immobilisée en raison de la gravité de l'infraction qu'elle a subie ".

Par ailleurs, cet article tend également à permettre à une personne de demander des dommages-intérêts ou la restitution d'objets par déclaration devant un officier ou un agent de police judiciaire au cours de l'enquête de police. Cette demande vaudrait constitution de partie civile si l'action publique était mise en mouvement.

Il semble que cette possibilité soit déjà reconnue par certaines juridictions ; elle paraît adaptée au développement du traitement " en temps réel " des procédures. En revanche, votre commission propose, par un amendement , d'exclure que la demande de dommages-intérêts devant un officier de police judiciaire puisse, à elle seule, valoir constitution de partie civile en cas d'ouverture d'une information.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 30
(Article 464 du code de procédure pénale)
Renvoi de la décision sur l'action civile à une audience ultérieure

Dans sa rédaction actuelle, l'article 464 du code de procédure pénale prévoit que le tribunal prononce une peine s'il estime que le fait constitue un délit. Il statue, s'il y a lieu, sur l'action civile, et peut ordonner le versement provisoire, en tout ou en partie, des dommages-intérêts alloués.

A propos de cet article, une jurisprudence relativement complexe s'est développée. Considérant que le jugement de l'action civile était l'accessoire du jugement de l'action publique, la Cour de cassation a estimé que le tribunal correctionnel était tenu de statuer par le même jugement sur les deux actions (Cass. Crim, 26 mars 1963).

La Cour de cassation a cependant estimé que certaines circonstances pouvaient justifier le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure sur les seuls intérêts civils. Il en est ainsi si les juges ne peuvent se prononcer sur une demande de dommages-intérêts car des éléments nouveaux sont apparus au cours des débats et ont mis la partie civile dans l'obligation d'accomplir certaines formalités. Dans de tels cas, le tribunal doit renvoyer l'affaire à une date déterminée. Ainsi, la Cour de cassation a refusé d'admettre l'ajournement sine die de la décision dans l'attente des résultats d'une expertise.

En ce qui concerne les hypothèses dans lesquelles l'importance du dommage est susceptible de varier après le prononcé de jugement, la jurisprudence considère que le tribunal doit statuer immédiatement sur la partie des dommages dont il constate dès à présent la réalité au vu des éléments du dossier. En revanche, le tribunal peut surseoir à statuer sur l'évaluation du préjudice et ordonner des mesures d'instruction complémentaires (Cass. crim., 23 novembre 1976).

L'article 30 du projet doit permettre de clarifier la situation en cette matière. Il tend en effet à insérer un nouvel alinéa dans l'article 464 du code de procédure pénale pour prévoir que le tribunal peut, après avoir statué sur l'action publique, renvoyer l'affaire à une date ultérieure pour statuer sur l'action civile d'office ou à la demande du procureur de la République ou des parties. Le tribunal pourrait renvoyer la décision, même s'il n'ordonnait pas de mesures d'instruction, afin de permettre à la partie civile d'apporter les justificatifs de ses demandes. Le texte prévoit en outre que le renvoi est de droit si les parties civiles le demandent et que le tribunal doit fixer la date de l'audience à laquelle il sera statué sur l'action civile.

Il s'agit d'une clarification heureuse qui ne peut qu'être bénéfique pour les victimes d'infractions pénales. Votre commission propose simplement, par un amendement , que la présence du ministère public à l'audience sur l'action civile ne soit pas obligatoire, le tribunal ayant déjà statué sur l'action publique.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 31
(Article 618-1 nouveau du code de procédure pénale)
Remboursement des frais irrépétibles

L'article 475-1 du code de procédure pénale permet au tribunal correctionnel de condamner l'auteur d'une infraction à payer à la partie civile la somme qu'il détermine, au titre des frais non payés par l'Etat et exposés par celle-ci.

Cette disposition est l'équivalent en procédure pénale de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, qui prévoit que " le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ". L'article 629 du même code permet explicitement l'application de cet article par les chambres civiles de la Cour de cassation.

La chambre criminelle de la Cour de cassation a pour sa part refusé d'appliquer l'article 475-1 du code de procédure pénale au pourvoi en cassation en matière pénale (Cass, crim. 3 mars 1993). La chambre criminelle a en effet estimé que " les dispositions de ce texte -comprises dans le livre deuxième du code de procédure pénale gouvernant la procédure suivie devant les juridictions du fond- ne sauraient s'appliquer lors d'un pourvoi en cassation, voie de recours extraordinaire dont la procédure est réglée au livre troisième du même code et dans lequel il n'est fait aucun renvoi audit article 475-1 ".

L'article 31 du projet de loi tend donc à créer, parmi les dispositions du code de procédure pénale relatives au pourvoi en cassation, un article 618-1 précisant que les dispositions de l'article 475-1 sont applicables devant la Cour de cassation. Votre commission approuve pleinement cette évolution et a adopté un amendement tendant à permettre le remboursement des frais irrépétibles en cas de pourvoi en cassation en matière criminelle.

Votre commission des Lois vous propose d'adopter cet article ainsi modifié .

Article 31 bis
(Article 15-2 nouveau du code de procédure pénale)
" Guichet unique " en matière de dépôt de plainte

Cet article tend à insérer dans le code de procédure pénale un article 15-2 pour prévoir que la police judiciaire est tenue de recevoir les plaintes déposées par les victimes d'infractions à la loi pénale et de les transmettre, le cas échéant, au service ou à l'unité de police judiciaire territorialement compétent.

D'ores et déjà, l'article 17 du code de procédure pénale prévoit que les officiers de police judiciaire " regroupent les plaintes et dénonciations ".

Toutefois, le rapport du groupe interministériel d'aide aux victimes note qu'" on observe les mêmes carences concernant les critères de compétences territoriales relatives à la réception des plaintes. Même si des efforts ont été réalisés, trop de victimes se plaignent encore d'être renvoyées d'un service à l'autre sans parvenir à se faire entendre ".

Le groupe a donc proposé d'inscrire dans le code de procédure pénale que " toute personne victime d'une infraction pénale peut déposer plainte en tout lieu du territoire, à charge pour le service qui la reçoit de transmettre la procédure aux autorités compétentes ".

L'article 31 bis tend à traduire cette proposition en instaurant en quelque sorte le principe du " guichet unique " en matière de dépôt de plainte. Il s'agit d'une mesure particulièrement bienvenue, qui devrait considérablement simplifier les démarches des victimes et mérite de ce fait d'être approuvée.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 31 ter
(Article 138 du code de procédure pénale)
Contrôle judiciaire des avocats

L'article 138 du code de procédure pénale concerne les mesures que le juge d'instruction peut ordonner dans le cadre d'un contrôle judiciaire. Le juge peut notamment imposer à la personne concernée de " ne pas se livrer à certaines activités de nature professionnelle ou sociale, à l'exclusion de l'exercice des mandats électifs et des responsabilités syndicales, lorsque l'infraction a été commise dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ces activités et lorsqu'il est à redouter qu'une nouvelle infraction soit commise ".

Le législateur, à l'initiative de M. Michel Pezet, rapporteur de la commission des Lois de l'Assemblée nationale sur le projet de loi qui a donné naissance à la loi du 4 janvier 1993, a complété cette disposition pour prévoir que " lorsque l'activité concernée est celle d'un avocat, le juge d'instruction doit saisir le conseil de l'ordre qui statue comme il est dit à l'article 23 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques ".

L'intention de M. Michel Pezet, en présentant cet amendement, était claire : " Des juges d'instruction peuvent être conduits à instruire contre un avocat et prononcer immédiatement, comme c'est leur droit, une interdiction d'activité professionnelle, au titre des peines accessoires. Les répercussions d'une telle interdiction sont considérables, tant à l'égard des règles régissant les rapports de l'avocat avec son client, qu'à l'égard de l'avocat lui-même en tant qu'auxiliaire de justice ou des rapports entre l'avocat avec ses propres collègues.

" Si un juge d'instruction estime qu'un avocat peut être effectivement suspendu de son activité professionnelle, il doit au préalable saisir le conseil de l'ordre qui statue conformément à la loi
".

Le Gouvernement s'est vivement opposé, par la voie de M. Michel Vauzelle, à cet amendement en observant qu'il " aurait pour effet de subordonner l'application d'une règle générale de procédure pénale à la décision d'une instance disciplinaire professionnelle, ce qui n'est pas acceptable ". Au Sénat, l'article concerné a été adopté sans débat.

La Cour de cassation n'a pas retenu l'interprétation faite par l'auteur de l'amendement de cet article.

A plusieurs reprises en effet, elle a considéré que l'article 138-12 n'avait pas pour effet de retirer au juge d'instruction le pouvoir d'interdire à un avocat d'exercer sa profession. Dans un arrêt du 30 juin 1993, la chambre criminelle a estimé que " la décision du juge d'instruction ne saurait être subordonnée à celle d'une instance disciplinaire professionnelle ".

Plus récemment, dans un arrêt du 22 octobre 1997, la chambre criminelle a fait valoir que " la décision du juge d'instruction, dont l'autonomie dans la conduite de l'information est affirmée par l'article 81, 1 er alinéa du même code, ne saurait être subordonnée à celle d'une instance disciplinaire professionnelle ".

L'article 31 ter, adopté par l'Assemblée nationale contre l'avis du gouvernement, tend donc à préciser explicitement dans l'article 138 du code de procédure pénale que seul le Conseil de l'ordre est habilité à statuer en ce qui concerne l'interdiction pour un avocat d'exercer sa profession.

De fait, il ne paraît pas illogique d'accorder une protection particulière à l'avocat, compte tenu du rôle qu'il joue dans la procédure pénale, d'autant que toutes les autres mesures du contrôle judiciaire peuvent lui être appliquées et qu'il peut être mis en détention provisoire.

L'Assemblée nationale ayant intégré cette disposition parmi celles relatives aux victimes, votre commission vous propose, par un amendement , de l'insérer parmi les dispositions finales du projet de loi dans un article additionnel après l'article 33.

En conséquence, votre commission vous propose de supprimer l'article 31 ter.

Article 31 quater
(Article 399-1 nouveau du code de procédure pénale)
Information de la victime sur la date de l'audience

L'article 399 du code de procédure pénale définit les modalités d'application de la procédure de comparution immédiate, qui permet au procureur, lorsqu'il estime qu'une information n'est pas nécessaire, d'inviter la personne déférée à comparaître devant le tribunal dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours, sauf renonciation expresse de l'intéressé en présence de son avocat, ni supérieur à deux mois.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement tendant à insérer un article 393-1 dans le code de procédure pénale, afin de prévoir, en cas de comparution immédiate, une information par tout moyen de la victime en ce qui concerne la date de l'audience.

Actuellement, l'article 391 du code de procédure pénale prévoit que " toute personne ayant porté plainte est avisée par le parquet de la date de l'audience ". En cas de comparution immédiate, l'audience peut avoir lieu alors même que la victime n'a pas porté plainte, de sorte qu'il n'est pas inutile de prévoir une disposition particulière afin qu'elle soit informée.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 31 quinquies
(Article 800-2 nouveau du code de procédure pénale)
Indemnisation des personnes bénéficiant d'un non-lieu,
d'une relaxe ou d'un acquittement

Cet article a pour objet d'insérer un article 800-2 dans le code de procédure pénale, afin de permettre à toute juridiction prononçant un non-lieu, une relaxe ou un acquittement d'accorder à la personne poursuivie une indemnité qu'elle détermine au titre des frais non payés par l'Etat et exposés par celle-ci. L'indemnité serait à la charge de l'Etat, mais pourrait être mise à la charge de la partie civile en cas de mise en mouvement de l'action publique par cette dernière.

Il s'agit d'une innovation importante. En effet, il paraît particulièrement choquant qu'une personne injustement mise en cause dans une procédure pénale doive supporter des frais qui, dans certains cas, peuvent s'avérer très lourds.

Le décret prévu dans cet article devra définir la procédure à suivre pour obtenir l'indemnité. La demande devra-t-elle être faite avant le prononcé du non-lieu, de la relaxe ou de l'acquittement ? ou bien sera-t-il possible de la formuler après la décision de la juridiction ?

Votre commission approuve pleinement l'objectif poursuivi par cet article. Toutefois, une telle disposition ne paraît guère devoir figurer dans la partie du projet de loi relative aux victimes, mais dans celle concernant la présomption d'innocence.

Votre commission vous propose donc, par un amendement , d'inscrire cette disposition avant l'article 22 du projet et vous propose en conséquence la suppression de l'article 31 quinquies.

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