Projet de loi, relatif à la réduction négociée du temps de travail
SOUVET (Louis)
RAPPORT 30 (1999-2000) - Commission des Affaires sociales
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Table des matières
-
TRAVAUX DE LA COMMISSION
- I. AUDITION DE MME MARTINE AUBRY, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ
-
II. AUDITIONS DU MERCREDI 29 SEPTEMBRE 1999
- A. AUDITION DE M. ADRIEN BEDOSSA, VICE-PRÉSIDENT DE L'UNION NATIONALE DES PROFESSIONS LIBÉRALES (UNAPL)
- B. AUDITION DE M. MICHEL COQUILLON, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT DE LA CONFÉDÉRATION FRANÇAISE DES TRAVAILLEURS CHRÉTIENS (CFTC)
- C. AUDITION DE M. ARNOLD BRUM, CHEF DU SERVICE DES AFFAIRES SOCIALES DE LA FÉDÉRATION NATINALE DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES (FNSEA)
-
III. AUDITIONS DU MARDI 5 OCTOBRE 1999
- A. AUDITION DE M. GEORGES RIFFARD, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA FÉDÉRATION DES ÉTABLISSEMENTS HOSPITALIERS DE L'ASSISTANCE PRIVÉE (FEHAP)
- B. AUDITION DE M. MICHEL JALMAIN, SECRÉTAIRE NATIONAL DE LA CONFÉDÉRATION FRANÇAISE DÉMOCRATIQUE DU TRAVAIL (CFDT)
- C. AUDITION DE MME MICHELLE BIAGGI, SECRÉTAIRE CONFÉDÉRAL DE LA CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DU TRAVAIL-FORCE OUVRIÈRE (CGT-FO), ACCOMPAGNÉE DE M. JEAN-CLAUDE MAILLY, ASSISTANT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
-
IV. AUDITIONS DU MERCREDI 6 OCTOBRE 1999
- A. AUDITION DE MME MARYSE DUMAS, SECRÉTAIRE CONFÉDÉRALE DE LA CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DU TRAVAIL (CGT) DE M. ROLAND METZ, ANIMATEUR DU SECTEUR GARANTIES COLLECTIVES, ET DE M. MICHEL DONEDDU, SECRÉTAIRE NATIONAL DE L'UNION GÉNÉRALE DES INGÉNIEURS, CADRES ET TECHNICIENS DE LA CGT (UGICT-CGT)
- B. AUDITION DE M. JEAN DELMAS, PRÉSIDENT DE L'UNION PROFESSIONNELLE ARTISANALE (UPA)
- C. AUDITION DE M. DENIS KESSLER, VICE-PRÉSIDENT DU MOUVEMENT DES ENTREPRISES DE FRANCE (MEDEF) ET DE M. BERNARD BOISSON, DIRECTEUR DES AFFAIRES SOCIALES
- D. AUDITION DE M. JEAN-FRANÇOIS VEYSSET, MEMBRE DU BUREAU ET PRÉSIDENT DE LA COMMISSION SOCIALE DE LA CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES (CGPME) ET DE M. GEORGES TISSIÉ, DIRECTEUR DES AFFAIRES SOCIALES
-
V. AUDITIONS DU MARDI 12 OCTOBRE 1999
- A. AUDITION DE M. JEAN-MARC ICARD, SECRÉTAIRE NATIONAL CHARGÉ DE L'EMPLOI À LA CONFÉDÉRATION FRANÇAISE DE L'ENCADREMENT-CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DES CADRES (CFE-CGC)
- B. AUDITION DE M. DENIS GAUTIER-SAUVAGNAC, PRÉSIDENT DE L'UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE (UNEDIC), ACCOMPAGNÉ DE M. DOMINIQUE CHERTIER, DIRECTEUR GÉNÉRAL
- C. AUDITION DE M. EMILE ZUCCARELLI, MINISTRE DE LA FONCTION PUBLIQUE, DE LA RÉFORME DE L'ETAT ET DE LA DÉCENTRALISATION
- VI. EXAMEN DU RAPPORT
-
AVANT-PROPOS
- I. LES FRANÇAIS CONTINUENT À DOUTER DU BIEN-FONDÉ DES 35 HEURES
-
II. LES PARTENAIRES SOCIAUX ET LE GOUVERNEMENT NE
S'ACCORDENT PAS SUR LE BILAN DE LA PREMIÈRE LOI
- A. LE PREMIER MINISTRE CONSIDÈRE QUE " L'ENGAGEMENT PRIS SERA TENU "22 Intervention de M. Lionel Jospin, Premier ministre, aux journées parlementaires du groupe socialiste, Strasbourg, 27 septembre 1999.
-
B. LES ORGANISATIONS D'EMPLOYEURS DÉNONCENT LE
BILAN DE LA LOI DU 13 JUIN 1998 DE MANIÈRE UNANIME
- 1. Le MEDEF reste résolument opposé à la loi du 13 juin 1998
- 2. La CGPME et le CJD mettent en avant les difficultés rencontrées par les PME pour s'adapter à cette loi
- 3. L'UPA et le SDI considèrent que la loi du 13 juin 1998 n'encourage pas l'emploi dans les très petites entreprises
- 4. La FNSEA considère que les modalités d'application des 35 heures sont peu adaptées au monde agricole
-
C. LES SYNDICATS DE SALARIÉS SONT DIVISÉS
SUR LE BILAN DES 35 HEURES ET DUBITATIFS QUANT AUX OBJECTIFS RÉELS
DU SECOND PROJET DE LOI
- 1. La CFDT est globalement favorable à la loi du 13 juin 1998 mais émet des réserves substantielles sur le nouveau texte
- 2. La CGT dénonce une " remise en cause des acquis sociaux "
- 3. FO considère que le bilan de la loi n'est " pas fameux "
- 4. La CFTC craint que ce projet de loi remette en cause son existence
- 5. La CGC-CFE estime que le projet de loi rétablit " le servage des cadres "
-
III. LE GOUVERNEMENT PROCÈDE À UN AMALGAME
ENTRE LES EMPLOIS CRÉÉS PAR LA CROISSANCE ET LES RÉSULTATS
DES 35 HEURES
- A. COMME PRÉVU, LES " 35 HEURES " SE METTENT EN PLACE SANS BEAUCOUP D'EMBAUCHES5555 " Les 35 heures se mettent en place sans beaucoup d'embauche ", article de M. Alain Faujas, in " Le Monde " du 21 septembre 1999.
- B. DEPUIS DEUX ANS LA FRANCE FAIT MOINS BIEN QUE SES PARTENAIRES EUROPÉENS EN TERMES DE CRÉATION D'EMPLOIS
-
IV. LES 35 HEURES ONT ROUVERT L'ÉPINEUX
DÉBAT SUR LA REPRÉSENTATIVITÉ DES SYNDICATS
- A. LA MULTIPLICATION DES ACCORDS " DONNANT-DONNANT " DANS LE CADRE DES 35 HEURES POSE LE PROBLÈME DE LA REPRÉSENTATIVITÉ DES SIGNATAIRES
- B. LES PARTENAIRES SOCIAUX SONT MAJORITAIREMENT OPPOSÉS AU RECOURS AU RÉFÉRENDUM
- C. LES PARTENAIRES SOCIAUX DEMANDENT LA VALIDATION LÉGISLATIVE DE LA RECONDUCTION DU MANDATEMENT PRÉVU PAR L'ACCORD DE 1995
-
V. LES ACCORDS CONCLUS ENTRE LES PARTENAIRES SOCIAUX SONT
REMIS EN CAUSE PAR LE GOUVERNEMENT
- A. LA LOI DU 13 JUIN 1998 A MODIFIÉ UNE RÉGLEMENTATION DÉJÀ ABONDANTE ET COMPLEXE SUR LE TEMPS DE TRAVAIL
- B. LA MISE EN OEUVRE DE LA LOI DU 13 JUIN 1998 ET LA PRÉPARATION DE LA SECONDE LOI ONT JETÉ LE DOUTE SUR LA VALIDITÉ DE CERTAINS ACCORDS COLLECTIFS ET INDIVIDUELS
-
VI. LES 35 HEURES DANS LA FONCTION PUBLIQUE SE HEURTENT
AUX QUESTIONS DE LA FLEXIBILITÉ ET DE L'EMPLOI
-
A. " L'AMÉNAGEMENT ET LA RÉDUCTION DU
TEMPS DE TRAVAIL (...) DOIVENT ÊTRE SAISIS COMME UNE OPPORTUNITÉ
D'AMÉLIORER L'EFFICACITÉ DU SERVICE PUBLIC "133133 Le temps
de travail dans les trois fonctions publiques, rapport au ministre de la
fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation, M. Jacques Roché, rapporteur, la documentation
française, collection des rapports officiels, février 1999, p.
99.
-
1. Les cinq constats du rapport Roché
- a) Une réglementation inadaptée à la fois rigide, incomplète et complexe.
- b) Une mesure hebdomadaire de la durée du travail qui n'est plus pertinente
- c) Une absence d'instrument de mesure uniforme
- d) Des aménagements du temps de travail réalisés au détriment des usagers du service public
- e) Une absence de réflexion globale sur l'organisation du travail
- 2. Le rapport Roché prône des modifications de la réglementation et une large concertation à l'occasion de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail
-
1. Les cinq constats du rapport Roché
- B. LE GOUVERNEMENT EST INCAPABLE D'ESTIMER LES COÛTS GÉNÉRÉS PAR LE PASSAGE AUX 35 HEURES DANS LES FONCTIONS PUBLIQUES
-
A. " L'AMÉNAGEMENT ET LA RÉDUCTION DU
TEMPS DE TRAVAIL (...) DOIVENT ÊTRE SAISIS COMME UNE OPPORTUNITÉ
D'AMÉLIORER L'EFFICACITÉ DU SERVICE PUBLIC "133133 Le temps
de travail dans les trois fonctions publiques, rapport au ministre de la
fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la
décentralisation, M. Jacques Roché, rapporteur, la documentation
française, collection des rapports officiels, février 1999, p.
99.
- VII. LES 35 HEURES SÈMENT LE TROUBLE DANS LE SECTEUR MÉDICAL ET SOCIAL
-
VIII. UN PROJET DE LOI AU CARACTÈRE
IDÉOLOGIQUE EXACERBÉ QUI RENONCE À PRIVILÉGIER
L'EMPLOI
- A. LE SÉNAT, LORS DE LA DISCUSSION DE LA PREMIÈRE LOI " AUBRY ", S'ÉTAIT MONTRÉ FAVORABLE À UN DISPOSITIF SOUPLE ET NÉGOCIÉ DE RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL
- B. LE PROJET DE LOI PRIVILÉGIE LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL À LA CRÉATION D'EMPLOIS
- C. LES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ONT RENFORCÉ LE CARACTÈRE IDÉOLOGIQUE DU PROJET DE LOI
-
REGIME DES HEURES SUPPLEMENTAIRES
-
I. UN PROJET DE LOI NON FINANCÉ
- A. LES ALLÉGEMENTS DE CHARGES SUR LES BAS SALAIRES ÉTAIENT CRITIQUÉS PAR LE GOUVERNEMENT
- B. LE GOUVERNEMENT A CHOISI DE RECOURIR AUX ALLÉGEMENTS DE CHARGES POUR " SAUVER " LES 35 HEURES
- C. LE FONDS DE FINANCEMENT DE LA RÉFORME DES COTISATIONS PATRONALES : UN DISPOSITIF COMPROMIS
-
II. LES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION
- 1. Supprimer les dispositions relatives à l'abaissement de la durée légale du travail
- 2. Corriger les dispositions adoptées à l'Assemblée nationale qui durcissent le texte
- 3. Privilégier le recours à la négociation collective pour les dispositions non liées à l'abaissement de la durée légale du travail
- 4. Développer la négociation collective et garantir l'application des accords
-
I. UN PROJET DE LOI NON FINANCÉ
- EXAMEN DES ARTICLES
-
CHAPITRE PREMIER
-
Durée légale du travail et régime des heures supplémentaires -
CHAPITRE II
-
Répartition et aménagement du temps de travail -
CHAPITRE III
-
Dispositions relatives aux cadres -
CHAPITRE IV
-
Travail à temps partiel et contrat intermittent -
CHAPITRE V
-
Dispositions relatives aux congés -
CHAPITRE VI
-
Compte épargne-temps -
CHAPITRE VII
--
Formation et réduction du temps de travail -
CHAPITRE VIII
-
Développement de la négociation des allégements de cotisations sociales -
CHAPITRE IX
-
Sécurisation juridique -
CHAPITRE X
-
Rémunération -
CHAPITRE XI
-
Application dans les professions agricoles -
CHAPITRE XII
-
Bilan pour l'emploi - TABLEAU COMPARATIF
- ANNEXES
-
ANNEXE N° 1
-
TABLEAU COMPARATIF DES ACCORDS 35 HEURES
DANS LES BRANCHES PROFESSIONNELLES
DES PLUS DE 100.000 SALARIÉS -
ANNEXE N° 2
-
HISTORIQUE DES ALLÉGEMENTS
DE CHARGES SOCIALES -
ANNEXE N° 3
-
DIRECTIVE N° 97/81/CE DU CONSEIL
DU 15 DÉCEMBRE 1997 CONCERNANT L'ACCORD-CADRE SUR LE TRAVAIL À TEMPS PARTIEL
CONCLU PAR L'UNICE, LE CEEP ET LA CES -
ANNEXE N° 4
-
RÉPONSES DE MME MARTINE AUBRY,
MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ,
À UN QUESTIONNAIRE ÉCRIT
DE M. LOUIS SOUVET, RAPPORTEUR
N° 30
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès-verbal de la séance du 27 octobre 1999
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, relatif à la réduction négociée du temps de travail ,
Par M.
Louis SOUVET,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de MM. Jean Delaneau, président ; Jacques Bimbenet, Louis Boyer, Mme Marie-Madeleine Dieulangard, MM. Guy Fischer, Jean-Louis Lorrain, Louis Souvet, vice-présidents ; Mme Annick Bocandé, MM. Charles Descours, Alain Gournac, Roland Huguet, secrétaires ; Henri d'Attilio, François Autain, Paul Blanc, Mme Nicole Borvo, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Gilbert Chabroux, Jean Chérioux, Philippe Darniche, Christian Demuynck, Claude Domeizel, Jacques Dominati, Michel Esneu, Alfred Foy, Serge Franchis, Francis Giraud, Claude Huriet, André Jourdain, Philippe Labeyrie, Roger Lagorsse, Dominique Larifla, Henri Le Breton, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Jacques Machet, Georges Mouly, Lucien Neuwirth, Philippe Nogrix, Mme Nelly Olin, MM. Lylian Payet, André Pourny, Mme Gisèle Printz, MM. Henri de Raincourt, Bernard Seillier, Martial Taugourdeau, Alain Vasselle, Paul Vergès, André Vezinhet, Guy Vissac.
Voir
les numéros :
Assemblée nationale (11
ème
législ.) :
1786
rect.,
1826
et T.A.
366
Sénat
:
22
(1999-2000).
Travail. |
LISTE DES TABLEAUX ET ENCADRÉS
PREMIÈRE PARTIE |
|
Chronologie 35 heures |
100 |
" Selon vous, quelle est parmi les raisons suivantes celle qui constitue le plus aujourd'hui un frein à l'embauche ? " |
|
La mesure qui paraît la plus efficace pour réduire le chômage - Evolution 1996-1999 de la première réponse |
|
" Pour lutter contre le chômage, le Gouvernement propose de ramener à 35 heures la durée hebdomadaire du travail. Vous, personnellement, pensez-vous qu'une telle mesure créera effectivement des emplois ? " |
|
DEUXIÈME PARTIE |
|
" Le pari des 35 heures est en bonne voie mais il
n'est pas
gagné "
|
|
Accords d'entreprise signés dans le cadre de la loi
du 13
juin 1998
|
|
Les différentes définitions de la durée du travail |
113 |
Les salariés à 35 heures dans le champ de la loi de juin 1998 |
115 |
Les différents délais |
115 |
L'évolution comparée de l'emploi dans les établissements ayant et n'ayant pas réduit la durée du travail |
|
Les embauches prévues par catégorie socioprofessionnelle |
119 |
Population active par groupe socioprofessionnel |
119 |
Evolution des plans sociaux et des licenciements économiques |
120 |
Les modalités du temps de travail dans les conventions, selon le secteur d'activité des entreprises |
|
Taux
de recours à la modulation par secteur
|
|
La réorganisation du travail |
123 |
Le nouveau temps de travail des salariés à temps plein |
124 |
La durée hebdomadaire maximale prévue par l'accord |
125 |
Le Centre des jeunes dirigeants d'entreprises (CJD) estime que la loi Aubry II ne permet pas les conditions du succès de la réduction du temps de travail (RTT) |
|
Le syndicat des indépendants considère que le projet de loi est inapplicable pour les toutes petites entreprises (TPE) |
|
La Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) souhaite que le taux de rémunération des heures supplémentaires soit fixé à 10 % de manière pérenne . |
|
TROISIÈME PARTIE |
|
Les recommandations de l'OCDE pour l'emploi |
139 |
Estimation du nombre d'emplois ayant bénéficié d'un effet d'aubaine |
141 |
Perception du passage aux 35 heures |
144 |
Réduction du temps de travail et création d'emplois |
146 |
L'OFCE estime les effets possibles sur l'emploi du projet de loi entre 0 et 640.000 emplois |
|
Taux de chômage standardisé |
150 |
Durée " légale " du travail |
152 |
Le temps de travail en Europe |
153 |
Travailler moins ne sert pas l'emploi |
153 |
Des résultats passables sur le front de l'emploi - Taux de chômage comparé entre la France et l'Europe des 15 |
|
Productivité comparée du travail |
155 |
QUATRIÈME PARTIE |
|
Détermination des organisations appelées à la discussion et à la négociation des conventions collectives de travail |
|
Elections prud'homales du 10 décembre 1997 - Résultats (métropole) - Collège Salariés en % exprimés |
|
Position par rapport au référendum tel qu'il est prévu par le projet de loi |
165 |
Le
mandatement prévu par les partenaires sociaux selon l'article 6
|
|
Le
mandatement " AUBRY " selon paragraphe III de l'article 3
|
|
Les accords de réduction du temps de travail |
169 |
Les accords avec mandatement par taille et secteur d'activité |
170 |
CINQUIÈME PARTIE |
|
Nature juridique et application de la convention collective |
174 |
Nombre de salariés concernés par la réduction du temps de travail dans le cadre de la loi de Robien |
|
L'accord du 28 juillet 1998 dans le secteur de la métallurgie |
181 |
Principales réserves et exclusions prononcées lors de la procédure d'extension des accords et avenants |
|
SIXIÈME PARTIE |
|
Les effectifs de la fonction publique |
193 |
Temps de travail hebdomadaire dans la fonction publique de l'Etat |
198 |
Temps de travail hebdomadaire dans la fonction publique territoriale |
199 |
SEPTIÈME PARTIE |
|
Le SNAPEI considère que le projet de loi ne prend pas en compte la situation particulière des établissements spécialisés |
|
Temps de travail hebdomadaire dans la fonction publique hospitalière |
209 |
HUITIÈME PARTIE |
|
Les entreprises de transport souhaitent obtenir des aménagements du projet de loi qui prennent en compte les spécificités de leur profession |
|
Le temps de travail des cadres en Europe |
228 |
M. Bernard Brunhes doute que la loi puisse être applicable par les entreprises dès le 1 er janvier 2000 |
|
M. Jean-Emmanuel Ray considère que la nouvelle loi pourrait être difficilement applicable par les entreprises dès le 1 er janvier 2000 |
|
Régime des heures supplémentaires |
236 |
NEUVIÈME PARTIE |
|
L'historique des allégements de charges sur les bas salaires (1993 - 1997) |
238 |
La part des exonérations de cotisations dans le budget emploi |
239 |
Exonérations de cotisations prises en charge par l'Etat, compensées au régime général |
|
Les exonérations non compensées |
240 |
Les propositions du Sénat en matière d'allégement de charges sociales |
242 |
Les
déclarations de Mme Nicole Péry au Sénat le 29 juin
1998
|
|
Les crédits destinés à la réduction du temps de travail |
244 |
Loi Aubry - Coût d'un emploi créé |
246 |
Nouveau barème d'exonérations applicable à un salarié à temps complet dans une entreprise à 35 heures (en remplacement de la ristourne dégressive actuelle) |
|
Accès aux allégements de charges |
249 |
Comparaison entre la " ristourne Juppé " et de la " ristourne Aubry " |
250 |
La " ristourne Juppé " : coût salarial pris en charge |
250 |
La " ristourne Aubry " : coût salarial pris en charge |
251 |
Extrait du rapport déposé par le Gouvernement pour le débat d'orientation budgétaire de juin 1999, p. 47-48 |
|
Clef de répartition des " retours " pour les finances publiques |
254 |
Le financement du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales en 2000 |
|
La taxation des heures supplémentaires : des évaluations différentes |
257 |
Le financement " à terme " |
258 |
Pertes de recettes en 2000 des administrations publiques |
259 |
Impact sur les entreprises en 2000 des mesures prises dans le cadre de la RTT |
261 |
Les prêts de l'Unedic |
265 |
L'Etat et les régimes complémentaires d'assurance vieillesse |
266 |
Nouveau plan de financement du fonds de financement de la réforme des cotisations patronales en 2000 |
|
Le nouveau plan de financement " à terme " |
269 |
TRAVAUX DE LA COMMISSION
I. AUDITION DE MME MARTINE AUBRY, MINISTRE DE L'EMPLOI ET DE LA SOLIDARITÉ
Le
jeudi 21 octobre 1999, sous la
présidence de M. Jean Delaneau,
président
, la commission a procédé à
l'audition de Mme Martine Aubry
,
ministre de l'emploi et de
la solidarité
, sur le
projet de loi n° 1786
(rectifié)
(AN) relatif à la
réduction
négociée du temps de travail
.
Dans son propos liminaire,
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité,
a souligné que l'objectif de la réduction
du temps de travail était de favoriser l'emploi et que la
démarche du Gouvernement était fondée sur le recours
à la négociation collective. Elle a rappelé que la loi du
13 juin 1998 avait fixé un cap, l'abaissement de la durée
légale de travail, en renvoyant aux partenaires sociaux le soin d'en
négocier les modalités de son anticipation.
Evoquant le bilan de la loi du 13 juin 1998, elle a observé que
109 accords de branche, couvrant 8 millions de salariés, avaient
été signés, 66 de ces accords ayant été
étendus. Elle a considéré que, seuls, deux accords ne
feraient pas l'objet d'une extension, l'accord de la métallurgie,
l'Union des industries métallurgiques et minières (UIMM) n'ayant
pas demandé l'extension avant l'an 2000, et l'accord signé par le
secteur " carrières et matériaux " qui comprenait des
clauses illégales. Elle a déclaré que 16.500 accords
d'entreprises avaient été signés concernant 2,3 millions
de salariés.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
déclaré que ces accords avaient permis 130.000 engagements de
créations ou de préservations d'emplois, 85 %
représentant des embauches. Elle a estimé que ces engagements
équivalaient à la baisse du chômage constatée en
1998. Elle a observé que ces engagements étaient encore à
réaliser compte tenu des délais nécessaires aux embauches.
Mme Martine Aubry
a souligné que 115.000 des
130.000 engagements de créations ou de préservations
d'emplois correspondaient à des embauches qui n'auraient pas eu lieu en
l'absence de mise en oeuvre de la réduction du temps de travail. Elle a
considéré que le dispositif de suivi des accords avait permis
d'établir que seuls 10 % des engagements concernaient des embauches
qui auraient eu lieu en tout état de cause. Elle a déclaré
que l'amélioration de l'emploi consécutive à la
réduction du temps de travail devrait être de 100.000 emplois par
an pendant les années de négociation.
Mme Martine Aubry
a observé que les accords signés se
plaçaient dans les hypothèses les plus favorables établies
par les modèles économétriques en 1998, le financement de
la compensation salariale étant assuré par des gains de
productivité de 3 à 3,5 %, une modération salariale
de 2 à 2,5 % et les aides de l'Etat.
Elle a observé que la souplesse permettait de répondre à
la fois aux besoins des entreprises et à ceux des salariés. Elle
a remarqué que plus de la moitié des accords de modulation
comprenait une amplitude horaire comprise entre 30 et 39 heures. Elle a
souligné que, seuls, 9 % des accords prévoyait une
durée maximale du travail de 42 heures et plus. Elle a
évoqué les progrès concernant les délais de
prévenance et la meilleure prise en compte des souhaits des
salariés concernant l'organisation du travail. Elle a cité
l'exemple d'une entreprise de l'Est de la France, où les salariés
avaient demandé à travailler 6 jours sur 7 afin de pouvoir
disposer de temps libre l'après-midi, alors que dans une autre
entreprise, proche d'Orléans, les salariés avaient demandé
à regrouper le travail sur 4 jours afin de limiter les temps de
transport.
Mme Martine Aubry
a déclaré que 91 % des accords
avaient été conclus par tous les syndicats présents dans
l'entreprise signataire, et que deux tiers des salariés avaient pu
choisir la forme de la réduction du temps de travail appliquée
par leur entreprise.
Elle a observé que la négociation avait permis des
avancées sur des sujets comme la réduction du temps de travail
appliquée aux cadres. Elle a rappelé que le projet de loi
prévoyait la distinction entre trois catégories de cadres, les
dirigeants, les cadres travaillant en équipe et les cadres
rémunérés sur la base d'un forfait de jours
travaillés par an.
Mme Martine Aubry
a estimé que le projet de loi s'inspirait
largement des accords conclus par les partenaires sociaux. Elle a
considéré que les accords de branche étaient tous pris en
compte dans ce second texte à l'exception des clauses illégales
comme le travail le dimanche, la formation prévue uniquement en dehors
du temps de travail ou les forfaits horaires pour toutes les catégories
de cadres. Elle a observé que la majeure partie des accords de
modulation sur l'année prévoyait un plafond aux alentours de
1.600 heures par an.
Mme Martine Aubry
a considéré que le projet de loi
confortait la négociation collective à travers notamment un
délai supplémentaire d'un an pendant lequel s'appliquerait un
régime transitoire.
Elle a évoqué deux amendements adoptés à
l'Assemblée nationale qui avaient prévu pour l'un que la mise en
place d'un plan social devait être précédée d'une
négociation sur la réduction du temps de travail et, pour
l'autre, un dispositif particulier permettant aux entreprises de moins de
20 salariés qui négocieraient la réduction du temps
de travail par étape, avant l'an 2000, de bénéficier
d'allégements de cotisations de sécurité sociale.
Après avoir souligné que l'objectif de l'emploi restait
essentiel,
Mme Martine Aubry
a déclaré que le projet
de loi n'était pas dirigé contre les entreprises. Elle a
rappelé qu'il associait une baisse des charges à un engagement
d'embauche et a précisé que le Gouvernement réaliserait
chaque année un bilan des emplois créés du fait de la
baisse des charges après avis de la commission nationale de la
négociation collective.
Mme Martine Aubry
a considéré que le projet de loi se
bornait à fixer un calendrier pour la réduction du temps de
travail et les garanties dont pourraient bénéficier les
salariés. Elle a évoqué les dispositions relatives au
nouveau régime du travail à temps partiel qui permettaient, dans
certains cas, au salarié de refuser une modification de ses horaires de
travail.
Elle a indiqué que les salariés payés au salaire minimum
interprofessionnel de croissance (SMIC) bénéficieraient d'une
garantie mensuelle de leur rémunération dans le cadre de la
réduction du temps de travail, de même que les salariés
nouvellement embauchés. Elle a rappelé qu'un amendement
adopté par l'Assemblée nationale avait prévu que les
entreprises créées postérieurement à la loi
pourraient bénéficier des aides incitatives à la
réduction du temps de travail, si elles respectaient le principe de la
garantie de la rémunération mensuelle des salariés
payés au SMIC.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
observé que la durée maximale du travail sur douze semaines avait
été ramenée à 44 heures hebdomadaires et qu'un
régime transitoire avait été établi concernant la
rémunération des heures supplémentaires qui permettrait
aux entreprises de limiter le surcoût des quatre premières heures
du travail à 10 % au lieu de 25 %. Elle a rappelé que
ces 10 % seraient versés au salarié dans le cas où
l'entreprise aurait signé un accord de réduction du temps de
travail ou au fonds de financement des allégements de charges dans le
cas contraire.
Elle a considéré que le projet de loi se limitait à fixer
les clauses d'un ordre public social en évoquant, par exemple, le
principe adopté à l'Assemblée nationale d'un repos continu
hebdomadaire de 35 heures, composé du repos hebdomadaire de 24 heures et
du repos quotidien de 11 heures prévu par une directive
européenne.
Elle a souligné que la simplification des dispositifs de modulation
avait été accompagnée de la fixation d'un délai de
prévenance de 7 jours en cas de modification des horaires. Elle a
observé que le projet de loi avait accepté le principe qu'une
partie de la formation pourrait être réalisée en dehors du
temps de travail pour autant qu'elle correspond à un projet personnel ou
à une démarche du salarié.
Mme Martine Aubry
a estimé que la réforme des cotisations
sociales, organisée par l'article 12 du projet de loi, poursuivait deux
objectifs : un abaissement structurel du coût du travail de 5 %
à destination notamment de l'artisanat et des petites et moyennes
entreprises (PME) et une compensation du coût de la mise en oeuvre de la
réduction du temps de travail.
Elle a estimé qu'il n'était pas possible de chiffrer les
créations d'emplois auxquelles devraient procéder les entreprises
en échange des allégements de cotisations sociales. Citant
l'exemple d'un côté de la téléphonie ou de la
pharmacie et de l'autre celui de l'habillement, elle a souligné
l'hétérogénéité des situations des
différents secteurs d'activités au regard de leur capacité
à créer des emplois.
Elle a déclaré qu'elle avait souhaité privilégier
la négociation pour définir le niveau de création
d'emplois correspondant à chaque catégorie d'entreprises. A cet
égard, elle a justifié le recours à un accord majoritaire
qui constituait une garantie concernant la prise en compte de l'objectif de
création d'emploi au cours de la négociation.
Mme Martine Aubry
a estimé à terme le coût global du
dispositif financier à 105 milliards de francs, dont
65 milliards de francs consacrés à la baisse des charges
sous la forme d'une réforme de la ristourne dégressive et
40 milliards de francs à l'aide structurelle à la
réduction du temps de travail. Elle a considéré que les
40 milliards de francs équivalaient à un abattement de
charges sociales de 4.500 francs par salarié pour chaque entreprise
ayant signé un accord de réduction du temps de travail. Elle a
observé que le coût d'un emploi lié à la
réduction du temps de travail, dans le cadre de la deuxième loi,
serait de 55.000 francs annuels, soit un coût bien inférieur
à tous les autres dispositifs.
Mme Martine Aubry
a déclaré que les modalités de
financement de la baisse de charges différeraient de celles de l'aide
structurelle à la réduction du temps de travail. Elle a
considéré que les 25 milliards de francs
d'allégements de charges supplémentaires seraient financés
pour moitié par une contribution sociale sur les bénéfices
des sociétés (CSB), et pour moitié par la taxe
générale sur les activités polluantes (TGAP).
Concernant les 40 milliards de francs restants, elle a rappelé que
le Gouvernement avait envisagé une contribution de l'Etat, de l'Union
nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) et des
régimes de la sécurité sociale à la hauteur des
" retours " dont chacun d'entre eux pourrait bénéficier
du fait de la réduction du chômage. Pour 2000, la contribution de
l'UNEDIC était estimée entre 7 et 7,5 milliards de francs
contre 5,6 milliards de francs pour les organismes de
sécurité sociale et 4,3 milliards de francs pour le budget
de l'Etat, soit 17,5 milliards de francs en tout.
M. Louis Souvet, rapporteur,
s'est interrogé sur la
conformité des accords signés au regard des dispositions
adoptées dans le cadre du second projet de loi et sur le dispositif du
financement du projet de loi compte tenu du désaccord existant entre le
Gouvernement et les partenaires sociaux.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que le Sénat avait
examiné, le 29 juin 1998, la proposition de loi " Poncelet "
tendant à alléger les charges sur les bas salaires et qu'à
cette occasion, Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat à la
formation professionnelle, avait déclaré que le Gouvernement
n'avait pas fait de la poursuite des allégements de charges une
priorité pour trois raisons : le niveau des charges patronales ne
lui semblait pas un obstacle majeur à l'emploi, l'efficacité des
allégements de charges lui semblait relative et le financement d'une
telle mesure lui semblait difficile.
Il a observé que le Gouvernement prévoyait aujourd'hui
25 milliards de francs d'allégement de charges
supplémentaires qui s'ajoutaient aux 40 milliards de francs de la
ristourne Juppé. Il a demandé à Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité, comment elle expliquait
l'évolution de la position du Gouvernement depuis un an.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a par ailleurs déclaré
que les établissements du secteur sanitaire, social et
médico-social considéraient que le délai d'agrément
des accords d'établissements ayant été porté
à 6 mois, le conventionnement nécessitant 1 à
2 mois et la mise en oeuvre de l'accord 2 à 3 mois
supplémentaires, ils ne pourraient bénéficier des aides,
ni mettre en place le dispositif de réduction du temps de travail entre
le 1
er
janvier et le 1
er
juin 2000, alors
même que des accords avaient été signés.
M. Louis Souvet, rapporteur
, s'est interrogé sur la situation de
ces établissements dans cet intervalle de 6 mois ; il a
souhaité savoir si le Gouvernement envisageait des dispositions pour
neutraliser la contrainte juridique supplémentaire que rencontraient les
établissements du secteur sanitaire, social et médico-social
compte tenu de la procédure d'agrément. Il a demandé si un
report, au 1er juillet 2000, de l'application des 35 heures à
ces établissements était envisageable.
M. Charles Descours,
après avoir indiqué qu'il avait cru
comprendre que l'UNEDIC pourrait ne pas avoir à verser la contribution
évoquée de 5 à 7 milliards de francs pour 2000 a
souhaité savoir où en était dans ces conditions le
financement du projet de loi relatif à la réduction
négociée du temps de travail.
M. Charles Descours
s'est interrogé sur les conséquences
politiques et sociales d'une contribution du régime
général évaluée à 5,5 milliards de
francs, observant que cette contribution était censée faire
l'objet d'une négociation et était simultanément
chiffrée sous la forme d'une " provision " inscrite dans les
comptes pour 2000 par la commission des comptes de la sécurité
sociale, dont le montant avait été confirmé par les
déclarations du Gouvernement à l'Assemblée nationale. Il a
souhaité connaître les modalités de la consultation de la
commission des comptes de la sécurité sociale prévue
à l'article 11, paragraphe XVI du projet de loi relatif à la
réduction négociée du temps de travail pour définir
les règles de calcul du montant et de l'évolution de la
contribution des régimes sociaux. Il s'est interrogé sur la
position du Conseil d'Etat quant au mode de fixation de cette contribution. Il
a demandé, en outre, quels étaient les régimes de
protection sociale concernés.
En réponse à M. Louis Souvet, rapporteur,
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité,
a déclaré
que les accords signés étaient directement applicables avant
d'observer que les heures travaillées au-delà du plafond de 1.600
heures prévu dans le cadre des accords de modulation entreraient
simplement dans le régime des heures supplémentaires.
Mme Martine Aubry
a déclaré que le Gouvernement
s'était opposé aux propositions de loi déposées par
MM. Jacques Barrot à l'Assemblée nationale et Christian
Poncelet au Sénat parce qu'elles n'étaient pas financées,
sinon par les salariés et les ménages, qu'en revanche, ses
propres déclarations depuis 1993 étaient claires quant à
la baisse des charges sur les bas salaires.
Evoquant la question relative à la situation des établissements
du secteur sanitaire, social et médico-social,
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité,
a reconnu que face au
problème posé, un décret publié en juin 1999 avait
prévu un délai de trois mois après l'agrément des
accords pendant lequel les établissements, qui procèdent à
l'application directe de l'accord, pourront bénéficier de l'aide
incitative au barème du premier semestre 1999.
En réponse à
M. Charles Descours,
elle a noté que
l'Etat avait versé 35 milliards de francs à l'UNEDIC depuis
1993, alors même que la situation financière de ce régime
s'était redressée dès 1994. Elle a expliqué que
l'Etat respecterait en tout état de cause l'engagement pris par les
précédents gouvernements de rembourser le prêt de
10 milliards de francs contracté en 1993 par l'UNEDIC. Elle a
reconnu que la contribution demandée à l'UNEDIC, dans le cadre du
financement de la réduction du temps de travail, était
contestée. Elle a rappelé que le Gouvernement s'était,
dès le 7 septembre devant la commission des affaires culturelles de
l'Assemblée nationale, déclaré prêt à trouver
une solution négociée. Elle a indiqué qu'il était
nécessaire que l'Etat et l'UNEDIC trouvent un accord réglant
l'ensemble des contentieux existants. Elle a mentionné à cet
égard le contentieux relatif à la prise en charge des cotisations
des contrats emplois-solidarité, des emplois-jeunes et la prise en
charge par l'UNEDIC des cotisations retraite de base des chômeurs et a
estimé que le travail avait avancé et que l'UNEDIC et le
Gouvernement étaient d'accord sur l'état des problèmes et
sur les chiffres.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
déclaré que le financement des 35 heures était, de toute
façon, assuré pour 2000, grâce à la taxation des
heures supplémentaires dont il était jusque-là
prévu qu'elle serait affectée à la réserve de
trésorerie du fonds de financement. Elle a indiqué qu'elle
présenterait une solution à l'Assemblée nationale le mardi
26 octobre. Elle a précisé qu'elle comprenait la demande de
rigueur dans les finances publiques, mais que ni la ristourne bas salaires, ni
la loi famille du 25 juillet 1994 n'avaient été financées
par le précédent Gouvernement.
Concernant la provision de 5,6 milliards de francs inscrite dans les comptes du
régime général pour 2000, elle a indiqué que la
commission des comptes de la sécurité sociale était bien
consultée sur l'affectation des excédents de la
sécurité sociale, et avait clairement fait apparaître un
excédent prévisionnel de 7,5 milliards de francs
ramené à 2 milliards de francs par l'inscription d'une
provision de 5,6 milliards de francs destinée au financement des
35 heures. Elle a confirmé que la commission des comptes serait
à nouveau consultée pour l'examen du décret en Conseil
d'Etat prévu à l'article 11 paragraphe XVI.
Elle a par ailleurs confirmé que le Conseil d'Etat, dans son avis sur le
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000,
n'avait émis aucune objection de principe à l'égard d'une
contribution des organismes de protection sociale au financement des
35 heures. Il avait seulement observé qu'une telle contribution,
dès lors qu'elle ne résultait pas d'un accord avec les
intéressés, était un impôt dont le Parlement devait
fixer l'assiette et le taux.
Elle a indiqué que la contribution demandée aux organismes de
protection sociale concernait les régimes complémentaires ARRCO
et AGIRC, mais qu'il existait un problème, en raison des dettes
anciennes de l'Etat vis-à-vis de ces deux régimes (prise en
compte des cotisations FNE).
M. Jean Chérioux
a remarqué que l'évolution de la
jurisprudence de la Cour de cassation sur la prise en compte des heures de
surveillance dans la définition du travail effectif avait posé un
problème aux associations du secteur sanitaire, social et
médico-social que l'amendement voté par l'Assemblée
nationale ne suffisait pas à régler, notamment au regard de
l'apurement du passé.
Il a estimé que l'ensemble des procédures pourrait coûter
7 milliards de francs aux associations, ce qui représentait
30 % de leur budget annuel. Il a considéré qu'une solution
pourrait consister à valider les conventions collectives non
étendues, ce qui permettrait d'éviter le développement
prévisible d'un fort contentieux.
M. Alain Gournac
a observé que plusieurs branches
professionnelles, dont les représentants de commerce et le secteur du
nettoyage, étaient toujours inquiètes quant à la
légalité de leur accord au regard du projet de loi.
Il a souhaité savoir quels seraient les délais et les
modalités de mise en oeuvre du système d'assurance chômage
subsidiaire, prévu par l'article L. 351-22 du code du travail, dans
l'hypothèse où la convention entre l'UNEDIC et les partenaires
sociaux ne serait pas renouvelée.
M. André Jourdain
a fait part de l'inquiétude du secteur
de l'artisanat sur la compatibilité de l'accord de branche avec le
projet de loi. Il s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles le
projet de loi ne prévoyait aucune disposition relative au multisalariat.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a considéré que le projet
de loi s'inscrivait dans le prolongement de la loi du 13 juin 1998, et qu'il
répondait bien aux attentes tant en termes de lutte contre le
chômage que de projet de société. Elle a remarqué
qu'il apportait des solutions au problème des cadres, du double SMIC, du
délai de prévenance et du temps partiel choisi. Néanmoins,
elle a souhaité que la question de la formation fasse l'objet d'un
réexamen complet et que la question du travail précaire soit
mieux prise en compte.
M. Guy Fischer
a constaté que cette deuxième loi
répondait à une demande de l'ensemble du corps social. Il a
déclaré que son groupe proposerait d'enrichir le texte, notamment
sur les questions relatives aux heures supplémentaires, aux cadres, au
SMIC et au licenciement individuel du fait de la mise en oeuvre d'un accord de
réduction du temps de travail. Il s'est interrogé sur les
perspectives de réduction du temps de travail dans la fonction publique.
M. Serge Franchis
, après avoir déclaré, à
titre personnel, qu'il avait toujours été favorable au partage du
temps de travail, a regretté que la question des travaux pénibles
n'ait pas été prise en compte par le projet de loi. Il s'est
étonné que la taxe générale sur les
activités polluantes soit amenée à financer les
allégements de charges, alors qu'il existait des besoins immenses dans
le domaine de l'environnement. Il a souligné les problèmes que
posait la nouvelle définition du travail effectif, notamment au regard
de la question du temps d'habillage pour les entreprises d'abattage.
M. Jean Delaneau, président,
a estimé qu'il existait une
contradiction entre le souhait affiché par le Gouvernement de
réserver une place importante à la négociation collective
et l'article premier du projet de loi, qui prévoyait le principe d'un
abaissement autoritaire de la durée légale du travail. Il a
considéré que le texte, tel qu'il avait été
amendé par l'Assemblée nationale, réduisait encore le
champ d'intervention des partenaires sociaux. Il s'est interrogé sur le
contenu du paritarisme, compte tenu, notamment, des dispositions
envisagées relatives au financement des 35 heures.
En réponse aux différents intervenants,
Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi et de la solidarité,
a estimé qu'il
faudrait effectivement trouver une solution qui permette de préserver la
situation financière des associations du secteur sanitaire, social et
médico-social. Elle a toutefois remarqué que la validation
rétroactive des accords signés ne devait pas remettre en cause
des situations qui correspondaient à un temps de travail effectif.
Elle a considéré que l'ensemble des accords de branche
était applicable, notamment ceux des secteurs des transports, du
nettoyage et de l'artisanat.
Mme Martine Aubry
a déclaré qu'elle ne souhaitait pas que
la convention entre l'Etat et les partenaires sociaux sur l'UNEDIC soit remise
en cause, mais que, le cas échéant, le Gouvernement pourrait
proroger par décret le système d'indemnisation du chômage.
Elle s'est déclarée favorable au multisalariat en soulignant
néanmoins que sa mise en oeuvre posait des difficultés relatives
notamment au régime des cotisations sociales et au principe de la
déclaration par le salarié de ses activités à tout
employeur.
Mme Martine Aubry
a observé que le Gouvernement avait
travaillé avec l'UPA afin de définir les dispositions propres
à adapter la loi aux besoins des PME. Elle a fait part d'un souci commun
de modernisation des conditions de travail dans le secteur de l'artisanat qui
permette de résorber la pénurie de vocation constatée
aujourd'hui, notamment dans les métiers de bouche et d'hôtellerie.
Mme Martine Aubry
a estimé qu'il était temps de revoir la
loi de 1971 en réorientant les fonds vers la formation et la
préparation des salariés à l'avenir.
Elle a rappelé que le Premier ministre avait annoncé, le
27 septembre dernier, un projet de loi destiné à lutter
contre la précarité.
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
a
déclaré que, dans la fonction publique hospitalière, la
nécessité de réduire le temps de travail devrait
probablement s'accompagner de créations d'emplois.
Evoquant la question des travaux pénibles, elle a observé qu'un
amendement adopté à l'Assemblée nationale avait
traité la question du travail en cycle continu.
Mme Martine Aubry
a considéré que la modification de la
définition du travail effectif prenait en compte l'évolution de
la jurisprudence. Elle a observé que les problèmes que pouvaient
rencontrer les secteurs de l'agro-alimentaire et du commerce de viande
étaient sans doute dus au fait qu'ils n'avaient pas pris en compte
l'évolution de la jurisprudence sur cette question.
En réponse à M. Jean Delaneau, président,
Mme Martine
Aubry
a déclaré qu'elle aurait, elle aussi,
préféré ne pas avoir à recourir à la loi
pour favoriser la réduction du temps de travail, mais que l'intervention
législative trouvait sa raison d'être dans les faibles
résultats de l'accord interprofessionnel de 1995 et de la loi du 11 juin
1996. Elle a observé que la loi se limitait à définir les
clauses d'ordre public social relatives à la durée légale,
à la durée maximale du travail et à la définition
des modulations. Elle a considéré que le projet de loi avait
cherché à conserver un équilibre entre les garanties
apportées par la loi aux salariés et les modalités
d'application de la réduction du temps de travail renvoyées
à la négociation collective.
II. AUDITIONS DU MERCREDI 29 SEPTEMBRE 1999
A. AUDITION DE M. ADRIEN BEDOSSA, VICE-PRÉSIDENT DE L'UNION NATIONALE DES PROFESSIONS LIBÉRALES (UNAPL)
Réunie le mercredi 29 septembre 1999, sous la
présidence de M. Jacques Bimbenet, vice-président
,
puis de M. Jean Delaneau, président
, la commission a
engagé son programme d'auditions sur le
projet de loi
n° 1786 (rectifié)
(AN) relatif à la
réduction négociée du temps de travail
.
M. Jacques Bimbenet, vice-président
a rappelé que M. Louis
Souvet, rapporteur de la loi du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation
relative à la réduction du temps de travail, avait
présenté le 30 juin dernier à la commission un premier
bilan d'application de cette loi ; qu'à l'issue de cette
communication, la commission avait pressenti
M. Louis Souvet
pour
rapporter le second projet de loi qui a été adopté en
conseil des ministres le 28 juillet 1999, afin qu'il puisse commencer ses
travaux dès la mi-septembre.
M Jacques Bimbenet, vice-président
, a indiqué que
naturellement cette nomination serait confirmée lorsque le texte du
projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, serait transmis
au Sénat, probablement le 19 octobre.
La commission a tout d'abord entendu
M. Adrien Bedossa,
vice-président
de l'Union nationale des professions
libérales
(UNAPL).
Dans son propos liminaire,
M. Adrien Bedossa
a rappelé que
l'UNAPL comprenait
296.000 adhérents employant 1,5 million de
salariés. Il a souligné que 50 % de ces entreprises
comprenaient moins de dix salariés et 80 % moins de vingt
salariés. Dans ces conditions, et compte tenu du délai
supplémentaire accordé aux entreprises de moins de vingt
salariés pour mettre en place la réduction du temps de travail,
il a expliqué que les entreprises du secteur libéral avaient
temporisé, sans refuser a priori de discuter de la réduction du
temps de travail dans une perspective d'accroissement de la flexibilité.
M. Adrien Bedossa
a déclaré que l'UNAPL avait
souhaité quatre mesures incitatives qui permettraient aux professions
libérales de créer davantage d'emplois.
Il lui a semblé tout d'abord que des dispositions particulières
relatives aux groupements d'employeurs devaient être adoptées. Il
a cité, à ce propos, une expérience dans le Languedoc
faisant apparaître la possibilité de créer 22 emplois
équivalents temps plein.
De même, il a souhaité que soit créé un
" chèque premier emploi " considérant qu'il
faciliterait les embauches.
Ensuite, il a estimé qu'il convenait que le statut de collaborateurs
libéraux ne fasse plus l'objet, de la part des unions de recouvrement
des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales
(URSSAF), d'une requalification en contrat de salariés, comme c'est le
cas actuellement, avec pour conséquence de freiner le mouvement des
recrutements.
Enfin, il a estimé que la question de la qualification des personnels
était cruciale pour les petites entreprises du secteur libéral,
et qu'il était par conséquent nécessaire de consacrer la
36
e
heure hebdomadaire à la formation continue. Cette heure,
payée par l'entreprise, pourrait ainsi être comptabilisée
de manière à constituer un capital formation, majoré par
l'entreprise, afin de permettre aux salariés de disposer, par exemple,
d'un droit à la formation de six mois tous les dix ans.
M. Adrien Bedossa
a observé que ces revendications n'avaient pas
été reprises dans le projet de loi et, qu'en conséquence,
les entreprises du secteur restaient très attentistes voire
réticentes à s'engager dans un processus d'anticipation de la
réduction du temps de travail. Il a rappelé que depuis vingt ans,
le secteur des professions libérales avait créé des
emplois à un rythme de 3 à 3,4 % par an, sans attendre la
loi du 13 juin 1998.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur
,
qui lui demandait si le projet de loi avait repris les dispositions des accords
de branche signés par les employeurs du secteur libéral,
M.
Adrien Bedossa
a déclaré que cela n'avait pas
été le cas, notamment pour les dispositions spécifiques
relatives à la formation continue.
Concernant le bilan du mandatement dans le cadre de la loi Aubry,
M. Adrien
Bedossa
a répondu à M. Louis Souvet, rapporteur, que cette
disposition n'était pas sans rappeler le délégué de
site que voulaient créer les lois Auroux. Il a observé que le
recours à un salarié mandaté extérieur à
l'entreprise se heurtait à des réticences de la part des
employeurs et du personnel.
M. Louis Souvet, rapporteur,
l'ayant interrogé sur les
dispositions prévoyant qu'un accord doit être signé par un
ou plusieurs syndicats majoritaires dans l'entreprise,
M. Adrien
Bedossa
a déclaré
que ces accords n'avaient aucun sens
dans une entreprise ne comportant que quelques salariés. Il a
rappelé que la négociation collective répondait à
des règles particulières dans ces petites entreprises, comme le
dialogue direct et l'absence de formalisme.
En réponse à
M. Louis Souvet, rapporteur,
qui
s'interrogeait sur l'éventuelle contradiction du projet de loi avec la
directive européenne relative au travail à temps partiel,
M.
Adrien Bedossa
a estimé que la nouvelle définition du travail
à temps partiel était effectivement contradictoire avec le
principe des 35 heures payées 39.
Il a ajouté que le pacte européen pour l'emploi
privilégiait l'échange d'expériences et
l'employabilité, deux concepts qui lui semblaient être
étrangers à la démarche du Gouvernement.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a souhaité savoir combien de
salariés étaient couverts par un accord sur la réduction
du temps de travail dans le secteur des professions libérales. Elle a
souhaité connaître la position de l'UNAPL sur les
allégements de charges.
M. André Jourdain
a observé que le projet de loi ne
comportait aucune disposition relative au développement des groupements
d'employeurs et au travail à temps partagé contrairement à
ce que laissaient entendre les déclarations du Gouvernement.
M. Jacques Machet
a souligné que le coût financier du
projet de loi était estimé entre 80 et 100 milliards de
francs et que les partenaires sociaux s'opposaient au principe d'une
contribution à ce financement.
En réponse aux différentes questions des intervenants,
M.
Adrien Bedossa
a déclaré que deux branches signataires
d'accords sur la réduction du temps de travail, celle des experts
comptables et celle des agents d'assurance, comprenaient respectivement 40.000
et 30.000 salariés. Il a déclaré qu'il n'y avait pas eu
d'accord d'entreprise en expliquant ce phénomène par le lien
très fort qui unissait les entreprises et la branche dans ce secteur.
Il a confirmé que les entreprises du secteur des professions
libérales attendraient le plus possible avant de mettre en oeuvre la
réduction du temps de travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a observé que l'expérience
des accords signés et non repris dans le projet de loi invitait
effectivement ces entreprises à adopter un comportement attentiste.
Evoquant les allégements de charges,
M. Adrien Bedossa
a fait
part de son inquiétude que les entreprises de ce secteur soient exclues
du bénéfice de ces aides.
Il a constaté qu'il y avait une très forte demande en faveur de
dispositions particulières aux groupements d'employeurs, remarquant que
nombre d'entreprises souhaitaient partager une secrétaire ou un
informaticien.
En conclusion,
M. Adrien Bedossa
a déclaré qu'il ne
comprenait pas pourquoi le volet emploi avait été
abandonné dans le second texte relatif à la réduction du
temps de travail.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
et
M. Guy Fischer
ont
déclaré partager ce sentiment d'incompréhension.
B. AUDITION DE M. MICHEL COQUILLON, SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ADJOINT DE LA CONFÉDÉRATION FRANÇAISE DES TRAVAILLEURS CHRÉTIENS (CFTC)
Ensuite, la commission a entendu
M. Michel
Coquillion
,
secrétaire général adjoint de la
Confédération française des travailleurs
chrétiens
(CFTC).
Dans son propos liminaire,
M. Michel Coquillion
a rappelé le
regret de la CFTC que l'accord du 31 octobre 1995 sur l'aménagement du
temps de travail pour l'emploi n'ait pas débouché sur une vraie
démarche dans les branches et les entreprises en faveur de l'emploi. Il
a constaté que c'est cet échec qui avait ouvert la voie à
une démarche législative. Il a observé que la
négociation sur les 35 heures était un exercice très
difficile eu égard à son caractère transversal qui remet
en cause des domaines aussi différents que la
rémunération, l'organisation de l'entreprise, la formation ainsi
que le régime des cadres.
Il a estimé que le succès de cette négociation reposait
sur l'existence d'une volonté commune d'aboutir. Il a souligné
que le contexte social était défavorable aux salariés pour
trois raisons : les entreprises souhaitent que la mise en oeuvre de la
réduction du temps de travail soit réalisée à
coût constant, les salariés, faiblement syndiqués et
mobilisés, n'opposent pas de résistance déterminée
aux revendications des employeurs, et la démarche juridique, qui laisse
place à une négociation suivie d'une loi, a joué comme un
" piège " obligeant le législateur soit à
remettre en cause les accords signés soit à légaliser des
déréglementations importantes.
M. Michel Coquillion
a estimé que le défi majeur du second
texte relatif à la réduction du temps de travail consistait
à sortir de cette impasse juridique. Il a déclaré que la
CFTC demandait la négociation d'un accord interprofessionnel
validé par la loi sur tous les sujets qui, dans les accords de branche,
pouvaient apparaître comme dérogatoires ou illicites. Il a
considéré que cette négociation ne devait pas être
renvoyée aux entreprises ou aux établissements sauf à
rendre supplétives la loi, la négociation interprofessionnelle et
la négociation de branche, ce à quoi la CFTC s'était
opposée lors de la négociation du 31 octobre 1995.
M. Michel Coquillion
a déclaré que le projet de loi
proposé devait être fortement amélioré pour
répondre aux exigences de la CFTC, notamment en matière d'emploi
et de conciliation des temps de vie.
Il a estimé que ce projet de loi ne remettait pas en cause les accords
négociées dans les branches ou les entreprises, si ce
n'était sur des dispositions non conformes au code du travail
renvoyées à la négociation. Il a néanmoins
regretté que des dispositions résultant d'un accord national
interprofessionnel ou couvertes par la loi ou la jurisprudence aient
été renvoyées à la négociation de branche ou
d'entreprise.
M. Michel Coquillion
a considéré que la CFTC avait eu gain
de cause sur un certain nombre de dispositions du projet de loi, il a
cité l'exclusion des jours fériés dans la comptabilisation
des jours faisant l'objet d'une réduction du temps de travail, la
réduction du contingent d'heures supplémentaires pour les
entreprises qui ont recours à la modulation, le maintien du salaire pour
les salariés au SMIC, l'amélioration du compte épargne
temps et la reconduction du mandatement.
M. Michel Coquillion
a estimé toutefois que le projet de loi
présentait encore de graves lacunes sur des problèmes comme le
temps de travail réel et les moyens de le contrôler, le maintien
des salaires réels, la nature des embauches et l'accès aux
négociations des 35 heures.
Il a observé que plusieurs points méritaient d'être
précisés tels que le forfait cadre, la modulation unique, les
contreparties des aides versées aux entreprises, le temps partiel et la
nécessité d'un accord " majoritaire " pour
bénéficier des allégements de charge.
En définitive,
M. Michel Coquillion
a considéré que
ce projet de loi présentait des lacunes et des risques graves pour les
employés concernés. Il a remarqué qu'une absence de
contrôle de la durée du travail pourrait amener de nombreux
salariés qui travaillaient 45, 50 ou plus de 60 heures actuellement
payées 39 heures à faire à l'avenir le même nombre
d'heures payées 35 heures.
Il s'est inquiété de ce que le texte légalise la
dérive du temps de travail des cadres et que l'insuffisant encadrement
de la modulation puisse ouvrir la porte à une précarisation
totale de l'horaire de travail.
Il a constaté que le risque était grand que ce texte donne lieu
à une baisse importante des revenus des salariés, une
dégradation de leurs conditions de vie par la
généralisation de l'annualisation, du travail du samedi et du
dimanche, ainsi que par la légalisation de la dérive du forfait
cadre, ceci alors même que les créations d'emplois pourraient
être très faibles.
M. Michel Coquillion
a estimé que faute d'une révision en
profondeur du texte proposé, les effets attendus sur l'emploi ainsi que
les conditions de vie des nombreux salariés pourraient été
sacrifiés à l'idéologie.
Revenant sur les articles du projet de loi, il a estimé que la
définition du temps de travail devait être mieux encadrée
de manière à tenir compte des déplacements professionnels,
des pauses et des astreintes.
Il a considéré, à propos de l'article 5, qu'il
conviendrait de préciser les différentes catégories de
cadres et de décompter précisément les heures
supplémentaires dans le forfait.
Evoquant le compte épargne temps, il a déclaré qu'il
devait être alimenté et vidé rapidement à travers
par exemple le financement de formations. Il a souligné que la CFTC
n'était pas hostile au coïnvestissement sous réserve qu'il
respecte le principe du volontariat.
Il a insisté sur la nécessité d'un engagement en termes de
création d'emplois de la part des entreprises qui recevront des aides
financières.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur
,
sur la compatibilité
du projet de loi avec la directive
européenne sur le temps partiel,
M. Michel Coquillion
a reconnu
que le risque que des entreprises essaient d'embaucher des salariés
à 34 heures payées 34 heures était réel, de
même que le risque de contentieux pour ceux qui étaient
déjà rémunérés sur la base de 35 heures.
Evoquant le mandatement et le référendum,
M. Michel
Coquillion
a déclaré que le choix du référendum
pour valider des accords constituait une erreur majeure de nature à
remettre en cause l'existence même des syndicats minoritaires. Il a
souligné que le dialogue social ne reposait pas sur la démocratie
élective mais sur une présomption de
représentativité.
Il a estimé que ce débat sur la représentativité
syndicale n'avait pas sa place dans un texte relatif à la
réduction du temps de travail.
M. André Jourdain,
après avoir remarqué que les
artisans ne trouvaient pas
toujours les salariés
qualifiés qu'ils recherchaient, a observé que le projet de loi ne
définissait pas rigoureusement les délais de prévenance
dans le cadre des changements d'horaires, ce qui pourrait avoir des
conséquences dommageables pour les multisalariés.
M. Alain Gournac
a souhaité connaître l'attitude
qu'adopterait la CFTC si aucune modification n'était apportée au
projet de loi.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
s'est demandé si le projet de loi
répondait bien aux contraintes du dialogue social dans les PME. Elle a
désiré connaître la position de la CFTC sur la
possibilité, pour pallier les difficultés constatées
à trouver des " négociateurs ", de se
référer à une " logique de territoire ".
M. Guy Fischer
a demandé à M. Coquillion si cette loi
marquait un pas supplémentaire vers la déréglementation.
En réponse aux différents intervenants,
M. Michel
Coquillion
a déclaré que l'adaptation de l'offre à la
demande du travail illustrait un problème relatif aux formations. Il a
estimé que plus de jeunes devraient s'orienter vers les métiers
de l'artisanat.
Il a souligné que la CFTC était favorable au multisalariat,
citant l'exemple du directeur des ressources humaines (DRH) que plusieurs PME
pouvaient partager entre elles.
Il a confirmé que la CFTC se plaçait dans une optique de
modification du projet de loi sans préciser quelle serait l'attitude de
ce syndicat si ce texte n'était pas sensiblement modifié à
l'issue du débat parlementaire.
Il a estimé que le concept de délégué de bassin
d'emploi n'était pas très éloigné de celui de
salarié mandaté.
Il a confirmé que le projet de loi légalisait certaines
dispositions relatives à la flexibilité contenues dans les
accords signés en réaffirmant que c'était là la
conséquence de l'attitude des employeurs qui n'avaient pas
souhaité venir sur le terrain de l'emploi.
C. AUDITION DE M. ARNOLD BRUM, CHEF DU SERVICE DES AFFAIRES SOCIALES DE LA FÉDÉRATION NATINALE DES SYNDICATS D'EXPLOITANTS AGRICOLES (FNSEA)
Enfin, la commission a procédé à
l'audition
de
M. Arnold Brum
, chef du service des affaires sociales de la
Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles
(FNSEA).
Répondant aux questions de
M. Louis Souvet, rapporteur
,
M. Arnold Brum
a souhaité faire part des observations de la
FNSEA sur le projet de loi relatif à la réduction
négociée du temps de travail.
Il a déclaré que la notion de " durée collective de
travail " évoquée aux articles 2, 11 et 12 du projet de loi
n'était définie par aucun texte législatif et que la
notion voisine d'horaire collectif n'était pas applicable à
l'agriculture. Dans ces conditions, il s'est interrogé sur le fait de
savoir si la décision de l'employeur de faire exécuter des heures
supplémentaires constituait ou non une modification de l'horaire
collectif.
Dans l'hypothèse où la réalisation des heures
supplémentaires devait être considérée comme une
modification d'horaire, il a observé que l'entreprise ne se trouverait
plus dans la situation où la durée collective de travail est
inférieure ou égale à la durée légale ;
les quatre premières heures supplémentaires donneraient lieu
alors à une bonification réduite de 15 % et à une
contribution de 10 %. A l'inverse, a-t-il a souligné, si les heures
supplémentaires n'étaient pas considérées comme une
modification d'horaire, la bonification serait systématiquement de
25 %.
M. Arnold Brum
a souligné que la FNSEA dénonçait,
en tout état de cause,
la création d'une contribution qui
avait pour effet de priver le salarié de la juste
rémunération de son travail.
Evoquant les articles 3, 4 et 11 prévoyant que la durée annuelle
du travail ne pouvait dépasser 1.600 heures,
M. Arnold Brum
a
observé que ce seuil ne tenait pas compte de trois faits : tous les
jours fériés ne sont pas chômés, tous les
salariés n'ont pas droit à cinq semaines de congés
payés et tous les salariés qui ont droit à cinq semaines
de congés ne les prennent pas forcément tous les ans. Il en a
conclu que la règle de 1.600 heures pouvait donc conduire à
qualifier d'heures supplémentaires les heures effectuées par un
salarié qui n'aurait jamais travaillé plus de 35 heures par
semaine en moyenne.
Il a estimé que la référence à 1.600 heures par an
devait être supprimée, la notion de 35 heures en moyenne par
semaine travaillée lui apparaissant comme suffisante.
Evoquant le titre du projet de loi relatif à la réduction
négociée du temps de travail, il a constaté que
c'était en réalité la réduction des charges
patronales qui faisait l'objet d'une négociation et non la
réduction de la durée du travail puisque l'accord des syndicats
était indispensable pour obtenir les allégements de charges,
même si la durée légale de 35 heures était
respectée par l'entreprise.
M. Arnold Brum
s'est interrogé sur le recours au
référendum afin de sanctionner un accord conclu entre l'employeur
et un salarié mandaté. Il a estimé que le risque de
désaveu aurait pour conséquence une absence de recours à
ce dispositif.
M. Arnold Brum
a remarqué que la réduction du temps de
travail dans les entreprises de moins de 50 salariés à travers un
accord de branche pourrait connaître le même sort, cet accord ou
cette convention devant fixer la durée du travail et préciser les
modalités d'organisation et de décompte, autant de dispositions
qui ne lui ont pas semblé relever du niveau de la branche.
Evoquant la nécessité dans certains cas de recourir au
référendum dans les entreprises de moins de 11 salariés,
il a considéré que l'obligation faite à un employeur d'un
ou deux salariés d'obtenir leur approbation pour
bénéficier des aides n'avait aucun sens compte tenu de la
position de dépendance de ces salariés par rapport à
l'employeur.
M. Arnold Brum
a considéré que les modalités
d'obtention des allégements de charges, compte tenu de leur
complexité et de leur inadaptation aux petites et moyennes entreprises
(PME), constitueraient un obstacle à la réduction
négociée du temps de travail.
Il a déclaré que la FNSEA proposait que dans les entreprises de
moins de 50 salariés, la réduction du temps de travail
puisse être organisée selon les modalités prévues
par une convention ou un accord de branche étendu comme cela
était prévu par la loi du 13 juin 1998. Il a observé
que cette disposition avait permis la conclusion d'un accord national dans le
secteur de l'agriculture le 3 février 1999, étendu par un
arrêté interministériel du 8 avril 1999. Il a
constaté que cet accord prévoyait plusieurs modalités de
réduction du temps de travail, obligeait les accords d'entreprise
conclus avec des salariés mandatés à respecter ces
modalités et permettait à l'employeur de choisir directement
lesdites modalités de la mise en oeuvre de la réduction du temps
de travail si l'entreprise avait moins de 11 salariés et si la
négociation avec un salarié mandaté avait
échoué.
M. Arnold Brum
a redouté que le bénéfice de
l'allégement de charges puisse être suspendu par simple
décision de l'administration dès lors que les horaires de travail
pratiqués dans l'entreprise étaient " incompatibles "
avec les limites de 35 heures par semaine ou 1.600 heures par an, ou
encore lorsque le salarié avait effectué un nombre d'heures
supplémentaires dépassant le contingent fixé par
décret.
Il a estimé que la suspension de l'allégement dans des conditions
aussi peu précises faisait courir le risque d'arbitraire et
n'encourageait pas les entreprises à négocier la réduction
du temps de travail.
M. Arnold Brum
a considéré que l'article 15 relatif
à la modification du contrat de travail, s'il devait être
voté en l'état, pourrait être la source d'innombrables
litiges.
Il a observé que la décision de l'employeur d'appliquer la loi et
de fixer l'horaire de travail à 35 heures, en l'absence d'accord
d'entreprise, constituerait une modification du contrat de travail, de
même que des modifications connexes relatives au temps de pause, au repos
compensateur et à l'annualisation, même prévues par un
accord d'entreprise.
Evoquant le principe selon lequel le licenciement d'un salarié serait
réputé reposer sur une cause réelle et sérieuse si
ce dernier refusait une modification de son contrat de travail
consécutivement à la signature d'un accord,
M. Arnold Brum
a souligné que tout salarié ayant intérêt à
quitter l'entreprise pourrait en conséquence prétendre avoir
été licencié et obliger l'employeur à lui verser
des indemnités de licenciement. A cette occasion, les salariés de
plus de 57 ans pourraient même prétendre au bénéfice
des allocations de chômage jusqu'à leur retraite.
Il a dénoncé le fait que le licenciement pourrait être
considéré comme abusif et l'employeur condamné à
des dommages et intérêts lorsque la durée du travail serait
réduite en l'absence d'accord, alors même qu'il ne s'agirait pour
l'employeur que d'appliquer la loi. Il a estimé que l'application dans
l'entreprise d'un horaire égal à la durée légale du
travail et les conséquences qui en résultaient sur la
rémunération et l'organisation du temps de travail ne devaient
pas constituer une modification du contrat de travail.
Evoquant l'article 16 relatif au salaire minimum interprofessionnel de
croissance (SMIC), il a rappelé qu'il était prévu qu'au
1
er
juillet 2005, le SMIC horaire aurait augmenté de
façon à rendre la garantie mensuelle sans objet. Il en a conclu
que d'ici cinq ans, le SMIC horaire devrait donc rattraper le 11,4 % de
différentiel entre 152 heures et 169 heures, l'évolution de
l'indice des prix entre 1999 et 2005 et la moitié de l'augmentation du
pouvoir d'achat du " salaire mensuel de base ouvrier " (SMBO). Il a
ainsi évalué à au moins 15 % l'augmentation du
pouvoir d'achat du SMIC horaire en 2005 par rapport à 1999.
M. Arnold Brum
a déclaré qu'il convenait, dans ces
conditions, d'adopter des dispositions transitoires permettant d'amortir le
choc de l'augmentation du SMIC. Il a suggéré que le SMIC horaire
soit indexé sur le seul indice des prix pendant deux ans, que la
garantie mensuelle soit indexée sur le seul indice des prix et que
l'augmentation de 11,4 % du SMIC soit reportée au-delà du
1
er
juillet 2005.
III. AUDITIONS DU MARDI 5 OCTOBRE 1999
A. AUDITION DE M. GEORGES RIFFARD, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA FÉDÉRATION DES ÉTABLISSEMENTS HOSPITALIERS DE L'ASSISTANCE PRIVÉE (FEHAP)
Réunie le
mardi 5 octobre 1999
sous la
présidence de
M. Jean Delaneau, président
, la
commission a poursuivi son programme
d'auditions
sur le
projet de loi
n° 1786 (rectifié)
(AN) relatif à la
réduction négociée du temps de travail.
La commission a tout d'abord entendu
M. Georges Riffard, directeur
général de la Fédération des établissements
hospitaliers de l'Assistance privée
(FEHAP).
M. Georges Riffard
a rappelé que la loi du 13 juin 1998
avait placé les établissements devant les termes d'une
alternative : soit s'engager dans le processus de négociation, soit
attendre la mise en oeuvre obligatoire de la réduction du temps de
travail au 1
er
janvier 2000. Toutefois, dans ce dernier cas,
l'absence d'aides de l'Etat ne pouvait qu'entraîner de graves
difficultés budgétaires pour les établissements.
A cet égard, il a estimé que les dépenses strictement
liées à l'application des 35 heures au 1
er
janvier 2000 entraînaient une augmentation salariale de 12,6 %,
compte tenu des heures supplémentaires majorées, en soulignant
que cette augmentation n'était pas compatible avec le niveau des
enveloppes de financement limitées à environ 2 % de hausse
annuelle.
Soulignant que la FEHAP devant choisir " entre le choléra et la
myxomatose ", avait opté pour le moindre mal et s'était
engagée dans le processus de négociation sur la réduction
du temps de travail (RTT),
M. Georges Riffard
a
précisé que l'accord signé le 4 mars 1999,
après plus d'un an de négociations et trois additifs successifs,
avait fait l'objet d'un refus d'agrément du ministre de l'emploi et de
la solidarité au début du mois d'août. Il a ajouté
que la FEHAP avait introduit un recours gracieux contre la décision de
refus.
Rappelant que la convention collective du 31 octobre 1951 recouvrait
148.000 salariés dans 2.200 établissements sanitaires,
sociaux ou médico-sociaux, il a souligné que l'accord du 4 mars
1999 s'était traduit par la signature d'environ 1.000 accords dans les
établissements, la plupart ayant été signés avant
le 1
er
juillet 1999 pour bénéficier de l'aide maximale
et que plus d'un salarié sur deux, relevant de la convention collective,
était aujourd'hui concerné par un accord d'entreprise ou
d'établissement.
Il a rappelé que la FEHAP avait, à l'origine,
préconisé le principe de l'agrément d'un accord national,
modulable, qui aurait été ensuite décliné au niveau
de chaque établissement, les services extérieurs de l'Etat
n'ayant alors qu'à vérifier la conformité des
aménagements locaux au regard de la loi du 13 juin 1998 et de l'accord
national.
Il a souligné toutefois que cette proposition de la FEHAP n'avait pas
été retenue par le Gouvernement qui avait estimé que tous
les accords et décisions unilatérales portant sur la RTT devaient
être soumis à l'agrément du ministre au sens de l'article
16 de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975.
Il a estimé que, dans le secteur social et médico-social,
3.000 accords au total avaient été transmis au
ministère pour agrément et que leur examen nécessiterait
une période de six mois au moins. Il a souligné la
difficulté soulevée par le fait que des accords signés en
décembre ne prendraient juridiquement effet qu'en juin 2000,
c'est-à-dire après la date butoir du 1
er
janvier 2000
prévue par la loi du 13 janvier 1998 pour l'application des " 35
heures ".
Il a constaté que les établissements en question pourraient
être mis dans l'obligation d'appliquer la RTT sans aide de l'Etat, au
cours du premier semestre 2000, ce qui entraînerait une hausse de la
masse salariale de 6 % en 2000.
Il a estimé nécessaire que les établissements sociaux et
médico-sociaux bénéficient d'une dérogation
transitoire permettant de reporter au 1
er
juillet 2000 la date
de mise en oeuvre obligatoire de la RTT. Il a estimé important que les
établissements sociaux et médico-sociaux ne perdent pas le
bénéfice des négociations longues conduites au cours du
premier semestre 1999 qui avaient conduit à la signature de plus de
1.000 accords dans le secteur couvert par la convention du 31 octobre 1951.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a fait part du désarroi de certains
gestionnaires vis-à-vis des règles d'application de la loi. Il
s'est interrogé sur l'origine des retards intervenus pour agréer
l'accord du 4 mars 1999, sur l'articulation de l'accord signé par la
FEHAP avec l'accord de la branche professionnelle du secteur sanitaire, social
et médico-social à but non lucratif (UNIFED) du 1
er
avril 1999 agréé le 25 juin et étendu le 4 août. Il
s'est demandé si le projet de loi remettait en question certains aspects
des accords signés dans les établissements. Il s'est
inquiété du financement de la RTT par les employeurs du secteur
hospitalier privé et s'est posé des questions sur le sort
particulier réservé aux établissements publics.
M. Jean Delaneau, président,
s'est interrogé sur
l'éventualité de reporter d'un an la date de mise en oeuvre
obligatoire de la RTT.
En réponse,
M. Georges Riffard
a indiqué qu'il n'avait pas
d'explications officielles du retard pour l'agrément de l'accord FEHAP.
Selon certaines hypothèses, l'accord remettrait en cause le principe
d'annualité budgétaire, ce qui semble toutefois relever d'une
erreur d'interprétation selon
M. Georges Riffard
.
Par ailleurs, l'accord ne permettrait pas d'assurer un équilibre
salarial du fait du caractère insuffisant des retenues sur les salaires.
Sur ce point,
M. Georges Riffard
a précisé que l'accord
FEHAP prévoyait deux retenues, portant respectivement sur 2,58 % et
0,26 % du salaire, qui étaient plus élevées que
celles fixées dans d'autres accords signés par les organismes
nationaux du secteur médico-social non lucratif et agréés
par le ministre.
Enfin, il a évoqué l'argument de " proximité "
avec la fonction publique hospitalière, tout en s'interrogeant sur la
portée de ce motif dans la mesure où le secteur
médico-social n'est pas comparable en importance au secteur hospitalier.
Concernant l'accord UNIFED, il a rappelé qu'il avait été
convenu en 1998 de distinguer, pour l'application de la loi sur la RTT, trois
niveaux : l'accord de branche devait porter sur toutes les dispositions
relatives à l'aménagement du temps de travail et à
l'organisation de la flexibilité ; les avenants aux conventions
collectives devaient régler les questions relatives à la
durée du travail, au maintien des salaires et aux embauches ;
enfin, les situations particulières devaient être traitées
par les accords d'entreprise ou d'établissement.
M. Georges Riffard
s'est donc félicité de
l'agrément de l'accord de l'UNIFED mais a souhaité que, par
cohérence, l'agrément des accords signés par les deux
autres niveaux de négociations intervienne maintenant le plus rapidement
possible.
Concernant le projet de loi, il a observé que les dispositions
prévues pour les cadres ou pour les salariés à temps
partiel correspondaient largement aux choix effectués dans le cadre de
l'accord de la FEHAP. En revanche, il a souhaité que soient
mentionnés non seulement les accords étendus mais
également les accords de branche agréés dans le texte du
projet de loi afin d'éviter toute incertitude juridique pour l'avenir.
Concernant le financement de la RTT, il a souligné que cette
dernière devrait entraîner mécaniquement une embauche
supplémentaire de 6 à 7 % dans la mesure où les gains
de productivité dans le secteur étaient difficiles à
dégager et où le service auprès des personnes prises en
charge revêtait un caractère permanent. Il a indiqué que le
financement était assuré à la fois par les retenues sur
salaires et par l'aide de l'Etat qui représenterait entre 2,5 et
3,5 % du salaire moyen.
Il n'a pas souhaité porter de jugement sur la situation du secteur
public hospitalier.
Concernant le moratoire d'un an, il a souligné que la demande de la
FEHAP portait sur un report de six mois seulement et qu'elle était
motivée uniquement par le caractère exorbitant du droit commun de
la procédure d'agrément prévue à l'article 16 de la
loi du 30 juin 1975.
En réponse à M. Jean Delaneau, président,
M. Georges
Riffard
a souligné que le blocage des rémunérations
intervenu en 1999 à la suite de la signature des accords devrait faire
l'objet de report d'année en année une fois l'accord
agréé.
M. Philippe Nogrix
s'est interrogé sur l'intention
affichée par le Gouvernement d'éviter toute dérive
budgétaire dans le secteur social et médico-social à
l'occasion de la mise en oeuvre de la RTT. Il s'est interrogé sur le
financement du dispositif au-delà des cinq ans prévus par la loi
pour le versement des aides. Il s'est demandé si le délai de six
mois ne pouvait pas être réduit en pratique. Il s'est
interrogé sur l'incidence des mesures relatives à la tarification
dans le secteur social et médico-social.
M. Paul Blanc
s'est également interrogé sur la situation
financière des établissements sociaux et médico-sociaux
dans un délai de cinq ans.
M. Jean Chérioux
a rappelé que l'aide de l'Etat devait
diminuer progressivement au cours des cinq prochaines années et s'est
enquis de l'incidence de la récente jurisprudence de la Cour de
cassation sur les règles de compensation des heures de veille.
M. Claude Huriet
s'est demandé si la mise en oeuvre de la RTT
n'aurait pas pour conséquence d'augmenter la participation
demandée aux familles des personnes prises en charge dans les
établissements sociaux et médico-sociaux.
En réponse,
M. Georges Riffard
a souligné que la situation
des usagers était une préoccupation de la FEHAP, en particulier
dans les 600 établissements d'hébergement pour personnes
âgées. Il a souligné qu'il était important de mettre
en oeuvre le plus rapidement possible la RTT, afin de pouvoir obtenir les aides
de l'Etat et d'éviter d'être dans l'obligation de reporter le
coût salarial sur d'autres financeurs.
Il a précisé qu'à l'expiration de la période de
cinq ans, les établissements continueraient à appliquer les
mesures de modération salariale et à bénéficier de
l'aide structurelle versée pour chaque salarié qui correspondait
environ à 1,7 % de la masse salariale, ainsi que de l'incidence des
allégements structurels de l'échelle des
rémunérations. Il a considéré que les recettes
correspondraient environ à 5 % de la masse salariale, admettant
qu'un problème pourrait se poser pour les établissements qui
auraient procédé à 7 % d'embauches
supplémentaires.
S'agissant des délais d'examen par le ministère, il a
rappelé que, sur les 2.000 accords relatifs au secteur social et
médico-social déposés avant le 1
er
juillet
1999, seuls une vingtaine d'accords avaient été
agréés par l'administration. Il s'est donc interrogé sur
la capacité de la commission compétente à examiner environ
3.000 accords au total d'ici au 1
er
janvier 2000.
Il a redouté que l'opération d'agrément des accords soit
déléguée dans les services extérieurs de l'Etat, ce
qui risquerait de conduire à de multiples rejets pour de simples motifs
de précaution.
Il a estimé que le problème de la tarification applicable aux
établissements d'hébergement pour personnes âgées
était indépendant de celui de la RTT. Il s'est
félicité que la nouvelle tarification permette de mieux
répartir les charges, tout en soulignant que le problème majeur
était celui du niveau des enveloppes de financement.
Enfin, il a regretté le comportement évolutif de la Cour de
cassation sur le problème de la compensation des heures de veille, en
soulignant que les dettes cumulées de certains établissements
pouvaient dépasser 50 % de leur budget annuel.
Il a estimé souhaitable une solution législative qui renverrait
aux conventions collectives nationales agréées une
compétence en matière de fixation des compensations des heures
d'astreinte et qui prévoirait en outre qu'aucun nouveau contentieux ne
pourrait être ouvert après la promulgation de la loi.
B. AUDITION DE M. MICHEL JALMAIN, SECRÉTAIRE NATIONAL DE LA CONFÉDÉRATION FRANÇAISE DÉMOCRATIQUE DU TRAVAIL (CFDT)
Puis
la commission a entendu
M. Michel Jalmain, secrétaire national de la
Confédération française démocratique du travail
(CFDT).
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souhaité connaître le bilan
que dressait la CFDT des accords conclus dans le cadre de la loi du 13 juin
1998, et son opinion sur la reprise, par le projet de loi, des dispositions
signées par les partenaires sociaux. Il s'est interrogé sur la
procédure du mandatement, ainsi que sur la question de la
représentativité syndicale que le projet de loi posait
indirectement. Il a souhaité également connaître la
position de la CFDT sur la prise en charge du financement des
allégements de charges sociales par les régimes sociaux.
Après avoir rappelé que la CFDT avait depuis longtemps fait de la
réduction négociée du temps de travail une priorité
de son action,
M. Michel Jalmain
a estimé que le bilan des
accords passés dans le cadre de la loi du 13 juin 1998 et de la loi
" de Robien " était encourageant et prouvait que la
réduction du temps de travail (RTT) était créatrice
d'emplois.
Il s'est félicité que le dialogue social ait été
relancé au sein des entreprises et que la RTT ait ouvert un nouvel
espace de négociation.
Il a observé que 115 accords de branche avaient été
signés, en rappelant que ce résultat était inattendu dans
la mesure où la loi du 13 juin 1998 privilégiait la
négociation d'entreprise.
Puis il a indiqué que la CFDT tirait quatre enseignements de
l'application de la loi du 13 juin 1998.
Tout d'abord, la réduction du temps de travail a permis des embauches
supplémentaires dans les entreprises où elle est effectivement
appliquée.
De plus, elle permet une approche différente par les salariés des
questions relatives à la flexibilité du travail en mettant en
avant l'amélioration des conditions de travail.
Ensuite, les salariés portent un jugement positif sur la RTT : 70
à 75 % des salariés concernés ne souhaitent pas
revenir à la situation antérieure lorsqu'ils
bénéficient d'un accord sur la RTT.
Enfin, la RTT apparaît comme un instrument de relance du dialogue social
et de la négociation collective, y compris dans les petites entreprises
qui devront mettre en oeuvre obligatoirement la RTT en 2004 seulement, mais qui
ont été beaucoup plus nombreuses que prévu à signer
des accords.
M. Michel Jalmain
a considéré que le projet de loi
reprenait " à 90 % " le contenu des accords signés
dans le cadre de la loi du 13 juin 1998.
Puis il a évoqué les principales modifications du projet de loi
demandées par la CFDT. Il a considéré tout d'abord que la
majoration de salaire pour heures supplémentaires devrait être de
50 % dès la 43
e
heure.
Il a demandé, dans une logique de création d'emploi, que le repos
compensateur corresponde aux heures supplémentaires effectuées et
ne corresponde pas à la seule majoration de ces heures.
Il a souhaité que, dans les entreprises de moins de dix salariés,
le repos compensateur, applicable à partir de la 131
e
heure
supplémentaire, soit de 100 % au lieu de 50 %, pour rester
dans la logique de création d'emploi.
Le deuxième point concerne la durée annuelle maximale de travail
qui a été fixée à 1.600 heures dans le projet
de loi alors que quelques accords, notamment dans le secteur du bâtiment,
prévoient une durée supérieure.
M. Michel
Jalmain
a considéré que l'horaire maximum sur douze semaines
devrait être réduit à 42 heures hebdomadaires au lieu de 46
heures actuellement prévues.
En troisième lieu, le projet de loi ne définit pas assez
clairement la catégorie des cadres pour lesquels un régime de
convention de forfait peut être mis en oeuvre.
Enfin, se pose la question du lien entre la formation professionnelle et la
réduction du temps de travail.
M. Michel Jalmain
a rappelé qu'il existait déjà un
accord interprofessionnel de 1991 autorisant la prise en charge de 25 % du
temps de formation en dehors du temps de travail, mais il a souligné que
cette disposition était très peu appliquée en pratique
sauf pour quelques catégories de cadres. Il a estimé que cet
accord de 1991 devait être rediscuté par les partenaires sociaux
ou que la question pourrait être abordée dans un projet de loi
relatif à la formation professionnelle.
S'agissant des leçons à tirer du mandatement,
M. Michel
Jalmain
a estimé que, si quelques dizaines d'accords
négociés par des salariés mandatés pouvaient
paraître contestables, ceux-ci n'en demeuraient pas moins
réguliers au sens de la loi. Il a précisé que les sujets
litigieux, portant notamment sur la possibilité de travailler le samedi,
étaient largement " subjectifs " et pouvaient être
appréciés au regard des circonstances locales.
D'une manière générale, il a estimé que le recours
au mandatement avait eu des aspects positifs en soulignant que 45 % des accords
étendus avaient été signés dans le cadre de cette
procédure, pourtant vivement critiquée par certains en 1998.
Concernant le référendum dans l'entreprise,
M. Michel Jalmain
a estimé que cette procédure pouvait se comprendre lorsqu'un
ou des syndicats majoritaires veulent s'opposer à des accords conclus
par un ou des syndicats minoritaires. En revanche, il a regretté que le
projet de loi introduise automatiquement une validation de l'accord par
référendum lorsque celui-ci est conclu par une ou des
organisations syndicales minoritaires, par un salarié mandaté ou
par décision de l'employeur.
Il a estimé que l'institutionnalisation du référendum par
la loi fournissait un moyen de contournement des organisations syndicales,
alors que ces dernières sont nécessaires pour permettre un
dialogue social construit et efficace.
Il a estimé que le référendum ne manquerait pas de
réveiller des comportements corporatistes et individualistes. Rappelant
qu'un accord sur la réduction du temps de travail était toujours
le résultat d'un compromis équilibré mais parfois
difficile et que l'intérêt collectif n'était pas la somme
des intérêts particuliers, il a souligné le risque que des
accords soient remis en cause au cours des campagnes provoquées par les
référendums au détriment des organisations signataires.
Il a souhaité que le référendum ne soit pas obligatoire
lorsque l'accord est conclu dans une entreprise pourvue de
délégués syndicaux ou par des personnels
mandatés ; il s'est prononcé en revanche en faveur d'une
amélioration du recours au droit d'opposition des syndicats en tenant
compte des suffrages exprimés aux élections professionnelles.
S'agissant de la représentativité syndicale, il a indiqué
que la CFDT était prête à débattre du décret
du 31 mars 1966, tout en soulignant que cette question était
indépendante de celle de la RTT.
Enfin, concernant le financement des allégements de charges sociales par
les régimes sociaux,
M. Michel Jalmain
s'est
déclaré très défavorable à l'article 2 du
projet de loi de financement de la sécurité sociale, en rappelant
que les régimes gérés par l'Association des régimes
de retraites complémentaires (ARRCO) et par l'Association
générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC)
connaissaient déjà des difficultés et que, par ailleurs,
il était souhaité une meilleure indemnisation du chômage
par l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC).
C. AUDITION DE MME MICHELLE BIAGGI, SECRÉTAIRE CONFÉDÉRAL DE LA CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DU TRAVAIL-FORCE OUVRIÈRE (CGT-FO), ACCOMPAGNÉE DE M. JEAN-CLAUDE MAILLY, ASSISTANT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL
Enfin, la commission a procédé à
l'audition
de
Mme Michelle Biaggi, secrétaire confédéral de la
Confédération générale du travail-Force
ouvrière
(CGT-FO), accompagnée de
M. Jean-Claude Mailly,
assistant du secrétaire général
.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
concernant le bilan de la loi du 13 juin 1998,
Mme Michelle Biaggi
a déclaré que les 120.000 créations d'emplois
prises en compte dans le bilan de la loi du 13 juin 1998 comprenaient
également des emplois créés en application de la loi
" de Robien ". Elle a estimé que ces promesses d'emplois
devaient encore se réaliser étant donné le délai
d'un an laissé aux employeurs pour procéder aux embauches.
Elle a observé que les salariés en place subissaient le
contrecoup des 35 heures sous la forme d'une augmentation du stress et la
suppression de certains temps de pause et d'habillage.
Elle a considéré que le projet de loi était très
complexe et difficilement lisible. Après avoir rappelé que Force
ouvrière avait toujours souhaité privilégier les accords
de branche par rapport aux accords d'entreprises, elle a regretté que le
projet de loi adopte une démarche contraire. Elle a remarqué que
l'accord dans la métallurgie avait eu pour avantage d'établir un
cadre au niveau de la branche alors que les employeurs menaçaient de
dénoncer la convention collective.
Mme Michelle Biaggi
a estimé que la modération salariale
mise en oeuvre par la plupart des accords relatifs à la réduction
du temps de travail était inacceptable et elle a indiqué que son
organisation demandait une négociation annuelle sur les
rémunérations.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
sur la compatibilité du projet de loi avec la directive
européenne relative au travail à temps partiel,
Mme Michelle Biaggi
a déclaré que la
définition du travail à temps partiel envisagée dans la
directive ne satisfaisait pas Force ouvrière. Elle a estimé que
cette définition pouvait entraîner une incitation au travail
à temps partiel subi, de même qu'un effet d'aubaine pour
l'employeur à travers les incitations financières liées au
travail à temps partiel.
Elle a considéré qu'il était anormal que le projet de loi
institue un salaire minimum de croissance (SMIC) " à
compartiments " pour les salariés dont la durée du travail
aura été abaissée à 35 heures. Elle a
observé qu'un délai de cinq ans serait nécessaire pour
faire converger cette double échelle du SMIC au moyen de " coups de
pouce ". Elle a estimé que ce mécanisme aurait pour
conséquence de bloquer l'évolution des salaires situés
au-dessus du SMIC. Elle a regretté que trois embauches sur quatre
réalisées dans le cadre de la RTT donnaient lieu à des
contrats à durée déterminée éventuellement
à temps partiel. Elle a également observé que certains de
ces emplois à durée déterminée, créés
à l'occasion de la RTT, étaient dévolus à des
salariés qui occupaient auparavant un statut d'intérimaire dans
la même société.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
sur le bilan de mandatement,
Mme Michelle Biaggi
a rappelé que
Force ouvrière n'était pas, à l'origine, favorable au
mandatement. Elle a remarqué que le bilan n'était pas bon et que
cette procédure n'avait notamment pas entraîné -comme cela
aurait été souhaitable- de création de sections syndicales
ou d'instances représentatives. Elle a estimé que le recours au
mandatement pouvait constituer une manoeuvre de contournement des syndicats.
Elle a considéré qu'il aurait été
préférable de désigner des délégués
syndicaux dans les entreprises de moins de 50 salariés. Elle a
réaffirmé l'opposition de Force ouvrière à la
technique du mandatement.
En réponse à deux questions de
M. Louis Souvet,
rapporteur,
M. Jean-Claude Mailly
a jugé que la question
de la représentativité syndicale et celle du financement des
allégements de charges constituaient les deux " dégâts
collatéraux " des 35 heures, ces deux sujets n'ayant rien
à voir avec le texte.
Concernant la représentativité syndicale, il a
déclaré que Force ouvrière refusait de traiter ce
thème dans le cadre de la discussion sur les 35 heures. Evoquant
les accords majoritaires, il a observé que la rédaction de
l'article 11 donnait un pouvoir de veto aux organisations syndicales sur
la possibilité pour l'entreprise de bénéficier des
nouveaux allégements. Il a estimé que ce n'était pas
là le rôle de ces organisations. Il a remarqué que seule la
CGT soutenait cette disposition qui constituait, en réalité, un
" cavalier " au sein du projet de loi.
Poursuivant sur la question du financement des allégements de charges
sociales,
M. Jean-Claude Mailly
a observé que le projet de loi
relatif à la réduction négociée du temps de travail
était lié au projet de loi de financement de la
sécurité sociale et prévoyait une contribution des
régimes sociaux qui pourrait atteindre jusqu'à 20 milliards
de francs pour l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce
(UNEDIC).
Il s'est interrogé sur les conséquences qu'aurait ce
prélèvement sur les cotisations et les prestations et il a
observé qu'un tel dispositif revenait à faire financer une partie
des allégements de charges par les chômeurs, les retraités
ou les assurés sociaux.
M. Jean-Claude Mailly
a observé que ces mesures intervenaient de
surcroît au moment même où allaient débuter les
négociations relatives à la renégociation de la convention
UNEDIC et risquaient de les compromettre. Il a souligné qu'existait un
accord entre l'ensemble des partenaires sociaux pour refuser le principe de
cette contribution. Il a contesté par ailleurs le postulat selon lequel
la réduction du temps de travail procurerait des recettes
supplémentaires aux régimes de protection sociale, estimant
indispensable une évaluation préalable des effets sur l'emploi
réel, hors effets d'affichage et effets d'aubaine.
En réponse à une question de
M. Philippe Nogrix
qui
s'interrogeait sur l'attitude des syndicats vis-à-vis de la
modération salariale inscrite dans les accords relatifs à la RTT,
Mme Michelle Biaggi
a confirmé que Force ouvrière ferait
en sorte de renégocier les salaires tous les ans, sans tenir compte de
la modération salariale résultant de la RTT.
M. Serge Franchis
s'est interrogé sur l'intérêt
qu'il pourrait y avoir à réduire le montant des cotisations
salariales d'un employé payé au SMIC pour conserver le niveau de
sa rémunération suite à une baisse de la durée du
travail, de préférence à la création d'un double
barème. Il a observé que la finalité affichée de ce
projet de loi était l'emploi et que cet objectif nécessitait des
concessions de part et d'autre.
M. Jean-Claude Mailly
a considéré qu'il existait un
débat sur le fait que la réduction du temps de travail pouvait
avoir pour objet la création d'emplois. Il a rappelé que Force
ouvrière estimait qu'il n'y avait pas de corrélation statistique
entre les deux variables et que plus des trois quarts des emplois
créés depuis deux ans étaient dus à la croissance.
Il a souligné que la réduction du temps de travail ne constituait
que la troisième source de création d'emplois, loin
derrière les emplois-jeunes.
Il a jugé que nul ne pouvait prendre l'engagement qu'il n'y aurait pas
de hausse de salaires dans les cinq ans et que l'amoindrissement de la part des
cotisations sociales dans le financement de la protection sociale posait un
problème de fond étant donné qu'il n'appartenait pas aux
partenaires sociaux de gérer le produit de l'impôt.
Mme Michelle Biaggi
a déclaré que Force ouvrière
n'était pas favorable à des accords de réduction du temps
de travail signés par des groupements d'employeurs, en raison du
problème posé par le choix de la convention de branche
applicable.
IV. AUDITIONS DU MERCREDI 6 OCTOBRE 1999
A. AUDITION DE MME MARYSE DUMAS, SECRÉTAIRE CONFÉDÉRALE DE LA CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DU TRAVAIL (CGT) DE M. ROLAND METZ, ANIMATEUR DU SECTEUR GARANTIES COLLECTIVES, ET DE M. MICHEL DONEDDU, SECRÉTAIRE NATIONAL DE L'UNION GÉNÉRALE DES INGÉNIEURS, CADRES ET TECHNICIENS DE LA CGT (UGICT-CGT)
Réunie le
mercredi 6 octobre 1999
sous la
présidence de
M. Jean Delaneau, président
, la commission a
poursuivi son programme d'auditions sur le
projet de loi n° 1786
(rectifié)
(AN) relatif à la
réduction
négociée du temps de travail.
La commission a tout d'abord entendu
Mme Maryse Dumas, secrétaire
confédérale de la Confédération
générale du travail
(CGT),
M. Roland Metz, animateur
du secteur garanties collectives,
et
M. Michel Doneddu,
secrétaire national de l'Union générale des
ingénieurs, cadres et techniciens de la CGT
(UGICT-CGT).
Evoquant en introduction les rapports entre la loi et la négociation
collective,
Mme Maryse Dumas
a estimé que la loi devait
contribuer à la relance de la négociation collective en mettant
les salariés en position de force face aux représentants du
patronat. Elle a considéré que la réduction de la
durée hebdomadaire du travail constituait une nouvelle conquête
sociale, de nature à favoriser les créations d'emplois.
Mme Maryse Dumas
a ensuite abordé les huit points de la position
de la CGT.
Elle a affirmé que la CGT contestait le projet d'allégement de
cotisations sociales prévu à l'article 12 à la fois sur la
forme, puisqu'il résultait d'une décision unilatérale du
Premier ministre, et sur le fond, dans la mesure où il aboutissait
à instituer un système de cotisations sociales progressives
préjudiciable aux augmentations de salaire.
Elle a aussi revendiqué l'augmentation du SMIC horaire de 11,4 %
à la date de mise en oeuvre de la réduction du temps de travail,
soit en 2000 pour les grandes entreprises et 2002 pour les petites, estimant
qu'une telle augmentation ne se traduirait pas par celle du coût du
travail : en effet, la masse salariale des entreprises demeurerait
inchangée en l'absence d'embauche. C'est pourquoi elle a souhaité
que les aides publiques aillent aux créations d'emploi et non aux
salaires.
Mme Maryse Dumas
a indiqué que, pour que la réduction de
la durée hebdomadaire du travail à 35 heures se traduise par une
amélioration des conditions de travail des salariés, il convenait
de réduire également les durées maximales du travail
journalière, hebdomadaire, sur douze semaines et en continu.
Elle a précisé que la CGT demandait le retrait de l'article 10 du
projet de loi, qui permettait d'exclure le temps de formation du temps de
travail.
Mme Maryse Dumas
a ensuite abordé la question des heures
supplémentaires et souhaité que le régime actuellement
prévu à partir de la 40
e
heure s'applique dès
la 36
e
aux dates prévues pour l'entrée en vigueur des
35 heures. Elle a aussi estimé que la totalité des heures
supplémentaires devrait être comptabilisée dans le
contingent, que ces heures aient fait l'objet d'une rémunération
ou d'un repos compensateur.
Elle a affirmé que les cadres devaient bénéficier de la
réduction du temps de travail au même titre que l'ensemble des
salariés et estimé possible d'établir le décompte
horaire de leur durée du travail.
Assimilant l'annualisation du temps de travail à une flexibilité
inefficace pour favoriser les créations d'emploi, elle a fait part de
l'opposition totale de son organisation syndicale à cette méthode
de gestion du temps de travail.
Prenant acte toutefois de son existence,
Mme Maryse Dumas
a
indiqué que la CGT formulait en conséquence des revendications
pour en contenir la mise en oeuvre. Elle a ainsi déclaré que les
motifs du recours à la modulation ou à l'annualisation devaient
être sévèrement encadrés, que celui-ci devait
être précisé par des accords de branche et d'entreprise,
que la modulation ou l'annualisation ne devait pas s'appliquer au temps partiel
et qu'elle devait faire l'objet d'une programmation très à
l'avance, avec un délai de prévenance de huit jours minimum. En
outre, les contreparties actuelles, à savoir une durée du travail
hebdomadaire calculée à l'année inférieure à
la durée légale et un contingent d'heures supplémentaires
limité à 80 heures, devaient être conservées.
Mme Maryse Dumas
a ensuite évoqué le temps partiel, dont
elle a estimé que sa diffusion au sein du monde du travail aggravait les
inégalités entre les femmes et les hommes. Elle a
déclaré que les salariés travaillant à temps
partiel devaient bénéficier de la réduction du temps de
travail prévue par la loi, soit par un retour au temps plein, soit par
une augmentation de salaire de 11,4 %, soit encore par une diminution du
temps de travail avec maintien du salaire. Elle a fait part de son opposition
au temps partiel intermittent, auquel faisait référence le projet
de loi.
Elle a enfin affirmé l'opposition de la CGT au référendum
patronal, la CGT étant en revanche favorable à la diminution du
seuil d'effectifs pour la désignation de délégués
syndicaux et à ce que la signature par les syndicats majoritaires soit
érigée en condition de validité, parmi d'autres, des
accords d'entreprise.
M. Louis Souvet, rapporteur,
faisant référence aux huit
points abordés par Mme Maryse Dumas, lui a demandé lequel
était le plus important pour la CGT.
Il a souhaité connaître le bilan que traçait la CGT des
accords conclus dans le cadre de la loi du 13 juin 1998, ainsi que du
" mandatement Aubry ", ainsi que les positions de la
confédération sur l'éventuelle réforme des
dispositions réglementaires de 1966 concernant la
représentativité syndicale et sur la participation des
régimes sociaux au financement des allégements de charges
sociales, prévues par le projet de loi.
Mme Maryse Dumas
a rappelé que la CGT était un syndicat
qui n'avait pas vocation à amender ou voter un projet de loi, et qui ne
devait donc pas établir une hiérarchie dans ses huit
revendications.
Dressant le bilan -qu'elle a qualifié de mitigé- des accords
conclus dans le cadre de la loi du 13 juin 1998, elle a estimé toutefois
qu'il démontrait que la réduction du temps de travail pouvait
être à l'origine de nombreuses créations d'emplois. Elle a
cependant considéré que les accords conclus concernaient trop peu
d'entreprises et de salariés et que les négociations laissaient
apparaître des situations de blocage dans de grandes entreprises.
Répondant à une question de
M. Jean Delaneau,
président
, elle a confirmé que 120.000 emplois avaient
été créés ou sauvegardés, mais que ce
résultat n'était pas suffisant pour améliorer la situation
du marché du travail.
Elle a rappelé les réticences de la CGT à l'égard
du mandatement, rappelant que son organisation demandait l'abaissement des
seuils pour la création de délégués syndicaux et
souhaitait plus généralement renforcer les droits syndicaux dans
les petites entreprises.
Elle a confirmé que la CGT était favorable à la notion
d'accord majoritaire ; elle a estimé que les syndicats majoritaires
devaient obtenir une primauté dans la négociation collective, les
organisations minoritaires se voyant ouvrir l'exercice d'un droit d'opposition.
Elle a affirmé, s'agissant de la question de la
représentativité syndicale, que, si certains considéraient
que les dispositions réglementaires de 1966 avaient empêché
la " balkanisation " syndicale, elles avaient également
contribué à la faiblesse du taux de syndicalisation en France.
Mme Maryse Dumas
a fait part de l'opposition de la CGT à toute
ponction financière des régimes de protection sociale pour
financer les allégements de charges sociales. Alors que quatre
chômeurs sur dix seulement sont aujourd'hui indemnisés par
l'UNEDIC, elle a estimé que cet organisme avait mieux à faire que
de contribuer à un tel financement.
M. Serge Franchis
lui a demandé s'il existait, en France, une
institution ou un syndicat qui apporte véritablement son soutien au
projet de loi sur la réduction négociée du temps de
travail.
M. Guy Fischer,
prenant acte des propos de Mme Maryse Dumas selon
lesquels les allégements de charges généralisés ne
favorisaient pas l'emploi, lui a demandé si la CGT pouvait formuler une
proposition établissant un lien entre le versement des aides publiques
et les créations d'emplois.
Mme Nicole Borvo
l'a interrogée sur la distinction
opérée par le projet de loi entre diverses catégories de
cadres.
Enfin,
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a demandé à la
représentante de la CGT comment résoudre les contradictions
existant entre certaines dispositions du projet de loi et des stipulations
d'accords collectifs déjà signées. Elle lui a
également demandé si ce projet de loi comportait suffisamment de
dispositions incitant à réduire la durée du travail
jusqu'à 32 heures.
Répondant aux orateurs,
Mme Maryse Dumas
a estimé que le
projet de loi n'allait pas assez loin en matière de réduction du
temps de travail, puisqu'il tendait à établir une norme au niveau
des 35 heures, au lieu d'inciter les entreprises à aller au-delà.
Elle s'est déclarée favorable à l'évaluation des
effets de toutes les aides publiques à l'emploi actuellement
versées aux entreprises, puis à une réforme des
cotisations sociales patronales distinguant des cotisations basées sur
le salaire et des cotisations établies sur la base du rapport existant
dans l'entreprise entre les salaires et la valeur ajoutée. Une telle
réforme, qui permettrait de taxer les revenus financiers, serait de
nature à favoriser les créations d'emploi.
Elle a également considéré que l'obtention des aides
publiques devait être soumise à trois conditions : la
réduction effective du temps de travail, la conclusion d'un accord
majoritaire et la réalisation d'un taux d'embauches nouvelles de
6 % au moins pour toute réduction de la durée du travail de
10 %.
Evoquant de possibles contradictions entre des accords déjà
conclus et le projet de loi actuellement en discussion, elle a souligné
la différence de nature existant entre les accords collectifs, dont le
contenu traduit l'état d'un rapport de force à un moment et en un
lieu donné, et la loi qui doit édicter des dispositions
générales et protectrices.
Elle a à cet égard cité l'exemple de l'accord textile qui
avait été signé par plusieurs organisations syndicales,
dont la CGT. Elle a observé que tous les syndicats signataires avaient
émis des réserves sur ses stipulations concernant le
régime des heures supplémentaires et qu'ils avaient
souhaité que la seconde loi sur la réduction du temps de travail
contribue à en améliorer le contenu.
Elle a enfin rappelé que la CGT s'engageait de toutes ses forces en
faveur de la réduction du temps de travail. Rappelant qu'au cours de ce
siècle, seulement quatre lois avaient réduit le temps de travail,
elle a affirmé que son organisation syndicale ne manquerait pas le
rendez-vous que constituait le présent projet de loi, la preuve
étant faite désormais que, sans loi de réduction du temps
de travail, il n'y avait pas de réduction du temps de travail.
Complétant les propos de Mme Maryse Dumas,
M. Michel Doneddu
a
évoqué la situation des cadres, catégorie de
salariés la plus mal traitée par le projet de loi. S'il s'est
déclaré favorable à l'institution d'une catégorie
de " cadres dirigeants ", à condition de bien la
définir, il a estimé que la distinction entre deux autres
catégories de cadres isolées par le projet de loi, les cadres
à horaire prédéterminé et les cadres à
horaire non prédéterminé, n'avait pas de sens. Il a enfin
regretté que la situation des femmes-cadres soit trop souvent
ignorée et affirmé que le lien établi au sein des
entreprises entre responsabilités et disponibilité constituait
une des premières causes de la discrimination dont elles étaient
victimes.
B. AUDITION DE M. JEAN DELMAS, PRÉSIDENT DE L'UNION PROFESSIONNELLE ARTISANALE (UPA)
Puis
la commission a entendu
M. Jean Delmas, président de l'Union
professionnelle artisanale
(UPA).
M. Jean Delmas
a rappelé que l'artisanat avait clairement
affirmé son opposition, à l'occasion du débat sur la
première loi relative aux 35 heures, à l'obligation de
réduction généralisée du temps de travail.
Constatant que cette volonté politique était aujourd'hui devenue
loi de la République, l'UPA avait cependant choisi la voie du dialogue
plutôt que celle de l'affrontement. Il apparaissait en effet
stérile de choisir la voie de l'opposition systématique et plus
utile de tenter d'obtenir des aménagements de la deuxième loi
pour rendre supportables, pour les entreprises artisanales, ces nouvelles
contraintes très importantes.
M. Jean Delmas
a estimé que l'application de la première
loi confirmait que le passage aux 35 heures pouvait s'avérer
intéressant pour les grandes entreprises, être négociable
pour les entreprises de taille moyenne dont le volume d'activité
croît mais se révélait inapplicable pour la majorité
des toutes petites entreprises. Il a ajouté que, compte tenu de leur
taille -3 salariés en moyenne-, les entreprises artisanales ne
disposaient pas d'un service juridique interne pour mener une réflexion
sur l'organisation du temps de travail : dans ces conditions, seule la
négociation de branche apparaissait réellement adaptée aux
spécificités des entreprises artisanales.
M. Jean Delmas
a expliqué que c'était dans cet esprit que
l'UPA avait signé une convention avec Mme la ministre de l'emploi et de
la solidarité et Mme la secrétaire d'Etat aux petites et moyennes
entreprises (PME), au commerce et à l'artisanat, le 21 octobre 1998.
Il a précisé que cette convention poursuivait trois
objectifs : permettre la réalisation d'études de
faisabilité sur le passage aux 35 heures dans les
différentes branches professionnelles, permettre l'information des
entreprises artisanales sur le contenu et les modalités de mise en
oeuvre des accords de branche qui ont été conclus et permettre
l'accompagnement des artisans désireux d'appliquer un accord de branche.
Après avoir souligné que sur les 26 branches
professionnelles de l'artisanat, 14 accords avaient déjà
été signés et couvraient plus de 70 % des
salariés de l'artisanat, il a reconnu que le nombre d'entreprises qui
était passé aux 35 heures dans le cadre de l'application de
ces accords de branche restait marginal.
M. Jean Delmas
a ajouté que le contenu de ces accords permettait
d'apporter quelques enseignements. La réduction du temps de travail
était ainsi envisageable dans les secteurs d'activité où
l'annualisation a un sens, comme dans le bâtiment. Il a
précisé à cet égard que l'accord de la
confédération de l'artisanat et des petites entreprises du
bâtiment (CAPEB) reposait ainsi sur l'annualisation rendue possible par
des périodes où l'activité extérieure est difficile.
M. Jean Delmas
a souligné que la création d'emplois
était possible dans les secteurs où l'accroissement de
l'activité est réel. Il a fait observer que d'autres secteurs,
comme celui de l'alimentation, ne parvenaient pas à signer des accords
dignes de ce nom. Il a expliqué que le secteur de l'alimentation
était notamment confronté à des amplitudes d'ouverture
importante, à une concurrence acharnée de la grande distribution,
à un recours systématique aux heures supplémentaires, qui
se traduisaient, pour les salariés, par un supplément de salaire
important, et par des difficultés structurelles de recrutement. Il a
jugé que le passage aux 35 heures allait aggraver ces
difficultés de recrutement.
M. Jean Delmas
a indiqué que l'UPA avait également
demandé du temps au Gouvernement, car le passage brutal aux
35 heures, même fin 2002, était tout simplement impossible
dans ses entreprises qui comptent en moyenne 3 salariés. Il a
observé que, fort de ce constat, l'UPA avait formulé un certain
nombre de propositions d'amendements qui lui semblaient minimalistes, mais qui
n'avaient pas rencontré l'assentiment de la majorité plurielle.
Il a précisé que ces propositions portaient sur plusieurs points
essentiels.
Il a souhaité tout d'abord que l'on puisse aménager le
régime des heures supplémentaires. Expliquant que les entreprises
de l'artisanat travaillent au-delà de 39 heures par semaine et que
le passage à 35 heures, sans aucun gain possible de
productivité, allait donc poser de graves difficultés, il a
demandé, pour les entreprises de 20 salariés au plus, la
pérennisation du taux de majoration de 10 % entre la 36
e
et la 39
e
heure. Il a jugé en effet indispensable que la
rémunération de la 36
e
à la 39
e
heure, après application du taux de majoration des heures
supplémentaires, ne soit pas supérieure au coût actuel des
heures supplémentaires.
M. Jean Delmas
a également demandé une extension du
régime applicable aux heures supplémentaires effectuées
au-delà du contingent de 130 heures dans les entreprises de
10 salariés au plus à celles de 20 salariés au
plus. Il a considéré que cette mesure permettrait en outre de
limiter les pertes de salaires des salariés effectuant de manière
structurelle des heures supplémentaires.
Il a jugé essentiel de conserver, pour les petites entreprises, des
éléments de souplesse indispensables à la mise en oeuvre
d'une réduction du temps de travail, même annualisée, et a
demandé, par conséquent, la suppression de la réduction du
contingent d'heures supplémentaires à 90 heures en cas de
modulation et le maintien du contingent de 130 heures.
Après avoir rappelé que nombre d'entreprises artisanales
effectuaient aujourd'hui 42 heures,
M. Jean Delmas
a insisté
sur la nécessité de maintenir le paragraphe VIII de
l'article 2 qui prévoit un passage progressif indispensable pour le
déclenchement du contingent d'heures supplémentaires, soit
37 heures en 2002 et 36 heures en 2003.
M. Jean Delmas
a souligné que l'allégement des cotisations
patronales ne devait pas être une contrepartie de l'obligation de
réduire le temps de travail. Il a estimé que, dès lors que
l'Etat renchérissait le coût du travail en diminuant le temps de
travail, il devait compenser le coût de cette mesure. L'allégement
des cotisations patronales était donc une nécessité
à partir du moment où l'obligation de passer aux 35 heures
entraînait un renchérissement du coût du travail de
11,4 %, sans possibilité de gain de productivité pour la
plupart des entreprises artisanales.
Il a jugé regrettable que cette réforme soit assimilée
à une nouvelle aide aux entreprises qui pourront appliquer les
35 heures. Il a donc demandé que toutes les entreprises
bénéficient des allégements si l'horaire légal
était fixé à 35 heures.
M. Jean Delmas
a rappelé que le Gouvernement et la commission des
affaires culturelles de l'Assemblée avaient fait un pas en direction des
entreprises artisanales en acceptant deux amendements pour aider les
entreprises de moins de 20 salariés à absorber le coût
et la charge des 35 heures. Un premier amendement permettait aux
entreprises qui réduisent le temps de travail progressivement, dans le
cadre d'un accord de branche étendu, de bénéficier de
l'aide incitative sans passage immédiat et effectif aux 35 heures.
Un second amendement allégeait les démarches administratives
nécessaires à l'obtention de cette aide dans le cadre d'un accord
offensif. Il a demandé que ce dispositif soit étendu aux accords
défensifs.
S'agissant du temps de travail effectif,
M. Jean Delmas
a indiqué
que l'UPA était tout à fait hostile au durcissement de la
définition du temps de travail effectif qui, s'il était retenu,
entraînerait de nombreuses renégociations d'accords de branche et
serait inapplicable dans les petites entreprises. En outre, cette
définition paraissait contraire au projet de directive
européenne, ce qui mettrait la France dans une situation inconfortable.
Il a considéré que cette disposition, si elle était
adoptée, ajouterait à la complexité de ce projet de loi,
dont il se demandait tout simplement si les chefs d'entreprise seraient en
mesure de comprendre tous les méandres. Il a rappelé à cet
égard que l'on assistait, depuis plusieurs années, à une
multiplication des contentieux dont cette loi risquait d'être une source
inépuisable.
Enfin, s'agissant du lien entre réduction du temps de travail et contrat
de travail,
M. Jean Delmas
a souhaité que le refus du
salarié d'accepter ses nouvelles conditions de travail, résultant
d'une obligation légale, soit assimilé à une
démission et ne donne donc pas lieu à indemnisation de la part de
l'employeur. Il a jugé totalement anormal que le chef d'entreprise
supporte la charge d'un licenciement dont il n'est pas responsable.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souhaité savoir quel bilan l'UPA
dressait des accords conclus dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi du
13 juin 1998 et du " mandatement Aubry ". Il s'est enquis de
l'opinion de l'UPA sur le principe des accords majoritaires et sur la question
de la représentativité syndicale. Il a souhaité
connaître la position de cette organisation sur le projet du Gouvernement
de faire participer les régimes de protection sociale au financement des
allégements de charges sociales.
En réponse à
M. Louis Souvet, rapporteur,
M. Pierre
Burban
,
secrétaire général de l'UPA
, a
indiqué que si 70 % des salariés de l'artisanat
étaient couverts par un accord de branche relatif à la RTT, le
nombre d'entreprises artisanales appliquant effectivement ces accords devait
être très faible. Il a précisé que
12.000 artisans, sur les 430.000 qui emploient au moins un salarié,
avaient participé à des réunions d'information sur ces
accords de branche. Il a ajouté qu'environ 800 entreprises
artisanales appliquaient aujourd'hui ces accords de branche.
M. Jean Delmas
a souligné que la question des accords
majoritaires ne se posait pas dans les entreprises artisanales qui comptaient,
en moyenne, seulement 3 salariés. Il s'est déclaré
favorable aux accords de branche et hostile à l'idée de
délégués de site.
Après avoir rappelé que l'UPA souhaitait une baisse des
cotisations patronales,
M. Jean Delmas
a indiqué que l'UPA ne
s'était pas encore prononcée sur les modalités de
financement des allégements de charges sociales.
Mme Annick Bocandé
a souligné la diversité des
entreprises et a jugé que ces dernières ne pouvaient être
toutes traitées de la même façon par la loi. Après
avoir fait observer les difficultés de recrutement que connaissaient
certaines branches de l'artisanat, elle a souhaité connaître le
nombre d'emplois que ce secteur était susceptible de créer. Elle
s'est demandé si la seconde loi sur la réduction du temps de
travail pouvait favoriser le recrutement dans les entreprises artisanales.
Evoquant le manque de personnels qualifiés dont souffrait l'artisanat,
M. Philippe Nogrix
a souhaité savoir quel était le
délai pour former les personnels nécessaires. Il s'est
interrogé sur les raisons de la désaffection des jeunes pour les
métiers de l'artisanat. Il a souligné que les recrutements des
entreprises artisanales dépendaient avant tout de leur volume
d'activité et qu'il paraissait difficile de fixer, par une loi,
l'augmentation de cette activité. Il a souhaité connaître
l'impact sur l'emploi de la baisse de la taxe sur la valeur ajoutée
(TVA) sur les travaux à domicile annoncée par le Gouvernement.
En réponse aux différents intervenants,
M. Jean Delmas
a
indiqué que la Confédération de l'artisanat et des petites
entreprises du bâtiment (CAPEB) estimait que cette baisse de la TVA
pouvait créer environ 45.000 emplois. Evoquant les
difficultés de recrutement dans les secteurs du bâtiment et de la
restauration, il a souligné que l'UPA venait de signer une convention
avec les ministres de l'emploi, du commerce et de l'artisanat et de
l'éducation nationale afin d'aider les entreprises à former des
jeunes et à les recruter. Il a considéré que la
désaffection des jeunes pour ces métiers provenait de l'image un
peu archaïque des activités artisanales et des contraintes
spécifiques liées aux activités de certaines branches. Il
a jugé qu'il faudrait plusieurs années pour inverser cette
tendance.
M. Jean Delmas
s'est refusé à donner une évaluation
du nombre d'emplois susceptibles d'être créés dans
l'artisanat, mais a jugé que le potentiel était remarquable.
C. AUDITION DE M. DENIS KESSLER, VICE-PRÉSIDENT DU MOUVEMENT DES ENTREPRISES DE FRANCE (MEDEF) ET DE M. BERNARD BOISSON, DIRECTEUR DES AFFAIRES SOCIALES
La
commission a ensuite procédé à
l'audition de
M.
Denis Kessler, vice-président du Mouvement des entreprises de France
(MEDEF) et de
M. Bernard Boisson, directeur des affaires
sociales
.
Dans son propos liminaire,
M. Denis Kessler
a estimé que la voie
d'une généralisation des 35 heures choisie par le Gouvernement
n'était pas favorable au développement des entreprises et de
l'emploi en France et a formé, à l'encontre du projet de loi,
plusieurs critiques de fond.
Il a observé que le projet de loi isolait la France de ses partenaires
européens. Il a constaté que contrairement à ce qui avait
été dit il y a deux ans, aucun pays n'avait suivi la voie
tracée par le Gouvernement français alors que,
simultanément, chacun d'entre eux avait réduit son taux de
chômage de manière plus accentuée que la France, ceci sans
recourir à la réduction du temps de travail.
M. Denis Kessler
a souligné que ce projet de loi rationnait
l'activité des entreprises et des salariés et freinait
l'expansion économique. Il a estimé que les dispositions
prévues par ce texte réduisaient la capacité productive de
chaque salarié de près de 300 heures, soit 15 % de la
durée du travail, compte tenu du nouveau régime d'heures
supplémentaires.
M. Denis Kessler
a souligné également combien la
réduction du temps de travail était contraire aux
intérêts des salariés. Il a déclaré que
seules 30.000 des 120.000 créations d'emplois annoncées
correspondaient à des créations véritables, ce qui
réduisait d'autant l'impact de ce projet sur le chômage. Il a
insisté sur l'évolution du SMIC qui devrait aboutir, à
terme, à un renchérissement du coût du travail, compte tenu
de la création d'un double barème. Il a observé que le
blocage des salaires consécutif à la réduction du temps de
travail aurait pour conséquence une diminution du pouvoir d'achat des
salariés.
M. Denis Kessler
a considéré que le projet de loi
entravait la flexibilité du travail. Il a souligné que,
contrairement à ce qui avait été évoqué en
octobre 1997, le nouveau texte ne prévoyait pas d'accès direct
à la flexibilité, contrepartie nécessaire de la RTT. Il a
considéré qu'il y avait ainsi une asymétrie entre les 35
heures acquises et la flexibilité qui devait être
négociée. Il s'est interrogé, en outre, sur
l'intérêt qu'il pouvait y avoir pour les employeurs à
négocier, si tous les paramètres étaient, d'ores et
déjà, fixés par la loi.
M. Denis Kessler
a souligné combien le projet de loi portait
atteinte au dialogue social. Il a déclaré que, contrairement aux
engagements des pouvoirs publics, ce nouveau texte ne respectait pas les
accords de branche ou d'entreprise conclus. Il a relevé quatre domaines
qui étaient particulièrement concernés par cette remise en
cause : les clauses relatives aux durées annuelles de travail, les
dispositions concernant la rémunération et les forfaits sans
référence horaire des personnels d'encadrement, les dispositions
relatives à l'organisation de la formation professionnelle en dehors du
temps de travail et les nouveaux contingents conventionnels d'heures
supplémentaires.
M. Denis Kessler
a estimé que le dialogue social était
ainsi " bafoué " par le contenu du second projet de loi et il
a observé que cela constituait un événement
extrêmement grave, qui remettait en question la pratique de la
négociation collective depuis 1945. Il a observé que le recours,
par le Gouvernement, à la notion d'ordre public social réduisait
d'autant la sphère de la négociation, et remettait en cause tout
le dialogue social.
Il a considéré que, jusqu'à présent, la loi
s'était limitée à fixer un seuil de garanties pour les
salariés, à charge pour les accords collectifs de prévoir
des stipulations plus favorables. Il a estimé que cette nouvelle loi
remettait en question le niveau intermédiaire de la branche, voire celui
de l'accord d'entreprise. Il a qualifié la démarche du
Gouvernement de " renversement historique et copernicien ".
M. Denis Kessler
a relevé " l'inimaginable
complexité " du projet de loi, avouant au passage que certaines
dispositions restaient encore obscures pour le MEDEF lui-même. Dans ces
conditions, il s'est interrogé sur la façon dont la loi pourrait
être appliquée par une petite entreprise dépourvue de
directeur des ressources humaines. Evoquant la possibilité, pour
l'inspecteur du travail, de déroger au régime des heures
supplémentaires lorsque l'entreprise bénéficiait d'une
commande exceptionnelle, il a souligné combien l'aide financière
devenait aléatoire et dépendante de l'interprétation de
l'administration.
M. Denis Kessler
a insisté sur la démotivation des cadres,
consécutive au nouveau régime instauré par le projet de
loi. Il a relevé la difficulté à distinguer trois
catégories de cadres selon la fonction, alors qu'il s'agissait en
définitive de personnels titulaires des mêmes diplômes. Il
s'est interrogé sur les modalités de passage d'une
catégorie à une autre.
M. Denis Kessler
a observé que le projet de loi favoriserait une
hausse des coûts salariaux à travers notamment les majorations du
SMIC nécessaires pour combler l'écart entre la garantie mensuelle
et la rémunération des salariés payés au SMIC sur
une base de 39 heures à l'horizon de 2005.
M. Denis Kessler
a considéré
que les 105 milliards
de francs évoqués comme montant total des allégements de
charges constituaient une somme considérable. Evoquant les
40 milliards de francs prélevés sur les régimes
sociaux, il a souligné que, dans le cas du régime des retraites
complémentaires, ces prélèvements reviendraient à
amputer les droits des retraités.
Rappelant que le projet de loi subordonnait la plupart des décisions
à l'accord des syndicats,
M. Denis Kessler
a observé
qu'un nombre considérable d'entreprises ne disposaient pas de
délégué syndical, que le taux de syndicalisation
était de 4,2 %, soit le plus faible de toute l'organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE), et que
les entreprises rencontraient des problèmes pour trouver un
interlocuteur.
M. Denis Kessler
a observé que le projet de loi favorisait un
contrôle administratif de la gestion quotidienne des entreprises, source
de nombreux contentieux, que redoutaient déjà les responsables
d'entreprises.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
relative à la manifestation organisée par le MEDEF le lundi 4
octobre,
M. Denis Kessler
a déclaré que cet
événement avait démontré la
représentativité de l'organisation patronale. Il a rappelé
que le MEDEF représentait avec la CGPME la totalité des branches
et l'ensemble des entreprises comme l'avait montré ce rassemblement de
30.000 chefs d'entreprises. Il a déclaré que ces derniers avaient
confirmé leur totale hostilité au projet de loi
considéré comme une " loi contre les entreprises ".
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
relative à la façon dont le projet de loi avait repris les
dispositions des accords de branche,
M. Denis Kessler
a
estimé qu'un accord, qui constituait un tout, ne pouvait être
repris à 90 % et qu'en conséquence on ne pouvait pas dire
que le projet de loi reprenait les dispositions des accords de branche.
M. Louis Souvet, rapporteur,
l'ayant interrogé sur la question du
référendum,
M. Denis Kessler
a déclaré que
le MEDEF n'y était pas favorable, car il était attaché
à la représentativité syndicale, facteur de
stabilité. Il a évoqué à ce propos la confusion
existant dans le secteur bancaire dont l'accord de branche, signé par un
syndicat, avait été étendu par Mme Martine Aubry, ministre
de l'emploi et de la solidarité, avant d'être annulé par le
juge.
M. Louis Souvet, rapporteur,
ayant posé une question sur le
débat relatif à la représentativité syndicale
introduit par le projet de loi,
M. Denis Kessler
a estimé que ce
débat était nécessaire, mais qu'il ne trouvait pas sa
place à l'occasion de la discussion d'un texte relatif à la
réduction du temps de travail.
M. Bernard Boisson
a considéré que le mandatement
constituait un autre exemple du non-respect par le Gouvernement des accords
signés. Il a rappelé que les partenaires sociaux avaient
prévu en 1995 la possibilité de négocier des accords avec
les délégués du personnel. Il a observé que cet
accord renouvelé en avril dernier nécessitait une validation
législative sur laquelle le Gouvernement refusait pour l'instant de se
prononcer. Il a considéré que le mandatement ne devait pas
être exclusif de tout autre dispositif comme, par exemple, le recours aux
délégués du personnel.
En réponse à une question de
M. Charles Descours
sur
l'attitude qui serait celle du MEDEF dans l'hypothèse où le
Gouvernement persisterait à vouloir faire financer les 35 heures
par les régimes de protection sociale,
M. Denis Kessler
a
déclaré que son organisation quitterait les organismes
paritaires. Il a rappelé que le patronat s'était engagé
avec les syndicats de salariés depuis 1945 dans la cogestion de la
protection sociale, soit sous la forme d'un paritarisme " pur "
(Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC),
Association générale des institutions de retraite des cadres et
Association des régimes de retraites complémentaires
(AGIRC-ARRCO)), soit dans le cadre d'un paritarisme " bousculé par
un étatisme de plus en plus fort " (Caisse nationale d'assurance
maladie des travailleurs salariés (CNAMTS), Caisse nationale d'assurance
vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS)). Il a
considéré que le MEDEF ne pouvait pas accepter, sans
réagir, que la signature des partenaires sociaux ne soit pas
respectée et que les fonds des régimes sociaux soient
" siphonnés " par le Gouvernement. Il s'est interrogé,
en outre, sur la constitutionnalité du paragraphe 16 de
l'article 11 du projet de loi qui dispose que le mode de calcul de la
contribution des régimes sociaux sera déterminé par un
décret en conseil d'Etat.
En réponse à
Mme Nicole Borvo
qui soulignait l'importance
des aides accordées aux entreprises,
M. Denis Kessler
a
déclaré que le MEDEF n'était pas demandeur d'aides
publiques, car elles se traduisaient par une aggravation des
prélèvements sur les entreprises.
Il a souligné par ailleurs que la RTT qui avait à l'origine un
objectif de création d'emplois privilégiait désormais le
développement des loisirs et favorisait le temps libre
subventionné.
En réponse à une question de
M. André Jourdain
sur
les conséquences du projet de loi pour les entreprises,
M. Denis
Kessler
a considéré que si le projet de loi devait être
" gauchi ", il n'en deviendrait que plus inapplicable. Il a
estimé qu'il provoquerait sans aucun doute des délocalisations,
une augmentation du travail au noir et plus généralement un
développement de l'économie grise.
M. Philippe Nogrix
s'étant interrogé sur le dispositif de
conseil prévu par la première loi et sur l'impact respectif de la
croissance et des 35 heures sur l'évolution de l'emploi,
M.
Denis Kessler
a déclaré que l'impact des 35 heures
n'était pas perceptible par rapport au rythme normal de création
d'emplois en phase haute du cycle conjoncturel. Il a constaté par
ailleurs que pour un même taux de croissance, la France ne créait
pas plus d'emplois que ses voisins. Il a considéré enfin que les
35 heures auraient pour effet de renchérir le coût du travail et
de renforcer la substitution du facteur capital au facteur travail.
M. Bernard Boisson
a estimé que l'aide au conseil prévue
par la première loi avait renforcé la pression exercée sur
les entreprises en les incitant à se lancer dans un processus de
réduction du temps de travail. Il a déclaré que les
organisations patronales avaient été plus prudentes dans leurs
conseils prodigués à leurs adhérents.
D. AUDITION DE M. JEAN-FRANÇOIS VEYSSET, MEMBRE DU BUREAU ET PRÉSIDENT DE LA COMMISSION SOCIALE DE LA CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DES PETITES ET MOYENNES ENTREPRISES (CGPME) ET DE M. GEORGES TISSIÉ, DIRECTEUR DES AFFAIRES SOCIALES
Enfin, la commission a entendu
M. Jean-François
Veysset, membre du bureau et président de la commission sociale de la
Confédération générale des petites et moyennes
entreprises
(CGPME) et
M. Georges Tissié, directeur des affaires
sociales.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
M. Jean-François Veysset
a déclaré tout
d'abord que le succès de la manifestation organisée conjointement
par la CGPME et le MEDEF le 4 octobre dernier avait dépassé
toutes ses espérances. Il a affirmé que cette nouvelle loi
était mal perçue par les chefs d'entreprise sur le terrain. Il a
fait part de son étonnement que M. François Hollande, Premier
secrétaire du parti socialiste, ait participé à la
contre-manifestation organisée par la Confédération
générale du travail (CGT) au même moment.
M. Louis Souvet, rapporteur,
s'étant interrogé sur le
bilan que faisait la CGPME de la loi du 13 juin 1998,
M. Georges
Tissié
a estimé que le projet de loi ne reprenait pas nombre
de stipulations contenues dans les accords de branche. Il a cité
l'exemple du contingent d'heures supplémentaires qui avoisinait les 180
heures dans les secteurs de la métallurgie, du commerce et de la
réparation automobile et du bâtiment et des travaux publics, alors
que le projet de loi maintenait un contingent de 130 heures. Il a
estimé que la durée maximale du travail de 1.600 heures
prévue dans le cadre d'un recours à l'annualisation contredisait
nombre d'accords signés.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
relative au mandatement,
M. Jean-François Veysset
a
déclaré que le mandatement dans les entreprises de moins de onze
salariés constituait un " leurre complet ". Il a
regretté que le projet de loi n'ait pas prévu la
possibilité de signer un accord avec les délégués
du personnel dans des entreprises de moins de cinquante salariés. Il a
estimé que les syndicats ne pouvaient pas espérer retrouver, en
favorisant le recours au mandatement, leur audience passée dont il a
rappelé qu'elle continuait à baisser depuis deux ans. Il a
considéré que nombre d'entreprises préféreraient
renoncer aux aides publiques plutôt que de devoir composer avec des
salariés mandatés. Il a estimé que le mandatement
prévu par la loi du 13 juin 1998 était beaucoup plus lourd que
celui prévu par la loi du 12 novembre 1996 en application de l'accord
interprofessionnel de 1995.
M. Jean-François Veysset
a déclaré que le principe
des accords majoritaires tel qu'il était énoncé à
l'article 11 du projet de loi était inadmissible. Il a
considéré que l'hypothèse d'un référendum
aurait pour conséquence la destruction de l'autorité du chef
d'entreprise.
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
sur le financement des allégements de charges sociales,
M.
Jean-François Veysset
a déclaré que les dispositions
prévues par le projet de loi étaient très
préoccupantes étant donné la fragilité de
l'équilibre financier des régimes sociaux. Il a rappelé
que le Parlement avait créé, il y a quelques années, un
nouvel impôt, la contribution au remboursement de la dette sociale
(CRDS), afin de rétablir l'équilibre des comptes sociaux et s'est
étonné que le Gouvernement puisse envisager, dans ces conditions,
de ponctionner des régimes sociaux toujours convalescents.
M. Jean-François Veysset
a déclaré que la CGPME
quitterait les organismes paritaires de concert avec le MEDEF si le principe
d'une contribution des régimes sociaux au financement des 35 heures
devait être maintenu. Il a toutefois précisé que son
organisation n'entendait pas se rendre complice d'une rupture recherchée
du dialogue social. Il a fait part de son sentiment que les syndicats
n'accepteraient pas le principe d'une contribution forcée des
régimes sociaux au financement des allégements de charges.
M. Jean-François Veysset
a estimé que le débat
parlementaire devait être l'occasion d'expliquer à l'opinion
publique qu'une partie de la rémunération des heures
supplémentaires entre 35 et 39 heures ne bénéficierait pas
aux salariés mais à un fonds ayant pour mission de financer les
allégements de charges sociales. Il a rappelé que la règle
normale devait être que les majorations bénéficient aux
salariés ; il a estimé également que le taux de
rémunération des heures supplémentaires entre la
35
e
et la 39
e
heure devait être fixé de
manière pérenne à 10 %.
Evoquant la flexibilité,
M. Jean-François Veysset
a
estimé que le projet de loi remettait en cause les dispositions
existantes en promouvant un système unique et rigide qui limitait la
durée annualisée du travail à 1.600 heures, soit 34
heures par semaine, ce qui lui semblait insuffisant.
Concernant l'évolution de l'emploi,
M. Jean-François Veysset
a observé que la reprise de l'activité avait d'ores et
déjà permis la création d'emplois dans le cadre des
39 heures. Il a considéré que cette loi accentuait la
pénurie sur le marché du travail, rappelant que des classes
d'apprentissage ou de formation professionnelle avaient déjà
dû être fermées faute de candidats éligibles. Il a
constaté que nombre de chômeurs étaient tellement
éloignés d'une situation d'emploi qu'il était difficile de
les former et que, dans ces conditions, l'impact de la réduction du
temps de travail sur la création d'emplois était pour le moins
incertain.
M. Jean-François Veysset
a déclaré que ce projet de
loi favoriserait les concurrents européens au détriment des
entreprises françaises et conforterait en France le développement
du travail dissimulé.
En réponse à une question de
M. André Jourdain
relative à l'attitude de la CGPME si le projet de loi devait être
adopté sans de substantielles modifications,
M. Jean-François Veysset
a déclaré qu'il
serait nécessaire que les PME se mobilisent pour signifier leur refus
que la France devienne un " désert économique ".
En réponse à une question de
M. Philippe Nogrix
relative
au groupement d'employeurs et au multisalariat,
M. Jean-François
Veysset
a estimé que le groupement d'employeurs constituait une
piste dynamique pour les PME, susceptible de favoriser l'autoformation. Il a
regretté la complexité des dispositions relatives au groupement
d'employeurs dans le projet de loi
V. AUDITIONS DU MARDI 12 OCTOBRE 1999
A. AUDITION DE M. JEAN-MARC ICARD, SECRÉTAIRE NATIONAL CHARGÉ DE L'EMPLOI À LA CONFÉDÉRATION FRANÇAISE DE L'ENCADREMENT-CONFÉDÉRATION GÉNÉRALE DES CADRES (CFE-CGC)
Réunie le mardi 12 octobre 1999, sous la
présidence
de
M. Jean Delaneau, président
, la commission a poursuivi son
programme d'
auditions
sur le
projet de loi n° 1786
(rectifié) (AN) relatif à la
réduction
négociée du temps de travail
.
La commission a tout d'abord entendu
M. Jean-Marc Icard,
secrétaire national chargé de l'emploi à la
Confédération française de
l'encadrement-Confédération générale des cadres
(CFE-CGC).
M. Jean-Marc Icard, secrétaire national de la CFE-CGC,
a tout
d'abord souhaité rappeler que son organisation syndicale n'avait pas
demandé une loi sur la réduction du temps de travail. Il a
souligné que la CFE-CGC avait été signataire de l'accord
interprofessionnel de 1995 et que c'est l'absence de volonté de
négocier des organisations patronales qui avait amené le
Gouvernement à légiférer. Evoquant la loi du 13 juin
1998,
M. Jean-Marc Icard
a souligné que son organisation
s'était déclarée favorable à une loi qui
permettrait de créer des emplois, ceci d'autant plus qu'il avait
été dit que la deuxième loi reprendrait le contenu des
accords signés par les partenaires sociaux, notamment pour les
dispositions relatives aux cadres.
Revenant sur le projet de loi,
M. Jean-Marc Icard
a
considéré qu'il ne donnait pas satisfaction à la CFE-CGC,
notamment pour ce qui était des dispositions relatives aux cadres. Il a
estimé que le forfait journalier restaurait " le servage des
cadres ", il a considéré par ailleurs que la
définition des cadres dirigeants était trop imprécise.
Il a déclaré que la catégorie des cadres-dirigeants devait
se limiter aux mandataires sociaux, non régis par la convention
collective de leur branche d'activité et ayant des
responsabilités qui les amenaient à définir les
stratégies politiques, économiques et financières de
l'entreprise.
M. Jean-Marc Icard
a estimé que les employeurs avaient tendance
à considérer que les cadres du comité de direction voire
certains directeurs de magasins pouvaient être considérés
comme des cadres-dirigeants, ce qui ne lui semblait pas acceptable.
Il s'est déclaré d'accord avec la notion de cadre
intégré dans les équipes de travail et soumis au droit
commun. Il a estimé que les forfaits avec référence
mensuelle ou annuelle présentaient un intérêt, mais il
s'est élevé contre la formule du forfait-jour, sans limitation
d'horaire, qui pourrait amener un cadre à travailler 13 heures de suite.
Il s'est déclaré très inquiet sur le renvoi à la
négociation de branche de la définition des limites horaires pour
le forfait-jour.
Il a rappelé qu'un cadre travaillait actuellement jusqu'à 46
heures en moyenne par semaine, soit 2.100 heures par an, et que la formule du
forfait pourrait théoriquement permettre une durée annuelle du
travail des cadres proche des 2.800 heures par an.
Ce faisant, il s'est interrogé sur la réalité de la mise
en oeuvre de la réduction du temps de travail pour les cadres.
M. Jean-Marc Icard
a souligné qu'un cadre qui refuserait les
conséquences d'un accord de réduction du temps de travail
pourrait faire l'objet d'une procédure de licenciement pour cause
réelle et sérieuse.
Il a insisté sur la situation particulière des femmes
exerçant des fonctions de cadre qui se voyaient souvent interdire
l'accès aux plus hautes responsabilités pour des raisons
liées à une insuffisante disponibilité.
Il a fait part du risque que plusieurs catégories de salariés
fassent l'objet d'un basculement dans la catégorie des cadres
payés au forfait, citant l'exemple des agents de maîtrise, et que
le chef d'entreprise puisse ainsi détourner la législation sur la
durée du travail.
M. Jean-Marc Icard
a estimé que le conditionnement des aides
financières à la signature d'un accord majoritaire porterait un
rude coût à la négociation contractuelle. Il a fait
observer le risque de chantage de la part des chefs d'entreprise et la
possibilité que les salariés refusent l'accord soumis à
référendum. Il a considéré qu'il fallait laisser
les organisations syndicales prendre leurs responsabilités.
Il a considéré que la CFE-CGC acceptait de discuter de la
question de la représentativité, mais pas au détour d'une
loi sur la réduction du temps de travail.
M. Jean-Marc Icard
a déclaré que son organisation
syndicale était tout à fait opposée au principe d'un
financement des allégements de cotisations sociales par les organismes
de sécurité sociale. Il a estimé que cela revenait
à demander au salarié de payer la " baisse des
charges ".
Il a qualifié d'" usine à gaz " le dispositif relatif
aux heures supplémentaires prévu par le projet de loi, estimant
qu'il était très difficile à mettre en oeuvre pour les
petites et moyennes entreprises (PME).
Il a souligné le risque que les employeurs saisissent le prétexte
de la nouvelle définition du travail à temps partiel pour
demander à leurs salariés de travailler 34 heures par semaine
payées sur la base de 34 heures.
Il a regretté l'absence de la référence à la
création d'emplois dans le projet de loi en observant que, sans ces
créations, les cadres seraient encore plus sollicités. Il a
considéré que les allégements de cotisations sociales ne
créeraient pas d'emploi et s'est déclaré favorable au
principe d'un allégement des charges pour le premier cadre.
Il a estimé que la formation, qui fait l'objet d'un article 10 dans le
projet de loi, relevait du domaine de la négociation collective.
Enfin,
M. Jean-Marc Icard
a estimé que le projet de loi aurait
pour conséquence une remise en cause des conventions collectives et des
classifications.
Il a souhaité que la négociation collective détermine
quelles étaient les catégories de cadres qui pourraient
bénéficier du forfait et de la formation, en suggérant
qu'en cas d'absence d'accord, tous les cadres se voient appliquer le droit
commun en matière de durée du travail.
M. Jean Delaneau, président,
a fait observer qu'il lui semblait
que la CFE-CGC souhaitait que certaines matières soient laissées
à la négociation collective.
M. Jean-Marc Icard
a confirmé que la loi devait être un
cadre incitant à la négociation. Il a regretté que le
projet de loi " ouvre une porte et la referme aussitôt ".
En réponse à une question de
M. Louis Souvet, rapporteur,
qui l'interrogeait sur la compatibilité du projet de loi avec les
accords signés,
M. Jean-Marc Icard
a estimé que
certains accords devraient être modifiés notamment sur le nombre
de jours de travail des cadres au forfait.
En réponse à
M. Louis Souvet, rapporteur,
M. Jean-Marc
Icard
s'est déclaré opposé au principe de l'exclusion
du bénéfice des aides financières des cadres
rémunérés au forfait.
M. Louis Souvet, rapporteur
, l'ayant interrogé sur la question de
la représentativité des syndicats,
M. Jean-Marc Icard
a
déclaré que son organisation syndicale n'était pas
opposée à une discussion sur le décret de 1966, mais il a
souligné que cette question n'avait pas à être
traitée dans le cadre de ce projet de loi.
Il a souhaité, à cet égard, que la CFE-CGC puisse
être considérée comme représentative de l'ensemble
des salariés et non seulement des cadres.
M. André Jourdain
a observé que la CFE-CGC n'était
pas opposée à la définition de plusieurs catégories
de cadres. Il s'est interrogé sur la possibilité que plusieurs
entreprises puissent recruter des cadres en commun à travers la formule
du multisalariat.
M. Guy Fischer
a considéré que les cadres souhaitaient se
voir appliquer les 35 heures et s'est interrogé sur la
possibilité d'un abaissement sur plusieurs années de la
durée du travail pour cette catégorie de salariés.
En réponse aux intervenants,
M. Jean-Marc Icard
a estimé
que la négociation collective devait déterminer la
répartition des cadres entre les différentes catégories,
la loi ne constituant en la matière qu'un recours en cas d'échec.
Il a reconnu que le projet de loi ne comportait aucune disposition relative au
multisalariat et s'est déclaré favorable au développement
du groupement d'employeurs pour les cadres.
Il a estimé que si l'on diminuait l'horaire de travail des cadres sans
diminuer la charge de travail, il n'y aurait aucun changement. Il s'est
déclaré favorable à une baisse du temps de travail des
cadres par palier.
B. AUDITION DE M. DENIS GAUTIER-SAUVAGNAC, PRÉSIDENT DE L'UNION NATIONALE POUR L'EMPLOI DANS L'INDUSTRIE ET LE COMMERCE (UNEDIC), ACCOMPAGNÉ DE M. DOMINIQUE CHERTIER, DIRECTEUR GÉNÉRAL
Puis
la commission a entendu
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de
l'Union nationale pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC),
accompagné de
M. Dominique Chertier, directeur
général.
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de l'UNEDIC,
a souhaité
préciser, de prime abord, que l'UNEDIC étant un organisme
paritaire, il veillerait à ce que ses propos reflètent l'opinion
commune des gestionnaires de l'assurance chômage. Puis il a
souhaité répondre aux questions du rapporteur et des membres de
la commission.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souhaité savoir si l'UNEDIC avait
été amenée à prendre officiellement position sur le
projet de loi relatif à la réduction négociée du
temps de travail.
Il
a observé que l'article 11 du projet de loi prévoyait
que les organismes gérant des régimes de protection sociale
contribuent au financement d'un fonds assurant la compensation intégrale
des allégements de cotisations sociales. Il a souhaité savoir, en
conséquence, si la lettre de l'article L. 131-7 du code de la
sécurité sociale, qui prévoit que les exonérations
de cotisations sociales sont remboursées intégralement " aux
régimes concernés par le budget de l'Etat ", était
respectée.
Il s'est interrogé sur la technique du calcul de la contribution de
l'UNEDIC au regard du texte de l'article 11-XVI du projet de loi, souhaitant
savoir s'il s'agissait de procéder à une analyse fine du statut
des embauchés ou, au contraire, de considérer que tout
embauché était un chômeur en puissance.
Il s'est demandé si la fixation, par décret en Conseil d'Etat,
des règles de calcul de l'évolution de la contribution des
organismes sociaux aux allégements de charges constituait l'amorce d'une
indexation, voire d'une forfaitisation de cette contribution.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souhaité connaître le
rôle de la commission des comptes de la sécurité sociale,
qui, selon l'article 11 du projet de loi, doit être consultée sur
les règles de calcul de cette contribution.
Il a souhaité savoir quelle serait techniquement la situation de
l'assurance chômage au 1
er
janvier 2000 si la convention
UNEDIC n'était pas renouvelée par les partenaires sociaux.
Enfin,
M. Louis Souvet, rapporteur,
s'est interrogé, de
façon générale, sur l'état des relations
financières entre l'Etat et l'UNEDIC.
En réponse aux questions du rapporteur,
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a déclaré que l'organisme gestionnaire de l'assurance
chômage n'avait pas été amené à prendre une
position officielle dès lors qu'à la différence des
caisses de sécurité sociale, la consultation de l'UNEDIC sur le
projet de loi n'était pas prévue par les textes. Il a
indiqué toutefois que l'UNEDIC avait eu l'occasion d'exprimer
indirectement son sentiment, le 29 septembre dernier, lors de la
réunion de son bureau. L'ensemble des gestionnaires s'étaient
alors unanimement refusé à une remise en cause de l'accord de
1995 relatif au remboursement d'un prêt souscrit par l'UNEDIC, qui
prévoyait une prise en charge par l'Etat d'une partie de ce
remboursement à hauteur de 10 milliards de francs. En tant que
gestionnaires, comme en tant que partenaires sociaux, ils avaient
considéré, à cette occasion, qu'il n'appartenait pas
à l'UNEDIC d'utiliser le produit des cotisations pour financer le budget
de l'Etat.
S'agissant de la compensation intégrale par le budget de l'Etat des
exonérations de charges sociales,
M. Denis Gautier-Sauvagnac,
président de l'UNEDIC,
a estimé que la lettre de l'article
L. 131-7 du code de la sécurité sociale n'était
à l'évidence pas respectée.
Pour ce qui est du mode de calcul d'une contribution de l'UNEDIC au financement
des exonérations de charges sociales, il a considéré qu'il
était absolument impossible de " décortiquer " les
cotisations perçues pour mesurer ce qui relevait des emplois
créés du fait des 35 heures. Il a affirmé que
l'argent du chômage devait aller aux chômeurs, soit à
travers une amélioration de l'indemnisation, soit à travers des
allégements de cotisations sociales créateurs d'emplois.
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a estimé que la définition, par
décret en Conseil d'Etat, des règles de calcul de la
contribution, signifiait que l'Etat se substituait aux partenaires sociaux pour
fixer les cotisations d'assurance chômage et que, ce faisant, on
assistait à un tournant dans notre vie sociale, après cinquante
ans de paritarisme. Il a observé qu'il s'agissait là moins d'une
question relative à l'indexation ou à la forfaitisation de la
contribution qu'un problème de respect des partenaires sociaux. Il a
estimé que le projet de loi portait ainsi un coup fatal à la
politique contractuelle et au paritarisme.
Il a confirmé que la commission des comptes de la sécurité
sociale, dont le projet de loi prévoit l'avis sur le mode de calcul de
la contribution, n'était pas compétente dans le domaine de
l'assurance chômage.
Evoquant la situation de l'assurance chômage dans l'hypothèse
où la convention relative à l'UNEDIC ne serait pas
renouvelée par les partenaires sociaux,
M. Denis Gautier-Sauvagnac,
président de l'UNEDIC,
a rappelé qu'il existait des
dispositions législatives prévoyant ce cas de figure. Il a
évoqué l'article L. 351-22 du code du travail qui
prévoyait qu'en cas d'absence de convention, la continuité du
service de l'assurance chômage était assurée par un
établissement public national à caractère administratif
qui assurait le recouvrement des contributions et le paiement des prestations.
Il a souligné que le pouvoir réglementaire se voyait confier la
charge de l'organisation de ce système de substitution, y compris pour
ce qui concernait les conditions d'équilibre du régime. Il a
conclu que, dans cette hypothèse, l'UNEDIC n'existerait plus sous sa
forme actuelle.
S'agissant des relations financières entre l'Etat et l'UNEDIC,
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a rappelé que trois dossiers
étaient en débat : le premier portait sur la question des
10 milliards déjà évoquée sur lequel la
position de l'UNEDIC était claire : elle ne paierait pas ; le
deuxième dossier était relatif à la prise en charge de la
couverture chômage d'un certain nombre de dispositifs en faveur de
l'emploi (emplois-jeunes, emplois-ville, fonds national de l'emploi (FNE),
allocation formation reclassement (AFR)) qui constituait une question
récurrente pouvant être résolue dans la transparence ;
le troisième dossier, enfin, concernait l'affaire du
" recyclage ", selon la terminologie gouvernementale, des
exonérations de cotisations sociales dans le cadre des 35 heures
sur laquelle la quasi-totalité des partenaires sociaux s'était
prononcée négativement.
M. Louis Souvet, rapporteur,
ayant souhaité savoir si le risque
d'implosion des régimes de sécurité sociale et d'assurance
chômage était réel dans l'hypothèse de l'adoption du
projet de loi,
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de l'UNEDIC,
a affirmé qu'il était sûr de la détermination d'au
moins un des partenaires sociaux à quitter les organismes paritaires.
M. Charles Descours
s'est interrogé sur les conditions dans
lesquelles la commission des comptes de la sécurité sociale
serait à même d'émettre un avis sur le mode de calcul de la
contribution demandée aux organismes sociaux, y compris l'UNEDIC, et sur
les réserves financières constituées par l'UNEDIC pour
couvrir ses engagements à venir.
Il a déclaré qu'il proposerait, en tant que rapporteur de la loi
de financement de la sécurité sociale, de supprimer les
dispositions du projet de loi de financement, qui prévoyaient une
participation des organismes sociaux au financement des allégements de
charges, et a souhaité que le Gouvernement ne doute pas de la
détermination des partenaires sociaux à assurer le respect de
leurs prérogatives.
En réponse à M. Charles Descours,
M. Denis Gautier-Sauvagnac
s'est déclaré incompétent, au titre de ses fonctions
de responsable de l'assurance chômage, pour se prononcer sur les
règles de fonctionnement de la commission des comptes de la
sécurité sociale. Il a indiqué que les comptes de
l'assurance chômage atteignaient à peine à
l'équilibre, après pourtant deux années de croissance de
l'économie.
Evoquant la situation comptable de l'UNEDIC, il a estimé que les
27 milliards de francs disponibles en trésorerie correspondaient
à des dettes exigibles soit immédiatement, soit au plus tard en
2002 et qu'une partie de ces fonds permettait d'assurer le besoin en fonds de
roulement, c'est-à-dire le paiement des engagements infra-mensuels. Il a
estimé la marge de manoeuvre à 15 milliards de francs, soit
un mois de prestations, et a considéré qu'il s'agissait là
de l'indispensable filet de sécurité dont avait besoin le
régime d'assurance chômage.
M. Denis Gautier-Sauvagnac, président de l'UNEDIC
, a
déclaré que, face à cette trésorerie, le
régime d'assurance chômage affichait 30 milliards de francs
de dettes dont 24 milliards de francs d'engagements provisionnés,
notamment 12,6 milliards de francs pour l'allocation de remplacement pour
l'emploi (ARPE) et 1,8 milliard de francs pour l'allocation
spéciale du fonds national pour l'emploi (ASFNE). Il a
considéré que la situation nette de l'UNEDIC était ainsi
à la limite du négatif.
En réponse à la remarque de M. Charles Descours,
M. Denis
Gautier-Sauvagnac
a constaté, qu'au jour d'aujourd'hui, les
négociations n'étaient toujours pas engagées pour le
renouvellement de la convention UNEDIC, qui expirait pourtant au
31 décembre de cette année.
M. Guy Fischer
a souhaité savoir si l'UNEDIC pourrait prendre en
charge les cotisations retraites des chômeurs.
M. Denis Gautier-Sauvagnac
a estimé que la question du respect
des partenaires ne pouvait être divisée, les accords signés
devaient être respectés, ainsi que leur autonomie à fixer
les recettes et les dépenses du régime d'assurance chômage.
C. AUDITION DE M. EMILE ZUCCARELLI, MINISTRE DE LA FONCTION PUBLIQUE, DE LA RÉFORME DE L'ETAT ET DE LA DÉCENTRALISATION
Enfin, la commission a procédé à
l'audition de M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la
réforme de l'Etat et de la décentralisation.
M. Emile Zuccarelli
a tout d'abord rappelé qu'actuellement la loi du
13 juin 1998 était seulement applicable aux salariés du secteur
marchand et qu'elle ne concernait pas les agents de la fonction publique de
l'Etat, de la fonction publique hospitalière et de la fonction publique
territoriale.
Il a indiqué que, lors de la négociation de l'accord salarial du
10 février 1998, après avoir été
sollicité par les représentants syndicaux sur la mise en
application de la réduction du temps de travail (RTT) dans le secteur
public, il avait estimé nécessaire que soit établi au
préalable un état des lieux.
Il a rappelé que cet état des lieux, confié à M.
Jacques Roché, conseiller-maître honoraire à la Cour des
comptes, lui avait été remis en février 1999 et qu'il
avait fait l'objet d'une concertation avec les représentants des
syndicats du personnel et des organisations d'élus locaux. Il a
souligné que le résultat de ces rencontres bilatérales
avait été retracé dans le rapport remis au Parlement, le
22 juin 1999, conformément à l'obligation prévue à
l'article 14 de la loi du 13 juin 1998.
Il a souligné qu'il avait à nouveau pris contact avec les
organisations syndicales et les associations représentatives
d'élus locaux en septembre dernier pour faire avancer le dossier.
Il a précisé que l'objectif du Gouvernement était de faire
bénéficier les fonctionnaires de " l'avancée
sociale " que constitue la règle des 35 heures de travail
hebdomadaire au même titre que les autres salariés.
L'objectif est également de saisir cette occasion pour améliorer
le service public tout en prolongeant le dialogue social au niveau
déconcentré, le plus près possible du terrain.
Il a précisé que la RTT devait s'appliquer aux fonctionnaires qui
travaillaient en moyenne annuelle plus de 35 heures par semaine, les
autres devant, en première analyse, conserver les mêmes horaires
qu'actuellement.
Il a estimé possible de déboucher, d'ici à trois mois, sur
un accord relatif à l'aménagement et à la RTT qui serait
valable pour l'ensemble des trois fonctions publiques.
Cet accord, à la fois suffisamment précis et suffisamment souple,
devrait ensuite être adapté au niveau de chaque fonction publique
et pour la fonction publique d'Etat, pour chaque ministère. Enfin, la
négociation devrait avoir lieu au niveau des entités
administratives déconcentrées, c'est-à-dire au niveau des
services de l'Etat, des établissements hospitaliers et des
collectivités locales employeurs.
S'agissant du contenu de l'accord " inter-fonctions publiques ", il a
précisé que celui-ci aurait pour objet de mettre à jour
l'environnement réglementaire pour définir des notions de base,
telles que la notion de temps de travail, de travail de nuit, d'astreinte ou de
temps choisi, de poser quelques objectifs généraux, et de
transposer en droit interne des directives européennes.
M. Jean Delaneau, président,
s'est interrogé sur les
conséquences législatives de cet accord.
M. Emile Zuccarelli
a effectivement considéré qu'un projet
de loi pourrait apparaître nécessaire, notamment au regard du
principe de libre administration des collectivités locales, pour les
dispositions applicables à la fonction publique territoriale.
M. Louis Souvet, rapporteur,
s'est interrogé sur la constatation
émise dans le rapport de l'inspection générale des
finances (IGF) de 1997 qui faisait état d'un sureffectif de 10 % au
minimum dans les trois fonctions publiques, soit près de
500.000 agents en trop, pour un coût de 150 milliards de francs
par an.
Il s'est demandé si la RTT serait considérée comme une
occasion de maîtriser, voire de réduire, les effectifs dans les
fonctions publiques. Il s'est interrogé sur le coût du passage aux
35 heures hebdomadaires de travail. Il s'est demandé si la RTT
serait financée par un développement de la flexibilité
dans la fonction publique, par un blocage des salaires des fonctionnaires ou
par des augmentations d'impôts.
En réponse,
M. Emile Zuccarelli
a souligné que le rapport
de l'IGF de 1997 n'avait pas été réalisé à
la demande du ministère de la fonction publique mais qu'il
résultait d'une initiative de M. Jean Choussat. Il a
précisé qu'il ne partageait pas les analyses exposées dans
ce rapport, tout en regrettant que son auteur n'ait pas précisé
dans quel secteur il estimait excédentaire le nombre de fonctionnaires.
Evoquant les diverses demandes transmises par les élus relatives
à l'insuffisance numérique d'infirmières, d'enseignants et
de policiers dans les services de l'Etat, il a rappelé qu'il avait
déclaré que " les besoins du service public étaient
illimités, mais que ses moyens étaient limités ". Il
a souligné que le nombre des fonctionnaires était un choix
politique effectué sous la contrainte du respect des équilibres
économiques internes et externes.
Concernant le rapport de M. Roché, il a indiqué que celui-ci ne
posait pas la question de la RTT dans la fonction publique en termes de
créations d'emplois et il a précisé que le Gouvernement
n'analysait pas le passage aux 35 heures de travail hebdomadaire dans le
secteur public de la même façon que dans le secteur marchand.
Il a rappelé que le secteur marchand n'avait pas effectué de
créations nettes d'emplois au cours des quinze ou vingt dernières
années, alors que, dans le même temps, le secteur public avait
augmenté ses effectifs de 20 %, ce qui avait contribué
à lutter contre le chômage.
Il a considéré que les éléments qui permettaient le
financement de la RTT dans la loi du 13 juin 1998 ne pouvaient pas être
transposés dans le secteur public : en effet, les gains de
productivité ne suscitent pas de recettes supplémentaires, mais
un meilleur service pour l'usager ; l'augmentation de la pression fiscale
n'est pas une hypothèse à l'ordre du jour ; enfin, la
modération salariale est difficile à faire jouer dans un domaine
où la grille salariale est uniforme et centralisée et où
toute modification du point de rémunération joue à la fois
pour les actifs et pour les retraités.
Il a souligné, à nouveau, que l'emploi n'était pas un
objectif dans la démarche de réduction du temps de travail dans
la fonction publique, mais qu'il s'agissait de lui appliquer une avancée
sociale.
S'agissant de la flexibilité, faisant part de ses réticences
à l'égard de ce terme dont le sens a parfois été
dévoyé, il a indiqué que le rapport Roché se
référait à la notion " d'annualité "
à des fins statistiques pour comparer sainement le temps de travail des
différents fonctionnaires et prendre en compte les différents
régimes de congé ou de récupération.
Il s'est déclaré incapable d'évaluer le coût de la
mise en oeuvre de la RTT dans les fonctions publiques, tout en soulignant que
ce coût devrait rester compatible avec les grands équilibres
financiers de la Nation et que chaque collectivité employeur devrait
faire face à ses responsabilités.
M. Alain Gournac
s'est inquiété que l'on puisse discuter
de la RTT dans la fonction publique sans préalablement et
prioritairement calculer son coût ; il a évoqué
l'inquiétude des maires sur le coût des modalités du
passage aux 35 heures. Evoquant la démarche d'amélioration
de la qualité des services et de certification poursuivie dans sa
commune, il a souligné que la RTT devrait aller de pair avec une
meilleure adaptation des horaires en vue d'améliorer le service rendu au
public.
M. André Jourdain
a considéré qu'au cours des
quinze dernières années, le secteur marchand avait
créé 1,7 million d'emplois et en avait supprimé
802.000, ce qui faisait apparaître un solde positif. Il a émis des
doutes sur le fait que les fonctionnaires, dont la durée de travail est
aujourd'hui inférieure à 35 heures, admettent que leurs
horaires ne soient pas réduits. Il a souhaité un assouplissement
des règles de cumul entre un emploi public et un emploi privé,
notamment pour les secrétaires de mairie des petites communes
travaillant à temps partiel.
M. Jacques Bimbenet
s'est interrogé sur les conséquences
financières de la mise en oeuvre des 35 heures hebdomadaire de
durée du travail dans les services départementaux d'incendie et
de secours.
En réponse,
M. Emile Zuccarelli
a indiqué qu'il
n'était pas étonné des réticences exprimées
par les responsables des collectivités locales, mais il a observé
que ces dernières procédaient souvent à des
avancées sociales dans la plus grande dispersion, ce qui rendait la
situation particulièrement complexe.
Il a observé, à cet égard, que 25 % des communes
avaient déjà mis en oeuvre une durée hebdomadaire moyenne
de travail égale ou inférieure à 35 heures, tout en
soulignant que les communes en question n'étaient pas celles dont les
ressources étaient les plus importantes. Dans ces conditions, il a
observé qu'il serait difficile de prévoir une subvention
compensatrice de l'Etat.
De même, il a souligné que le temps de présence effectif en
caserne des sapeurs-pompiers dans les services d'incendie et de secours variait
entre 90 et 140 jours par an selon les collectivités locales, en
observant que cette disparité n'était pas un facteur
d'équité.
S'agissant de l'amélioration du service rendu, il a estimé qu'il
serait " malheureux " de ne pas saisir l'occasion de la mise en place
de la RTT pour chercher à mieux satisfaire les besoins des usagers.
Concernant le cumul d'emplois, il a indiqué que le Conseil d'Etat avait
récemment transmis un rapport au Gouvernement qui allait dans le sens de
l'autorisation du cumul avec un emploi privé en cas d'occupation d'un
emploi public " à temps très partiel ".
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
s'est inquiétée de la
perception par le public des informations telles que celles contenues dans le
rapport de l'IGF de 1997. Elle a souhaité que les négociations
sur la RTT soient utilisées pour favoriser une réorganisation des
services. Elle s'est interrogée sur le calendrier de négociations
envisagé par le Gouvernement.
M. Claude Domeizel
a approuvé la démarche consistant
à rechercher un accord préalable valable pour l'ensemble des
trois fonctions publiques. Il a souligné la difficulté que
poserait la coexistence au sein d'une même collectivité publique,
d'agents de droit privé bénéficiant de la RTT, et de
fonctionnaires de droit public dont la durée hebdomadaire moyenne de
travail serait maintenue à 39 heures.
M. Michel Esneu
a douté que l'on puisse diminuer le temps de
travail dans la fonction publique sans créer d'emplois, sauf à
courir le risque d'un moindre service offert.
M. Guy Fischer
a approuvé la démarche du ministre tout en
évoquant l'importance des besoins nouveaux à satisfaire, en
particulier dans les banlieues sensibles. Il s'est demandé si les
élus seraient bien responsables de la mise en oeuvre de la RTT
vis-à-vis de leurs services.
En réponse,
M. Emile Zuccarelli
a souligné, s'agissant du
rapport de M. Choussat, que le Gouvernement estimait, en
général, que l'on avait tort de stigmatiser les fonctionnaires.
Rappelant que les fonctionnaires, pour 96 % d'entre eux, travaillaient
directement sur le terrain, il a considéré que ces derniers
étaient utiles et qu'il n'y avait pas aujourd'hui " de
fonctionnaires en trop ". Il a indiqué que l'objectif du
Gouvernement était bien de passer aux 35 heures hebdomadaires de
travail dans les services publics, en facilitant leur réorganisation, et
sans surcharge financière excessive.
S'agissant du calendrier, il a précisé que le Gouvernement
espérait signer un accord-cadre d'ici au 1
er
janvier 2000,
que les dispositions applicables à chaque fonction publique pourraient
être fixées au 1
er
janvier 2001 et que la mise en place
concrète de la RTT dans le secteur public pourrait donc se faire
à partir de 2002.
Il a admis que la coexistence d'agents de droit privé et de
fonctionnaires sous statut, au sein d'une même entité,
entraînerait temporairement un problème délicat à
gérer en particulier dans les hôpitaux.
Concernant la fonction publique territoriale, il a confirmé que le
responsable élu de la collectivité locale serait le seul
responsable de la mise en oeuvre de la RTT dans ses services, tout en
n'excluant pas une concertation approfondie avec les associations
représentatives d'élus locaux lors de la période de
négociation sur les mesures générales.
M. Jean Delaneau, président,
s'est interrogé sur la
façon dont la RTT pourrait permettre certaines avancées,
s'agissant en particulier de l'avenir des emplois-jeunes et de la mise en
oeuvre des nouvelles technologies.
M. Emile Zuccarelli
a considéré que la mise en oeuvre de
la RTT offrait une occasion pour améliorer le dialogue social dans la
fonction publique et mettre en oeuvre des réformes en termes de
mobilité, de formation et de gestion des ressources humaines. Il a
estimé que les nouvelles technologies de l'information et de la
communication (NTIC), avec lesquelles les nouvelles générations
de fonctionnaires semblaient très familiarisées,
entraîneraient des changements importants et rapides de l'organisation
administrative.
VI. EXAMEN DU RAPPORT
Le
mercredi 27 octobre 1999, sous la
présidence de M. Jean Delaneau,
président
, la commission a procédé à
l'examen du rapport
de
M. Louis Souvet
sur le
projet de
loi n° 22
(1999-2000), adopté par l'Assemblée
nationale, après déclaration d'urgence, relatif à la
réduction négociée du temps de travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que le Gouvernement avait
déposé, le 28 juillet dernier, un projet de loi relatif
à la réduction négociée du temps de travail et que
ce projet de loi, sensiblement amendé et complété par une
quinzaine d'articles supplémentaires, avait été
adopté par l'Assemblée nationale le 19 octobre dernier.
Il a observé que la discussion de ce texte intervenait dix-huit mois
après celle d'un premier texte déjà relatif à la
réduction du temps de travail, en soulignant l'existence d'une
différence essentielle entre ces deux textes : la loi du
13 juin 1998 fixait le principe d'un abaissement de la durée
légale du travail à 35 heures par semaine à compter du
1
er
janvier 2002 et dès le 1
er
janvier
2000 pour les entreprises dont l'effectif est de plus de vingt salariés,
alors que le nouveau projet de loi met en oeuvre ce principe.
Il a souligné que l'abaissement de la durée légale du
travail ne se traduisait pas mécaniquement par une baisse de la
durée effective du travail, son effet indirect étant un
renchérissement du coût du travail pour les entreprises qui ne
réduiraient pas la durée collective du travail.
Il a considéré que le débat ne portait pas aujourd'hui sur
le principe de la réduction du temps de travail. Il a estimé en
effet que l'opposition actuelle avait beaucoup oeuvré pour favoriser une
réduction du temps de travail négociée en
considérant que, dans un contexte de chômage massif, aucune piste
ne devait être négligée.
Il a rappelé que la commission avait toujours été en
pointe dans cette démarche, notamment lors de la discussion de la loi du
11 juin 1996 dite " loi de Robien " qui incitait les entreprises
à réduire la durée collective du temps de travail, ainsi
que lors de la discussion de la première loi Aubry, il y a dix-huit
mois. Le Sénat avait alors voté les propositions de la commission
qui privilégiaient une nouvelle fois une réduction volontaire du
temps de travail selon un barème révisé de la " loi
Robien " afin de maîtriser le coût budgétaire du
dispositif, de préférence à un abaissement de la
durée légale du travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé qu'il avait
déclaré à cette occasion que " librement
négociée, associée à une souplesse indispensable
à la compétitivité de l'économie, la
réduction du temps de travail pouvait sans doute créer des
emplois ou en préserver dans certaines entreprises, en fonction du
contexte qui est propre à chacune, contexte économique, contexte
social, contexte psychologique également, c'est-à-dire
volonté commune ".
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que, depuis deux
ans, la France était le seul pays au monde à avoir engagé
une démarche de réduction de la durée légale du
travail, cette question étant même devenue l'alpha et l'omega du
débat économique et de la négociation collective. Il a
observé qu'aucune autre réforme d'envergure n'avait
été menée, que ce soit en termes d'allégements de
cotisations sociales, de flexibilité, de réforme du marché
du travail ou encore de formation professionnelle.
Il a estimé, dans ces conditions, que la comparaison du bilan de la loi
du 13 juin 1998 d'une part et des résultats obtenus par les autres
grands pays européens d'autre part, dans la lutte contre le
chômage, devait permettre de porter un premier jugement sur la
validité de l'option choisie par le Gouvernement.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que bilan de la loi
du 13 juin 1998, en termes de créations d'emplois, ne pouvait
pas être considéré comme satisfaisant.
Il a rappelé que le Gouvernement avait annoncé début
septembre que les accords avaient donné lieu à environ 120.000
engagements de créations d'emplois, dont près de 18.000 emplois
préservés et près de 19.000 créés par le
secteur public, ce qui lui a semblé bien peu compte tenu des moyens mis
en oeuvre par le Gouvernement pour inciter l'ensemble des entreprises
françaises à signer un accord.
Il a remarqué que 98,8 % des entreprises occupant au moins un
salarié n'avaient pas signé d'accord de réduction du temps
de travail et que 90 % des salariés du secteur marchand
n'étaient pas couverts par un accord.
Il a noté que les 120.000 créations ou préservations
d'emplois ne représentaient que 0,58 % des effectifs actuels du
secteur marchand.
Il a rappelé que la croissance à elle seule avait
généré la création de 500.000 emplois dans le
secteur marchand en deux ans.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a estimé que le bilan
présenté par le Gouvernement n'était donc pas à la
hauteur des enjeux : 3 millions de chômeurs, un chômage
de longue durée qui se maintient, une segmentation du marché du
travail qui se confirme, alors même que la présentation des
résultats de la loi du 13 juin 1998 n'était pas exempte de tout
reproche.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré qu'il
était aujourd'hui démontré que les 85.000 créations
d'emplois annoncées (hors secteur public et hors emplois
" préservés ") ne constituaient que des promesses
d'embauches qui restaient encore à réaliser comme l'avait reconnu
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, lors
de son audition par la commission. Il a observé qu'on ne pouvait dire,
aujourd'hui, précisément combien d'emplois avaient
été effectivement créés du fait de la loi du 13
juin 1998 et que ce fait à lui seul légitimait sa
perplexité sur le dispositif dans son ensemble.
Par ailleurs,
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souligné que 6 des
15.000 accords concernaient à eux seuls près de 600.000 des
2,2 millions de salariés couverts par un accord d'entreprise ou
d'établissement, soit 27,5 % du total des effectifs
concernés. Il a déclaré que ces accords avaient
été signés par Electricité de France (EDF),
Télédiffusion de France (TDF), la Société nationale
des chemins de fer français (SNCF), le Conseil général de
la Nièvre, les Mines de potasse d'Alsace et La Poste, en remarquant que
la prise en compte de ces structures publiques pouvait biaiser sensiblement le
bilan.
Il s'est interrogé sur la véritable signification des 85.000
créations d'emplois annoncées dans le cadre des accords
aidés, considérant qu'un certain nombre de ces emplois
correspondait à des effets d'aubaine.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que le Gouvernement
estimait à 15.000 les créations d'emplois relevant des effets
d'aubaine. Il a estimé que ce chiffre ne pouvait être
rapporté aux 120.000 engagements de créations ou de
préservations d'emplois, compte tenu des 18.800 emplois relevant du
secteur public et des 16.300 emplois créés ou
préservés par des entreprises qui n'avaient pas reçu une
aide financière.
Il a constaté que ces 15.000 emplois devaient être
rapprochés des 85.000 emplois créés ou
préservés par des entreprises ayant signé un accord
aidé, ce qui représentait déjà un effet d'aubaine
d'environ 18 %. Il a observé à ce stade que ce chiffre de
18 % ne distinguait pas entre emplois créés ou
préservés, sachant toute l'ambiguïté que comportait
la notion d'emploi " préservé ". Dans ces conditions,
il a estimé que les chiffres du rapport préparé par le
Gouvernement illustraient que les accords signés en vertu de la loi du
13 juin 1998 avaient permis 70.000 promesses d'embauches (82 % des
85.000 emplois prévus par les accords aidés) et non 120.000
comme on pouvait le croire en écoutant des lectures plus accommodantes.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré,
néanmoins, que ce chiffre de 70.000 créations d'emplois ne
pouvait, lui aussi, constituer une bonne approximation du nombre d'emplois
créés, compte tenu de la technique retenue par le Gouvernement
pour mesurer les effets d'aubaine.
Il a rappelé que le rapport présenté par le Gouvernement
le 20 septembre dernier expliquait, en effet, que la mesure de l'effet
d'aubaine avait été obtenue en comparant les entreprises ayant
signé un accord Aubry avec celles qui, appartenant à un
même secteur et ayant une taille comparable, n'avaient pas signé
d'accord. Il a observé que les experts du ministère de l'emploi
estimaient que la rupture observée dans l'évolution des effectifs
de ces entreprises constituait une mesure de l'effet sur l'emploi de la
réduction du temps de travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a
déclaré que le raisonnement, développé à la
page 13 du tome I du bilan, serait correct si l'on ne constatait pas avec
étonnement à la page 6 du tome II, dans les annexes, un graphique
tout à fait intéressant, et bien peu mis en valeur, qui
expliquait que l'évolution des deux catégories d'entreprises
examinées par les services du ministère différait
déjà entre 1990 et 1996, c'est-à-dire avant le vote de la
loi Robien et bien avant celui de la première loi Aubry.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a estimé que cela signifiait que,
bien qu'appartenant à un même secteur et ayant la même
taille, les entreprises ayant signé un accord n'étaient pas
comparables à celles qui n'en avaient pas signé,
l'évolution de l'emploi dans les entreprises signataires étant
spontanément plus favorable.
Il a considéré que, paradoxalement, les données
rassemblées dans les annexes du rapport publié le 20 septembre
par le Gouvernement démontraient que l'effet d'aubaine jouait à
plein et que les entreprises qui avaient signé un accord en promettant
d'embaucher étaient celles qui avaient déjà tendance
à embaucher, c'est-à-dire celles qui bénéficiaient
d'un avantage compétitif.
M. Louis Souvet, rapporteur,
s'est interrogé sur la
véritable mesure de l'effet d'aubaine. Il a rappelé que le Centre
des jeunes dirigeants (CJD) estimait que 50 % des emplois
créés relevaient de l'effet d'aubaine, que les chambres de
commerce et d'industrie estimaient ce chiffre à 70 % tandis que M.
Bernard Brunhes considérait que la " quasi-totalité "
des embauches réalisées relevait de l'anticipation,
c'est-à-dire littéralement de l'effet d'aubaine.
M. Louis
Souvet, rapporteur,
a déclaré que ces estimations ramenaient
entre 25.000 et 43.000 le nombre d'emplois créés en vertu de la
loi du 13 juin 1998.
Observant que 6,7 milliards de francs avaient été inscrits
au budget en 1998 et 1999 pour financer la loi du 13 juin 1998, il a
noté que si l'on retenait la fourchette haute de l'estimation, soit
43.000 vrais emplois créés, chaque emploi créé
aurait été financé par l'Etat à hauteur de 156.000
francs (268.000 francs par emploi si l'on retenait l'hypothèse
basse de 25.000 emplois créés hors effet d'aubaine). Il
s'est interrogé sur le fait de savoir si cet argent n'aurait pas
été mieux employé à réduire le coût du
travail ou à développer la formation professionnelle.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souligné que l'ensemble des pays
européens avait bénéficié d'un retour de la
croissance depuis 1997.
Il a observé que le taux de chômage français,
supérieur à 11 % en 1999, était parmi les plus
élevés de l'Union européenne, ce taux étant
aujourd'hui de 7 % en Suède, 6,5 % en Irlande et au
Royaume-Uni, 4,5 % au Portugal, en Autriche et au Danemark, 3,3 % aux
Pays-Bas. Il a estimé que cette comparaison n'était pas à
l'avantage de la politique de l'emploi menée par le Gouvernement, la
France étant, en effet, le pays, parmi ceux qui avaient les plus hauts
taux de chômage en 1997, à avoir obtenu les moins bons
résultats depuis deux ans en termes de réduction du
chômage.
Il a observé, que, depuis deux ans, la Suède, l'Irlande et la
Finlande, trois pays qui avaient un taux de chômage compris entre 10 et
12 %, avaient réduit celui-ci de 20 à 33 % contre seulement
11 % pour la France. Il a remarqué que seule l'Italie avait obtenu
des résultats moins favorables que la France, en termes de baisse du
taux de chômage, soulignant qu'elle était le seul pays
également à avoir manifesté un intérêt pour
les 35 heures, bien qu'elle ait, depuis, renoncé à mener une
politique d'abaissement généralisé de la durée du
travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a conclu, aux termes de cette analyse du
bilan réalisé par le Gouvernement, que les emplois
n'étaient pas au rendez-vous de la loi du 13 juin 1998.
Il a cependant reconnu que la loi du 13 juin 1998 n'avait pas été
sans conséquence, la centaine d'accords de branche et les 15.000 accords
d'entreprise étant une réalité. Il a souligné que,
sous la contrainte exercée par la perspective de la seconde loi, les
partenaires sociaux avaient été amenés à
négocier ce dont les entreprises avaient besoin : la
flexibilité. Il a estimé que cette loi avait fait " tomber
des tabous " sur l'organisation du travail, les salariés ayant
dû accepter un accroissement de la flexibilité contre une
amélioration des conditions de travail et une réduction du temps
de travail. Il a remarqué que les accords signés avaient
prévu, dans plus de 42 % des cas, une fluctuation des horaires,
dans 25,2 % un redéploiement des qualifications des salariés
et dans 21 % une augmentation de l'amplitude des horaires d'ouverture. Par
comparaison, il a noté que seuls 18 % des accords avaient
prévu une augmentation de la durée d'utilisation des
équipements. Il a souligné que, selon les chiffres
communiqués dans le bilan du 20 septembre, 12 % des salariés
concernés par le nouveau temps de travail avaient une durée
annuelle du travail supérieure à 1.600 heures et 21 % des
accords prévoyaient une durée du travail hebdomadaire maximale
supérieure à 44 heures.
Il a insisté sur ces deux points, compte tenu du fait que le second
projet de loi avait prévu que le plafond de l'annualisation serait
abaissé à 1.600 heures et la durée maximale du travail
à 44 heures.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que les partenaires
sociaux étaient peu nombreux à considérer le bilan de la
loi du 13 juin 1998 comme satisfaisant.
Il a observé que le Mouvement des entreprises de France (MEDEF) et la
Confédération générale des petites et moyennes
entreprises (CGPME) restaient résolument opposés à ce
texte. Evoquant le Centre des jeunes dirigeants d'entreprises (CJD), il a
observé que 200 de ses 500 adhérents, qui avaient
décidé de mettre en oeuvre la loi Aubry, avaient renoncé
en cours de route à négocier la réduction du temps de
travail compte tenu de la complexité et de la rigidité des
procédures, de l'absence d'interlocuteurs du côté
salarié et des difficultés à mettre en oeuvre la
modulation du temps de travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que M. Jean Delmas,
président de l'Union professionnelle artisanale (UPA) avait
déclaré, lors de son audition, que la loi du 13 juin 1998
s'était révélée impossible à appliquer pour
la majorité des toutes petites entreprises du fait notamment de leur
déficit d'expertise juridique.
Il a observé que, globalement, les syndicats de salariés
redoutaient qu'à une première loi Aubry
" réformant " la négociation collective, à
travers une certaine pratique du mandatement, succède une seconde loi
réorganisant le paysage syndical, à travers, par exemple, la
pratique des " accords majoritaires ".
Il a souligné que les désaccords entre le Gouvernement d'une part
et les partenaires sociaux d'autre part, portaient sur cinq points : la
capacité de ce dispositif à créer des emplois, l'ouverture
inopinée d'un débat sur la représentativité
syndicale, l'articulation du second projet de loi avec les accords
déjà signés, la question du financement et l'application
des 35 heures aux trois fonctions publiques qui posait un problème
de coût considérable.
Il a rappelé que l'article 2 de la loi du 13 juin 1998 appelait les
partenaires sociaux à " négocier d'ici les
échéances fixées à l'article premier (2000 ou 2002
selon la taille de l'entreprise), les modalités de réduction
effective de la durée du travail adaptées aux situations des
branches et des entreprises ".
Il a observé que les employeurs estimaient que les entreprises avaient
" joué le jeu " et respecté la loi, " chacun ayant
négocié selon les exigences de sa profession dans un dialogue
parfaitement classique " et qu'ils considéraient, maintenant, que
les accords étendus ne seraient pas opérationnels, compte tenu du
refus du Gouvernement de reprendre les dispositions des accords concernant
notamment le régime des cadres, la durée du travail en cas
d'annualisation, le développement de la formation en dehors du temps de
travail ou encore le nombre d'heures supplémentaires effectivement
applicable.
Examinant le contenu des accords de branche,
M. Louis Souvet,
rapporteur,
a constaté qu'ils prenaient en compte des exigences
communes. Il a observé que plusieurs branches avaient retenu un
contingent élevé d'heures supplémentaires, citant la
métallurgie et le bâtiment et les travaux publics (BTP) (180
heures), les services de l'automobile (182 heures), la propreté
(190 heures), le textile et l'habillement (175 heures). Concernant
l'annualisation, il a observé que les durées annuelles retenues
étaient souvent supérieures à 1.600 heures par an,
comme pour le BTP (1.645 heures) ou la métallurgie, les services
à l'automobile ou les industries chimiques (1.610 heures).
M. Louis Souvet, rapporteur,
a indiqué que certains accords
prévoyaient qu'une partie importante de la formation aurait lieu en
dehors du temps de travail (services à l'automobile).
Concernant la compensation de la baisse de salaire en cas de réduction
d'horaire, il a observé que les accords de branche se partageaient entre
ceux qui renvoyaient aux accords d'entreprise et ceux qui posaient le principe
d'une compensation sur les salaires réels.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que la
procédure d'extension avait déjà constitué une
première occasion de remise en cause des accords, leur examen
s'étant fait à partir du cadre légal actuel,
c'est-à-dire du droit existant. Il s'est demandé s'il ne fallait
pas comprendre que la loi du 13 juin 1998 ouvrait un droit à
l'expérimentation pour autant que les dispositions adoptées
n'étaient pas sans lien avec l'objet de la loi et rejoignaient sur la
forme la procédure des ordonnances législatives qui habilite le
Gouvernement à adopter des actes de portée législative
à " durée déterminée ".
Il a déclaré que les dispositions qui avaient fait l'objet d'une
exclusion au motif d'une absence de base légale n'avaient rien de
scandaleux, citant l'annualisation individuelle, le décompte en jours du
forfait annuel de la durée du travail, la prise en compte des
salariés à temps partiel dans la modulation, le remplacement de
la rémunération des heures complémentaires par du repos,
l'abondement par les repos compensateurs légaux et les majorations pour
heures supplémentaires du compte épargne-temps ou encore la
non-assimilation à du temps de travail effectif du temps consacré
aux actions de formation prévues par le plan de formation.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a estimé que l'étendue des
réserves et des exclusions illustrait le fait que le Gouvernement ne
souhaitait pas encourager l'innovation dans le contenu des accords, ce qui
était contradictoire avec l'esprit même de la loi du 13 juin 1998.
Il a observé que les employeurs pouvaient tout à fait, dans ces
conditions, dénoncer le " double-jeu " du Gouvernement qui
exerçait un droit de regard sur le contenu des accords tout en
précisant que les dispositions étendues " ne
préjugeaient pas du contenu de la seconde loi ".
M. Louis Souvet, rapporteur,
a constaté que la négociation
sur la réduction du temps de travail avait donc été
sérieusement " encadrée " par l'absence de
possibilité d'innover et qu'il apparaissait aujourd'hui que, non
seulement les partenaires sociaux n'avaient pu négocier ce qu'ils
souhaitaient, c'est-à-dire " les modalités de
réduction effective de la réduction du temps de travail
adaptées aux situations des branches et des entreprises " mais
qu'il leur faudrait renégocier certains accords sur des clauses
fondamentales comme l'annualisation du temps de travail, le régime des
heures supplémentaires, la formation professionnelle, le temps de
travail des cadres ou les salaires, compte tenu des dispositions figurant dans
le présent projet de loi.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a estimé, en conséquence, que
le projet de loi ne reprenait pas le contenu des accords signés, mais
qu'il se limitait à tenir compte des " enseignements des accords
conclus ", ce qui lui semblait très différent. Il a
remarqué que si la loi du 13 juin 1998 avait pu être
présentée comme une loi-cadre sur la réduction du temps de
travail, ce nouveau texte constituait un recadrage brutal compte tenu notamment
des amendements souvent très contraignants adoptés à
l'issue de la première lecture à l'Assemblée nationale.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé les principales
dispositions du projet de loi.
Il a déclaré que l'article premier était sans doute le
plus emblématique puisqu'il confirmait le principe de la
réduction de la durée légale à 35 heures au
1
er
janvier 2000 pour les entreprises de plus de vingt
salariés et au 1
er
janvier 2002 pour les autres. Il a
remarqué que l'article 2 modifiait le régime des heures
supplémentaires pour tenir compte de l'abaissement de la durée
légale prévu par l'article premier. Il a souligné que
l'article 3 unifiait et simplifiait le régime des modulations
autour des 35 heures, tandis que l'article 4 pérennisait la
possibilité d'organiser la réduction du temps de travail sous
forme de journées ou de demi-journées de repos. Il a
observé que l'article 5 distinguait trois catégories de cadres et
que l'article 6 modifiait le régime du temps partiel.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a insisté sur l'article 11 du
projet de loi relatif aux allégements de cotisations sociales pour les
entreprises ayant conclu un accord de réduction du temps de travail. Il
a observé que le paragraphe XVI de cet article prévoyait que ces
allégements seraient financés par les régimes de
protection sociale, d'assurance chômage et par l'Etat. Il a
déclaré que l'article 12 définissait le barème
d'allégement de cotisations sociales. Il a souligné que l'article
14 validait les accords conclus avant l'entrée en vigueur de cette
nouvelle loi mais seulement pour un an, tandis que l'article 15 traitait
des conséquences du refus par un salarié d'accepter une
modification de son contrat de travail consécutive à la
réduction du temps de travail. Il a observé que l'article 16
garantissait les revenus des salariés rémunérés au
niveau du SMIC et passés aux 35 heures.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré que
l'étendue des dispositions du projet de loi comme leur
complexité, notamment en ce qui concernait le régime des heures
supplémentaires, illustrait bien le " recadrage "
opéré par le Gouvernement à l'occasion de l'examen de ce
projet de loi. Il a déclaré qu'il ne s'agissait plus seulement
d'abaisser la durée légale du travail mais aussi de renforcer
l'encadrement du pouvoir de gestion des chefs d'entreprise.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré que le
débat à l'Assemblée nationale avait pris un tour
très idéologique, l'objectif de création d'emplois
étant clairement passé au second rang derrière la
dimension sociale du projet de loi.
Il a cité Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité, déclarant, au début de sa présentation
du projet de loi à l'Assemblée nationale, que " les enjeux
de la loi étaient clairs : non seulement rechercher un meilleur
équilibre quantitatif entre le temps de travail, le temps pour soi, le
temps pour les autres, mais aussi améliorer la qualité de la vie
de travail comme de la vie personnelle " à travers le sport, le
bricolage, le jardinage, la culture, la flânerie... Il a rappelé
que la discussion avait inscrit le projet de loi " au coeur des grandes
luttes sociales de notre pays pour l'amélioration des conditions de vie,
pour la défense et le développement de l'emploi ".
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré que l'adoption de
nombreux amendements présentés quelquefois conjointement par la
commission des affaires culturelles, familiales et sociales de
l'Assemblée nationale, les membres du groupe socialiste et les membres
du groupe communiste, avait sensiblement durci le texte. Par ailleurs, il a
souligné que des articles additionnels avaient été
adoptés sans rapport direct avec la réduction
" négociée " du temps de travail, ceux-ci
réécrivant de nombreuses dispositions du code du travail.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a estimé que le plus
emblématique de ces ajouts " idéologiques "
était sans doute l'amendement à l'article premier,
déposé par la commission et les membres du groupe socialiste, qui
imposait aux employeurs projetant un plan social d'engager préalablement
une négociation tendant à la conclusion d'un accord sur la
réduction du temps de travail (amendement " Michelin ").
Il a considéré que ces durcissements étaient perceptibles
tout le long du texte, la définition du travail effectif (article
premier ter) ayant été modifiée pour inclure le temps
nécessaire à la restauration, les temps consacrés aux
pauses ainsi que certains temps d'habillage et de déshabillage.
Il a observé que les horaires d'équivalence avaient
été strictement encadrés (article premier quater) de
même que les astreintes (article premier quinquies). Il a souligné
que le délai de prise du repos compensateur avait été
réduit de six mois par un amendement à l'article 2.
Il a remarqué que la durée maximale du travail hebdomadaire avait
été abaissée à 44 heures par un article
additionnel 2 bis et qu'un repos hebdomadaire de 35 heures avait
été créé par un article additionnel 2 ter, sans
possibilité de dérogation, contrairement à ce que
prévoyait la directive européenne.
Il a noté que le régime unique de modulation de l'article 3 avait
été durci par un amendement qui prévoyait que l'accord
devait préciser les données économiques et sociales
justifiant le recours à la modulation, qu'un article 4 bis avait
renforcé les modalités de contrôle du repos dominical.
Il a souligné que la catégorie des cadres dirigeants de l'article
5 avait été strictement délimitée.
Par ailleurs, il a observé que des conditions supplémentaires
pour obtenir le bénéfice des allégements de cotisations
sociales prévus à l'article 11 avaient été
introduites.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a estimé que les modifications
apportées par l'Assemblée nationale avaient toutes
privilégié le renforcement et le durcissement de " l'ordre
public social " de préférence à
l'élargissement
du champ d'intervention des partenaires
sociaux. Il a remarqué que " l'ancrage à gauche " du
texte revendiqué par Mme Martine Aubry et M. Gaëtan
Gorce, rapporteur pour l'Assemblée nationale, avait donc
été confirmé et accentué par la première
lecture à l'Assemblée nationale.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que les auteurs du
projet de loi avaient souhaité le situer dans la lignée des
" grandes lois de gauche " sur le renforcement des garanties
accordées aux salariés.
Il a observé que les effets de ces " grandes " lois
contredisaient souvent leurs objectifs, en considérant qu'elles avaient,
non seulement tendance à privilégier l'amélioration des
conditions de travail des salariés en place au détriment des
perspectives d'emploi pour les chômeurs, mais aussi à faire que
les contraintes imposées aux chefs d'entreprise les amènent
à augmenter encore la productivité, la substitution du facteur
capital au facteur travail, et donc à pénaliser l'emploi
salarié.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré qu'au-delà
d'un principe, la réduction du temps de travail, et d'une
méthode, l'abaissement de la durée légale du travail, il
existait donc une véritable rupture entre la vision de la
société qui portait ce projet de loi et les convictions profondes
que partageait la majorité des membres de la commission. Il a
remarqué que, bien que les " 35 heures " aient
constitué la 23
ème
des 110 propositions de
M. François Mitterrand en 1981, elles n'avaient pas
été appliquées, la durée légale ayant
simplement été ramenée de 40 à 39 heures.
Toutefois, il a observé que l'idée était restée,
notant qu'en 1982, deux des inspirateurs du présent projet de loi,
MM. Yves Barou et Jacques Rigaudiat, écrivaient déjà
que la réduction du temps de travail était la seule voie
permettant d'éviter la solution néo-libérale. Il a
observé que ces deux auteurs considéraient alors que
" travailler deux heures par jour, et 40.000 heures tout au long de sa
vie ", ce vieux rêve de " l'humanité était
aujourd'hui à notre portée " en concluant que " le
droit à la paresse était d'abord une conquête à
réaliser avant que d'être une jouissance à savourer ".
Sans dénier l'importance des loisirs pour les salariés,
M.
Louis Souvet, rapporteur,
a souhaité réaffirmer combien le
travail restait aujourd'hui pour lui un principe de liberté
indispensable à la cohésion de la société. Il a
rappelé ce qu'avait expliqué Max Weber, à savoir que la
division du travail qui caractérisait nos économies contraignait
chaque individu à travailler pour les autres et constituait ainsi un
puissant facteur d'unité et de solidarité.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré
préférer penser avec Hannah Arendt que " la condition
humaine du travail est la vie elle-même " plutôt que de
considérer le travail comme une aliénation. Il a rappelé
à cet égard les termes de la première phrase du
cinquième alinéa du Préambule de la Constitution du 27
octobre 1946 : " Chacun a le devoir de travailler et le droit
d'obtenir un emploi ".
Il a estimé que la commission ne pouvait pas accepter ce texte en
l'état. Il a remarqué que ses objections se trouvaient
aujourd'hui renforcées par les incertitudes qui entouraient le
financement du dispositif.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que le 29 juin 1998 lors
du débat sur la proposition de loi relative à l'allégement
des charges sur les bas salaires dont le premier signataire était M.
Christian Poncelet alors président de la commission des Finances,
Mme Nicole Péry, secrétaire d'Etat aux droits des femmes et
à la formation professionnelle, avait déclaré au
Sénat que le Gouvernement n'avait pas souhaité poursuivre cette
politique d'allégement des charges sociales pour trois raisons : le
niveau des charges ne constituait pas selon lui un obstacle certain à
l'emploi, l'efficacité des allégements de charges lui semblait
relative et le financement d'un tel dispositif lui apparaissait comme difficile.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a remarqué que le Gouvernement
était aujourd'hui revenu sur ses deux premières objections,
reconnaissant que le coût du travail constituait bien un obstacle
à l'emploi et que les allégements de charges étaient
efficaces, mais il a observé que le troisième point relatif au
financement continuait à lui poser un problème.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a rappelé que le Gouvernement avait
en effet prévu dans ce projet de loi un allégement de cotisations
sociales spécifique pour les entreprises signataires d'un accord de
réduction du temps de travail ayant abaissé la durée
collective du travail à 35 heures au plus. Il a observé que tout
emploi inscrit dans ce cadre donnerait droit, à partir de l'an 2000,
à un abattement de cotisations patronales compris entre 21.500 francs
par an au niveau du SMIC et 4.000 francs à 1,8 SMIC et au-delà.
Il a souligné que les entreprises qui ne seraient pas éligibles
au nouveau dispositif continueraient de bénéficier de la
ristourne dégressive sur les bas salaires (" ristourne
Juppé ").
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré qu'à
plusieurs reprises, le Gouvernement avait fait état d'une estimation
d'une baisse de 4 à 5 % du coût salarial pour un salarié
à 1,6 SMIC, une fois pris en compte l'effet
" négatif " des 35 heures.
Il a souligné que le financement des allégements de cotisations
sociales était assuré par un fonds de financement
créé par l'article 2 du projet de loi de financement de la
sécurité sociale auquel se référait le paragraphe
XVI de l'article 11 du présent projet de loi.
Il a déclaré que ce fonds avait un double objectif :
financer les aides accordées aux entreprises passant aux 35 heures et
financer les allégements de charges sociales sur les bas salaires. Il a
observé que ce fonds était alimenté par des recettes
d'origines diverses : une fiscalité affectée (pas moins de
trois prélèvements : droits sur tabacs, contribution sociale
sur les bénéfices, taxe générale sur les
activités polluantes) et, dans la rédaction adoptée par
l'Assemblée nationale, examinée présentement, une
contribution de l'Etat, de l'UNEDIC et des régimes de
sécurité sociale.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que pour l'an 2000,
le financement de la ristourne " Juppé " sur les bas salaires
actuelle était assuré par 85,5 % des droits sur les tabacs dans
la limite de 39,5 milliards de francs.
Il a observé que l'extension de la ristourne " Juppé "
actuelle sur les bas salaires serait financée par le conglomérat
improbable de la taxe générale sur les activités
polluantes (3,2 milliards de francs) et de la contribution sociale sur les
bénéfices des sociétés (4,3 milliards de
francs).
Il a remarqué que les 17,5 milliards de francs résultant
directement des 35 heures devaient être financés en 2000 par
une contribution de l'Etat à hauteur de 18 %, une contribution des
régimes de protection sociale à hauteur de 32 % et une
contribution de l'UNEDIC à hauteur de 50 %.
Il a également rappelé que le produit de la contribution de 10 %
sur les quatre heures supplémentaires entre 35 et 39 heures,
payée par les entreprises dont la durée collective du travail
n'aurait pas été abaissée à 35 heures, serait
affecté au fonds.
Concernant le financement du fonds " à terme ",
M. Louis
Souvet, rapporteur,
a observé que l'exposé des motifs de
l'article 2 du projet de loi de financement de la sécurité
sociale indiquait que " les dépenses seraient de l'ordre de 100
à 110 milliards de francs par an ". Il a remarqué que le
coût proprement dit des 35 heures atteindrait alors 40 milliards de
francs et l'extension de la " ristourne Juppé "
25 milliards de francs, les 40 premiers milliards de francs
d'allégements devant être toujours financés par les tabacs
et les 25 milliards supplémentaires par la taxe
générale sur les activités polluantes et la contribution
sociale sur les bénéfices des sociétés. Il a
observé que la contribution des organismes sociaux et de l'Etat
était estimée à 40 milliards de francs.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que la
majorité des membres de la commission ne pouvait qu'être
très défavorable à ce plan de financement.
Il a estimé que l'affectation des droits sur les tabacs à un
fonds de financement mélangeant allégements et aides
pérennes à la réduction du temps de travail ne
répondait en rien à un impératif de santé publique.
Il a considéré que la contribution sociale sur les
bénéfices des sociétés, dont l'affectation au fonds
de financement était proposée à l'article 3 du projet de
loi de financement de la sécurité sociale constituait, en
réalité, une majoration déguisée de l'impôt
sur les sociétés, le produit de la taxe générale
sur les activités polluantes étant détourné de son
objet qui devrait être la réparation des dommages causés
à l'environnement.
Par ailleurs,
M. Louis Souvet, rapporteur,
a estimé que demander
des contributions à la sécurité sociale et à
l'UNEDIC pour financer des allégements de charges et la réduction
du temps de travail constituait un détournement de la finalité
des ressources de ces régimes, compte tenu notamment des
ambiguïtés qui entouraient la notion de " recyclage " des
bénéfices à attendre des créations d'emplois dans
le cadre des 35 heures.
Il a observé que les gestionnaires des régimes sociaux et les
partenaires sociaux avaient réaffirmé en juillet et en septembre
leur opposition totale à cette contribution.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré qu'en maintenant
son dispositif jusqu'au terme de la première lecture à
l'Assemblée nationale, le Gouvernement avait pris le risque de mettre
fin au paritarisme dans les régimes sociaux, ce qui lui semblait
très grave.
Au surplus,
M. Louis Souvet, rapporteur,
a déclaré que ces
contributions présentaient le caractère d'impositions, le
législateur étant seul compétent pour fixer les
règles concernant " l'assiette, le taux et les modalités de
recouvrement des impositions de toute nature ", comme le précisait
l'article 34 de la Constitution du 4 octobre 1958.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a souligné que l'annonce par le
Gouvernement de l'abandon du principe d'une contribution de la part des
régimes sociaux et de l'assurance chômage, si il devait être
salué comme un " retour à la raison ", ne laissait pas
moins la question du financement en suspens.
Il a observé que le Gouvernement avait annoncé que cette
contribution serait remplacée par une fraction des droits de
consommation sur les alcools. Ce faisant, il a considéré qu'en
privilégiant le financement des allégements de charges et la
réduction du temps de travail au détriment du financement futur
des retraites, le Gouvernement semblait contredire lui-même sa
priorité de " sauvegarder les régimes par
répartition " par l'intermédiaire du fonds de réserve.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré qu'en
dépit des annonces faites par le Gouvernement, le financement des 35
heures pour 2000 n'était pas assuré à hauteur de
8 milliards de francs et qu'à terme, le plan de financement
montrait un " trou " d'une vingtaine de milliards de francs.
M. Louis Souvet, rapporteur,
en a conclu que le projet de loi relatif
à la réduction négociée du temps de travail
n'était toujours pas financé.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a pris acte des reculs et des
hésitations du Gouvernement. Il a souhaité proposer une solution
radicale aux problèmes posés par ce projet de loi en le modifiant
selon quatre principes.
Il a souhaité supprimer les dispositions relatives à
l'abaissement de la durée légale du travail, et notamment
l'article premier (abaissement de la durée légale du travail),
l'article 2 (régime des cadres), l'article 11
(allégement de charges subordonné à la réduction du
temps de travail), l'article 12 (barème de l'allégement),
l'article 16 (double-SMIC) et l'article 17 (35 heures dans le secteur
agricole).
Il a présenté des corrections aux dispositions adoptées
à l'Assemblée nationale pour durcir le texte en supprimant ou en
amendant notamment les articles premier bis (contreparties à
l'aménagement du temps de travail), premier ter (modification de la
durée du travail effectif) et 4 bis (renforcement du contrôle du
travail dominical).
Il a proposé d'enrichir les dispositions non liées à
l'abaissement de la durée légale du travail par des amendements
importants, notamment sur les articles 3 (régime unique de modulation),
6 (travail à temps partiel), 9 (compte épargne-temps).
Il a souhaité développer la négociation collective et
garantir l'application des accords à travers l'adoption de quatre
amendements créant des articles additionnels : le premier appelle
les partenaires sociaux à participer à une conférence
nationale sur le développement de la négociation collective, le
deuxième valide pour cinq ans les clauses des accords conclu en
application de la loi du 13 juin 1998, le troisième valide l'accord
signé par les partenaires sociaux le 8 avril 1999 qui reconduit le
mandatement tel qu'il avait été défini par l'accord
interprofessionnel de 1995 et, enfin, le quatrième prévoit que
les établissements du secteur sanitaire, social et médico-social
pourront bénéficier de l'aide prévue par la
première loi Aubry jusqu'en juin 2000 afin de tenir compte des
contraintes spécifiques auxquelles doivent faire face ces
établissements du fait de la procédure d'agrément.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
a considéré que les
conclusions du rapporteur sur le bilan de la loi du 13 juin 1998 étaient
sombres et sans nuance. Elle a estimé que le nouveau projet de loi, en
associant étroitement la loi et le recours à la
négociation collective, permettait d'affirmer des garanties pour les
salariés et d'assurer une application sur le terrain au plus près
des réalités. Elle a constaté que la première loi
avait permis une reprise du dialogue social dans les entreprises. Rappelant que
les simples incitations à la négociation n'avaient pas
donné beaucoup de résultats après avoir cité
l'accord interprofessionnel de 1995 et la loi du 11 juin 1996, elle a
réaffirmé la nécessité d'une loi pour promouvoir la
réduction du temps de travail.
Mme Marie-Madeleine Dieulangard
ayant observé que M. Louis
Souvet, rapporteur, considérait que le projet de loi privilégiait
dorénavant un projet de société et un renforcement des
garanties sociales des salariés, s'est félicitée que la
dimension sociale ne soit pas absente de ce texte.
Elle a observé que le projet de loi proposait un dispositif
dégressif d'allégement des cotisations sociales dont pouvait
bénéficier l'essentiel des entreprises françaises.
M. André Jourdain
a déclaré qu'il aurait
préféré que la commission propose d'adopter une exception
d'irrecevabilité. Il a rappelé que les organisations d'employeurs
considéraient que les dispositions des accords n'avaient pas
été reprises entièrement par le second projet de loi.
M. André Jourdain
, évoquant le financement du dispositif,
a observé que le montant de la contribution de 10 % liée aux
heures supplémentaires étant estimé à
7 milliards de francs, cela signifiait qu'un milliard d'heures
supplémentaires était pris en compte. Il a estimé que ce
milliard d'heures supplémentaires entre 35 et 39 heures correspondait au
fait que dix millions de salariés n'étaient pas passés
à 35 heures, ce qui illustrait l'échec du dispositif.
M. Guy Fischer
a exprimé la volonté du groupe
communiste républicain et citoyen de clarifier nombre de points de ce
projet de loi et de sécuriser certains articles afin d'affirmer un
objectif de créations d'emplois. Il a déclaré que les
allégements de cotisations sociales opérés depuis une
dizaine d'années n'avaient pas donné de résultats
tangibles et a estimé que les nouveaux allégements prévus
devaient être subordonnés à des engagements de la part des
entreprises bénéficiaires. Il a considéré que la
France n'était pas le pays où le coût du travail
était le plus élevé et qu'au contraire le rapport entre le
capital et le travail s'était dégradé.
M. Guy Fischer
a déclaré que les propositions du
rapporteur revenaient à supprimer l'essentiel du texte adopté par
l'Assemblée nationale et illustraient l'existence de deux philosophies
complètement opposées sur la réduction du temps de
travail. Il a considéré qu'une loi était nécessaire
afin de libérer du temps pour les salariés. Il a affirmé
que son groupe s'opposerait aux propositions de la commission des affaires
sociales.
M. Jean Chérioux
a déclaré que la question de la
réduction du temps de travail n'était pas au centre du
débat et que les différences d'appréciation reposaient
plutôt sur les modalités à retenir. Il a
considéré qu'il n'était pas réaliste de s'en
remettre à la loi et qu'il convenait de laisser une plus grande latitude
aux partenaires sociaux. Il a observé que la négociation sur la
réduction du temps de travail aurait tout intérêt à
trouver sa place dans le cadre de la négociation annuelle obligatoire.
Mme Annick Bocandé
a souligné les faibles résultats
en termes d'emplois de la loi du 13 juin 1998. Elle s'est
inquiétée des modalités de financement de ce dispositif et
notamment du fait que la taxe générale sur les activités
polluantes soit détournée de son objectif premier,
c'est-à-dire la réparation des dommages causés à
l'environnement.
M. Serge Franchis
a estimé que le projet de loi était
moins moderne que ne le pensaient ses auteurs. Il a considéré que
si l'objectif de créations d'emplois n'était pas atteint cela
signifierait qu'une occasion avait été manquée. Il a
souhaité connaître les modalités d'articulation des
différentes aides relatives à la réduction du temps de
travail.
M. Philippe Nogrix
a fait part de son désaccord sur la vision qui
sous-tendait ce projet de loi qui a tendance à ne pas tenir compte des
modalités d'application et des oppositions qui se manifestaient, y
compris sur le terrain. Concernant le financement, il s'est
étonné que des ressources soient détournées de leur
objet, notamment en ce qui concernait la taxe générale sur les
activités polluantes. Il a évoqué la question de
l'application des 35 heures dans le secteur public qui demeurait une
inconnue. Il a souligné les problèmes que posait l'abaissement de
la durée légale pour les établissements du secteur social
compte tenu des contraintes spécifiques liées à la
procédure d'agrément.
M. Claude Domeizel
a considéré que les conclusions du
rapporteur étaient très catégoriques et s'est
interrogé sur la contradiction qu'il y avait à supprimer
l'essentiel des dispositions du texte tout en prônant le
développement de la réduction du temps de travail.
M. Claude Huriet
a souligné les conséquences de
l'abaissement de la durée légale du travail sur l'augmentation
des coûts salariaux des entreprises. Il a déclaré que de
nombreuses entreprises avaient déjà des problèmes pour
recruter des salariés possédant les qualifications requises.
En réponse aux différents intervenants,
M. Louis Souvet,
rapporteur,
a souligné les difficultés qu'il avait pu
rencontrer dans l'examen d'un texte dont le Gouvernement avait changé
l'ensemble des modalités de financement en cours d'examen. Il a
considéré que le Gouvernement avait semé ainsi un grand
désordre dans l'organisation de la procédure d'examen du projet
de loi.
Il a déclaré qu'aux termes de ses nombreuses auditions, la
majorité de ses interlocuteurs s'interrogeaient sur la façon dont
ce projet de loi pourrait être appliqué. Il a estimé que
l'application des 35 heures dans le secteur public poserait d'énormes
difficultés, notamment au niveau local.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a réaffirmé qu'il existait
des visions différentes de l'évolution de la
société et que cette opposition reposait notamment sur la place
qui devait être accordée au travail. Il a rappelé que le
projet de loi ne tenait pas les engagements pris en 1998 concernant la reprise
des clauses des accords signés.
Il a observé que l'intérêt d'une motion tendant à
opposer l'exception d'irrecevabilité avait perdu de son
intérêt depuis que le Gouvernement avait renoncé à
mettre à contribution les régimes sociaux et l'assurance
chômage.
Concernant la question des allégements de charges,
M. Louis Souvet,
rapporteur,
a rappelé que Mme Nicole Péry, secrétaire
d'Etat, avait déclaré en 1998 que les allégements de
charges ne constituaient pas une priorité du Gouvernement ; il a
salué la récente volte-face du Gouvernement sur ce sujet.
M. Louis Souvet, rapporteur,
a considéré qu'il n'y avait
pas de contradiction entre les dispositions proposées et le souhait de
favoriser une réduction du temps de travail étant donné la
place qui était réservée aux partenaires sociaux dans le
cadre du nouveau dispositif.
Concernant les articulations des différentes aides à la
réduction du temps de travail,
M. Louis Souvet, rapporteur,
a
déclaré qu'il avait demandé par écrit à
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, un
récapitulatif de ces aides. Il a précisé qu'il n'avait pas
encore reçu de réponses à ce questionnaire bien qu'il
avait souhaité les obtenir avant le 27 octobre.
M. Jean Delaneau, président,
a souhaité rappeler les
termes du huitième alinéa du Préambule à la
Constitution du 27 octobre 1946, selon lesquels " tout travailleur
participe par l'intermédiaire de ses délégués,
à la détermination collective des conditions de travail ainsi
qu'à la gestion des entreprises ". Il a considéré que
telle était la philosophie du dispositif d'amendements proposés
par le rapporteur.
Ensuite la commission a procédé à l'examen des articles et
des amendements proposés par le rapporteur.
Elle a adopté un premier amendement tendant à insérer un
article additionnel avant l'article premier
prévoyant que
les partenaires sociaux seraient appelés à participer à
une conférence nationale sur le développement de la
négociation collective.
Elle a adopté ensuite un second amendement tendant également
à insérer un
article additionnel avant l'article premier
validant, dans la limite de cinq ans, les clauses des accords conclu en
application de la loi du 13 juin 1998.
La commission a adopté un amendement de modification de
l'article premier
du projet de loi supprimant les paragraphes I, II
et IV de cet article et coordonnant ces suppressions avec les dispositions de
l'article premier de la loi du 13 juin 1998 au regard de la suppression de
l'abaissement de la durée légale du travail.
Elle a adopté un amendement tendant également à
insérer un
article additionnel avant l'article premier bis
afin de valider l'accord signé par les partenaires sociaux sur le
renouvellement du dispositif relatif au mandatement.
Elle a adopté un amendement tendant à insérer un
article additionnel avant l'article premier bis
pour prévoir
que les établissements du secteur sanitaire, social et
médico-social pourront bénéficier de l'aide prévue
à l'article 3 de la loi du 13 juin 1998 jusqu'au
1
er
juin 2000.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article premier
bis
(affirmation des contreparties pour le salarié de
l'aménagement du temps de travail).
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article premier ter
, prévoyant que le temps nécessaire
à l'habillage et au déshabillage, lorsque le port d'une tenue de
travail est imposé, est rémunéré selon des
modalités fixées par convention ou accord collectif de travail.
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article premier quater
tendant à prévoir, en l'absence
de décret, la possibilité pour les partenaires sociaux de
définir des durées d'équivalence.
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article premier quinquies
relatif à la définition de
l'astreinte.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 2
relatif
au régime des heures supplémentaires dans le cadre de
l'abaissement de la durée légale du travail.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 2 bis
relatif à l'abaissement de la durée maximale du travail
hebdomadaire.
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article 2 ter
afin de prendre en compte les dispositions d'une
directive sur le repos hebdomadaire minimal.
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article 3
relatif à un régime unique de modulation des
horaires de travail.
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article 4
relatif à la réduction du temps de travail par
l'attribution de journées ou de demi-journées de repos.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 4 bis
qui
renforce le contrôle et l'interdiction du travail hebdomadaire.
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article 5
relatif à la durée et à la
rémunération du travail des cadres.
Elle a adopté une nouvelle rédaction de
l'article 6
relatif au travail à temps partiel, comportant huit modifications aux
différents paragraphes de cet article.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 6 bis
relatif à l'abrogation d'un dispositif d'exonération de charges
sociales pour les contrats de travail à temps partiel.
Elle a adopté conformes
les articles 7
(travail intermittent) et
8
(dispositions relatives aux congés) du projet de loi.
Elle a adopté un amendement qui modifie plusieurs dispositions de
l'article 9
(compte épargne-temps).
Elle a adopté un amendement qui modifie plusieurs dispositions de
l'article 10
relatif à la possibilité d'organiser des
périodes de formation pour partie en dehors du temps de travail.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 10 bis
portant sur la transposition de certaines dispositions d'une directive
européenne du 22 juin 1999 relative à la protection des jeunes au
travail.
Elle a adopté trois amendements de suppression des différents
paragraphes de
l'article 11
relatif à un allégement de
cotisations sociales pour les entreprises signant un accord de réduction
du temps de travail et prévoyant ses modalités de financement.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 11 bis
prévoyant des dispositions relatives au SMIC pour les salariés
des entreprises créées postérieurement à
l'entrée en vigueur de la présente loi.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 12
qui
définit le nouvel allégement de cotisations sociales lié
à la réduction du temps de travail.
Elle a adopté un amendement de modification de
l'article 12 ter
relatif à la réduction du temps de travail par étapes des
entreprises de moins de vingt salariés.
Elle a adopté un amendement comportant plusieurs modifications de
l'article 12 quater
relatif aux formalités administratives
imposées aux entreprises de moins de vingt salariés applicables
pour bénéficier de l'aide financière à la
diminution du temps de travail.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 12 quinquies
relatif à l'adaptation de
certaines dispositions du projet de loi à la collectivité de
Saint-Pierre-et-Miquelon.
Elle a adopté un amendement de modification de
l'article 13
relatif aux groupements locaux d'employeurs.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 14
relatif à une validation partielle des accords signés en
application de la loi du 13 juin 1998.
Elle a adopté un amendement modifiant
l'article 15
relatif au
licenciement d'un salarié refusant les conséquences de
l'application d'un accord de réduction du temps de travail.
Elle a adopté un amendement modifiant
l'article 15 bis
qui
exonère du paiement de la contribution Delalande l'entreprise ayant
licencié un salarié refusant la modification de son contrat de
travail consécutive à la mise en place d'un accord de
réduction du temps de travail.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 16
garantissant la rémunération des salariés payés au
SMIC en cas de réduction du temps de travail au motif que cet article
était intrinsèquement lié à la baisse de la
durée légale du travail, supprimée par la commission
à l'article premier.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 17
qui
abaisse à 35 heures par semaine la durée légale du
travail des salariés agricoles.
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 18
relatif à la présomption de salariat qui constitue un
" cavalier législatif ".
Elle a adopté un amendement de suppression de
l'article 19
relatif à l'information du comité d'entreprise sur les aides
reçues par l'entreprise, dépourvu de portée normative.
Elle a adopté un amendement qui propose une nouvelle rédaction de
l'article 20
relatif à un rapport sur la mise en oeuvre de
l'allégement de cotisations prévu par le projet de loi.
La commission a approuvé à sa majorité le projet de loi
ainsi amendé.
" La réduction de la durée du travail (...) peut créer des emplois, beaucoup d'emplois "
Martine
Aubry
(JO - débat AN - 27 janvier 1998 - p. 977)
" La réduction du temps de travail crée des emplois, beaucoup d'emplois "
Martine
Aubry
(JO - débat AN - 5 octobre 1999, p. 6861)
" On peut estimer à environ 30.000 à 40.000 les emplois déjà créés à cette date pour l'ensemble des accords. "
Réponse de Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité à un questionnaire écrit de M. Louis Souvet, rapporteur, 28 octobre 1999
AVANT-PROPOS
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat a été saisi, le 19 octobre 1999, d'un projet
de loi au titre erroné dont le dispositif est déjà
périmé.
Un titre erroné
: le Gouvernement peut-il en effet parler de
réduction
" négociée "
du temps de
travail quand il abaisse autoritairement la durée légale ?
Un dispositif périmé
: le financement du projet de
loi en tant qu'il prévoyait une taxation des organismes de protection
sociale, a été totalement remis en question par le Gouvernement
quelques jours après son adoption sans modification par
l'Assemblée nationale.
Jamais probablement un projet de loi n'aura donc été
présenté et examiné dans une telle confusion, de
surcroît selon la procédure d'urgence déclarée par
le Gouvernement.
Confusion quant à ses objectifs
La réduction du temps de travail devrait
" créer des
emplois, beaucoup d'emplois "
. Il est prématuré de tirer
un bilan de la première loi Aubry car, si le compteur des aides tourne
déjà, les créations ou préservations d'emplois
restent des " promesses ".
Toutefois, à la lecture du second projet de loi, la réduction du
temps de travail apparaît désormais comme un objectif en soi.
Les aides que le projet de loi institue ne sont pas liées à des
créations d'emplois, même si le texte adopté par
l'Assemblée nationale se veut ambigu et peut laisser en
définitive un pouvoir exorbitant d'appréciation à
l'Administration.
Parallèlement, le Gouvernement fait son " chemin de Damas " et
découvre tardivement le mérite de l'allégement des charges
sur les bas salaires.
Mais il entend fusionner ces allégements avec les aides aux 35 heures et
réserver ce nouveau barème aux seules entreprises dotées
d'un
" accord fixant la durée collective du travail à 35
heures "
.
En seront ainsi exclues, sans raison, les entreprises qui,
indépendamment de leur volonté, n'auront pu conclure un accord,
quand bien même elles seraient à 35 heures, de même que
celles qui, sans être à 35 heures, supporteront toutefois le
coût de l'abaissement de la durée légale.
Confusion quant à la méthode
La loi du 13 juin 1998 qui restait volontairement floue quant aux
conséquences qui s'attachent à la baisse de la durée
légale du travail, appelait les partenaires sociaux à
" négocier les modalités de réduction effective de
la durée du travail adaptées aux situations des branches et des
entreprises
".
Face, d'une part, à l'échéance non négociable,
fixée par la même loi, d'une baisse de la durée
légale du temps de travail, compte tenu, d'autre part, des aides
substantielles qui étaient accordées pour inciter à une
anticipation de cette échéance, prenant acte, enfin, de la
promesse que la seconde loi reprendrait à son compte la teneur des
accords conclus, les partenaires sociaux ont négocié.
Le Gouvernement ne se fait pas faute de se féliciter du nombre et de la
qualité des accords conclus.
Cependant, le Gouvernement, en
" s'inspirant "
du contenu des
accords, opère des choix entre les clauses et n'en retient que
certaines, ce qui revient à nier toute négociation qui est faite
de concessions réciproques permettant d'atteindre un équilibre.
En outre,
" le nouvel espace de négociation "
que
prétend ouvrir le projet de loi est corseté par les
précisions, limites et détails que son dispositif comporte, de
sorte que l'espace de la négociation s'apparente à une peau de
chagrin.
Confusion quant aux financements
Depuis deux ans, le Gouvernement s'obstine à vouloir faire financer les
35 heures par les organismes gérant la protection sociale des
Français, malgré l'opposition formelle, résolue et unanime
de l'ensemble des partenaires sociaux.
En décembre 1997, dès le dépôt du premier
projet de loi sur la réduction du temps de travail, le Gouvernement
affirmait, dans son exposé des motifs, son intention de ne compenser que
partiellement à la sécurité sociale les
exonérations de charges liées aux 35 heures.
En juin 1999, le ministre de l'économie et des finances, dans son
rapport pour le débat d'orientation budgétaire,
développait à nouveau et longuement la théorie du
" recyclage ".
Le 28 juillet 1999, date de son dépôt, le projet de loi sur
la réduction négociée du temps de travail prévoyait
une " contribution " des organismes de protection sociale dont le
Conseil d'Etat s'est inquiété que ni le taux, ni l'assiette ne
soient fixés par la loi, dès lors qu'il s'agissait d'une
" imposition ".
Le 21 septembre 1999
,
dès la réunion de la commission
des comptes de la sécurité sociale, le Gouvernement faisait
" inscrire au budget de la sécurité sociale "
,
selon l'expression significative de la ministre de l'emploi et de la
solidarité, une provision de 5,6 milliards de francs.
Parallèlement, le Gouvernement annonçait que la
" part de
l'UNEDIC était provisionnée à hauteur de 5 à
6 milliards de francs "
. Cette dernière somme a crû
d'autant plus vite que son principe était plus vivement contesté
par les gestionnaires de l'UNEDIC : 5 à 6 milliards de francs le
30 septembre, 5 à 7 milliards de francs le 7 octobre,
7 milliards de francs le 12 octobre, 7 à 7,5 milliards de
francs le 21 octobre.
Le 19 octobre 1999, l'Assemblée nationale adoptait, en
première lecture, le projet de loi relatif à la réduction
négociée du temps de travail et votait sans modification
" l'imposition " des organismes sociaux dont le Sénat est donc
saisi.
Le 25 octobre 1999, le ministère de l'emploi et de la
solidarité annonçait le retrait du dispositif.
A l'évidence, le financement des 35 heures, pas plus que la
réduction du temps de travail, n'a été
négocié.
Les " mesures de rechange " annoncées reposent en outre sur
une double contradiction.
En privant le fonds de solidarité vieillesse d'une partie du droit sur
les alcools, les 35 heures assèchent l'un des modes d'alimentation du
fonds de réserve pour les retraites, ce fonds étant pourtant la
seule mesure que le Gouvernement a annoncée au titre de la
réforme des retraites.
En faisant reposer désormais le financement des 35 heures sur la
taxation des heures supplémentaires, le Gouvernement met en place un
système incohérent : plus nombreuses seront les entreprises
qui passent à 35 heures, plus les aides seront élevées
mais plus faible sera le produit de la taxation des heures
supplémentaires. Ainsi plus la dépense croît, plus la
recette se dérobe.
En réalité, le projet de loi n'est pas financé sauf
à alourdir encore les impôts nouveaux que crée la loi de
financement (taxe générale sur les activités polluantes et
contribution sociale sur les bénéfices) ou à taxer,
indirectement cette fois, la sécurité sociale et l'UNEDIC qui,
initialement, devaient couvrir plus de la moitié du surcoût du
projet de loi dès 2000 et plus des trois quarts " à
terme ".
*
* *
Lors de
l'examen de la loi du 13 juin 1998 d'orientation et d'incitation à
la réduction du temps de travail, le Sénat avait
récusé la baisse générale et autoritaire de la
durée légale du travail.
Il s'était en revanche montré favorable à une
réduction de la durée effective du travail sur la base d'une
démarche volontaire et adaptée à la situation de chaque
secteur d'activité, de chaque entreprise.
Il avait enfin tenu à réaffirmer explicitement le principe de la
compensation intégrale aux régimes de sécurité
sociale des exonérations de charges décidées par l'Etat.
Ce faisant, il avait affirmé solennellement son attachement au dialogue
social, à la négociation entre les partenaires sociaux et au
paritarisme qui caractérise l'organisation de notre système de
protection sociale depuis plus de cinquante ans.
Face au second projet de loi, la commission des Affaires sociales, dans sa
majorité, a voulu à nouveau donner la priorité au dialogue
social.
Elle propose, bien entendu, de supprimer la taxation des organismes sociaux
qui, pour être périmée au vu des déclarations
récentes du Gouvernement, n'en figure pas moins " noir sur
blanc " à l'article 11 du projet de loi soumis au Sénat.
Elle récuse, comme elle l'avait fait lors de la première loi
Aubry, l'abaissement général et autoritaire de la durée
légale du travail.
Elle purge en conséquence le texte des dispositions qui sont
liées à cette baisse de la durée légale et qui ont
pour conséquence de multiplier les situations d'inégalité
non justifiée :
inégalité
entre les
entreprises au regard des aides réservées à certaines
alors que toutes supporteront le surcoût des 35 heures ;
inégalité
entre les salariés au regard de la
rémunération des heures supplémentaires ou du
régime du double SMIC.
Elle estime indispensable que les accords conclus par les partenaires sociaux
en application de la loi du 13 juin 1998 soient respectés et
puissent s'appliquer dès lors naturellement qu'ils ne sont pas
contraires aux principes de l'" ordre public social absolu ".
Elle estime également indispensable que l'accord interprofessionnel
d'avril 1999 sur la négociation collective soit pris en compte dans la
loi.
Elle renvoie enfin, le plus largement possible à la négociation
pour les autres dispositions du projet de loi (définition du
régime des cadres, définition des durées
d'équivalence...).
Mais surtout, elle constate qu'au-delà du débat anachronique sur
les 35 heures dans lequel s'enlise notre pays, la vraie question est celle
des moyens de développer et d'enrichir la négociation collective,
particulièrement dans les petites et moyennes entreprises, et
d'améliorer la représentation des salariés.
Ce débat, que le projet de loi esquisse de façon confuse dans un
cadre étroit, la commission des Affaires sociales propose de le traiter
vraiment par la tenue d'une conférence nationale sur le
développement de la négociation collective.
Chronologie 35 heures
1998
13
juin
- La loi sur la réduction du temps de travail est
promulguée.
28 juillet
- La Fédération nationale des
coopératives laitières signe avec ses syndicats le premier accord
de branche.
28 juillet
- L'Union des industries métallurgiques et
minières (UIMM) obtient un accord avec trois syndicats.
18 août
- Accord entre le Syndicat patronal des fabricants
de sucre et trois syndicats.
10 septembre
- Accord dans l'artisanat du bâtiment (CAPEB).
16 octobre
- Accord à l'Union des industries textiles.
21 octobre
- Convention entre les professions artisanales et le
ministère de l'emploi pour un accompagnement à la
réduction du temps de travail dans les très petites entreprises.
6 novembre
- Accord de branche dans le bâtiment et les
travaux publics.
10 novembre
- Accord à la Fédération des
entreprises de nettoyage.
24 novembre
- Accord dans la grande distribution
(supermarchés).
16 décembre
- Le Gouvernement annonce que 1.055 accords ont
été signés dans les entreprises, prévoyant la
création ou la sauvegarde de 8.178 emplois.
1999
9
janvier
- Accord à Air France (personnels au sol).
25 janvier
- Accord à EDF-GDF.
10 février
- Publication du rapport Roché sur le
temps de travail des fonctionnaires.
1
er
mars
- Accord à PSA-Peugeot-Citroën.
17 mars
- Accord à La Poste.
26 avril-7 mai
- Grève des conducteurs SNCF refusant les
propositions de leur direction sur les 35 heures.
17 mai
- Les ministres de l'emploi et des finances
présentent au Premier ministre un projet de création de taxes
nouvelles pour aider au financement des 35 heures.
20 mai
- Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité, présente un " bilan d'étape " des
négociations sur les 35 heures.
22 juin
- Dans Le Monde, Martine Aubry fait connaître les
grandes lignes de la deuxième loi sur les 35 heures.
22 juin
- Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique,
écrit aux présidents des deux assemblées parlementaires
pour leur faire part d'un calendrier de négociations pour les
fonctionnaires.
27 juillet
- Le Gouvernement annonce que 11.551 accords
d'entreprise ont été signés, prévoyant la
création ou la sauvegarde de 101.809 emplois.
28 juillet
- Adoption du second projet de loi en Conseil des
ministres.
20 septembre
- Présentation par le Gouvernement du bilan sur
l'application de la loi du 13 juin 1998 intitulée " Les
enseignements des accords sur la réduction du temps de travail ".
Mme Martine Aubry annonce la signature de plus de 15.000 accords
prévoyant la création ou la sauvegarde de 120.000 emplois.
19 octobre
- Adoption en première lecture par
l'Assemblée nationale du projet de loi relatif à la
réduction négociée du temps de travail.
25 octobre
- Le Gouvernement renonce au principe du
financement de la réduction du temps de travail par une contribution des
régimes sociaux et de l'assurance chômage.
27 octobre
- La commission des Affaires sociales du Sénat
prend acte du recul du Gouvernement sur la question du financement, propose de
supprimer les dispositions relatives à la durée légale du
travail dans le projet de loi et propose la convocation d'une conférence
nationale sur le développement de la négociation collective tout
en validant les accords conclus en application de la loi du 13 juin 1998.
I. LES FRANÇAIS CONTINUENT À DOUTER DU BIEN-FONDÉ DES 35 HEURES
Depuis
1984, la
Direction de l'animation de la recherche des études et des
statistiques
(DARES) du ministère de l'emploi commande une
enquête concernant la façon dont l'opinion publique perçoit
le chômage, l'indemnisation des chômeurs et les politiques de
l'emploi.
L'enquête réalisée en 1999
1(
*
)
apporte des précisions intéressantes sur
les attentes des Français en matière de politique de l'emploi.
Les cotisations sociales trop élevées demeurent en effet aux yeux
de nos concitoyens le principal frein à l'embauche, devant les
difficultés rencontrées par les entreprises pour trouver du
personnel compétent (16 %), les complexités administratives
(13 %) et le manque de souplesse dans les procédures de
licenciement et dans la réglementation du travail.
Par rapport à l'enquête de 1998, on observe une baisse du nombre
de réponses concernant le niveau des charges sociales mais celui-ci
reste incontestablement en tête des réponses données. La
montée en charge et les résultats sensibles de la politique
d'allégements massifs mis en oeuvre, en plusieurs étapes, depuis
1993 expliquent sans doute pour une bonne part ce sentiment.
La hausse de 6 points du nombre de réponses mettant en cause les
difficultés des entreprises pour trouver du personnel compétent
coïncide avec une absence d'initiative depuis 1997 de la part du
Gouvernement en matière de formation professionnelle. Il convient enfin
de souligner que le nombre de réponses mettant en avant la
complexité et la rigidité des réglementations comme
principal frein à l'emploi a augmenté de près de
6 points, cela au moment même où le Gouvernement
s'évertue à mettre en place une réduction autoritaire du
temps de travail qui constitue une source de rigidité
supplémentaire pour les entreprises.
" Selon vous, quelle est parmi les raisons suivantes celle qui constitue le plus aujourd'hui un frein à l'embauche ? "
En pourcentage
|
Début 1998 |
Début 1999 |
Les cotisations sociales trop élevées |
62,6 |
48,2 |
Les difficultés des entreprises pour trouver du personnel compétent |
10,1 |
16,3 |
Les complexités administratives |
8,2 |
12,8 |
Le manque de souplesse dans les procédures de licenciement et la réglementation du travail trop contraignante pour les employeurs |
|
|
Les niveaux de salaires trop élevés |
6,5 |
7,7 |
Ne sait pas |
5,5 |
4,7 |
Ensemble |
100,0 |
100,0 |
Source : Enquête " Attitudes à
l'égard du chômage, de son indemnisation et des politiques
d'emploi ", IPSOS/MES-DARES.
Les solutions que préconisent les Français interrogés dans
le cadre de cette enquête pour réduire le chômage sont
cohérentes avec l'analyse qu'ils font des causes de ce
phénomène.
Les allégements de charges sociales recueillent 31,8 % d'opinions
favorables et constituent donc très nettement la mesure la plus efficace
pour réduire le chômage aux yeux des personnes interrogées,
suivent des aides en matière de formation (21,1 %) et un
développement des préretraites (9,5 %).
Le nombre d'opinions favorables aux allégements de charges sociales des
employeurs n'a cessé d'augmenter depuis quatre ans ; il a
augmenté de plus de 50 % depuis l'annonce de la mise en oeuvre des
35 heures.
A cet égard, une réduction générale de la
durée du travail n'est considérée comme une mesure
efficace pour réduire le chômage que par 9,1 % des
sondés (en baisse de 1,2 point depuis l'année
dernière), soit trois fois moins de réponses que pour les
allégements de charges sociales.
La
mesure qui paraît la plus efficace pour réduire le
chômage
Evolution 1996-1999 de la première
réponse
En pourcentage
Classement par ordre décroissant des réponses en 1999 |
Début 1996 |
Début 1997 |
Début 1998 |
Début 1999 |
Des allégements généraux des charges sociales des employeurs |
18,5 |
20,2 |
30,4 |
31,8 |
Des aides en matière de formation |
13,4 |
13,9 |
14,3 |
21,1 |
Un développement des préretraites |
16,6 |
16,0 |
9,9 |
9,5 |
Une réduction générale de la durée du travail (1) |
- |
- |
10,3 |
9,1 |
Des aides spécifiques aux entreprises pour " embaucher " (2) |
14,2 |
14,6 |
16,1 |
7,8 |
Un développement du temps partiel (3) |
21,1 |
20,2 |
4,7 |
5,7 |
Un développement des emplois publics ou associatifs (travaux d'intérêt général, ...) |
5,6 |
6,0 |
3,6 |
5,0 |
un développement des emplois de proximité (aides ménagères, assistantes maternelles, ...) |
7,2 |
6,3 |
4,5 |
4,9 |
L'annualisation du temps de travail (1) |
- |
- |
4,0 |
3,2 |
Ne sait pas |
3,4 |
2,8 |
2,2 |
1,9 |
Ensemble |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
(1)
- Cet item a
été
proposé en 1998.
(2)
- Cette précision a été
ajoutée en 1999.
(3)
- En 1996 et 1997, cet item était
formulé de la manière suivante : des aménagements du
temps de travail (temps partiel, ...).
Sources : Enquêtes " Attitudes à l'égard du
chômage, de son indemnisation et des politiques d'emploi ",
CREDOC/DARES, puis, à partir de 1998, IPSOS/MES-DARES.
Bien entendu, il convient de considérer les résultats de cette
enquête, commandée par le ministère de l'emploi, avec
prudence. Mais la tendance que reflètent les réponses aux
questions posées ne souffre pas l'équivoque. A la question
" Pensez-vous que les 35 heures créeront effectivement des
emplois ? ",
53,1 % des sondés ont répondu par la
négative.
Cela signifie que non seulement les personnes interrogées ne
considèrent pas que l'abaissement de la durée légale du
travail hebdomadaire constitue une mesure efficace pour réduire le
chômage, mais qu'une majorité d'entre elles estime qu'elle n'aura
aucun effet positif en termes d'emploi.
Il serait intéressant de connaître l'opinion du ministère
de l'emploi sur cette enquête qu'il a lui-même commandée
ainsi que son analyse sur le décalage constaté entre une mesure
qui constitue la clé des priorités gouvernementales en termes
d'emploi et le sentiment que peuvent ressentir les Français à son
égard.
Plusieurs réponses peuvent être avancées : il est
possible que les Français n'arrivent pas à saisir tout
l'intérêt des 35 heures, il est possible que le Gouvernement
n'arrive pas à expliquer le bien-fondé de sa politique, il
s'agirait alors d'un problème de communication, ou il est possible enfin
que le Gouvernement ne conduit pas la politique adéquate, attendue par
les Français et considérée par eux comme efficace et, dans
ce cas, le Gouvernement devrait s'interroger sur l'intérêt de
poursuivre dans cette voie.
" Pour lutter contre le chômage, le Gouvernement propose de ramener à 35 heures la durée hebdomadaire du travail. Vous, personnellement, pensez-vous qu'une telle mesure créera effectivement des emplois ? "
En pourcentage
|
Début 1998 |
Début 1999 |
||||
|
Actifs |
Salariés |
Ensemble |
Actifs |
Salariés |
Ensemble |
Oui |
41,7 |
46,2 |
39,4 |
45,0 |
46,9 |
41,8 |
Non |
55,1 |
50,6 |
56,2 |
51,5 |
49,2 |
53,1 |
Ne sait pas |
3,2 |
3,2 |
4,4 |
3,5 |
3,9 |
5,1 |
Ensemble |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
100,0 |
Source : Enquête " Attitudes à l'égard du chômage, de son indemnisation et des politiques d'emploi ". IPSOS/MES-DARES.
II. LES PARTENAIRES SOCIAUX ET LE GOUVERNEMENT NE S'ACCORDENT PAS SUR LE BILAN DE LA PREMIÈRE LOI
A. LE PREMIER MINISTRE CONSIDÈRE QUE " L'ENGAGEMENT PRIS SERA TENU "2( * )
1. Le Gouvernement et la majorité réaffirment leur volonté d'imposer les 35 heures aux entreprises et aux salariés
Le
débat sur la seconde loi " Aubry " a été
engagé sous le signe du volontarisme politique, il s'inscrit à
cet égard dans le prolongement du débat sur la première
loi " Aubry ".
Comme l'illustrent les propos tenus par M. Lionel Jospin, Premier
ministre
3(
*
)
, le Gouvernement entend s'acquitter
d'une promesse électorale avant tout,
"
l'engagement pris
sera tenu
"
.
On peut rappeler que le programme
4(
*
)
du parti
socialiste pour les élections législatives de 1997
prévoyait de
" ramener progressivement la durée
légale du temps de travail de 39 heures à 35 heures,
sans diminution de salaire ".
Il envisageait que
" cela se
(ferait) par la négociation entre partenaires sociaux, l'Etat ayant pour
rôle de donner le cap et de fixer le calendrier ".
Il proposait
" qu'une loi-cadre, qui (aurait) également pour objet de lutter
contre les horaires abusifs et les heures supplémentaires, (donne)
l'impulsion à ce mouvement historique "
.
Les propos de M. Lionel Jospin, Premier ministre, mettent l'accent sur la
nécessité de réussir les 35 heures.
Toutefois ils restent obscurs sur plusieurs points ; que signifie par
exemple le propos selon lequel il ne s'agirait " pas d'une loi contre les
entreprises " ? Les auditions des représentants des
organisations d'employeurs auxquelles a procédé votre commission
des Affaires sociales semblent démontrer
qu'il existe un
désaccord profond sur ce point entre l'appréciation du Premier
ministre et celle des chefs d'entreprises
.
On peut par ailleurs s'interroger sur l'évolution de la position du
Gouvernement par rapport à la question des 35 heures. Il
apparaît en effet, lorsque l'on compare les propos récents du
Premier ministre au programme du parti socialiste de 1997, que le Gouvernement
a été amené à renoncer à une simple
" impulsion " de la négociation collective sur la
réduction du temps de travail pour adopter finalement le principe d'une
seconde loi-cadre. Le contenu du projet de loi ne se limite pas, en effet,
à " tirer les conséquences législatives " des
accords signés par les partenaires sociaux, ni même à
seulement en tenir compte,
"
il tient compte
des
enseignements
des accords conclus
"
, ce qui est très
différent.
Après avoir fixé un " cap " en 1998 de manière
directive, le Gouvernement persiste et signe un projet de loi qui, comme votre
Commission s'emploiera à le démontrer dans ce rapport,
désavoue le contenu des accords signés par les partenaires
sociaux.
La négociation collective apparaît dès lors comme
subsidiaire. Le Gouvernement n'ayant manifestement pas été
satisfait par les accords conclus, (dans le cas contraire, il aurait simplement
procédé à une " validation
législative "), il n'a pas hésité à reprendre
en main la mise en oeuvre des 35 heures qu'il avait un instant
laissée aux partenaires sociaux.
Dans ces conditions, on peut légitimement s'interroger sur ce que
signifie l'expression
" un texte (...) qui donne toute sa place
à la négociation entre partenaires sociaux "
. Votre
rapporteur s'interroge sur l'ironie, peut-être involontaire, des propos
du Premier ministre.
2. Le bilan présenté par le Gouvernement le 20 septembre 1998 sur la loi du 13 juin 1998
a) Le bilan présenté par le Gouvernement ne satisfait que partiellement les termes de l'article 13 de la loi du 13 juin 1998
L'article 13 de la loi n° 98-461 du 13 juin 1998
d'orientation
et d'incitation relative à la réduction du temps de travail
prévoyait qu'"
au plus tard le 30 septembre 1999, et
après concertation avec les partenaires sociaux, le Gouvernement
présentera au Parlement un rapport établissant le bilan de
l'application de la présente loi. Ce bilan portera sur le
déroulement et les conclusions des négociations prévues
à l'article 2, ainsi que sur l'évolution de la durée
conventionnelle et effective du travail et l'impact des dispositions de
l'article 3 sur le développement de l'emploi et sur l'organisation des
entreprises
".
Ce même article 13 prévoyait également que ce
"
rapport présentera les
enseignements et
orientations
à tirer de ce bilan pour la mise en oeuvre de la
réduction de la durée légale du travail prévue
à l'article premier, en ce qui concerne notamment le régime des
heures supplémentaires, les règles relatives à
l'organisation et à la modulation du travail, les moyens de favoriser le
temps partiel choisi, la place prise par la formation professionnelle dans les
négociations et les modalités applicables au personnel
d'encadrement
".
Cet article prévoyait enfin que ce "
rapport précisera
également les conditions et les effets de la réduction du temps
de travail compte tenu de la taille des entreprises.
Il analysera plus
particulièrement les moyens de développer l'emploi dans les
petites et moyennes entreprises et les incidences des relations entre les
entreprises donneurs d'ordre et les entreprises sous-traitantes
".
En application de cet article 13 de la loi du 13 juin 1998, le Gouvernement a
effectivement préparé et rendu public le 20 septembre 1999,
un rapport intitulé "
les enseignements des accords sur la
réduction du temps de travail
"
5(
*
)
.
Votre commission des Affaires sociales tient à souligner que ce
volumineux document ne satisfait qu'imparfaitement au texte de
l'article 13 de la loi du 13 juin 1998
.
Au-delà des " enseignements des accords ",
le rapport
aurait dû également s'interroger sur les " orientations
à tirer de ce bilan " comme le précise le texte de cet
article
. Il aurait dû aussi analyser "
plus
particulièrement les moyens de développer l'emploi dans les PME
et les incidences des relations entre les entreprises donneurs d'ordre et les
entreprises sous-traitantes
".
Or ce volumineux rapport, compilation de tableaux, données et annexes en
tout genre, se garde bien de définir des orientations à partir de
ce bilan, comme d'ailleurs des moyens de développer l'emploi dans les
PME ; il dresse tout au plus un état des lieux complaisant des
accords conclus.
Manifestement, le Gouvernement a considéré que les
" orientations " que devait contenir le rapport relevaient en fait du
projet de loi, lequel a d'ailleurs été adopté en Conseil
des ministres deux mois avant la présentation du rapport...
C'est en tout cas ce que laisse entendre l'exposé des motifs de ce
dernier : "
ainsi que cela avait été prévu
par l'article 13 de la loi du 13 juin 1998 précitée (sic), la
présente loi a pour objet, après cette phase d'incitation et
d'expérimentation à grande échelle, de déterminer
les conditions de la généralisation du processus tenant compte du
résultat des négociations
"
6(
*
)
.
On peut s'interroger sur cette démarche du Gouvernement qui tend
à laisser croire que la première loi Aubry prévoyait un
second texte qui toucherait toutes les matières évoquées
à l'article 13 de la loi du 13 juin 1998. Ne s'agit-il pas là
d'une tentative visant à justifier un texte qui, par son essence,
constitue une véritable réforme du code du travail, voire
même des règles d'organisation et de fonctionnement de la
négociation collective, alors qu'il n'était question à
l'origine pour le Gouvernement que d'" acter " la baisse de la
durée légale du travail ? Ce faisant, le Gouvernement semble
signifier qu'il n'est pas satisfait des accords signés par les
partenaires sociaux et donc du sort que ces derniers ont réservé
à la mise en oeuvre des 35 heures.
" Le pari des 35 heures est en bonne voie mais il n'est
pas
gagné "
7(
*
)
(Gaëtan Gorce,
rapport sur la mise en oeuvre des 35 heures)
Dans un
premier rapport d'information sur la mise en oeuvre des 35 heures, daté
du 10 mars 1999
(1)
, M. Gaëtan Gorce, rapporteur de la
commission des Affaires culturelles de l'Assemblée nationale, a
dressé un état des lieux après huit mois d'application de
la loi. Assez satisfait, il a considéré que
" d'ores et
déjà, la loi du 13 juin 1998 (avait) largement atteint son
objectif "
8(
*
)
.
Il a par ailleurs reconnu que la démarche du Gouvernement relevait du
pari
, entérinant en cela le constat de la commission
d'enquête sénatoriale. Il a estimé que certaines
" incertitudes juridiques "
pouvaient freiner le rythme des
négociations et que
" certaines interrogations soulevées
par le texte gagneraient à être levées "
notamment
au regard du
" problème de la prévalance du contrat de
travail sur l'accord collectif "
9(
*
)
.
Il a considéré que
" contrairement à une vision
statique de l'économie, trop souvent répandue, la
réduction du temps de travail ne
(reposait)
pas sur l'idée
d'un partage de l'emploi
(mais qu'elle visait)
bien plutôt
à permettre un partage des revenus de la croissance en faveur de
l'emploi ".
Concernant les créations d'emplois à attendre des 35 heures, M.
Gaëtan Gorce a estimé que
" le mouvement qui
s'annonçait
(semblait)
vérifier la deuxième des
trois hypothèses de travail avancées par la direction de la
prévision à l'été 1998 "
10(
*
)
.
Il a prévu que
" le chiffre de
100.000 emplois
pourrait
être atteint du fait de la réduction du temps de travail d'ici la
fin de cette année "
, ce qui permettrait selon lui d'atteindre
les
"
250.000
emplois créés au minimum à
l'horizon 2002 "
. Il a même déclaré que
"le
nombre d'emplois créés au 1
er
janvier 2002 pourrait
s'établir à
450.000
"
si le rythme actuel se
poursuivait
11(
*
)
.
En écrivant que
" la réduction ample du temps de travail
oblige
à une remise à plat de l'organisation du
travail "
12(
*
)
,
M. Gaëtan Gorce,
rapporteur de l'Assemblée nationale, admet le caractère
contraignant pour les entreprises des 35 heures.
Dans cet esprit, il précise qu'
" en faisant adopter en juin 1998
la première loi, le Gouvernement de M. Lionel Jospin a
décidé un changement de méthode radical visant à
lever le blocage paradoxal et récurrent de la négociation sur la
réduction de la durée du travail,
en substituant à une
obligation de moyens (...)une quasi-obligation de résultats avant une
échéance inscrite dans la loi "
13(
*
)
En reconnaissant que la
" réduction du temps de travail implique
que soit abordée dans un même mouvement la quasi-totalité
des questions qui concernent la vie de l'entreprise "
14(
*
)
,
le rapporteur de l'Assemblée nationale
souligne l'étendue du choc que représentent les 35 heures pour
les entreprises.
Concernant le contenu des accords signés, M. Gaëtan Gorce a
observé que près de la moitié des accords de
réduction du temps de travail comportait un dispositif
d'annualisation
15(
*
)
. Pendant les débats,
la majorité de l'Assemblée nationale avait rejeté le
principe de l'annualisation, le contenu des accords tend à contredire
les souhaits de la majorité.
A propos des chefs d'entreprises, le rapporteur de l'Assemblée nationale
a observé que
" les principales inquiétudes
(venaient)
de manière générale de petites
entreprises en particulier de services, disposant de faibles marges de
productivité "
16(
*
)
.
Il a considéré que l'équilibre de la mise en oeuvre des 35
heures reposait sur un
" triptyque réduction et
aménagement du temps de travail/négociations salariales pour
permettre la viabilité économique de l'accord pour
l'entreprise/contrepartie en temps d'emploi "
17(
*
)
.
Il est donc logique que les accords
" s'accompagnent dans la plupart des cas d'une modération ou
d'un gel des augmentations ultérieures "
18(
*
)
.
Ces menaces sur le pouvoir d'achat de salariés n'ont pas
été sans conséquences sur le climat social et sur la
conflictualité des rapports entre partenaires sociaux.
A cet égard, on ne peut qu'être surpris par la réaction du
rapporteur de l'Assemblée nationale qui considère que
" bien loin de s'inquiéter de la montée de la
conflictualité dans certaines négociations emblématiques,
comme à Peugeot Citroën, ne doit-on pas au contraire se
féliciter de voir ainsi se réintroduire l'idée qu'un bon
accord est aussi le résultat d'un rapport de
forces ? "
19(
*
)
Les lois sur les 35 heures auraient ainsi également pour vertu d'inciter
à la grève afin que les salariés puissent obtenir des
avantages aux dépens de leurs entreprises. Votre rapporteur comprend mal
en quoi l'emploi pourrait sortir gagnant de cette démarche.
Evoquant le second projet de loi
20(
*
)
, M.
Gaëtan Gorce a estimé que le pouvoir d'achat des salariés
les moins bien rémunérés devrait être garanti sans
mettre en cause la compétitivité des entreprises. Il a
souhaité que le temps choisi soit facilité et la formation
professionnelle développée. Il a par ailleurs
considéré que la question du temps de travail des cadres devrait
être clarifiée.
b) Un bilan plus que modeste compte tenu des moyens mis en oeuvre et de la détermination du Gouvernement
A la fin
août 1999, le bilan du Gouvernement évaluait à 15.000 le
nombre d'accords conclus au titre de la loi du 13 juin 1998, ces accords
couvrant 2.168.000 salariés et prévoyant la création
ou le maintien de 120.273 emplois.
On peut rappeler que, dans le cadre de la loi n° 98-461 du 13 juin
1998, le bénéfice de l'aide financière incitative
était lié à la mise en oeuvre effective de l'abaissement
de la durée du travail. Les embauches quant à elles devaient
être réalisées dans un délai d'un an à
compter de la réduction du temps de travail. Les annonces de
créations d'emplois, prévues par les accords, ne correspondent
donc pas forcément à des créations effectives.
Dans son rapport présenté en septembre sur le bilan de la loi
Aubry, le ministère de l'emploi considère que le délai
entre la baisse de la durée du travail et les embauches n'est pas
calculable,
" le recul n'étant pas assez
important "
21(
*
)
.
Dans ces conditions, les 120.000 créations d'emplois ne constituent que
des
promesses
dont l'effet sur l'évolution de l'emploi est
discutable. Cette analyse est partagée par MM. Jean-Paul Fitoussi
et Bernard Brunhes qui ont chacun considéré, lors de leur
audition
22(
*
)
par votre rapporteur, que seule la
croissance expliquait la création d'emplois et que les annonces de
créations d'emplois ne devaient être considérées que
comme des promesses dont la réalisation méritait d'être
vérifiée.
Dans ces conditions, on peut également observer que les aides
financières prévues dans le cadre de la loi du 13 juin 1998
(2,8 milliards de francs en 1998, 3,5 milliards de francs en 1999,
4,3 milliards de francs en 2000)
" courent "
avant
même la création effective des emplois
. Votre commission
remarque en conséquence que la loi du 13 juin 1998 incitait
déjà plus à la signature d'un accord sur la
réduction du temps de travail qu'à la création
d'emplois ; le second projet de loi ne fait que renforcer cette logique.
Accords d'entreprises signés dans le cadre de la loi
du 13
juin 1998
(données au 1
er
septembre 1999)
|
Total |
Accords d'entreprises éligibles aidés* |
Accords d'entreprises éligibles non aidés* |
Accords d'entreprises non éligibles* |
Nombre d'accords |
15.026 |
14.599 |
421 |
6 |
Effectifs concernés |
2.168.329 |
1.088.591 |
482.599 |
597.139 |
Créations ou maintien d'emplois |
120.273 |
85.064 |
16.389 |
18.820 |
Source : MES (cf. document de référence n° 1), fin août 1999
* Les
entreprises éligibles sont celles qui font partie du champ défini
par la loi du 13 juin 1998 pour le bénéfice des
allégements de cotisations sociales. Les accords aidés sont ceux
qui remplissent les conditions pour bénéficier de ces
allégements en termes de réduction du temps de travail
(- 10 %) et de créations ou de maintiens d'emplois (6 %).
Il convient d'observer que 17.627 des 120.273 emplois concernés par
les accords sur la réduction du temps de travail correspondent à
des emplois préservés. Lorsque l'on exclut les
18.820 emplois créés dans le secteur public, il
apparaît que les accords signés prévoient la
création potentielle de seulement 83.826 emplois.
• Le bilan présenté par le Gouvernement signifie
a
contrario
que :
-
98,8 % des entreprises occupant au moins un salarié n'ont pas
signé d'accord de réduction de la durée du travail
à 35 heures (15.026 accords au 1
er
septembre 1999
pour 1.160.900 entreprises occupant au moins un salarié) ;
-
89,3 % des entreprises de plus de 20 salariés n'ont pas
signé d'accord
(8.754 accords pour 81.900 entreprises de plus de 20
salariés) ;
-
90 % des salariés du secteur marchand ne sont pas couverts par
un accord
(2.168.329 salariés sont couverts mais il convient de
retirer les 597.139 salariés relevant du secteur public, il reste donc
1.571.190 salariés couverts par un accord à rapporter aux
14.500.000 salariés du secteur marchand).
Enfin, les
créations nettes d'emplois
résultant de ces
accords, si elles se réalisaient dans les deux années à
venir,
représenteraient 0,58 % des effectifs actuels du secteur
marchand
(120.273 emplois auraient été créés ou
préservés par ces accords dont il convient de déduire
18.820 emplois relevant du secteur public et 17.627 emplois dont la suppression
aurait été évitée, soit 83.826 créations
nettes d'emplois annoncées à rapporter aux
14.500.000 emplois du secteur marchand).
Rappelons que la croissance
à elle seule a généré 550.000 emplois dans le
secteur marchand en deux ans.
Aux accords d'entreprise, il convient d'ajouter plus d'une centaine d'accords
de branche couvrant plus de 8 millions de personnes.
De manière plus subjective, le bilan du Gouvernement évalue
à 15.000 les emplois constituant un effet d'aubaine, ce qui ne
correspond pas aux estimations rassemblées par votre commission des
Affaires sociales
23(
*
)
.
Lorsque l'on examine le détail des accords signés, on remarque
que six accords non éligibles couvrent 597.139 salariés soit
27,5 % du total des effectifs concernés. Ils ont été
signés par EDF, la SNCF, TDF, le Conseil général de la
Nièvre, les Mines de potasse d'Alsace et la Poste.
Ces six accords ont permis de créer 18.820 emplois, soit plus de
15,6 % du total des emplois créés. Il fait peu de doutes que
la prise en compte de ces accords " fausse " considérablement
les données rassemblées étant donné l'influence de
la tutelle lorsqu'il s'agit d'un établissement public et le mode de
fonctionnement de ces établissements.
Les différentes définitions de la durée du travail
La
durée légale
du travail est fixée à
39 heures par semaine depuis l'ordonnance de janvier 1982, puis à
compter du 1
er
janvier 2000 (entreprises de plus de
20 salariés) ou 2002 (entreprises d'au plus
20 salariés), par la loi du 13 juin 1998. Elle correspond au
seuil de déclenchement des heures supplémentaires et du
chômage partiel.
La durée offerte
du travail est une durée collective,
correspondant à l'horaire collectif affiché. Elle ne concerne que
les salariés à temps complet, ceux à temps partiel ayant
une durée fixée individuellement par leur contrat de travail.
La durée effective
du travail est une durée individuelle,
déclarée par chaque salarié interrogé par
l'enquête annuelle sur l'emploi de l'INSEE. Elle inclut les personnes
à temps partiel mais ne tient compte de l'absentéisme, des jours
de congés, des heures supplémentaires, du chômage partiel
que dans la mesure où la personne interrogée les déclare.
•
Concernant la baisse de la durée collective du
travail
, force est de constater que le bilan est maigre :
" au
total, 660.000 salariés à temps complet étaient
concernés par des durées hebdomadaires collectives
inférieures à 35 heures dès la fin mars 1999 dans le
champ des établissements de plus de
10 salariés "
24(
*
)
. Ces
660.000 salariés représentent 4,5 % des salariés
du secteur marchand. La baisse de la durée du travail est donc
peut-être une réalité pour les établissements ayant
engagé une démarche de réduction du temps de travail, mais
elle est encore très loin de concerner l'ensemble des salariés du
secteur marchand.
Les 660.000 salariés dont la durée collective du travail
est déjà inférieure à 35 heures doivent être
comparés aux 2.525.000 salariés " concernés "
par un accord de réduction du temps de travail " Robien " ou
" Aubry " dont on ne sait trop quelle est leur durée
collective de travail effective compte tenu du bilan présenté par
le ministère de l'emploi.
Les salariés à 35 heures dans le champ de la loi de juin 1998
en milliers et en %
|
Entreprises de plus de 20 salariés |
Entreprises de 20 salariés et moins |
Total |
Ensemble des salariés |
10.000 |
4.300 |
14.300 |
dont : |
|
|
|
Salariés à temps partiel |
1.200 |
900 |
2.100 |
Salariés à temps complet |
8.800 |
3.400 |
12.200 |
|
(100 %) |
(100 %) |
(100 %) |
dont : |
|
|
|
A 35 heures avant novembre 1996 (*) |
220 |
30 |
250 |
|
(2,5 %) |
(0,9 %) |
(2,0 %) |
A 35 heures de novembre 1996 à juin 1998** |
270 |
10 |
280 |
|
(3,1 %) |
(0,3 %) |
(2,3 %) |
A 35 heures depuis juin 1998** |
1.960 |
35 |
1.995 |
|
(22,3 %) |
(1,0 %) |
(16,4 %) |
Total à 35 heures |
2.450 |
75 |
2.525 |
|
(27,8 %) |
(2,2 %) |
(20,7 %) |
Restant à passer à 35 heures |
6.350 |
3.325 |
9.675 |
|
(72,2 %) |
(97,8 %) |
(79,3 %) |
(*)
Estimation. Ces effectifs comprennent principalement les salariés
postés en continu.
(**) c'est-à-dire concernés par un accord de RTT
" Robien " ou " Aubry "
Source : MES-DARES, août 1999
•
Concernant les délais de mise en oeuvre et de
l'apparition de l'" effet emploi "
, le bilan établi par
les services du ministère de l'emploi estime que les embauches se
concrétisent environ trois mois en moyenne après la mise en
oeuvre de l'accord. Au total, compte tenu des six à neuf mois
nécessaires pour négocier, l'ensemble du processus dure souvent
plus d'un an.
Les différents délais
|
De l'accord à la convention |
De la convention à la baisse de la durée |
De la baisse de la durée à l'embauche des salariés prévus |
Conventions " Robien " |
2 mois (1) |
2 mois (2) |
3 mois (2) |
Conventions " Aubry " |
3 mois (1) |
NC (3) |
(1)
Source : MES-DARES :
base
des conventions " Robien " ou " Aubry ", juin 1999.
(2)
Source : MES-DARES : confrontation des bases des
conventions " Robien " ou " Aubry " et des enquêtes
trimestrielles ACEMO.
(3)
Non calculable, le recul n'est pas assez important.
Votre commission des Affaires sociales observe que, selon les données
fournies par le ministère de l'emploi (cf. tableau ci-dessus), le
délai de trois mois qui sépare la baisse de la durée
du travail du moment où les salariés sont effectivement
embauchés
correspond aux conventions " Robien ".
Le
ministère semble considérer que ce délai n'est pas
calculable compte tenu du faible recul pour les conventions
" Aubry ". Dans ces conditions, il semble tout à fait
imprudent d'essayer de déterminer quel a pu être l'effet des
promesses d'emplois sur l'évolution récente du chômage.
Si l'on essaie néanmoins d'estimer cet effet, il ressort des nombreuses
auditions
25(
*
)
auxquelles a
procédé votre rapporteur, qu'une très faible proportion de
ces promesses d'emplois semble avoir été réalisée,
compte tenu des différents délais administratifs et des
contraintes propres que rencontrent les entreprises qui cherchent à
embaucher.
• Le ministère de l'emploi a essayé d'estimer
l'évolution comparée de l'emploi dans les établissements
ayant et n'ayant pas réduit la durée du travail. Les
premières données confirment le fait que les entreprises qui ont
signé une convention Robien ou Aubry ont pu créer plus d'emplois
que celles qui ne l'avaient pas fait.
Un élément important doit être souligné, l'effet
brut sur l'emploi semble être plus important pour les accords Robien que
pour les accords Aubry, ceci tendrait à confirmer le fait
26(
*
)
que les entreprises qui se sont engagées les
premières, chronologiquement, dans un processus de réduction du
temps de travail étaient sans doute les plus dynamiques en
matière de créations d'emplois. Dans ces conditions on a tout
lieu d'être réservé sur les perspectives de
créations d'emplois dans le cadre de la généralisation de
la réduction du temps de travail.
L'évolution comparée de l'emploi dans les
établissements ayant
et n'ayant pas réduit la durée du
travail
Note : L'évolution des indices correspondant aux
établissements " Robien " comprend à la fois un effet
de diffusion (les établissements entrant progressivement dans le
dispositif), et un effet de mise en oeuvre du dispositif. La baisse au
4
ème
trimestre 1998 est à prendre avec
précaution puisqu'elle se produit lors du changement de l'enquête
trimestrielle ACEMO, et lors d'un trimestre de basse saison.
Source : MES-DARES : base des conventions " Robien " et
enquêtes trimestrielles ACEMO, juin 1999
Note : Les établissements
" Aubry " retenus ici ont signé une convention jusqu'en mars
1999, tous les établissements n'ont pu mettre en oeuvre le dispositif de
réduction du temps de travail et réaliser l'ensemble des
embauches.
Source : MES-DARES : base des conventions " Aubry " et
enquêtes trimestrielles ACEMO, juin 1999.
•
Les simulations macro-économiques
réalisées avant le vote de la loi de juin 1998 qui
étudiaient les effets d'une réduction effective de la
durée du travail de 10 % sur un champ comparable à celui de la
loi, aboutissaient à un résultat compris entre 250.000 et 700.000
emplois créés ou préservés en cinq ans. Une
étude de l'OFCE chiffrait l'effet du dispositif à
450.000 emplois au bout de trois ans mais elle s'était
limitée aux entreprises de plus de 20 salariés. Par ailleurs, la
Direction de la prévision du ministère de l'économie avait
proposé, toujours pour les seules entreprises de plus de
20 salariés, plusieurs scénarios avec un effet emploi allant
de 0, voire un effet négatif pour certaines hypothèses
extrêmes, jusqu'à 510.000, ce qui correspond à environ
700.000 pour l'ensemble des entreprises.
Le bilan réalisé par le ministère de l'emploi
considère que les 120.273 créations ou maintiens d'emplois
prévus par les accords signés jusqu'à la fin août
représentent un taux moyen d'engagements sur l'emploi de 5,5 %. Il
estime que ces " premiers résultats " de la loi de juin 1998
se situent bien sur la " pente " tracée par les
scénarios précédents.
A cet égard, votre commission des Affaires sociales rappelle combien
les résultats des modèles économétriques sont
dépendants des hypothèses formulées au
départ
27(
*
)
. Elle souligne
également que l'OFCE
28(
*
)
considère qu'il n'est pas possible de chiffrer avec précision les
emplois qui pouvaient être créés du fait des deux lois
Aubry les résultats étant dépendants de l'attitude des
différents acteurs en présence.
• L'analyse des embauches prévues dans le cadre de la loi du
13 juin 1998 en termes de catégories professionnelles illustre une
certaine déformation des profils des salariés embauchés
par rapport à la structure de la population active au
bénéfice des ouvriers et des employés.
Les
embauches prévues par catégorie
socioprofessionnelle
(en % du total des embauches)
Source : MES-DARES, base des conventions
" Aubry ", juin 1999.
Il apparaît à la lecture des résultats du bilan
préparé par le ministère de l'emploi que les entreprises
ayant participé à la réduction du temps de travail ne sont
pas véritablement représentatives de la structure de
l'économie française. Ces entreprises comprennent 75 %
d'ouvriers et d'employés alors que ces deux catégories
représentent 57 % de la population active.
A contrario
,
elles ne comprennent que 27 % de cadres et de professions
intermédiaires alors que ces deux catégories représentent
plus de 32 % de la population active, soit une hausse de quatre points par
rapport à 1990.
Population active par groupe socioprofessionnel
|
1990 |
1998 |
Agriculteurs exploitants |
4,8 |
2,7 |
Artisans, commerçants et chefs d'entreprise |
7,7 |
6,5 |
Cadres et professions intellectuelles supérieures |
10,2 |
12,2 |
Professions intermédiaires |
18,4 |
19,8 |
Employés |
27,7 |
29,6 |
Ouvriers |
29,2 |
27,2 |
Ensemble (1) |
100,0 |
100,0 |
(1)
Y compris militaires du contingent et
chômeurs n'ayant jamais travaillé.
Source : Insee, enquêtes Emploi, 1999
La forte proportion d'ouvriers dans les salariés embauchés dans
le cadre de la mise en oeuvre de la réduction du temps de travail laisse
penser que ce dispositif est tourné vers l'industrie et les entreprises
organisées de manière " taylorienne ".
Ceci n'est pas sans soulever des questions dans une économie de plus en
plus tournée vers l'immatériel et les activités à
forte valeur ajoutée. On peut s'interroger sur la prise en compte par la
loi Aubry I des réalités du marché du travail qui se
caractérise aujourd'hui par une grande
hétérogénéïté. Il ne s'agit plus
aujourd'hui d'appliquer des solutions uniformes imaginées en fonction
d'un paradigme fordiste dépassé mais de
" concevoir le
droit du travail comme un nouvel ensemble cohérent qui évite le
fractionnement du marché du travail. Il s'agit de corriger les
inégalités liées à la formation initiale, de
stimuler une gestion prévisionnelle de l'emploi et de favoriser une
" implication patrimoniale " des salariés qui parviennent dans
le même temps à protéger la relation salariale des
aléas de la finance "
29(
*
)
.
• Le bilan présenté par le ministère de
l'emploi considère, chiffres à l'appui, que "
grâce
à la réduction du temps de travail, des plans sociaux ont pu
être évités et s'ils ne l'ont pas été, se
sont traduits par de moindres licenciements économiques
".
Evolution des plans sociaux et des licenciements économiques
|
1996 |
1997 |
1998 |
1999 |
|||
|
1 er semestre |
2 e semestre |
1 er semestre |
2 e semestre |
1 er semestre |
2 e semestre |
1 er semestre |
Nombre de plans sociaux modifiés |
976 |
913 |
829 |
699 |
679 |
537 |
669 |
Evolution (1) en % |
+ 108.5 |
+ 39.4 |
- 15 |
- 23.4 |
- 18.1 |
- 23.3 |
- 1.5 |
Licenciements économiques en milliers |
226.1 |
219.3 |
215.2 |
196.4 |
169.1 |
158.3 |
146.8 |
Evolution (1) |
+ 9.2 |
+ 8.5 |
- 4.8 |
- 10.4 |
- 21.4 |
- 19.4 |
- 13.2 |
Source : MES-DARES-ANPE : tableau de bord des
politiques d'emploi et BMST
(1)
Par rapport à la même période de
l'année précédente.
Votre commission des Affaires sociales s'étonne des conclusions du
ministère de l'emploi. L'analyse des données fait en effet
apparaître une tendance à la baisse des licenciements
économiques perceptible dès le premier semestre 1997, de
même pour les plans sociaux, ceci 18 mois avant le vote de la loi du 13
juin 1998. Les licenciements économiques évoluent avec
l'activité économique et l'influence des 35 heures
revendiquée par le ministère de l'emploi semble relever plus de
l'autosuggestion que de la démonstration.
• Les modalités de la réduction du temps de travail
semblent très variées, elles sont souvent cumulées dans
les grandes entreprises. Elles prennent la forme d'une modulation annuelle dans
un cas sur deux.
Les
modalités du temps de travail dans les conventions,
selon le secteur
d'activité des entreprises
|
Agriculture |
Construction |
Industrie |
Services |
Ensemble |
Annualisation |
76,1 |
50,0 |
62,7 |
38,5 |
48,0 |
Jours de repos sur l'année |
47,8 |
32,1 |
47,1 |
44,3 |
43,5 |
Ponts et jours fériés |
4,4 |
9,8 |
8,9 |
4,9 |
6,7 |
Semaines courtes et longues alternées |
8,7 |
20,1 |
28,6 |
23,0 |
24,0 |
Réduction hebdomadaire (1/2 journée ou journée) |
39,1 |
26,7 |
47,4 |
51,8 |
46,9 |
Journées plus courtes |
17,4 |
22,6 |
43,5 |
42,9 |
39,8 |
Source : MES-DARES base des conventions
" Aubry ",
juin 1999
L'analyse des données illustre l'extraordinaire besoin de souplesse des
entreprises. Lorsque l'on s'intéresse à la répartition
sectorielle des entreprises ayant eu recours à des dispositifs de
modulation, on constate que les secteurs de l'agriculture (83,3 %), de
l'industrie (61,5 %) et de la construction (74,2 %) semblent les plus
concernés. Il semblerait que ces entreprises aient trouvé
prétexte à la signature d'un accord de réduction du temps
de travail pour obtenir une " réforme du code du travail " qui
leur permette de sortir du carcan d'une réglementation construite sur le
modèle d'une organisation taylorienne de l'atelier.
Taux
de recours à la modulation par secteur
Accords de RTT signés
entre juin 1998 et mars 1999
|
Proportion d'accords prévoyant une modulation (type I, II, III) |
Agriculture |
83,3 % |
Industrie : |
61,5 % |
Industrie agro-alimentaire |
76,5 % |
Industrie des biens de consommation |
67,0 % |
Industrie automobile |
46,1 % |
Industrie des biens d'équipement |
50,6 % |
Industrie des biens intermédiaires |
59,8 % |
Industrie énergétique |
0,9 % |
Construction |
74,2 % |
Services : |
40,5 % |
Commerce |
46,5 % |
Transports |
44,6 % |
Activité financière |
24,7 % |
Activité immobilière |
28,2 % |
Services aux entreprises |
41,6 % |
Services aux particuliers |
51,5 % |
Service action sociale |
26,6 % |
Source : MES-DARES, base des accords d'entreprise, juin
1999
Lecture
: 83,3 % des accords de RTT signés dans
l'agriculture ont prévu un dispositif de modulation
La réorganisation du travail
en % des conventions
Source : ministère de l'emploi et de la
solidarité
Le mouvement de réorganisation consécutif à la mise en
oeuvre des accords " Aubry " n'a pas concerné que les
horaires, il a également pris la forme d'un redéploiement des
qualifications des salariés (25,2 %), d'une augmentation de
l'amplitude d'ouverture (20,8 %), d'une augmentation de la durée
d'utilisation des équipements (17,7 %) et d'un développement
de certaines fonctions (17,5 %).
Le
nouveau temps de travail des salariés à temps
plein
(durée annuelle)
en % de salariés à temps plein concernés
Source : MES-DARES, base des conventions, juin 1999
NB : La durée annuelle est calculée à partir des
éléments fournis par les entreprises sur leur nombre de jours de
repos, de jours fériés et leur durée hebdomadaire moyenne.
Si ces informations ne sont pas disponibles, on prend la durée annuelle
qu'ils déclarent.
En ce qui concerne le nouveau temps de travail des salariés à
temps plein, il apparaît que 11,9 % des salariés ont une
durée annuelle du travail supérieure à 1.600 heures. On
peut s'interroger sur les conséquences du second projet de loi sur
l'organisation du travail de ces entreprises étant donné que
celui-ci limite la durée annuelle à 1.600 heures en cas de
recours à l'annualisation. Le respect de cette limite étant une
condition de l'obtention des aides financières, on peut imaginer que ces
entreprises pourraient être gravement pénalisées pour avoir
négocié le mode d'organisation du travail qui leur semblait le
mieux correspondre à leurs contraintes.
Par ailleurs, il fait peu de doute que la proportion d'entreprises ayant besoin
de recourir à des durées annuelles du travail
élevées pourrait être au moins aussi élevée
dans l'ensemble de l'économie que parmi celles passées aux
35 heures, étant donné notamment le retard pris par le
secteur de la métallurgie du fait du refus d'extension de l'accord
signé par cette branche, décidé par Mme Martine Aubry,
ministre de l'emploi. Dans ces conditions, la mise en oeuvre de la seconde loi
Aubry pourrait être très délicate pour un nombre
considérable d'entreprises.
La durée hebdomadaire maximale prévue par l'accord
|
Ensemble (%) |
- Moins de39 heures |
9 |
- 39 heures |
19 |
- 40 heures |
14 |
- 41 heures |
4 |
- 42 heures |
16 |
- 43 heures |
1 |
- 44 heures |
8 |
- 45 heures |
4 |
- 46 heures |
8 |
- 47 heures |
1 |
- 48 heures |
8 |
* Ne se prononcent pas |
8 |
TOTAL |
100 |
|
|
Durée maximale moyenne |
42 heures |
Source : MES, Enquête IFOP auprès des
chefs
d'entreprise, juillet 1999
Concernant la durée hebdomadaire maximale prévue par l'accord,
votre commission observe que 72 % des entreprises ont prévu une
durée maximale supérieure à 39 heures par semaine et que
la durée maximale moyenne est de 42 heures. Là encore, le sort
des entreprises qui ont négocié une durée maximale
" élevée " reste incertain.
En définitive, il apparaît que les entreprises semblent avoir
eu recours à toutes les dimensions de flexibilité pour
réorganiser le travail à la suite de la mise en oeuvre d'un
accord " Aubry ".
Dans ces conditions, on pourrait effectivement considérer, à
l'instar de certains partenaires sociaux
30(
*
)
,
que la réduction du temps de travail a été
envisagée par nombre d'entreprises comme une
contrepartie à la
flexibilité
. Il en résulte une question
subséquente :
les emplois créés dans le cadre des
accords " Aubry " doivent-ils être portés au
crédit de la réduction du temps de travail ou à celui de
la flexibilité ?
B. LES ORGANISATIONS D'EMPLOYEURS DÉNONCENT LE BILAN DE LA LOI DU 13 JUIN 1998 DE MANIÈRE UNANIME
Il ressort très nettement des auditions auxquelles ont procédé votre commission des Affaires sociales et votre rapporteur que le bilan de la loi du 13 juin 1998 et le contenu du projet de loi relatif à la réduction négociée du temps de travail ne satisfont pas les organisations d'employeurs. Le désaccord est si profond que l'on peut légitimement s'interroger sur les propos de M. Lionel Jospin, Premier ministre, lorsqu'il déclare que le projet de loi ne sera " pas une loi contre les entreprises " 31( * ) . Manifestement, les chefs d'entreprises ne partagent pas cet avis.
1. Le MEDEF reste résolument opposé à la loi du 13 juin 1998
Le CNPF
était résolument opposé à la loi du 13 juin 1998.
Il semble que le MEDEF n'ait pas changé d'avis.
M. Ernest-Antoine Seillière, président du MEDEF, conteste le
principe même des 35 heures :
" Potion magique pour une
majorité plurielle fébrile d'une " politique vraiment
à gauche ", les 35 heures sont de plus en plus
considérées par les esprits lucides comme un poison diffus
à effet retard menaçant pour l'économie
française
32(
*
)
"
Revenant sur les conditions de la négociation collective depuis le vote
de la première loi, il estime que les entreprises ont
" joué le jeu "
et respecté la loi :
" Chacun a négocié selon les exigences de sa profession
dans un dialogue parfaitement classique. Or le résultat de ces
négociations a été systématiquement ignoré
par le projet de la seconde loi. On a préféré donner la
priorité à des principes politiques pour rassembler une
majorité parlementaire lors du débat (...).
Ce projet
méprise et bafoue les négociations conclues entre partenaires
sociaux responsables
. Il impose des dispositions que les entrepreneurs
jugeront non seulement inapplicables mais inacceptables
2
"
Evoquant l'attitude du Gouvernement par rapport aux accords signés par
les partenaires sociaux, il considère qu'
" en imposant par la
loi un contenu qui ne s'était pas dégagé des
négociations de branche, le législateur risque de casser le
dialogue social
2
"
Auditionné par votre commission des Affaires sociales
33(
*
)
, M. Denis Kessler, vice-président du
MEDEF, a déclaré que les 30.000 chefs d'entreprises ayant
participé à la manifestation du 4 octobre avaient confirmé
" leur totale hostilité au projet de loi considéré
comme une loi contre les entreprises ".
Evoquant la contribution prévue à l'article 11 du projet de loi,
il a prévenu que
" dans l'hypothèse où le
Gouvernement persisterait à vouloir faire financer les 35 heures par les
régimes de protection sociale, (son) organisation quitterait les
organismes paritaires ".
2. La CGPME et le CJD mettent en avant les difficultés rencontrées par les PME pour s'adapter à cette loi
Comme le
MEDEF, la CGPME considère que le nouveau projet de loi est mal
perçu par les chefs d'entreprise sur le terrain.
Auditionné
34(
*
)
par votre commission des
Affaires sociales, M. Jean-François Veysset, président de la
commission sociale de la CGPME, a déclaré que
" la
CGPME quitterait les organismes paritaires de concert avec le MEDEF si le
principe d'une contribution des régimes sociaux au financement des 35
heures devait être maintenu ".
Il a regretté
que le nouveau projet de loi ne reprenne pas nombre de stipulations contenues
dans les accords de branche.
Rejoignant l'UPA, la CGPME considère que les lois sur les 35 heures
pourraient accentuer la pénurie de personnel qualifié sur le
marché du travail. M. Jean-François Veysset a
déclaré à cet égard que certaines classes
d'apprentissage ou de formation professionnelle avaient déjà
dû être fermées faute de candidats éligibles.
Il apparaît en effet que nombre de chômeurs sont très
éloignés d'une situation d'emploi. Dans ces conditions, la CGPME
considère que l'impact de la RTT sur la création d'emplois est
incertain.
Le Centre des jeunes dirigeants d'entreprises (CJD) estime que la loi Aubry II ne permet pas les conditions du succès de la réduction du temps de travail (RTT)
Auditionnés le mardi 21 septembre par le rapporteur, MM.
Laurent Degroote, président, et Yves Pinaud, secrétaire
général, ont estimé que les obstacles à la
réduction du temps de travail, mis en évidence dans le rapport
d'expérimentation
35(
*
)
, étaient
toujours d'actualité :
" la loi, centrée sur la
réduction obligatoire du temps de travail, ne fait que changer une norme
et ne tient pas compte de la diversité qui existe entre les entreprises
et qui ne fait que s'accroître "
a réaffirmé M.
Laurent Degroote.
Les dirigeants du CJD ont estimé que sur les 500 entreprises qui avaient
commencé à négocier sur les 35 heures, entre 150 et 200
avaient décidé de renoncer en raison notamment de la
complexité et de la rigidité des procédures, de l'absence
d'interlocuteurs du côté salarié et des difficultés
à mettre en oeuvre la modulation du temps de travail. A cet
égard,
les représentants du CJD
ont rappelé que
la réduction du temps de travail ne devait pas être
considérée comme un objectif mais comme une contrepartie à
la flexibilité
permettant de reconstituer l'harmonie des temps
sociaux et privés.
Ils ont souligné combien, dans leur esprit,
modulation et annualisation du temps de travail devaient être
indissociables de la réduction du temps de travail. Ils ont
regretté à cet égard que le second projet de loi ne
prévoie pas explicitement le principe de la flexibilité
. Ils
ont constaté que le projet de loi alourdissait le code du travail au
lieu de l'assouplir.
MM. Laurent Degroote et Yves Pinaud ont rappelé combien le dialogue
social restait peu développé dans les petites PME qui constituent
pourtant l'essentiel des deux millions d'entreprises en France. Ils ont
souligné l'intérêt qu'il y aurait à
développer le référendum dans l'entreprise afin d'aboutir
à des accords.
Ils ont rappelé qu'à l'heure actuelle
l'attentisme dominait
,
" 98 à 99 % des entreprises ayant
décidé de ne pas bouger et d'attendre le vote de la
loi ".
Ils ont estimé que l'attentisme était renforcé par
l'attitude des inspecteurs du travail qui procédaient à des
interprétations " très libres " du texte de loi et
empêchaient l'innovation et l'expérimentation.
Ils ont insisté sur la nécessité de redéfinir les
relations entre la branche et l'accord d'entreprise selon le principe de
subsidiarité, ce dernier niveau de négociation devant être
privilégié. Concernant le nombre d'emplois créés
par les accords sur les 35 heures, ils ont déclaré que,
parmi les 500 entreprises du panel, celles qui avaient abouti à un
accord avaient recruté en moyenne 8 % d'effectifs supplémentaires
alors que la loi prévoyait 6 %. Toutefois,
ils ont
souligné que la moitié de ces embauches auraient eu lieu de toute
façon considérant que le taux d'aubaine était proche des
50 %.
Ils ont estimé que le taux de 12,5 % cité par
Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité,
n'était pas significatif puisqu'il prenait en compte l'ensemble des
entreprises, y compris les entreprises publiques qui représentent
l'essentiel des effectifs concernés.
Concernant le détail de la seconde loi, MM. Laurent Degroote et Yves
Pinaud ont déclaré qu'ils ne souhaitaient pas que l'on revienne
sur la définition du travail effectif qui, bien que différente de
celle édictée par la directive européenne du
23 novembre 1993, était un progrès par rapport aux
incertitudes qui s'étaient fait jour.
Ils ont estimé que le second texte, comme le premier, ne faisaient pas
assez la lumière entre ce qui relevait de l'accord de branche et de
l'accord d'entreprise.
Ils ont enfin considéré que l'article 15 du projet de loi relatif
aux conséquences d'une modification du contrat de travail individuel
à la suite d'une réduction du temps de travail n'était pas
satisfaisant puisqu'il prévoyait un licenciement à la charge de
l'employeur. Ils ont déclaré qu'en l'espèce, l'accord
collectif devait primer sur le contrat de travail.
En conclusion, MM. Laurent Degroote et Yves Pinaud ont souhaité que
la loi Aubry II intègre plus de souplesse et favorise le dialogue social
de manière plus réaliste. Ils ont estimé que la
maîtrise des coûts salariaux était indispensable et que
cette loi devait permettre une évolution forte du droit du travail.
3. L'UPA et le SDI considèrent que la loi du 13 juin 1998 n'encourage pas l'emploi dans les très petites entreprises
Votre
commission des Affaires sociales a auditionné
36(
*
)
M. Jean Delmas, président de l'UPA.
Celui-ci a rappelé l'opposition de l'UPA au premier texte. Il a
déclaré que son application s'était
révélée
impossible
pour la majorité des
toutes petites entreprises, notamment du fait de leur déficit
d'expertise juridique. Il a considéré que malgré la
signature de quatorze accords de branche, le nombre d'entreprises qui
était passé aux 35 heures restait
marginal
. Il a
souligné que la signature d'un accord dans l'artisanat était le
plus souvent lié à la mise en oeuvre d'un dispositif
d'annualisation.
Evoquant le marché du travail qui ne permet pas toujours aux artisans de
trouver du personnel qualifié, il a jugé que le passage aux 35
heures allait aggraver ces difficultés de recrutement.
Le syndicat des indépendants considère que le projet de loi est inapplicable pour les Toutes Petites Entreprises (TPE)
Auditionné par M. Louis Souvet, rapporteur, le
mercredi
29 septembre 1999, le Syndicat des indépendants,
représenté par MM. Marc Sanchez et J-P. Sudaka, a
estimé que le projet de loi tel qu'il était rédigé
pourrait bloquer le développement des plus petites entreprises. Il a
observé que seuls 2 % des entreprises de moins de
20 salariés avaient signé un accord Aubry. Il a
considéré que les règles relatives aux heures
supplémentaires seraient beaucoup trop rigides pour les TPE. Il a
regretté que le Gouvernement ne reprenne pas les accords signés
dans le second projet de loi. Il a considéré que le recours au
salarié mandaté pour signer des accords dans les TPE était
inapplicable et que la rédaction de l'article 15 était
dangereuse.
Le Syndicat des indépendants a demandé que les entreprises de
moins de 20 salariés soient exclues du texte. A défaut, il
souhaite que le contingent d'heures supplémentaires défini par la
branche prévue sur le contingent légal et que la majoration des
heures supplémentaires soit de 5 % entre la 35
ème
et la 39
ème
heure.
4. La FNSEA considère que les modalités d'application des 35 heures sont peu adaptées au monde agricole
Auditionné 37( * ) par votre commission des Affaires sociales, M. Arnold Brum, chef du service des affaires sociales de la FNSEA, a déclaré que les notions d'horaire collectif et de " durée collective du travail " n'étaient pas applicables à l'agriculture. Il a observé que les modalités d'adoption d'un accord de réduction du temps de travail ouvrant droit à un allégement de cotisations sociales (mandatement, référendum, accord majoritaire...) n'avaient pas beaucoup de sens dans des structures ne comprenant que quelques salariés.
La
Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP)
souhaite que le taux de
rémunération des heures supplémentaires
soit
fixé à 10 % de manière pérenne.
Votre
rapporteur a auditionné, mercredi 22 septembre 1999, une
délégation de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris
conduite par Mme Sylviane Bouillet-Larousse, présidente de la commission
du travail et des questions sociales.
Les membres de la délégation ont observé que les
entreprises qui avaient négocié dans le cadre de la loi du 13
juin 1998 étaient " celles qui avaient les moyens de le
faire " et qui, ce faisant, avaient " saisi l'opportunité de
se réorganiser ". Ils ont constaté que le nombre total
d'accords signés restait modeste et qu'il concernait les PME dans une
très forte proportion. Considérant que les accords signés
n'étaient pas représentatifs de la situation des entreprises
françaises en général, la délégation a
estimé que le Gouvernement ne suivait pas la bonne démarche en
généralisant le passage à la réduction du temps de
travail sur la base de ces accords.
Les membres de la délégation de la Chambre de commerce et
d'industrie de Paris se sont étonnés que Mme Martine Aubry ait pu
estimer à 12,5 % le nombre des emplois ayant
bénéficié d'un effet d'aubaine. Ils ont
considéré, en s'appuyant sur des enquêtes
réalisées par les chambres de commerce, que cet effet d'aubaine
était sans doute plus proche des 70 %.
Ils ont qualifié
la méthodologie employée par le Gouvernement pour estimer ce taux
de 12,5 % d'" étonnante ".
M. Philippe Pinon a considéré que ce projet de loi
" visait à interdire aux Français de travailler ". Il a
regretté que le Gouvernement n'ait pas tenu compte de certaines
dispositions que comportaient les accords signés. Il a estimé
qu'il convenait de respecter l'autonomie de la contractualisation en droit du
travail.
La délégation a estimé qu'
" en participant
à la réduction et à l'aménagement du temps de
travail, les heures supplémentaires avaient acquis un caractère
d'utilité durable qui justifiait de pérenniser le taux
spécifique de majoration de 10 % "
.
La délégation de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris a
déclaré au rapporteur que la coexistence de deux normes de
référence pour la rémunération minimale (le SMIC
horaire et la garantie mensuelle) allait considérablement compliquer la
tâche des entreprises. Elle a également estimé que les
allégements de charges envisagés au niveau du SMIC
(21.500 francs) ne permettraient pas de compenser le surcoût
occasionné. Les membres de la délégation ont
rappelé que la Chambre de commerce et d'industrie de Paris avait
proposé de résoudre la question du maintien du pouvoir d'achat
des salariés payés au SMIC par l'institution d'une ristourne
dégressive, applicable sur la part salariale des cotisations sociales
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