B. L'EFFORT GLOBAL DE L'ETAT
1. L'imprécision du " jaune " budgétaire
La
qualité des informations fournies par l'état récapitulatif
de l'effort financier en faveur de l'aménagement du territoire, le
" jaune ", s'est améliorée ces dernières
années. Ainsi, dorénavant, ce document précise sur quels
chapitres du budget des différents ministères s'impute leur
contribution à la politique d'aménagement du territoire.
Le " jaune " comporte cependant encore des lacunes. Par exemple :
- le montant de la contribution du ministère des transports inclut les
crédits du fonds d'investissement des transports terrestres et des voies
navigables (FITTVN), qui est pourtant un compte spécial du
Trésor. Le montant de la contribution du ministère des transports
est donc majoré de 4,3 milliards de francs. En revanche, le
" jaune " ne mentionne pas du tout la fraction des crédits de
l'ancien FPTA, le fonds d'intervention pour les aéroports et le
transport aérien (FIATA), consacrée à l'aménagement
du territoire ;
- au sein des concours financiers de l'Etat aux collectivités locales,
seule la dotation de développement rural (DDR), qui est une composante
du fonds national de péréquation de la taxe professionnelle
(FNPTP), est recensée comme relevant de la politique
d'aménagement du territoire. Sont ainsi laissés de
côté les crédits de la dotation de solidarité
urbaine (DSU), de la dotation de solidarité rurale (DSR), du
deuxième concours de l'Etat au FNPTP et du concours au fonds national de
péréquation (FNP). En conséquence, alors que la loi
d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du
territoire du 25 juin 1999 affirme, dans son article premier, que la politique
d'aménagement du territoire "
réduit les écarts de
richesse entre les collectivités territoriales par une
péréquation de leurs ressources en fonction de leurs charges et
par une modulation des aides publiques
", le " jaune "
budgétaire ne retrace pas le montant des instruments budgétaires
destinés à cet effet.
- la dépense fiscale ne fait toujours pas l'objet d'un recensement
exhaustif. Le " jaune " fournit seulement le montant du coût
pour l'Etat de deux des exonérations de charges fiscales liées
à la politique d'aménagement du territoire. L'imputation
budgétaire des compensations d'exonérations d'impôts locaux
versées aux collectivités locales, lorsqu'elles existent, n'est
pas précisée.
2. Les crédits du budget général
Le
" jaune " consacré à l'aménagement du territoire
évalue à 54,8 milliards de francs l'effort total de l'Etat
en faveur de l'aménagement du territoire en 2000.
Le principal ministère concerné est celui des transports, dont il
est considéré qu'il consacre, hors compte spéciaux du
Trésor, plus de 25 milliards de francs à la politique
d'aménagement du territoire.
Le second plus gros contributeur à la politique d'aménagement du
territoire est le ministère de l'agriculture, avec 10,4 milliards de
francs. Ces crédits comprennent notamment ceux du Fonds de gestion de
l'espace rural (FGER), du Fonds de gestion des milieux naturels (FGMN) et des
contrats territoriaux d'exploitation (CTE).
3. Les comptes spéciaux du Trésor
La loi
d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire du 4 février 1995 a créé deux comptes
d'affectation spéciale destinés à promouvoir la politique
d'aménagement du territoire :
Le fonds d'intervention pour les aéroports et le transport
aérien (FIATA)
Le FIATA est issu de la transformation en 1999 du fonds de
péréquation des transports aériens, le FPTA. Ce fonds
avait initialement été créé dans le but d'accorder
des subventions aux compagnies aériennes exploitant des lignes
déficitaires. Ses missions ont été élargies en
1999. Il contribue maintenant également au financement des
dépenses de sécurité des aéroports.
Les dépenses de ce fonds n'ont jamais été à la
hauteur des prévisions initiales. La taxe créée pour le
financer avait été " calibrée " pour rapporter
plus de 100 millions de francs (142 millions de francs en 1996). Cependant, les
dépenses ont toujours été inférieures, si bien que
le taux de la taxe à été réduit. Malgré
tout, un montant important de reports de crédits a été
accumulé.
Les dépenses en faveur des lignes aériennes d'aménagement
du territoire n'ont cependant jamais cessé d'augmenter. Elles
s'établissent aujourd'hui à un peu de moins de 80 millions de
francs, les estimations pour 1999 et 2000 s'établissant à 71 et
76 millions de francs.
La péréquation est cependant devenue un objet marginal pour le
FIATA. Le produit de la taxe de l'aviation civile alimentant le fonds
s'élèvera en 2000 à 361 millions de francs, soit 213
millions de francs de plus qu'en 1999. Au sein de ces crédits, les
mesures nouvelles en faveur de la péréquation ne
représenteront que 50 millions de francs, soit 1 million de francs de
moins qu'en 1999.
Le fonds d'investissement pour les transports terrestres et les voies
navigables (FITTVN)
Les ressources du FITTVN devraient progresser de 10,3 % en 2000, passant de
3.930 millions de francs en 1999 à 4.335 millions de francs en 2000.
L'augmentation des moyens du fonds résulte du relèvement de 4
à 4,5 centimes de la taxe sur les sociétés
concessionnaires d'autoroutes, prévu par l'article 33 du présent
projet de loi de finances.
L'augmentation de cette taxe contribuera à dégrader
l'équilibre financier des sociétés concessionnaires
d'autoroutes
1(
*
)
. Votre
commission des finances a adopté un amendement de suppression de
l'article 33 du projet de loi de finances pour 2000.
L'évolution des dépenses du FITTVN en 2000 reflète les
orientations du gouvernement en matière de transport. En effet, les
crédits consacrés au transport ferroviaire et au transport
combiné progresseront de 418 millions de francs, les voies navigables
bénéficieront de 50 millions de francs supplémentaires,
tandis que les investissements routiers diminueront de 63 milliards de
francs.
Le FITTVN vu par la Cour des comptes
Dans
son rapport sur l'exécution des lois de finances pour 1998 (page 230),
la Cour relève que
, " au vu de l'exécution 1998, le
recours à un compte d'affectation spéciale apparaît
contestable à plusieurs égards
. La présentation
globale au Parlement devrait donner une vision claire et exhaustive des
crédits budgétaires ou des programmes d'équipement. Il
s'avère qu'il y a plutôt éclatement des moyens. Le fonds ne
représente en effet qu'une fraction des dépenses d'investissement
pour les transports et finance trop souvent des opérations similaires
voire identiques à celle du budget général. La gestion des
moyens d'engagement se trouve perturbée par la contrainte d'une
disponibilité effective des recettes avec un triple problème
lié au profit pratiquement linéaire des recettes au long de
l'année, au rendement total fluctuant (en particulier pour la taxe
hydroélectrique) et au décalage de l'utilisation des deux
derniers mois de recettes d'un exercice sur l'autre.
" Enfin certaines opérations paraissent critiquables
. Ainsi
en 1998 cinq opérations routières ont été
financées pour partie par le budget général
(110,5 millions) et pour partie par le FITTVN (91,3 millions). En
outre, des opérations de réhabilitation du réseau routier
national, qui relèvent en principe du budget général, ont
été financées en 1998 sur le FITTVN ;
83 millions ont été programmés et affectés
à ce type d'opérations.
" Une subvention de 18 millions a été attribuée
à la SNCF au titre de l'aide à l'acquisition des premiers TER
thermiques par les régions concernées.
Cette dépense ne
répond pas à la finalité assignée au FITTVN par le
législateur,
à savoir "
la réalisation
d'infrastructures fluviales, ferroviaires, de transport combiné et de
routes
" (article 37 de la loi du 4 février 1995).
" Il est souligné également que pour les voies navigables,
le FITTVN finance des travaux de restauration, de sécurité ou de
dragage pour lesquels il n'existe plus de crédits au budget
général. "
4. La dépense fiscale
Les entreprises implantées dans des collectivités dont le territoire, ou une partie du territoire, est inclus dans le périmètre d'un zonage 2( * ) bénéficient d'exonérations de charges fiscales et sociales, retracées dans le tableau suivant :
Les
exonérations de charges fiscales et sociales en faveur de
l'aménagement
du territoire
|
ZAT |
TRDP |
ZRR |
ZUS |
ZRU |
ZFU |
ZIP |
Taxe professionnelle |
X |
X |
X |
X |
X |
X |
|
Impôt sur les sociétés |
X |
X |
X |
|
X |
X |
|
Charges patronales |
|
X |
X |
X |
X |
X |
|
Amortissement exceptionnel |
|
|
X |
|
X |
X |
|
Crédit bail immobilier |
X |
X |
X |
|
X |
X |
|
Taxe foncière |
X |
X |
X |
|
X |
X |
|
Majoration du crédit d'impôt recherche |
X |
X |
X |
|
|
|
|
Réduction de la taxe départementale de publicité foncière |
X |
X |
X |
|
X |
X |
|
Droits de mutation sur les commerces |
|
X |
X |
|
X |
X |
|
Crédits d'impôt sur les sociétés |
|
|
|
|
|
|
X |
Au sein
des exonérations d'impôts directs locaux, seuls les
exonérations dans les zones de revitalisation rurale (ZFR), les zones de
redynamisation urbaines (ZRU) et les zones franches urbaines (ZFU) font l'objet
d'une compensation de l'Etat aux collectivités locales.
L'état récapitulatif de l'effort financier de l'Etat en faveur de
l'aménagement du territoire, le " jaune " budgétaire,
ne retrace le coût pour l'Etat que des deux principales mesures
d'allégement de charges fiscales : l'exonération de taxe
professionnelle et l'exonération d'impôt sur les
sociétés.
Pour 2000, le " jaune " évalue la dépense fiscale
liée à ces deux mesures à 1.732 millions de francs, dont
832 millions de francs au titre des compensations des exonérations de
taxe professionnelle et 900 au titre des moindre recettes d'impôt sur les
sociétés. Ces montants ne sont que des estimations. Le coût
réel est susceptible d'en différer fortement.
En effet, malgré leur précision, au million de francs
près, ces estimations sont souvent démenties. Par exemple, le
document annexé au projet de loi de finances pour 1999 minorait de 360
millions de francs le coût des exonérations.
Le coût pour l'Etat de deux exonérations de charges fiscales et sociales en faveur de l'aménagement du territoire
|
1998 dans PLF 98 |
1998 dans PLF 99 |
1999 dans PLF 99 |
1999 dans PLF 2000 |
2000 dans PLF 2000 |
Coût total, dont : |
1.315,70 |
1.330 |
1500* |
1.863,40 |
1.732 |
TP |
15,70 |
800 |
800* |
983,40 |
832 |
IS |
1.300 |
530 |
530* |
880,00 |
900 |
* sic
Les tableaux ci-dessous récapitulent les modalités de compensation aux collectivités locales d'exonérations d'impôts locaux dans les zonages d'aménagement du territoire :
Exonérations de taxes locales prévues par la loi n 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (LOADT) et par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville (PRV)
|
|
|
Durée d'exonération (années) |
|
Collectivités supportant la charge |
Ligne comptable d'imputation de la compensation d'exonération |
I - TAXE PROFESSIONNELLE |
||||||
Z.R.R.
|
Article
52-I (LOADT)
|
1)
Créations d'activités à compter du 1.1.95
(créations d'activités industrielles ou de recherche
scientifique et technique, ou de services de direction, d'études,
d'ingénierie et d'informatique)
|
5
|
Bases
exonérées de N x taux TP de 1994
|
Etat
|
Compensation d'exoné-rations relatives à la
fiscalité locale
|
Anciennes Z.R.U
|
Article
52-II (LOADT) modifié par article 4-A.2° du PRV
|
1)
Créations d'activités entre le 1.1.95 et le 31.12.96
|
5
|
Bases
exonérées de N x taux TP de 1996
|
Etat
|
Compensation d'exonérations relatives à la
fiscalité locale
|
Nouvelles Z.R.U. (zones de redynamisation urbaine) |
Article
4-A 3° du PRV
|
1)
Créations, changements d'exploitants à compter du 1.1.97
|
5
|
Bases
exonérées de N x taux TP de 1996
|
Etat
|
Compensation d'exonérations relative sà la
fiscalité locale
|
Z.F.U.
|
Article
4-A 4° du PRV
|
1)
Créations, changements d'exploitants à compter du 1.1.97
|
5
|
Bases
exonérées de N x taux TP de 1996
|
Etat
|
Compensation d'exonérations relatives à la
fiscalité locale
|
II - TAXE FONCIERE SUR LES PROPRIETES BATIES |
||||||
Z.F.U.
|
Article
7-I du PRV
|
Immeubles situés dans les ZFU affectés à une activité entrant dans le champ d'application de la taxe professionnelle (à compter du 1.1.97) |
5 |
Bases exonérées de N x taux de TFPB de 1996 |
Etat
|
Compensation d'exonérations relatives à la fiscalité locale |