CHAPITRE III
LA TENTATION DU « MINISTÈRE DE PLEIN
EXERCICE »
I. L'AUGMENTATION DES CRÉDITS AU RYTHME OBSERVÉ N'EST PAS SOUHAITABLE
Les
crédits du ministère augmentent pour 2000 de 8,6 %, soit la
troisième plus forte hausse de tous les fascicules budgétaires.
Faut-il se réjouir de cette augmentation spectaculaire des
dépenses de l'Etat consacrées à l'environnement ?
Il ne le semble pas, pour plusieurs raisons :
L'effort de
maîtrise des dépenses de l'Etat
est
encore insuffisant.
Or, il apparaît que le budget de l'Environnement est
exonéré de toute participation à la nécessaire
maîtrise des dépenses de l'Etat, en particulier des
dépenses de personnel qui sont les plus rigides. Il convient de
s'interroger sur les raisons qui expliquent une telle situation au sein des
fascicules budgétaires.
La
capacité d'absorption
de ces crédits nouveaux par le
ministère est douteuse.
Face à l'évolution très forte des crédits
demandés pour 2000, votre rapporteur spécial s'interroge sur la
capacité du ministère à faire face à de telles
augmentations de ses moyens. En effet, le budget de l'Environnement se
caractérise régulièrement par la faiblesse de son taux de
consommation des crédits. Cette situation, qui ne semble pas
résulter d'une volonté de rigueur budgétaire, est
plutôt le signe que l'augmentation des crédits votés
dépassent la capacité de consommation du ministère.
L'évolution des crédits sur les dernières années
est donc manifestement trop forte et trop rapide.
II. UNE LOGIQUE DE POUVOIR AU DÉTRIMENT D'UNE LOGIQUE D'ACTION
A. UNE MAUVAISE ORIENTATION
Dans le
cadre du plan pluriannuel de modernisation du ministère (1999-2002),
l'accroissement de ses moyens de fonctionnement est justifié de la
façon suivante : «
L'augmentation continue du nouvel
agrégat 1 sur la période (1997-2000) s'explique par la
montée en puissance des questions environnementales au plan
international et dans l'opinion publique. (...) Le ministère de
l'aménagement du territoire et de l'environnement s'affirme comme un
ministère de plein exercice
. »
Votre rapporteur spécial ne partage pas une telle vision. Qu'attend
l'opinion publique ? Que nécessite «
la montée
en puissance des questions environnementales
» ? Non pas
tant la mise en place d'une administration spécialisée de
l'environnement, que des actions, des interventions du ministère en
matière d'amélioration de l'environnement.
Il est à déplorer que l'augmentation de ce budget soit
utilisée dans une logique de pouvoir, de mise en place d'une
structure administrative capable à terme de concurrencer les autres
ministères
, plutôt que dans une logique d'action pour
l'environnement.
Avec cette politique de renforcement des structures administratives, ce sont
les erreurs du passé qui sont à nouveau faites :
. d'une part, l'explosion des dépenses de personnel et de
fonctionnement, ce qui entraîne une
rigidification des dépenses
de l'Etat
;
. d'autre part, le développement de l'administration centrale par
rapport aux services déconcentrés, ce qui va
à
l'encontre de la modernisation de l'Etat
.
B. LES ORIENTATIONS À PRIVILÉGIER
Votre
rapporteur spécial ne conteste toutefois pas que des besoins en
personnels puissent apparaître, en particulier dans les services
déconcentrés. Toutefois, il souhaiterait qu'il y soit
répondu par des transferts de personnels ou des redéploiements de
crédits et non pas par des créations d'emplois et des mesures
budgétaires nouvelles.
Il convient de souligner que les négociations lancées en 1999
avec les ministères chargés de l'agriculture et de
l'équipement pour aboutir à des chartes précisant le
rôle de leurs propres services déconcentrés dans la mise en
oeuvre des politiques du ministère de l'Environnement vont dans le bon
sens et doivent être encouragées afin que tous les
ministères intègrent la dimension environnementale de leurs
actions.
Votre rapporteur spécial estime que la politique de l'environnement
doit demeurer :
. d'une part,
décentralisée
, or c'est le mouvement
inverse que l'on observe avec par exemple la centralisation des moyens de la
politique de l'eau au sein du nouveau FNSE ;
. d'autre part,
déconcentrée
, ici encore on remarque
une évolution contraire comme le prouve la priorité donnée
à l'administration centrale dans les augmentations de personnel ;
. enfin,
interministérielle
, or le ministère de
l'Environnement tend à perdre sa dimension transversale
légère pour devenir un ministère dépensier
" comme les autres ".