N° 89
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1999-2000
Annexe au procès verbal de la séance du 25 novembre 1999.
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2000 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Deuxième partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 9
CULTURE ET COMMUNICATION :
COMMUNICATION AUDIOVISUELLE
Rapporteur spécial
: M. Claude BELOT
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Claude Belot, Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Roland du Luart, Bernard Angels, André Vallet, vice-présidents ; Jacques-Richard Delong, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Jacques Baudot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Thierry Foucaud, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Henri Torre, René Trégouët.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème législ.) :
1805
,
1861
à
1866
et T.A.
370
.
Sénat
:
88
(1999-2000).
Lois de finances. |
OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR
Volontiers présenté comme un budget
" d'anticipation " sur la réforme en cours, ce budget ne
constitue pas le renversement de tendance annoncé et n'assure pas
à long terme l'avenir du secteur public.
Certes, dans le projet de loi de finances pour 2000, la redevance, d'une part,
et les concours budgétaires, d'autre part, augmentent fortement pour se
traduire par une hausse de 11,7 % des financements publics ; mais la
baisse très sensible (- 10%) des ressources propres de ces organismes
vient absorber une bonne part de l'effort de l'Etat au point que, globalement,
les ressources du secteur public ne croissent pour 2000 que de 2,6%.
Malgré l'augmentation, jusqu'à présent continue, des
ressources de redevance, dont le produit croît en dépit de toutes
les controverses sur l'efficacité de ce mode de perception, on ne peut
que manifester de l'inquiétude sur l'équilibre financier de
l'audiovisuel public, menacé à court terme par le recul des
recettes publicitaires et à plus long terme par la
nécessité de financer les développements rendus
nécessaires par les technologies numériques.
Au cours des développements ci-après, votre rapporteur
spécial justifiera un
amendement affectant
l'intégralité de l'excédent de redevance perçu en
1998
dans le cadre du projet de loi de finances pour 2000.
Il convient en effet de ne pas priver l'audiovisuel public des ressources
dont il a un besoin urgent pour financer sa modernisation et les charges
supplémentaires résultant de la réduction du temps de
travail.
A cet égard, les données fournies à ce sujet ont sans
doute un peu vieilli mais on peut douter de ce que le processus de passage au
35 heures soit maîtrisé sur le plan financier.
Face à ces incertitudes, votre rapporteur spécial n'a pu que
proposer à la commission des finances de ne pas adopter les
crédits de la communication audiovisuelle.
1. L'utilisation nécessaire de la totalité du produit de la redevance
Le
présent budget confirme l'amélioration du taux de recouvrement de
la redevance, évolution qui ne fait cependant pas taire les critiques
sur le coût de la collecte.
Le système de perception peut paraître archaïque à
certains, mais une visite sur place a permis à votre rapporteur
spécial de constater l'efficacité du service dans
l'accomplissement de ses missions. En outre, un rapide examen montre que les
systèmes de substitution ont également leurs défauts.
Bref, votre rapporteur a tendance à penser que,
si la redevance est
sans doute le pire des modes de perception, on n'en connaît pas,
pour
l'instant du moins,
de meilleur
.
En revanche, il faut paradoxalement attirer l'attention sur les
problèmes liés aux excédents chroniques de redevance.
a) L'augmentation sensible des recettes
L'accroissement des ressources au moment où le taux
d'équipement des ménages plafonne très normalement
à 95%, s'explique à la fois par une lutte plus efficace contre
l'évasion et par un certain durcissement des conditions
d'exonération.
L'on sait que le décret de 1996 a, après celui du 20
décembre 1993 relevant progressivement les conditions d'âge,
sensiblement réduit le nombre de bénéficiaires de
l'exonération en subordonnant l'octroi de cet avantage au fait
d'être titulaire de l'allocation supplémentaire du fonds social de
solidarité vieillesse, sauf pour les invalides qui restent soumis
à l'ancienne condition de non imposabilité.
Cette mesure, qui ne s'appliquent qu'aux nouvelles demandes
d'exonération, a eu un impact non négligeable sur
l'évolution du nombre de comptes exonérés. Tandis que l'on
en a compté jusqu'à 4,27 millions en 1991, le nombre de comptes
exonérés a vu sa baisse s'accentuer à partir de 1996 avec
plus de 100 000 comptes exonérés en moins par an. C'est ainsi
qu'il est prévu que l'on n'ait plus que 3,32 millions de comptes
exonérés en l'an 2000
. La perte de recettes correspondant aux
exonérations plafonne en conséquence à 2 milliards de
francs
( TTC).
D'autre part, on peut rappeler que
l'évasion
peut être
évaluée à 1,7 millions de comptes, soit
7,6 %
des quelque 22,4 millions de ménages équipés d'un
téléviseur. Compte tenu de l'évasion incompressible
l'enjeu des contrôles portent sur 3 à 4 % du parc, ce qui
fait que
la marge de progression constituée par l'intensification
de la lutte contre la fraude peut être estimée à 1,265
milliards de francs
La recherche de postes non déclarés
constitue un des
objectifs prioritaires du service, dont l'action - en dépit de moyens
réglementaires limités, les agents de la redevance ne pouvant
pénétrer chez les personnes contrôlées qu'avec
l'accord de celle-ci, et ne pouvant pas avoir accès aux fichiers des
opérateurs de télévision payante -
a permis
l'ouverture de plus de 2 millions de comptes depuis 1990, dont presque 400
000 en 1998
.
Si, depuis le début de la décennie, le service de la redevance a
pu augmenter régulièrement le taux de recouvrement sur exercice
courant,
le taux de recouvrement sur exercices antérieurs a, par
contre, subi une érosion depuis 1992, du fait des difficultés
économiques croissantes des redevables
.
Les revendications exprimées par les chômeurs et les
bénéficiaires du R.M.I. à la fin de l'année 1997,
ont conduit le gouvernement à rappeler la nature des mesures de
bienveillance qui, au cas par cas, pouvaient être prises en leur faveur :
étalement des paiements, remise gracieuse de la majoration de 30 %,
remise ou modération du principal de la taxe en cas de gêne ou
d'indigence mettant le redevable dans l'impossibilité de s'acquitter de
sa dette.
Le taux de poursuites extérieures en instance par rapport au nombre
de comptes des redevables est stabilisé à un peu moins de 5 % au
niveau national.
S'agissant des réductions
(dégrèvements, remises gracieuses, non-valeurs) il faut remarquer
que le ratio Réductions / Prises en charge brutes, qui était de
14,86 % sur l'année 1994, a été réduit à
13,59 % en 1998
1(
*
)
. Les
non-valeurs sont néanmoins contenues dans ce contexte et, grâce
à l'accentuation des actions contentieuses menées conjointement
avec le réseau du Trésor, ont un poids relatif en diminution
(5,44 % en 1998)
Le coût de perception de la redevance
, dont on remarque qu'il est
parfaitement isolable contrairement à d'autres coûts de perception
qui ne peuvent faire l'objet que d'estimation, a sensiblement baissé
depuis 10 ans. C'est ainsi qu'en pourcentage des encaissements, il est
passé de 5,5% en 1988 à 3,75% en 1999 et
3,55% en 2000
, ce
qui correspond à une baisse de près de deux pour cent du
coût d'intervention en 10 ans.
b) L'affectation des excédents de redevance pour 1998, un bonne initiative de l'Assemblée nationale
L'apparition d'excédents chroniques de la redevance sur
les
prévisions de loi de finances suscite de façon paradoxale des
interrogations tant sur le fond que sur les méthodes de prise en compte.
D'abord, parce que
les perspectives de recettes supplémentaires
attendues pour l'an 2000 au titre de l'amélioration du taux de
recouvrement et de l'extension du parc, soit 490 millions de francs
,
créent une aisance financière qui n'est peut-être pas
durable
.
Le service de la redevance engrange actuellement les dividendes d'efforts de
rationalisation des contrôles, ainsi que de la possibilité de
recoupement avec la taxe d'habitation, qui résulte, on peut le rappeler,
d'une initiative du Sénat. Mais
tôt ou tard
, sauf si
d'autres possibilités de recoupement sont ouvertes,
cet effet va
s'atténuer et les recettes plafonner
.
Au surplus, la montée du produit de la redevance doit aussi être
mis en relation avec la révision des conditions d'exonération,
qui sont toujours susceptibles d'évoluer.
Enfin, en dépit des textes, qui semblent en partie au moins ne pas
être inadaptés, il ne faut pas sous-estimer le risque de voir, du
fait de la convergence, une certaine frange de la population regarder la
télévision sur leur ordinateur, même si le prix des
matériels informatiques et la petite taille des écrans
permettent, pour l'instant, d'écarter l'hypothèse d'une
substitution massive.
Mais, sur le plan des méthodes, on constate que les excédents
actuels ne sont pas facile à gérer dans la clarté
.
L'année dernière, l'on avait procédé de
façon assez classique, à la répartition des
excédents en loi de finances rectificative. M. Philippe Marini,
rapporteur général de votre commission des finances, avait
souligné qu'une telle méthode consistant à venir en fin
d'exercice combler les déficits de telle ou telle société,
n'était sans doute pas une manière de procéder
particulièrement responsabilisante.
Mais, il faut admettre que les méthodes consistant, comme on va le faire
en l'an 2000, à affecter les excédents de l'exercice n-2 à
l'exercice n n'est pas non plus dépourvue d'inconvénients,
puisque ce type de report accentuera un éventuel tassement de la
ressource.
L'annexe " jaune " secteur public de la communication audiovisuelle,
prévoit ainsi que les quelque 276,4 millions de francs de plus-values de
recettes enregistrées en 1998, seront à raison de 138,5 millions
de francs affectés a compte d'affectation spéciale au titre de
l'année 2000.
Cela dit, on ne renonce pas pour autant à la méthode classique de
distribution des excédents passés, puisque
la
différence entre la part des plus-values de 1998 non affectées,
soit 137,9 millions de francs doivent a priori être distribuée en
loi de finances rectificative
. Les mêmes causes produisant les
mêmes effets, il faut bien intervenir en fin d'exercice 1999 pour pallier
les moins-values de recettes publicitaires de France Télévision.
Toutefois, une initiative de l'Assemblée nationale change les
données du problème. Sur proposition conjointe des rapporteurs
des commission des finances et des affaires culturelles, MM. Jean-Marie Le Guen
et Didier Mathus,
l'Assemblée nationale a décidé
d'affecter à la loi de finances pour 2000 la totalité des
excédents de 1998, soit 137,8 millions de francs
supplémentaires
.
Votre commission des finances a estimé qu'au moment où les
sociétés et organismes du secteur public audiovisuel se
trouvaient confrontés à des difficultés, il était
anormal de ne pas distribuer la totalité des ressources prévues
par la loi pour leur financement.
Il est légitime de suivre la voie ouverte de façon assez
largement consensuelle par l'Assemblée nationale en augmentant le
montant des ressources de redevance distribuée de 137,8 millions de
francs d'excédents 1998 mis en réserve sans raisons
légitimes par le gouvernement pour le porter à 14.007,8 millions
de francs. Tel est l'objet de l'amendement n°5 que votre rapporteur a
déposé à l'article 55 du projet de loi de finances
Par souci d'efficacité et de simplicité, il a paru plus simple
à votre rapporteur spécial de reprendre la répartition
proposée par les rapporteurs des commissions de l'Assemblée
nationale, dès lors qu'elle répondait à certains besoins
pressants et, en particulier, à ceux de modernisation de l'outil de
Radio France.
Quant à la question du financement des mesures prévues dans le
projet de loi de Finances pour 1999, on peut simplement rappeler que, si le
gouvernement ne trouve pas de ressources budgétaires, pour y faire face,
il reste une dernière possibilité, non prévue actuellement
mais qui n'est pas sans précédents, l'affectation des
excédents du produit de la redevance par rapport aux prévisions
sur le même exercice.
L'hypothèse est d'autant moins théorique que des excédents
importants seraient dégagés en 1999 avec des rentrées
supérieures aux prévisions de l'ordre de 280 millions de francs.
La réévaluation des droits
est une opération
possible
voire tentante pour faire face à des besoins
" exceptionnels ", qu'il s'agisse d'investissements estimés
nécessaires et urgents par tel ou tel organisme ou de faire face
à des besoins de financement plus importants que prévus au moment
de la construction du présent budget comme, en l'occurrence, un manque
à gagner de recettes publicitaires ou les premières
conséquences de la réduction du temps de travail.
Une telle solution aurait aussi l'avantage de permettre de s'assurer de
l'affectation de l'excédent dès le présent exercice et non
l'année prochaine, à un moment où il pourrait être
pris en compte dans les arbitrages budgétaires.
A cet égard, il faut souligner que l'affectation des 900 millions de
subventions représentatives des exonérations de redevance au
compte d'affectation spéciale n°902-15 qui est rendue possible par
l'article 25 de l'ordonnance organique, ne résout pas tous les
problèmes de financement du secteur public audiovisuel.
Certes, on peut considérer comme positif la reconnaissance du principe
consistant à faire assumer à l'État les
conséquences financières des exonérations qu'il
décide. Maintenant, il faut bien voir que ce financement de substitution
n'a pas la stabilité de la redevance en tant que ressource propre.
D'abord, il faudrait savoir quand les sommes seront transférées
au compte d'affectation spéciale pour juger si la ressource est
effectivement substituable au produit de la redevance, dont on sait qu'il est
effectivement versé de façon très régulière
aux chaînes ; ensuite, il ne faut pas dissimuler le risque de
mesures de régulations budgétaires en fin d'exercice, surtout si
d'importants excédents de redevance - de 1999 ou de 2000 - permettent
d'offrir au secteur public audiovisuel le financement global prévu par
le présent projet de loi de finances.
2. Des menaces à court terme sur les recettes publicitaires
Longtemps par prudence ou pour se ménager des marges de
manoeuvres, les recettes publicitaires figurant au budget de l'audiovisuel
public ont été sous évaluées.
L'année dernière déjà, votre rapporteur
spécial avait attiré l'attention sur le risque que l'on soit
tombé dans l'excès inverse en prévoyant de façon
délibérément optimiste la poursuite de la progression des
recettes publicitaires. Effectivement, il a fallu rectifier en début
d'année des objectifs de recettes devenus irréalistes.
Les chiffres bruts figurant dans le tableau ci-dessous, qui retrace
l'évolution de la part de marché publicitaire de France 2 et
France 3 en termes de données brutes SECODIP, n'incitent pas, pour cette
année également, à l'optimisme.
France Télévision indique en réponse à votre
rapporteur spécial qu'elle est parvenue à maintenir sa part de
marché en 1997, en dépit de l'érosion de l'audience des
chaînes mais que le tassement de l'audience commence à se faire
sentir en 1998 et, plus nettement encore au premier semestre 1999 : la
perte de part de marché est par rapport à la période
correspondante de l'année précédente, de 1,6 point pour
France 2 et de 1 point pour France 3.
Votre rapporteur a déjà souligné à la suite d'une
étude du Conseil supérieur de l'audiovisuel que, d'une
façon générale, il y a une différence
d'adaptabilité à la concurrence qui fait que, paradoxalement
,
les chaînes publiques apparaissent plus vulnérables que les
chaînes privées aux fluctuations du marché publicitaire
" Il est important de noter que, selon l'étude du Conseil
supérieur de l'audiovisuel susmentionnée, si minimes qu'elles
paraissent, les restrictions appliquées aux chaînes publiques en
matière d'accès au marché publicitaire (interdiction de
couper les oeuvres par des écrans publicitaires ; exclusion du
télé-achat) leur créent un handicap qui ira
croissant ; un gain d'un point d'audience rapporte, en part de
marché publicitaire, environ deux fois plus à une chaîne
privée qu'à une chaîne publique. "
De ce point de vue,
votre rapporteur spécial a le sentiment qu'il
faut se garder de toute publiphobie
. Pour la jeune
génération, non seulement la publicité n'est pas
perçue comme une gêne, mais encore son absence serait presque
suspecte, comme le signe de quelque chose d'élitiste, donc d'ennuyeux,
voire de ringard.
Il en conclut que la culture que le secteur public a pour mission de
véhiculer, doit parfois s'avancer masquée derrière le
divertissement ; une chaîne généraliste grand public
ne peut se présenter comme complètement culturelle, car elle
risque de confiner la culture dans un ghetto que le défaut de
publicité signalera de façon emblématique
.
3. Deux problèmes non résolus : le financement des 35 heures et l'alignement du régimes des personnels
L'installation de France 2 et France 3 sur un site commun, la perspective de regroupement au sein d'une société holding suscitent très naturellement au sein du personnel des comparaisons de statut de nature à nourrir des revendications, que les perspectives d'application incertaines de la réduction du temps de travail, ont eu tendance à stimuler.
a) La question des disparités
Les
revendications de parité ont constitué, au delà d'une
inquiétude diffuse sur l'avenir de la société, un des
moteurs de la grève qui a secoué France 3 en 1997.
Un protocole de sortie de grève, signé le 12 décembre
1997, prévoit une série de mesure concernant principalement la
poursuite du rapprochement des rémunérations France 3 - France 2
et les besoins de financement de la politique de développement
régional. Une partie de cette charge devait être financée
par redéploiement au sein du budget.
A la suite de cet accord, trois autres sociétés, Radio-France,
RFI et RFO ont conclu des accords similaires pendant le premier semestre 1998,
dont le coût total s'élève à près de 30
millions de francs hors charges patronales (plus de 40 millions de francs avec
charges) pour 1998, montant auquel il convient d'ajouter, à France 3
uniquement, une enveloppe supplémentaire plafonnée à 25
millions de francs (hors charges) pour 1999 et 2000, selon les termes d'un
protocole de levée de préavis de grève signé en
janvier 1999.
(1) France 3
L'accord
signé en décembre 1997 concernait les journalistes et les
personnels techniciens et administratifs, pour un montant global de 10 millions
de francs hors charges (15 millions de francs avec charges), dont 3
versés au titre de 1997 et 7 millions de francs au titre de 1998.
De plus, un protocole additionnel, signé par la direction
générale, pour la levée d'un préavis de
grève déposé en janvier 1999, prévoit la
répartition de deux enveloppes supplémentaires de 15 millions de
francs (hors charges) au titre de 1999 et de 10 millions de francs au maximum
pour 2000.
La direction générale de France 3, après un an de
discussions avec les organisations syndicales sur les modalités de
répartition de ces enveloppes, a annoncé leur attribution aux
salariés en tout état de cause avant la fin de 1999.
(2) Radio-France
Le
protocole signé avec les journalistes en janvier 1998, dont la base de
calcul est constituée par les salaires de France 3 avant l'accord de
décembre 1997, a un coût de 2,3 millions de francs hors charges
(3,6 millions de francs avec charges), réparti sur trois ans à
raison de 1,3 million de francs en 1997, 0,8 million de francs en 1998 et 0,2
million de francs en 1999.
L'accord signé en mars 1998 avec les personnels techniciens et
administratifs comprend une mesure générale qui
s'élève à 3,2 millions de francs (hors charges) et des
mesures catégorielles pour 4,5 millions de francs. L'application est
étalée sur quatre ans : 1,23 million de francs pour
1997, 1,81 million de francs, 2,31 millions de francs pour 1999 et
2,32 millions de francs pour 2000.
Par ailleurs, la Direction de Radio France a annoncé, le 14 avril 1998,
l'octroi d'une prime générale de 400 F en sus des mesures
accordées fin mars 1998, et son maintien en 1999. Il faut noter que
cette mesure est de coût budgétaire nul mais a un effet sur la
trésorerie, puisqu'il s'agit d'une simple translation d'une part de la
prime de fin d'année au mois de juin de l'année en
cours.
(3) RFO
Un accord a été signé le 28 mai 1998 à RFO, qui porte sur les Journalistes et les personnels techniciens et administratifs. Son coût total, qui est de 7,5 millions de francs selon la direction de RFO, dont 3,5 millions de francs pour les journalistes et 4 millions de francs pour les personnels techniciens et administratifs, reste dans les limites de l'enveloppe qui avait obtenu l'accord des tutelles.
(4) RFI
L'accord signé par les journalistes le 9 février 1998, a un coût de 2,1 millions de francs(avec charges). Pour les personnels techniciens et administratifs, le coût de l'accord signé par les syndicats est de 1,5 million de francs (avec charges). Ces montants s'inscrivent dans l'épure proposée par le Contrôle d'État, en liaison avec la tutelle.
b) Les 35 heures
Les
entreprises du secteur de l'audiovisuel public sont exclues des aides publiques
destinées aux entreprises anticipant le passage à 35 heures
avant le 1
er
janvier 2000 et doivent en conséquence financer
la réduction du temps de travail sur leurs ressources propres. Ainsi que
le prévoit la loi, les modalités d'accompagnement de la
réduction du temps de travail seront déterminées dans le
cadre des procédures régissant ses relations avec les tutelles.
On peut rappeler que les modalités d'application des directives
générales concernant la réduction du temps de travail ont
été précisées aux représentants du secteur
public audiovisuel lors d'une réunion en juillet 1998 par les
représentants de la Direction du Budget et du Service juridique et
technique de l'information.
Les principes définis par les tutelles sont les suivants :
• Prise en compte des situations réelles, des durées
effectives sur la semaine, sur l'année, réalisation d'un
état des lieux préalable à l'ouverture des
négociations.
• Toute négociation devra être encadrée par un
mandat, selon une procédure semblable à celle utilisée
pour les accords salariaux, dont le calendrier doit être homogène
pour tous les diffuseurs.
• Les négociations sur la réduction du temps de
travail devront être couplées avec celles sur les salaires, dans
l'optique d'une modération salariale.
La réduction du temps de travail devra s'accompagner d'une
évolution de l'organisation du travail et d'une amélioration des
performances économiques de l'entreprise ainsi que de la qualité
du service rendu au public. L'accord ne saurait reposer simplement sur la
hausse des subventions accordées par l'État.
Il avait été prévu qu'un état des lieux serait
établi pour préciser la durée du travail et sa
rémunération par services, fonctions, catégories, mais
aussi les règles et les pratiques en vigueur, notamment en
matière de contrôle des horaires...
La réduction du temps de travail a ainsi engagé un processus
de concertation qui s'est déroulé sur la base de ces directives
générales, suivant des modalités propres à chaque
société.
C'est ainsi que par exemple à
France 2
, ce processus a
donné lieu à la réalisation de fiches descriptives de
l'activité de chaque service de l'entreprise, sur la base desquelles a
été établi un projet économique et social transmis
aux autorités de tutelle en mars 1999.
Ce projet préconise le passage aux 35 heures sous des formes
diversifiées, la mise en place de modalités plus souples
d'organisation du travail, la redéfinition de procédures
précises en matière de fabrication des émissions, ainsi
que " le renforcement du rôle et des responsabilités de
l'encadrement et la réaffirmation des règles destinées
à favoriser la gestion des absences. ".
Ce projet ayant recueilli l'accord des autorités de tutelle, les
négociations ont pu commencer en septembre dernier.
Un processus analogue est en cours à
France 3,
à ceci
près que la négociation était compliquée par le
fait que le projet économique et social de la chaînes n'avait pas
reçu l'accord des autorités de tutelle.
Ce projet met notamment l'accent sur les points suivants :
modération salariale, amélioration de la flexibilité et de
l'organisation du travail avec, en particulier, une volonté de
rapprocher le temps de travail effectif et temps de travail utile, diminution
du recours aux emplois précaires, mise au point d'un concept de
forfaitisation annuelle des jours d'activité assorti d'une baisse des
heures supplémentaires, réflexion sur l'optimisation du processus
de production enfin, avec recherche d'une meilleure polyvalence et de la
rémunération des gains de productivité.
En attendant la délivrance du mandat de négociation, des
rencontres et des réunions de travail ont néanmoins
été organisées, en particulier, autour des cinq processus
principaux de l'entreprise que sont l'antenne, les programmes, l'information,
la production, le tertiaire et l'encadrement.
A
Radio France
, la mise au point d'un mandat de négociation sur
la base d'un état des lieux remis en novembre 1998, s'est
révélée tout aussi laborieuse entravant la capacité
de négociation de l'entreprise.
Sur le fond, compte tenu des objectifs de l'entreprise en matière de
modernisation et d'ouverture sur le numérique, des contraintes
résultant de la taille réduite d'une certain nombre
d'unités, en particulier, pour les radios locales, des rigidités
du budgétaires propres à l'entreprise, il est notamment
prévu : une nette priorité aux créations d'emplois de
journalistes et de techniciens, le rajeunissement des équipes et la
limitation du travail précaire, la réduction des heures
supplémentaires.
En ce qui concerne
Radio France internationale
, la perspective
d'application de la réduction du temps de travail s'est traduite par la
confection d'un état des lieux effectué par le cabinet Bernard
Brunhes transmis aux partenaires sociaux et d'un projet économique et
social précisant les orientations de l'entreprise en la matière.
Le processus de modernisation sur lequel vient se greffer la
négociations sur la réduction du temps de travail, s'accompagne
d'une réflexion sur les méthodes d'organisation et les modes de
production. Il est précisé que les gains de productivité
que ce processus devrait permettre de dégager, vont être en partie
absorbés par des redéploiements et en partie par la
réduction du temps de travail.
De son côté,
RFO
a signé le 30 mars 1999 avec toutes
les organisations syndicales un accord de méthode fixant le cadre
préalable à la négociation sur les 35 heures. Cet accord a
prévu une enquête de perception auprès de tous les
salariés, tandis qu'il était procédé à un
diagnostic sur l'organisation du travail. Parallèlement, un projet
économique et social a été élaboré en vue de
l'obtention d'un mandat de négociation au près des tutelles.
De même, à l'
INA
où les négociations
s'inscrivent dans un contexte économique difficile, un projet
d'état des lieux - effectué à la suite d'un débat
avec les organisations syndicales de l'institut - à été
présenté aux autorités de tutelle dans une perspective,
essentiellement défensive, de gestion à moyens constants.
Ce n'est qu'au début octobre qu'ont été
délivrés les mandats de négociation - à l'exception
de RFO. La teneur n'en est pas connue autrement que par des
indiscrétions de presse. La seule chose qui semble claire est que cet
accord s'appliquera uniquement aux personnels permanents des entreprises. En ce
qui concerne le financement, il avait été évoqué de
régler la question par le collectif pour 1999, mais l'adoption de
l'amendement susmentionné à l'article 55 obligerait à
trouver d'autres solutions pour permettre la prise en charge des
éventuelles charges immédiates consécutives à la
réduction du temps de travail.
Ce que votre rapporteur spécial peut faire remarquer, au regard des
perturbations actuelles, c'est que le processus de négociation s'engage
dans un contexte social naturellement risqué
. La fin de
l'année est toujours une période de tensions sociales fortes avec
les négociations de cadrage salariales et les commissions mixtes
paritaires.
L'attente des personnels est évidente. Il est légitime qu'il
espèrent être traité de la même façon que dans
les autres secteurs
. Si tel n'était pas le cas, cela ne pourrait que
susciter de frustrations peu propices à la nécessaire adaptation
du secteur à un environnement de plus en plus concurrentiel.
4. L'incertitude sur le financement des investissements de France télévision dans le numérique terrestre
La
France s'apprête à emboîter le pas à la
Grande-Bretagne et à la Suède et à la Norvège pour
se lancer dans le numérique terrestre, tandis que l'Allemagne et
l'Espagne amorcent également leur migration vers le tout
numérique.
Initialement circonspect compte tenu de la place du satellite et des
perspectives du câble par suite de ses capacités en termes
d'interactivité, votre rapporteur spécial estime que le
numérique terrestre constitue effectivement le vecteur d'une offre
numérique sans doute moins diversifiée que celle du satellite ou
du câble mais suffisante pour offrir une sorte de
service de
télévision numérique universel.
Dans cette perspective, il reste que la présence sur le numérique
terrestre suppose une multiplication de l'offre de programmes et une offre
complémentaire de services.
On peut penser que cette présence est moins coûteuse - au moins
directement, car il faut prendre en compte l'effet de concurrence entre le
numérique terrestre et les autres modes de diffusion numérique
terrestre - pour les opérateurs déjà bien implantés
en numérique sur le câble ou le satellite.
En revanche, pour le service public, pour lequel le numérique
terrestre constitue sans doute la dernière chance de ne pas être
progressivement marginalisé, l'atout qu'il constitue, suppose des
investissements importants.
Au moment où le vaisseau amiral du secteur public va devoir, service
public oblige, renoncer à l'exclusivité qui le liait à
TPS, le nouveau président de France Télévision joue la
carte du numérique terrestre pour relancer la télévision
publique.. Dans le cadre du Marché international des programmes de
télévision (Mipcom), il a présenté, début
octobre à Cannes, les grandes lignes de l'offre de programmes
numériques hertziens qui aura pour mission "de mieux accomplir et
développer les missions de service public de France
Télévision " .
Prenant acte de ce que, faute de moyens, la télévision publique
française a, pour ainsi dire, raté le premier train du
numérique, laissant au secteur privé un rôle de locomotive
en la matière, M. Marc Tessier ne veut pas manquer ce qu'il
considère manifestement comme la seconde et dernière chance de
France télévision.
Pour concrétiser ses ambitions, il a annoncé la création
par France 2 et France 3 d'une structure commune baptisée
France
Télévision Interactive
, qui aura pour objet de
développer tous les programmes interactifs du groupe ayant pour vocation
d'être diffusés par tous les opérateurs.
Les services et les programmes interactifs de France Télévision.
qui devraient être développés conjointement par France 2,
France 3 et la Cinquième-Arte, devraient s'articuler autour de deux axes
: le développement des sites Internet sous la marque
FranceTV.fr
,
et la télévision interactive sur les réseaux Internet
à haut débit (ADSL).
France Télévision Interactive disposerait d'une capacité
d'investissement de "
plus de 200 millions de francs sur trois
ans".
Elle devrait être dotée d'un apport en capital
qualifié " d'à la hauteur du projet ".
L'enveloppe des investissements et des coûts de fonctionnement sera
fonction de la capacité finalement allouée à France
Télévision lors de la répartition de la capacité
totale de diffusion en numérique hertzien entre les différents
opérateurs. En l'occurrence,
France Télévision
revendique l'attribution de deux multiplexes pour le secteur public
.
Ces investissements devraient être autofinancés par France
télévision au moyen de la redevance, la publicité, le
produit des applications de la télévision numérique, ainsi
que des recettes de partenariat avec les collectivités publiques, sans
oublier le produit des abonnements aux chaînes thématiques.
Le projet de développement de France télévision sur le
numérique hertzien majoritairement gratuit comportera également
une offre payante
. Le nouveau président de France
Télévision a indiqué que, si l'information " restera
dans la partie gratuite, il y a dans la partage entre l'offre en clair et
l'offre payante " une zone frontière qui reste à
définir ".
Compte tenu de calendrier prévu pour la mise en route de ce projet -
étude et préfiguration en 2000, ce qui " est compatible avec
le budget 2000 ", première dotation en capital en 2001, puis
montée en puissance de la fin 2001 à 2003 -, M. Marc Tessier a
indiqué que le projet du numérique hertzien doit être
conçu pour pouvoir être initialisé sur les autres
services ". Il a, à cet égard,
démenti les rumeurs
d'un départ imminent du capital de TPS, affirmant qu'il " n'avait pas de
projet de vente des actions de TPS "
Enfin , pour donner un contenu à son offre numérique, il a
confié à
M. Jean-Pierre Cottet
, ancien directeur
général chargé de l'antenne de France 2, coauteur avec
Gérald Emery, d'un rapport sur le numérique hertzien d'une
" mission de conseil sur le contenu éditorial des programmes et
des services de l'offre numérique du groupe ".
Votre rapporteur spécial qui estime qu'il s'agit, a priori, d'un projet
cohérent, considère néanmoins que ce pari
nécessaire sur le numérique n'est pas financé
. Cette
remarque lui paraît d'autant plus évidente qu'en Grande-Bretagne -
où il s'est rendu pour y observer la mise en place du numérique
terrestre - la question est clairement posée et fait l'objet d'un vaste
débat technique et politique, axé, chez eux, autour la
création d'un éventuel supplément de redevance
numérique.
Quelle que soit la solution qu'on y apporte
- et l'opinion de votre
rapporteur spécial qui anime un groupe de travail de la commission des
finances n'est pas faite sur le sujet
- la question du financement doit
être posée