II. LES CARENCES DES PROCÉDURES D'ÉLABORATION ET D'APPLICATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE DE L'ENVIRONNEMENT

A. L'ÉLABORATION DU DROIT COMMUNAUTAIRE DE L'ENVIRONNEMENT : DES ENJEUX MAL APPRÉHENDÉS

Les auditions menées au cours de cette mission de contrôle ont fait apparaître une triple faiblesse lors de l'élaboration du droit communautaire de l'environnement, ce qui peut ensuite entraîner des difficultés lors des phases de transposition ou d'application : les études d'impact sont lacunaires ; le délai de transposition peut apparaître déresponsabilisant ; l'approche politique des projets de législation reste parfois insuffisante. Il en résulte des difficultés importantes d'application.

1. Les études d'impact des directives : des lacunes à combler

La plupart des personnes auditionnées ont mis en évidence le caractère lacunaire des études d'impact associées aux projets de directives ou de règlements communautaires.

Il convient toutefois d'observer que des efforts réels ont été réalisés pour améliorer la qualité des études d'impact accompagnant les projets soumis au Conseil et au Parlement européen, notamment dans le cadre de l'accord interinstitutionnel « Mieux légiférer », qui souligne l'importance de la mesure préalable des conséquences financières ou administratives des projets législatifs. Cet accord interinstitutionnel prévoit également que le Parlement européen et le Conseil devront faire procéder à des analyses d'impact des amendements substantiels qu'ils proposent.

Les dispositions de l'accord interinstitutionnel « Mieux légiférer » (2003/C 321/01)
relatives aux analyses d'impact

« 27. Conformément au protocole sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité, la Commission tient dûment compte dans ses propositions législatives de leurs conséquences financières ou administratives, notamment pour l'Union et les Etats membres. En outre, les trois institutions, chacune pour ce qui la concerne, tiennent compte de l'objectif d'assurer une application adéquate et efficace dans les Etats membres.

« 28. Les trois institutions conviennent de l'apport positif des analyses d'impact pour améliorer la qualité de la législation communautaire, en ce qui concerne tant son champ d'application que son contenu.

« 29. La Commission poursuivra la mise en oeuvre du processus intégré d'analyse d'impact préalable pour les projets législatifs majeurs, en associant en une seule évaluation les analyses d'impact portant, notamment, sur les aspects économiques, sociaux et environnementaux. Les résultats de ces analyses seront mis entièrement et librement à la disposition du Parlement européen, du Conseil et du public. Dans l'exposé des motifs de ses propositions, la Commission indiquera en quoi les analyses d'impact ont influencé celles-ci.

« 30. Lorsque la procédure de codécision s'applique, le Parlement européen et le Conseil pourront également, sur la base de critères et de procédures définis en commun, faire procéder à des analyses d'impact préalables à l'adoption d'un amendement substantiel, soit en première lecture, soit au stade de la conciliation. Dans les meilleurs délais après l'adoption du présent accord, les trois institutions procéderont à un bilan de leurs expériences respectives et examineront la possibilité de définir une méthodologie commune ».

Votre rapporteur spécial a consulté quelques études d'impact récentes - au demeurant exclusivement présentées en anglais - et a pu constater leur intérêt pour présenter les différentes options possibles et le contexte de la proposition de la Commission.

Dans le cas de la proposition de directive du Parlement et du Conseil relative à l'évaluation et à la gestion des inondations en date du 18 janvier 2006, par exemple, l'étude d'impact analyse les impacts économiques et contient quelques données relatives au coût actuellement constaté dans certains Etats résultant de la production de cartes recensant les risques d'inondations. Mais le document reste assez général et souligne que le coût réel de la mesure dépendra des choix qui seront effectués par les Etats membres, raisonnement souvent retenu par la Commission.

En effet, la plupart des personnes rencontrées au sein des institutions communautaires estiment qu'une analyse plus fine de l'impact potentiel des mesures proposées sur un Etat membre particulier ne peut être menée que par l'administration de l'Etat membre, qui dispose des éléments les plus précis pour analyser ces effets.

A cet égard, la circulaire du 9 novembre 1998 relative à la procédure de suivi de la transposition des directives communautaires en droit interne rappelait la nécessité « de prendre en considération, dès le stade de l'élaboration et de la négociation des projets de directive, les effets sur le droit interne des dispositions envisagées et les contraintes ou difficultés politiques qui pourront en résulter ».

Or, les personnes auditionnées au sein de l'administration française ont indiqué que l'étude d'impact communautaire n'était pas, en règle générale, déclinée à l'échelon national, et qu'il était très difficile d'avoir une idée réelle de l'impact potentiel des mesures proposées par la Commission pour l'Etat membre, notamment d'un point de vue budgétaire.

Ceci est d'autant plus regrettable qu'environ 85 % du droit français de l'environnement a une origine communautaire (cf. infra C).

Les anciens ministres de l'écologie et du développement durable et les députés européens auditionnés ont également confirmé qu' ils n'avaient pas, au moment de l'adoption des projets de directive ou de règlement qui leur étaient soumis, une vision claire des conséquences potentielles de ce texte, en particulier budgétaires, pour le budget de l'Etat, pas plus que pour celui des collectivités territoriales éventuellement concernées.

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