UNE APPROCHE STRATÉGIQUE À CONFORTER
La proposition de règlement n'est en rien une mesure ou une réaction protectionniste . Elle s'inscrit dans un équilibre satisfaisant entre l'affirmation d'une Europe ouverte et la prise de conscience que cette ouverture ne doit pas avoir pour corollaire une naïveté préjudiciable aux intérêts stratégiques européens .
La proposition de résolution européenne élaborée par vos rapporteurs rappelle à cet égard que l'Union européenne est l'un des marchés les plus ouverts aux investissements étrangers et met l'accent sur l'intérêt que ces investissements présentent pour elle.
Dans le même temps, elle souligne qu'une concurrence loyale doit présider aux échanges internationaux, y compris en matière d'investissements et que l'Union européenne doit y veiller (1).
Elle réaffirme également que les États membres sont fondés à s'assurer que les investissements directs étrangers dans leurs entreprises ne sont pas de nature à mettre en cause la sécurité et l'ordre public et formule quelques observations sur l'encadrement des dispositifs de filtrage (2).
Enfin, la proposition de résolution européenne préconise une forte coopération européenne en matière de suivi des investissements directs étrangers dans l'Union européenne (3).
LUTTER EFFICACEMENT CONTRE LES PRATIQUES ANTICONCURRENTIELLES Y COMPRIS EN MATIÈRE D'INVESTISSEMENT
Il est proposé de souligner la nécessité de lutter contre les pratiques anticoncurrentielles y compris en matière d'investissements, en amont, dans le cadre des négociations commerciales , comme en aval, y compris en matière de marchés publics .
On relèvera à cet égard que la proposition de règlement permet aux mécanismes nationaux de filtrage de prendre en compte des situations dans lesquelles l'investisseur bénéficie d'aides d'État ou est une émanation d'un État étranger .
ASSURER UNE MEILLEURE PRÉVISIBILITÉ DES DISPOSITIFS NATIONAUX DE FILTRAGE POUR LES INVESTISSEURS ÉTRANGERS
La proposition de règlement garantit aux investisseurs étrangers une meilleure prévisibilité des dispositifs nationaux de contrôle dont le cadre procédural devra respecter certains principes en matière de délais et de voies de recours notamment.
Il serait utile de préciser à cet égard que le traitement des recours contentieux contre les décisions nationales de refus d'investissements ou les subordonnant à des conditions, doit être rapide et efficace .
Par ailleurs, la prévisibilité n'excluant pas la capacité d'appréhender des risques nouveaux ou d'identifier des éléments clés en cours de constitution dans les chaînes de valeur, il convient de relever que la liste des facteurs susceptibles d'être pris en considération dans le filtrage figurant dans la proposition de règlement n'est pas limitative. Il est en effet indispensable de laisser toute latitude à une extension du filtrage à des secteurs aujourd'hui inconnus ou non encore matures.
METTRE EN PLACE DES MOYENS COORDONNÉS DE SURVEILLANCE ET DE SUIVI DES INVESTISSEMENTS DIRECTS ÉTRANGERS EN EUROPE
Le dispositif d'échange d'informations entre les États membres et la Commission prévu par la proposition de règlement constitue une avancée. Il doit être organisé et sécurisé, et permettre une convergence d'analyse et un véritable suivi des investissements étrangers en Europe.
Veiller à ce que les échanges d'informations soient réactifs et sécurisés
La moitié des États membres ne prévoient pas de se doter d'un mécanisme de filtrage et en font même un argument d'attractivité. Or une approche efficace des enjeux stratégiques européens en matière de sécurité et d'ordre public appelle une coopération entre les États membres dont la proposition de règlement pose les principes.
Il conviendrait toutefois que soit précisé le délai de mise à disposition des États membres et de la Commission des informations demandées par l'État cible lorsque la Commission ou un État membre estime qu'un investissement est susceptible de porter atteinte à sa sécurité, à l'ordre public ou à un programme intéressant l'Union européenne. L'article 10 ne fixe en effet pas de délai contraignant en la matière mais mentionne simplement l'absence de « retard indu ».
Il est par ailleurs nécessaire de veiller à la sécurité des informations confidentielles échangées entre les États membres et la Commission, y compris relevant du secret des affaires.
Mettre en place un cadre de surveillance, d'analyse et de suivi des stratégies d'investissement dirigées vers l'Europe
Le mécanisme de coopération organisé par la proposition de règlement doit non seulement permettre l'échange ponctuel d'informations mais également servir de cadre à une analyse commune des stratégies d'investissement dirigées vers l'Europe et à un suivi de leurs évolutions.
Il apparaît indispensable qu'à partir des informations échangées entre les États membres et la Commission, le groupe de coordination dont la Commission a annoncé la création soit rapidement constitué pour procéder à une analyse, régulièrement actualisée, des intérêts stratégiques européens et des flux d'investissements directs étrangers entrant dans l'Union européenne.
Ce groupe, qui doit être pérenne, devrait également être chargé du suivi de la coopération entre les États membres et s'assurer notamment que ceux-ci ont mis en place un dispositif de déclaration des investissements directs étrangers sur leur territoire. Il constituerait en outre un cadre pour la définition d'une méthodologie commune et pourrait utilement favoriser une convergence des mécanismes nationaux de filtrage des investissements directs étrangers.
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La proposition de règlement soumise à l'examen de notre commission s'inscrit dans une démarche européenne plus vaste dont il convient de soutenir les avancées et de pousser les orientations. Ainsi en est-il par exemple de la sécurisation de l'approvisionnement en métaux rares ou de la politique de l'Union européenne, qui nécessiterait un autre rapport, consistant à faire naître des champions européens, dans des secteurs à mieux identifier, quand il est nécessaire d'atteindre une taille critique pour affronter la compétition mondiale