D. LE CHOIX DU CADRE JURIDIQUE : UNE DÉCISION COMPLEXE
Les questions relatives aux marchés publics n'ont pas été au centre de la réflexion de la mission d'information. Toutefois, cette thématique s'est inscrite dans ses travaux à propos d'évolutions récentes du droit de la commande publique liées notamment à la loi sur le tiers financement, et à travers des questionnements portés à la connaissance de la mission d'information par certains élus.
1. Quels supports juridiques pour les projets de rénovation du bâti scolaire ?
Le rapport Demarcq observait en 2020 que « Dans le parcours qui mène aux projets, une des difficultés consiste, pour une collectivité, à choisir le meilleur cadre contractuel permettant de réaliser les opérations en toute sécurité et en récoltant les bénéfices économiques et écologiques escomptés ». Cette remarque reste d'actualité.
Dans le cadre de la rénovation énergétique de leurs bâtiments, dont les bâtiments scolaires, les collectivités territoriales disposent de plusieurs outils juridiques pour assurer la réalisation de leurs projets.
- Dans le cadre des marchés publics classiques, portant sur la réalisation de travaux, l'achat de fournitures ou la réalisation d'une prestation de services, la collectivité assure elle-même le financement des travaux et la coordination des prestataires. Le maître d'ouvrage « garde une parfaite maîtrise sur chacun des prestataires » et « assume pleinement les risques financiers, juridiques et techniques »181(*). Ce type de marché public est généralement soumis à l'obligation d'allotissement, chaque lot portant sur un certain type de travaux ou de prestation. Il est aussi le plus courant.
- Les marchés globaux de performance permettent de responsabiliser le titulaire du marché sur les économies d'énergie à réaliser. Ces marchés peuvent porter sur la conception et la réalisation de travaux ainsi que sur l'entretien-maintenance des travaux réalisés, sur une certaine durée. Ils permettent de déroger à l'obligation d'allotir. Le cocontractant s'engage sur un certain montant d'économies d'énergie à atteindre ; il est sanctionné par un mécanisme de pénalités si ces objectifs ne sont pas atteints. FIN INFRA observe toutefois des réticences de la part de personnes publiques à recourir à cette formule, notamment en raison de sa complexité182(*).
Qu'il s'agisse de marchés publics classiques ou de marchés globaux de performance, la personne publique acquitte le coût des travaux au fur et à mesure de la réalisation de ceux-ci. Les économies d'énergie ne contribuent pas à ce financement, car elles interviennent après que les travaux ont été payés. Elles peuvent toutefois contribuer à alléger la charge de l'endettement lorsque la collectivité a recours à l'emprunt pour financer ces investissements.
Le rapport Demarcq relayait, à propos des marchés globaux de performance, le souhait de plusieurs personnes consultées de disposer d'un « cahier des clauses administratives générales (CCAG) approuvé par l'administration et applicable aux marchés globaux de performance, ce qui permettrait de sécuriser les élus et responsables aujourd'hui contraints de rédiger des CCAP très volumineux ». Il recommandait ainsi la mise à disposition d'un cahier des clauses administratives générales (CCAG) approuvé par l'administration et applicable aux marchés globaux de performance et la mise à jour du clausier des marchés publics de performance énergétique.
Selon la direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de l'économie, consultée par la rapporteure, « il n'est pas prévu d'élaborer et d'approuver un CCAG spécifique aux marchés globaux. En effet, la logique des CCAG vise à proposer des clauses administratives adaptées à une catégorie de prestations et non à un montage contractuel spécifique dont la caractéristique est de combiner la réalisation de travaux et l'exécution de services ». La DAJ renvoie sur ce point aux documents élaborés par les acteurs du secteur, notamment la FNCCR.
- Le marché de partenariat permet de confier à une personne privée une mission globale de conception, de réalisation, de financement et éventuellement d'entretien-maintenance d'un projet d'investissement. Le titulaire du contrat finance les travaux ; la personne publique le rembourse à compter de la réception des travaux, sous la forme d'une redevance payée en une fois ou sur une certaine durée. Le recours à ce type de contrat, dont FIN INFRA note la complexité et qui suppose de la part de la personne publique un engagement dans la durée, est très encadré : le marché de partenariat est réservé aux projets dépassant un seuil minimal, à savoir deux millions d'euros pour les contrats de performance énergétique. La personne publique doit prouver que le marché répond à un motif d'intérêt général. Plusieurs études préalables sont nécessaires, dont une étude de soutenabilité financière.
Rénovation de cinq écoles à Brest dans le cadre d'un marché de partenariat
Dans le cadre d'un marché de partenariat (marché global de performance énergétique), Brest-Métropole-aménagement (BMa) a procédé à la rénovation thermique de cinq écoles à Brest, impliquant :
- l'isolation thermique par l'extérieur (murs, toiture, sous face de planchers) ;
- le remplacement des menuiseries extérieures ;
- le raccordement au réseau de chaleur urbain ;
- la mise en place de systèmes de ventilation performants (centrale de traitement de l'air double flux...) ;
- l'installation d'éclairages LED ;
- l'installation d'un système de gestion technique centralisée (GTC) ;
- divers autres aménagements (embellissement, restauration, désamiantage, électricité, accessibilité...).
Ce marché de partenariat inclut vingt ans d'exploitation-maintenance après travaux, avec des objectifs de réduction des consommations. De fait, la baisse des consommations s'établit à :
- 37% à l'école Quatre moulins et à l'école Kerargaouyat ;
- 45% à l'école Lucie et Raymond Aubrac et à l'école Langevin ;
- 27% à l'école Hauts de Penfeld.
De manière générale, les contrats à financement privé présentent, selon FIN INFRA, l'inconvénient de générer des surcoûts par rapport aux marchés publics et aux marchés globaux de performance classiques, car lorsque le titulaire du contrat emprunte pour le financer, les conditions de prêt sont moins avantageuses que celles que les prêteurs consentent aux personnes publiques. De plus, les modifications contractuelles en cours d'exécution peuvent être coûteuses.
En revanche, ces contrats peuvent selon FIN INFRA présenter l'intérêt de diminuer l'effort budgétaire annuel en lissant le coût de l'investissement sur une longue période (habituellement 20 à 30 ans). Les projets conduits dans ce cadre peuvent être livrés avec moins de retard et présentent un risque moins élevé de dépassement des coûts que la maîtrise d'ouvrage publique. En définitive, d'après l'analyse de FIN INFRA, il convient de réserver l'usage de ces formules aux opérations de grande ampleur (par exemple la rénovation de plusieurs écoles dans un même contrat), permettant « un transfert important de risques sur les économies d'énergie ».
- Le recours au tiers financement, évoqué précédemment et rappelé ici pour mémoire, est une possibilité ouverte très récemment à titre expérimental par la loi n° 2022-222 du 30 mars 2023, afin de faciliter et d'accélérer la rénovation énergétique des bâtiments publics. Les collectivités sont ainsi autorisées, à titre exceptionnel, à recourir au paiement différé des travaux sous la forme d'un marché global de performance pour la rénovation d'un ou plusieurs de leurs bâtiments. L'investissement financier initial est assuré par un tiers financeur. Ce dispositif doit permettre aux collectivités de financer leurs travaux de rénovation en s'appuyant sur les économies d'énergie qui seront réalisées ultérieurement. Le marché de partenariat de performance énergétique, créé par la loi relative au tiers financement, présente plusieurs différences par rapport à un marché de partenariat : la personne publique reste maître d'ouvrage, aucun seuil minimal n'est prévu et la justification du recours à ce contrat pourra s'appuyer sur des éléments qualitatifs, et non pas seulement sur la dimension financière du projet183(*).
2. La prise en compte des enjeux environnementaux dans le code de la commande publique : quelles perspectives ?
Les auditions de la mission d'information ont fait émerger des interrogations sur le code de la commande publique.
Ainsi, Régions de France estime que ce cadre juridique ne permet pas aux acheteurs publics d'écarter « les matériaux et matériels produits selon des normes environnementales et sociales inférieures à celles de l'Europe ». L'association cite l'exemple de l'achat de luminaires LED ou de panneaux photovoltaïques, « produits dans des conditions sociales très défavorables, avec une électricité produite en grande partie au charbon et transportés par porte-containers ». Régions de France déplore l'impossibilité, pour les acheteurs publics, de « corriger l'avantage concurrentiel du prix par un critère européen ou français relatif aux normes environnementales et sociales »184(*).
Dans un rapport publié le 7 juillet 2022, l'Agence internationale de l'énergie (AIE) indique que la production de panneaux solaires dépendra presque entièrement de la Chine jusqu'en 2025. Un rapport de la commission des affaires économiques du Sénat faisait observer en 2021 que pour la France, la Commission de régulation de l'énergie (CRE) a évalué la part des lauréats des appels d'offres sur le photovoltaïque dont l'une des étapes de fabrication est française ou européenne à seulement 17% en 2019185(*).
Les règles d'attribution des marchés ne permettent pas d'évaluer les offres selon un critère européen ou français de normes environnementales et sociales, comme l'ont confirmé les informations transmises à la rapporteure par la direction des affaires juridiques du ministère de l'économie. En effet, « la seule circonstance que l'acheteur préfèrerait que le prestataire soit soumis à des obligations sociales et/ou environnementales ne constitue pas un besoin particulier en lien avec l'objet du marché ». L'état actuel du droit n'autorise la prise en compte des considérations environnementales dans le choix de l'attributaire que si elles sont en lien avec l'objet du marché et qu'elles ne portent pas sur la politique générale de l'entreprise (voir l'encadré ci-dessous).
Observations de la direction des affaires
juridiques du ministère de l'économie,
des finances et de la
souveraineté industrielle et numérique
« En droit français, tel que transposant directement le droit européen, le recours par un acheteur à un critère relatif au mode de production des produits composant l'offre n'est permis que si ce dernier présente un lien avec l'objet du marché et permet de définir les travaux, fournitures ou services qui font l'objet du marché186(*).
Prendre en compte les normes sociales ou environnementales en vigueur dans le pays de production reviendrait à exclure une entreprise en fonction de sa nationalité ou de son lieu de production, et non en fonction des caractéristiques de l'offre. Or, rejeter l'offre d'un pays tiers partie à un accord de libre-échange avec l'Union (comme l'Accord sur les Marchés Publics - AMP de l'OMC) enfreindrait le droit communautaire, qui prévoit que « les pouvoirs adjudicateurs accordent aux travaux, aux fournitures, aux services et aux opérateurs économiques des signataires de ces conventions un traitement non moins favorable que celui accordé aux travaux, aux fournitures, aux services et aux opérateurs économiques de l'Union187(*) ».
De la même manière, il est exclu de rejeter l'offre d'un État membre au motif que le produit, ou les matériaux de construction et les équipements proposés dans le cadre d'offres pour un marché de travaux, a été fabriqué dans un pays tiers ayant des normes sociales et environnementales inférieures aux normes européennes. Il n'est donc pas possible de modifier le code de la commande publique en ce sens puisqu'une telle modification serait inconventionnelle.
Les articles 42, 67 et 70 de la directive 2014/24/UE, respectivement relatifs aux spécifications techniques des besoins, aux critères d'attribution et aux conditions d'exécution, exigent que ceux-ci soient liés à l'objet des marchés et qu'ils ne portent pas sur la politique générale de l'entreprise. Et, comme le rappelle le considérant 97 de la directive 2014/24/UE, « la condition de l'existence d'un lien avec l'objet du marché exclut les critères et conditions relatifs à la politique générale de l'entreprise, qui ne peuvent être considérés comme un élément caractérisant le processus spécifique de production ou de fourniture des travaux, produits ou services achetés. Les pouvoirs adjudicateurs ne devraient dès lors pas être autorisés à exiger des soumissionnaires qu'ils aient mis en place une politique particulière de responsabilité sociale ou environnementale de l'entreprise ».
Il n'est donc pas loisible à l'acheteur de prendre en compte la politique générale de l'entreprise en matière sociale et de gestion de ses ressources humaines (par exemple, le niveau de salaire pratiqué, les questions d'égalité hommes-femmes ou l'attitude de l'entreprise par rapport aux considérations environnementales). Il a été ainsi jugé par la CJUE, le 18 septembre 2014, qu'un salaire minimum ne pouvait, en principe, être imposé au sous-traitant à un marché public établi dans un autre État membre. Les normes sociales d'un pays donné ne sont applicables qu'aux opérateurs économiques exerçant leur activité dans ce pays et les imposer à la fabrication de fournitures importées en provenance d'autres pays pour être utilisées à titre de consommations intermédiaires dans l'exécution de prestations de travaux, de services ou de fournitures constituerait une restriction à la libre prestation de service interdite par l'article 56 du TFUE.
De même, le Conseil d'État a censuré l'utilisation de critères relatifs à la responsabilité sociale des entreprises (décision CE, 25 mai 2018, Nantes métropole, n° 417580).
De fait, les besoins de l'acheteur s'expriment en considération d'une prestation plutôt que d'un prestataire. Au-delà du non-respect de certaines obligations légales ou de la commission de certaines fautes sanctionnées par des interdictions de soumissionner - cela ayant pour finalité d'assurer la fiabilité des opérateurs -, l'acheteur ne peut s'intéresser qu'à la capacité d'une entreprise à réaliser les prestations demandées. Autrement dit, les considérations environnementales ou sociales s'apprécient nécessairement au regard de la prestation, en lien avec l'objet du marché et, in fine, avec le besoin de l'acheteur.
L'acheteur peut ainsi prendre en compte les caractéristiques environnementales - à condition que celles-ci soient liées à l'objet du marché - au moyen, notamment, de critères de sélection des candidatures (en mentionnant, par exemple, la présence d'un label RGE dans l'appel d'offres, les références effectuées dans le cadre d'une démarche HQE...), de critères de sélection des offres (en privilégiant le recours à des matériaux biosourcés...) et de spécifications techniques (qui peuvent être issues, par exemple, de labels nationaux ou européens, ou pour l'application desquelles un certain niveau de performance est exigé, en termes de consommation énergétique, de résistance thermique...) ou de conditions d'exécution. Il est donc parfaitement possible aux acheteurs de prendre en compte de tels critères de notation notamment pour la rénovation thermique des bâtiments publics.
Les acheteurs peuvent aussi exiger, dans les spécifications techniques des cahiers des charges de leurs marchés de travaux, que soient utilisés des composants et matériaux de construction correspondant à un niveau de qualité environnementale supérieur aux normes obligatoires ou, à un moindre degré, prévoir un critère d'attribution qui permette de mieux noter les offres s'engageant à utiliser des composants et matériaux de construction présentant une qualité environnementale supérieure.
C'est d'ailleurs le sens des obligations adoptées dans le cadre de la loi dite « Climat et résilience »188(*) qui imposeront notamment de prendre en compte les caractéristiques environnementales de l'offre (et non du soumissionnaire) dans les critères d'attribution, les spécifications techniques et les conditions d'exécution des marchés publics et des contrats de concession.
La jurisprudence du Conseil d'État, dans sa décision Société Martin Fourquin, a reconnu la possibilité pour un acheteur d'imposer une localisation spécifique dès lors qu'elle était justifiée par l'objet du marché. En outre, le droit de la commande publique établit le droit à un traitement équivalent aux opérateurs économiques issus des États parties à l'AMP ou à un autre accord international équivalent auquel l'Union européenne est partie (article L. 2153-1 du CCP qui transpose l'article 25 de la directive 2014/24/UE).
Une obligation d'implantation géographique peut donc constituer une condition à l'obtention du marché, à condition que cette obligation d'implantation soit justifiée, c'est-à-dire nécessaire et proportionnée, par l'objet particulier du marché (notamment par les délais d'intervention du prestataire au regard du caractère urgent de la prestation à réaliser ou la rapidité et la sécurité des approvisionnements).
Pour que ce critère soit licite, un candidat qui s'engage à s'implanter localement en cas d'attribution du marché doit être considéré comme satisfaisant à cette obligation, au même titre qu'un candidat déjà implanté et ce critère ne doit pas être une discrimination dissimulée.
Toutefois, selon la direction des affaires juridiques du ministère de l'économie, des travaux en cours au niveau européen189(*) pourraient peut-être permettre à l'avenir de prendre en compte la sécurité des approvisionnements ainsi que des critères environnementaux pour l'achat de technologies dites « net-zéro », lesquelles comprennent notamment les panneaux photovoltaïques.
Il s'agit là d'un point de vigilance pour la mission d'information, favorable à une telle évolution tout en ayant conscience de l'enjeu budgétaire que constitue le coût de ces équipements et au risque qui résulterait, pour la transition écologique des bâtiments publics, d'un éventuel renchérissement de leur prix.
3. Les contrats de performance énergétique : quelles évolutions ?
a) Une lente montée en puissance des CPE publics
Le cadre juridique d'un CPE peut être un marché public de services ou de fournitures et services, un marché global de performance énergétique, ou un marché de partenariat.
Il prend la forme d'un contrat passé entre une maîtrise d'ouvrage, privée ou publique, qui porte le projet, et des opérateurs spécialisés dans les services énergétiques, les sociétés de services énergétiques ou les sociétés opératrices de tiers investissement (SOTI) qui le réalisent. Il a pour objectif l'amélioration de la performance énergétique d'un bâtiment par la réalisation d'investissements dans des travaux, des fournitures ou des services. Les investissements peuvent être portés, soit par le maître d'ouvrage, soit par un tiers.
À l'heure actuelle, 60% des CPE sont portés par les collectivités territoriales, dont 38,5% par les communes, 10,8% par les départements et 13,9% par les régions, la part des EPCI n'étant que de 6,3%190(*), comme le montre le schéma ci-dessous. De nombreux CPE sont signés par des communes dont la population est comprise entre 10 000 et 50 000 habitants. La progression des départements et des régions au cours des dernières années est, cependant, à souligner : ces collectivités ne représentaient respectivement que 5% et 10% du marché en 2017.
Répartition des CPE publics selon le
bénéficiaire
(Source : Observatoire national
des CPE, rapport 2022)
Toutefois, seuls 380 CPE publics ont été lancés depuis 2007, date de leur création. Leur nombre n'a progressé qu'à partir de 2012, ce qui a correspondu avec l'introduction des marchés de conception, de réalisation et d'exploitation ou de maintenance, puis des marchés globaux de performance dans la commande publique. Ensuite, leur évolution s'est stabilisée autour d'une trentaine de CPE publics signés par an.
On observe, par ailleurs, une grande hétérogénéité de la dimension des CPE : plus d'un tiers (35%) concerne un bâtiment ou un site unique (un site correspond par exemple à un lycée pouvant inclure quelques bâtiments). En revanche, les CPE portant sur plus de cinquante bâtiments ou sites représentent seulement 14% de l'ensemble. Toutefois, dans la majorité des cas, le périmètre d'un CPE englobe plusieurs bâtiments.
31% des CPE relèvent actuellement du secteur de l'enseignement, selon l'Observatoire national des CPE, qui juge cette forme de contractualisation adaptée au patrimoine immobilier public, en particulier scolaire, à l'exemple des écoles de la Ville de Paris ou des lycées en Alsace.
Dans le département des Yvelines, il est prévu dans le cadre des actions menées en faveur de la sobriété énergétique que 24 collèges bénéficient d'un CPE portant sur la rénovation du système de chauffage et de ventilation, pour 35 millions d'euros, ce qui devrait permettre de diminuer la consommation énergétique de 24%. Le département des Hauts-de-Seine a également initié des CPE dans 62 collèges, pour un retour sur investissement très favorable, avec une baisse notable de la consommation énergétique.
b) Une inégale distribution sur le territoire
Le dernier rapport de l'Observatoire des CPE, publié en novembre 2022191(*), constate une inégale distribution des 380 CPE sur le territoire. Ils sont davantage représentés dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, qui compte 104 CPE, soit plus du quart, et dans une moindre mesure dans la région Ile-de-France, où on en recense 56.
Répartition régionale des CPE publics
(Source : rapport de l'Observatoire des CPE, novembre 2022)
Ce déséquilibre s'explique, selon le dernier rapport de l'Observatoire national des CPE, par une politique volontariste des collectivités territoriales de la région Auvergne-Rhône-Alpes région et par une dynamique de réseaux qui repose sur :
- le soutien d'une association (Auvergne-Rhône-Alpes Énergie Environnement - AURAEE) en charge de l'animation d'un réseau d'acteurs publics et privés ;
- le soutien financier de l'ADEME régionale aux études préalables, notamment aux assistances à maître d'ouvrage dans le domaine de l'ingénierie) ;
- la création d'une société publique locale, la SPL OSER, qui mutualise les moyens liés à l'ingénierie.
Ainsi, le même rapport observe que « cette dynamique a contribué à créer un écosystème régional et à donner de la visibilité au marché de la rénovation en Auvergne-Rhône-Alpes. En stabilisant un cahier des charges et en ciblant des CPE de petite taille, la SPL a contribué au développement d'un tissu de PME locales compétentes et aptes à gérer des CPE sur plusieurs années. Quant aux collectivités territoriales de taille moyenne, elles ont pris connaissance des offres de la SPL en matière de rénovation et ont su s'appuyer sur cette structure pour mener des rénovations globales ambitieuses dans une logique patrimoniale ».
En conséquence, une politique plus volontariste, menée à l'échelle locale, pourrait probablement contribuer au développement des contrats de performance énergétique qui concernent pour l'instant, dans leur grande majorité (70%), des projets d'une surface supérieure à 10 000 m2.
En effet, les chiffres clés 2022 de l'Observatoire national des CPE montrent que 28% des CPE concernent des bâtiments dont la surface cumulée est comprise entre 10 000 et 50 000 m² et 29% plus de 100 000 m². À l'inverse, 18% des CPE concernent une surface inférieure à 5 000 m² ; dans cette dernière catégorie, les petites communes sont les plus concernées.
Ainsi, s'appuyer sur une structure telle que la SPL OSER, qui permet d'« industrialiser » le processus d'appel d'offres et de diminuer les coûts de transaction liés au montage et au suivi d'un projet de taille modeste semble particulièrement pertinent. Cette faculté a « permis de créer une niche pour les CPE des petites municipalités ».
* 181 INET, AFL, Comment financer la rénovation énergétique des bâtiments des collectivités territoriales ? mars 2023.
* 182 Source : communication écrite à la rapporteure.
* 183 Source : communication écrite de FIN INFRA à la rapporteure.
* 184 Réponses écrites de Régions de France au questionnaire de la rapporteure.
* 185 Où en est l'application de la loi « Énergie-Climat » ? Où en est l'objectif de « neutralité carbone » ?, rapport d'information fait au nom de la commission des affaires économiques par Daniel Gremillet (n° 553, 2021-2021), p. 48.
* 186 Article R.2152-7 du code de la commande publique.
* 187 Article 25 de la directive 2014/25.
* 188 Loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.
* 189 Le projet de règlement « net zero industry act » comporte notamment un article 19 sur la sécurité des approvisionnements dans les marchés publics : https://single-market-economy.ec.europa.eu/publications/net-zero-industry-act_en
* 190 Organismes HLM : 13,9% ; Centres hospitaliers 5% ; État 6,3% ; Universités- écoles supérieures : 4,2%.
* 191 Chiffres clés - Observatoire nationale des contrats de performance énergétique - Novembre 2022.