TROISIÈME PARTIE
LE CEREMA EST ENGAGÉ DANS
UNE IMPASSE FINANCIÈRE
I. LA RESTRUCTURATION DU CEREMA S'EST TRADUITE PAR UNE CONTRACTION EXTRÊMEMENT FORTE DE SES MOYENS
Depuis sa création, le Cerema s'est vu imposer une diminution très significative de ses moyens humains et financiers, par ailleurs extrêmement liés les uns aux autres compte tenu du poids que représente sa masse salariale dans le budget total de l'établissement.
Les premières années de l'opérateur ont été rendues extrêmement difficiles par ce contexte faute d'une véritable révision stratégique de son rôle et de ses missions. Cette situation a été très durement ressentie, allant jusqu'à provoquer une crise débouchant sur la démission du président et du directeur général de l'établissement à l'automne 2017.
Dès la fin de l'année 2017, dans son rapport spécial relatif au projet de loi de finances pour 2018, le rapporteur avait alerté sur cette situation préoccupante : « la baisse continuelle de ses moyens associée à l'absence de réflexion stratégique de l'État pour l'établissement ne pourra pas continuer indéfiniment au risque de fragiliser définitivement un opérateur au sein duquel le malaise social est palpable ».
Après cette phase de crise au cours de laquelle la pérennité même de l'établissement semblait questionnée, une réflexion stratégique a enfin été amorcée. Elle allait être traduite par le programme de restructuration Cerem'Avenir et l'ensemble des transformations structurelles qui l'ont accompagné. Observant cette évolution positive, le rapporteur notait ainsi dans son rapport spécial relatif au projet de loi de finances pour 2019 que la nouvelle direction de l'établissement semblait « avoir jeté les bases d'un projet stratégique à même de remobiliser les agents et être en mesure de faire de la contrainte financière que subit le Cerema une opportunité de transformation ».
En engageant une transformation profonde de ses missions et de son organisation, l'établissement s'est installé dans une situation moins inconfortable dans laquelle il a été en mesure de se restructurer pour parvenir à préserver ses capacités de production et son expertise avec des moyens sensiblement réduits. Cette réduction de moyens n'en a pas moins été extrêmement substantielle et, comme le soulignaient le CGEDD et l'IGA dans leur rapport de 2021, elle a largement guidé les réformes ambitieuses réalisées par l'opérateur au cours de la période recente : « ce principe cardinal de réduction continue (...) influence fortement les démarches de véritable réorganisation et de transformation du Cerema qui se sont engagées depuis 2019 ».
A. DEPUIS LA CRÉATION DU CEREMA, UNE SUBVENTION POUR CHARGES DE SERVICE PUBLIC EN « CHUTE LIBRE »
La principale ressource du budget du Cerema est constituée par la subvention pour charges de service public (SCSP) qui lui est versée chaque année par l'État. Cette subvention est retracée dans les crédits de l'action 11 « Études et expertises en matière de développement durable » du programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du budget de l'État.
Depuis sa création et jusqu'en 2022, le Cerema s'est vu imposer une diminution continue de cette subvention. Sur cette période, le montant de sa dotation a été réduit de 37 millions d'euros, soit 17 %.
Évolution de la SCSP versée au Cerema (2014-2025)
(en milliers d'euros)
Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires du Cerema
La trajectoire de baisse de la SCSP du Cerema a été infléchie à partir de 2023. En deux ans, entre 2022 et 2024, elle a ainsi progressé de 3,4 % (6,4 millions d'euros) pour atteindre 193,2 millions d'euros.
Toutefois, cette augmentation doit être relativisée du fait des mesures exogènes imposées à l'opérateur, décidées par le Gouvernement ou par son ministère de tutelle, qui ont, sur la même période, conduit à majorer significativement les charges de personnel de l'établissement. D'après le Cerema, le cumul de ces mesures représenterait ainsi plus de 10 millions d'euros par an dont 7,7 millions d'euros pour les seules augmentations du point d'indice de la fonction publique en 2022, puis en 2023.
Par ailleurs, la loi de finances pour 202540(*) et le décret d'annulation de crédits du 25 avril 202541(*) ont prévu une nouvelle diminution significative de la SCSP du Cerema. Sous réserve de nouvelles évolutions en cours de gestion, celle-ci pourrait ainsi s'établir à 187,6 millions, soit une baisse de 5,6 millions d'euros (- 2,9 %) par rapport à 2024.
Le Cerema observe que le ratio de couverture de ses charges de personnel par sa subvention ne cesse de décroître, passant de 99 % en 2020 à 83 % en 2025.
* 40 Loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025.
* 41 Décret n° 2025-374 du 25 avril 2025 portant annulation de crédits.