B. ... ELLE DEMEURE AUJOURD'HUI INSUFFISANTE

Si les capacités de rétention administrative ont été renforcées dans les années récentes, les besoins demeurent aujourd'hui importants, pour deux séries de raisons. D'une part, le parc actuel ne répond tout simplement pas à l'ensemble des besoins de placement en rétention administrative formulés par les préfectures et à la pression migratoire croissante. D'autre part, une extension du parc est nécessaire pour tirer davantage profit de l'efficacité de l'outil de la rétention en matière d'éloignement, en cohérence avec un renforcement de la lutte contre l'immigration irrégulière.

En premier lieu, si le nombre de personnes placées en rétention a diminué récemment, la pression sur les capacités d'accueil s'est en réalité accentuée. Cette évolution paradoxale tient à l'allongement progressif de la durée moyenne de rétention, qui ralentit la rotation des places et réduit mécaniquement le volume annuel de retenus. Dès lors, le renforcement quantitatif récent du parc ne suffit pas à répondre aux besoins exprimés, notamment dans les territoires fortement exposés à l'immigration irrégulière, à l'instar de l'Île-de-France. Le rapporteur spécial a ainsi pu constater que, faute de places disponibles, les préfets de zone sont régulièrement contraints d'opérer des arbitrages entre plusieurs demandes de placement émanant de différents préfets de département. Alors qu'en 2023, 2 967 demandes d'admission en CRA avaient ainsi été refusées pour cause de saturation du parc, ce nombre s'est établi à 3 624 en 2024. À la différence du système pénitentiaire, la rétention ne prévoit en effet pas de dépassement de capacité.

En second lieu, l'extension du parc apparaît comme un levier indispensable pour renforcer l'efficacité globale de la politique d'éloignement. Elle répondra à plusieurs enjeux :

- elle permettra de mieux garantir l'exécution des décisions d'éloignement, dont le nombre et le caractère exécutable devrait augmenter grâce aux dispositions prévues dans la loi CIAI, nettement enrichies par le Sénat ;

- elle est cohérente avec l'évolution du profil des retenus, souvent moins coopératifs, pour lesquels une rétention prolongée est nécessaire afin de mener à bien les démarches préalables à l'éloignement, telles que l'identification ou l'obtention d'un laissez-passer consulaire ;

- elle permettra de limiter le besoin d'arbitrer entre l'éloignabilité rapide et la dangerosité des personnes, en assurant la rétention à la fois des personnes rapidement éloignables et de celles qui le sont moins rapidement mais qui constituent une menace à l'ordre public ;

- elle répond à la pression migratoire croissante, tendance désormais structurelle à l'échelle européenne pour les années à venir, dans un contexte où le nombre de places apparaît très limité au regard des 128 250 OQTF délivrées en 2024 ;

- elle pourrait être organisée dans des conditions permettant une couverture renforcée de l'ensemble du territoire.

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