5. Compléter le dispositif existant pour aménager une " issue de secours " en faveur des cas les plus désespérés
Selon les indications fournies par la Banque de France,
les
dépôts successifs de dossiers concernant un même
débiteur ont tendance à se multiplier
: la proportion des
dossiers correspondant à un dépôt renouvelé
s'élèverait ainsi à 15 %, ce phénomène
étant imputable à la fois à une fragilité accrue
des plans élaborés, 35 % des dossiers déposés ne
présentant aucune capacité de remboursement, et à un
recours croissant à la pratique des moratoires.
Le pourcentage des plans comportant des moratoires est évalué
à environ un quart en phase amiable et à la moitié en
phase de recommandation. Les moratoires de courte durée recueillant la
préférence des créanciers (60 % sont d'une durée
inférieure ou égale à un an), cela a pour
conséquence mécanique d'entraîner un réexamen
périodique des dossiers par les commissions de surendettement. En
l'absence de véritables mesures de réaménagement de la
dette, ces moratoires ne constituent souvent qu'un simple répit, sans
apporter de solution, car il est rare que des changements favorables
interviennent pendant ce délai dans la situation du débiteur.
Or, l'évolution constatée, si elle devait se perpétuer ou,
pire, s'accentuer, ferait courir au dispositif de traitement du surendettement
un
risque d'asphyxie
de nature à compromettre son
efficacité globale, pourtant reconnue de tous. Il convient donc de
remédier rapidement à cette situation pour éviter que le
phénomène d'engorgement, à l'origine de la réforme
de 1995 concernant les juridictions, n'affecte à son tour le
fonctionnement des commissions.
Cela nécessite d'imaginer une issue définitive pour les
situations les plus désespérées. Cette
étape
ultime
devrait cependant être réservée aux cas
inextricables pour éviter les travers de la faillite civile qui
encourage la déresponsabilisation des emprunteurs. Elle ne doit pas
remettre en cause le caractère fondamentalement consensuel de la
procédure actuelle : il convient donc de souligner son caractère
résiduel.
Les conditions qui devraient être réunies pour accéder
à cette ultime étape de la procédure devraient fournir les
garanties de nature à éviter toute dérive
.
Afin qu'un même dossier ne fasse pas l'objet de dépôts
successifs résultant du seul effet mécanique de l'expiration de
moratoires de trop courte durée, une procédure de traitement des
cas les plus désespérés pourrait être
imaginée. Elle serait initiée soit, dès l'origine à
l'occasion de l'examen de la première demande en phase amiable, par la
commission de surendettement, soit, au terme du déroulement de la
procédure actuelle à l'occasion de la contestation devant le juge
des mesures recommandées, par l'une des parties.
Dans ce dernier cas, et afin d'éviter les manoeuvres dilatoires du
débiteur, une condition de recevabilité serait que
l'impossibilité de parvenir à un plan amiable n'ait pas
été la conséquence de son refus et que l'échec d'un
tel plan ne soit pas imputable à des agissements de celui-ci ayant
aggravé son endettement par la souscription de nouveaux emprunts ou par
des actes de disposition de son patrimoine.
Cette phase ultime se déroulerait sous le contrôle du juge qui,
appréciant la gravité de la situation, prescrirait un moratoire
global d'une durée qui pourrait être fixée à trois
ans. Une telle décision s'accompagnerait d'un fichage au FICP du
débiteur bénéficiaire pendant toute la durée de ce
moratoire avec obligation pour lui de répondre à un rendez-vous
annuel avec le secrétariat de la succursale de la Banque de France pour
faire le point sur sa situation.
En cas de fait nouveau consistant en une amélioration de la
solvabilité du débiteur rendant envisageable l'élaboration
d'un plan de redressement, la procédure ordinaire serait reprise au
point où elle avait été suspendue (phase amiable ou phase
de recommandation). Tout acte de dissimulation ou provoquant une aggravation
volontaire de la situation financière du débiteur emporterait
à son encontre déchéance du bénéfice de ce
dispositif.
A défaut de fait nouveau constitutif d'un retour à meilleure
fortune, le juge, au terme des trois années de moratoire, ouvrirait une
nouvelle période dont la durée pourrait être fixée
à sept ans pendant laquelle le débiteur continuerait à
faire l'objet d'un fichage au FICP et serait contraint, en fonction de
l'importance de ses revenus, à verser une somme forfaitaire,
fixée par le juge, destinée à dédommager
partiellement ses créanciers. A l'issue de cette nouvelle période
et en l'absence d'amélioration significative de la situation du
débiteur, le juge déciderait de l'effacement définitif de
ses dettes et de la liquidation de son patrimoine résiduel.
Les conditions et les conséquences d'une telle procédure
permettrait d'éviter les abus en offrant une solution ultime pour les
cas de surendettement les plus graves et les plus
désespérés, sans remettre en cause la
caractéristique fondamentale du dispositif actuellement en vigueur qui
donne la primauté à la conciliation.