II. LES MESURES RÉGLEMENTAIRES D'APPLICATION DE LA LOI ONT INUTILEMENT AGGRAVÉ LA COMPLEXITÉ DU DISPOSITIF, OCCASIONNANT AINSI ERREURS, PERTE DE TEMPS ET INCOMPRÉHENSIONS
Alors
qu'assez peu de dossiers de demande de CMU ont été reçus
et que le contrôle des ressources des anciens bénéficiaires
de l'aide médicale n'a pas encore été effectué, la
mise en oeuvre de la couverture maladie universelle a considérablement
aggravé, car elle n'en est pas la seule cause,
l'
" engorgement "
de beaucoup de caisses primaires d'assurance
maladie.
La grande complexité du dispositif législatif, renforcée
par les mesures réglementaires d'application, en est la cause
directe : la tâche des agents des caisses qui ont dû apprendre
un nouveau métier de contrôleur de ressources, a en effet
été rude.
A. BEAUCOUP DE COMPLEXITÉ INUTILE
1. Les agents des caisses ont dû apprendre deux méthodes de contrôle des ressources, une pour la CMU de base, une autre pour la CMU complémentaire
Pour être exact, ce n'est pas un mais deux nouveaux métiers qu'ont dû apprendre les agents des caisses de sécurité sociale pour mettre en oeuvre la CMU : en effet, ni les personnes prises en charge, ni la notion de " foyer ", ni les ressources prises en compte ne sont identiques pour la CMU de base et la CMU complémentaire.
a) Les " foyers " de la CMU de base et de la CMU complémentaire ne sont pas identiques
Pour le
contrôle des ressources des demandeurs de la CMU de base, la notion de
foyer fiscal s'applique le plus souvent.
Comme l'indique la circulaire DSS/5A/5B n° 2000-21 du 12 janvier 2000
" les revenus pris en compte sont ceux de l'assuré et de ses
ayants droit. De manière générale, ces revenus
correspondent à ceux du foyer fiscal ".
Il n'y a d'exception à ce principe que lorsque le foyer fiscal ne
coïncide pas avec celui de la personne affiliée et de ses ayants
droit. Dans ce cas, il appartient aux agents des caisses, soit d'additionner
les revenus fiscaux de l'assuré et de ses ayants droit, soit de
déduire du revenu fiscal de référence du foyer les revenus
correspondant à la ou aux personne(s) non ayant(s) droit.
Pour la protection complémentaire, la réglementation est
différente. Le " foyer " se compose, aux termes de l'article
R. 861-2 du code de la sécurité sociale :
- de l'auteur de la demande ;
- et de son conjoint soumis à imposition commune ou de son concubin
ou de son partenaire lié par un pacte civil de solidarité et des
personnes à leur charge
" réelle et continue "
,
à savoir :
- les enfants et autres personnes de moins de 25 ans rattachés au
foyer fiscal du demandeur, de son conjoint, concubin ou partenaire ;
- les enfants du demandeur, de son conjoint, de son concubin ou de son
partenaire vivant sous le même toit que le demandeur, âgés
de moins de 25 ans et ayant établi une déclaration de
revenus autonome ;
- les enfants majeurs du demandeur, de son conjoint, concubin ou
partenaire âgés de moins de 25 ans qui reçoivent une
pension faisant l'objet d'une déduction fiscale et dont le versement ne
fait pas suite à une décision judiciaire.
b) Les ressources prises en compte ne sont pas les mêmes
Cette
difficulté concernant la double notion de
" foyer "
répond à celle concernant le périmètre des
ressources à contrôler.
Pour la CMU de base, en effet, les ressources prises en compte correspondent
à celles qui sont énumérées au 1° du V de
l'article 1417 du code général des impôts, à savoir
le revenu fiscal de référence figurant sur l'avis d'imposition.
Eléments à prendre à compte dans
l'assiette
de la cotisation prévue
à l'article L. 380-2 du code de la
sécurité sociale
(annexe à la circulaire DSS du 12 janvier 2000
précitée)
(1° du V de l'article 1417 du CGI : montant net des revenus et plus-values retenus pour l'établissement de l'impôt sur le revenu au titre de l'année précédente, tel que pris en compte pour l'appréciation du critère d'exonération applicable en matière de taxe d'habitation).
Eléments à prendre en compte |
Source d'information |
Eléments à déduire du revenu déclaré (1) |
|
Revenu fiscal de référence (de l'assuré et ses ayants droit) : (I - II +III) |
Avis d'imposition |
Néant |
|
I. - Revenus pris en compte |
|
|
|
a) Traitements et salaires : |
|
|
|
Traitements et salaires avant tout abattement, dont
notamment :
congés payés, stages, CES, allocation de préretraite
progressive, allocation spécifique de conversion versée par
l'ASSEDIC, compléments pour les organisations internationales,
rémunérations des gérants et associés, avantages en
nature, indemnités de préavis en cas de licenciements, partie
imposable des apprentis sous contrat, indemnités journalières de
maladie maternité imposables (mais pas IF longue maladie ou accident du
travail), allocations journalières imposables (allocation chômage
partiel ou total versé par les ASSEDIC), indemnités de stage
imposables (durée supérieure à 3 mois) (mais pas les
bourses de l'enseignement supérieur).
|
Traitements et salaires avant tout abattement, tels que déclarés au cadre 1 de la déclaration n° 2042 (après déduction des cotisations de sécurité sociale). |
Déduction forfaitaire de 10 % pour frais
professionnels
(et) éventuellement déduction forfaitaire supplémentaire).
|
|
|
|
La
déduction forfaitaire supplémentaire ne peut être
supérieure à 20.000 F (30.000 F).
|
Abattement de 20 %.
|
b) Pensions, retraites et rentes : |
|
|
|
Pensions
de retraites, pensions d'invalidité, pensions alimentaires reçues
en espèce ou en nature en exécution d'obligations du code civil
(dans la limite d'un plafond de 20.480 F (20.370 F) dans le cas d'enfants
majeurs), rentes viagères à titre gratuit (à l'exception
de l'AVTS, des allocations du FSV et du FSI, des rentes viagères servies
aux victimes d'accidents du travail, des pensions militaires
d'invalidité, de l'AAH, du RMI, de l'allocation pour tierce personne).
|
Montant des pensions, retraites et rentes déclarées au cadre 1 de la déclaration n° 2042. |
Abattement forfaitaire de 10 % applicable aux retraites,
pensions et rentes viagères à titre gratuit.
|
Abattement de 20 % : calcul commun à celui mentionné plus haut. |
Rentes viagères à titre onéreux |
Montant des rentes viagères à titre onéreux déclarées au cadre 1 de la déclaration n° 2042. |
Elles ne
sont retenues que pour une fraction représentative du capital,
déterminée après l'âge du rentier lors de
l'entrée en jouissance de la rente (soit : 70 % si moins de 50
ans
|
|
c) Revenus d'activités non salariées : |
|
|
|
(Bénéfices agricoles, bénéfices des professions
industrielles, commerciales et artisanales, bénéfices des
professions non commerciales et revenus assimilés)
|
Revenus avant tout abattement, déclarés au cadre 5 de la déclaration n° 2042 au titre de l'année concernée. |
- lecture directe du revenu à retenir ;
|
|
d) Revenus fonciers : |
|
|
|
- revenus nets fonciers (loyers, fermages, parts de
SCI) ;
|
Revenus déclarés dans le cadre 4 de la déclaration n° 2042. |
- lecture directe à retenir ;
|
|
e) Revenus des valeurs et capitaux mobiliers : |
|
|
|
- y compris l'avoir fiscal ou le crédit d'impôt |
Revenus déclarés dans le cadre 2 de la déclaration n° 2042, y compris l'avoir fiscal ou le crédit d'impôt (éventuellement imprimés bancaires). |
Abattement annuel de 8.000 F pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés, et de 16.000 F pour les contribuables mariés soumis à l'imposition commune applicable exclusivement aux dividendes d'actions de sociétés françaises, aux produits de parts de SARL et EARL et aux intérêts des sommes inscrites en comptes bloqués d'associés. |
|
f) Montant des plus-values mobilières et immobilières imposables (Cessions à titre onéreux). |
|
|
|
|
Montant des plus-values mobilières et immobilières imposables déclarées au cadre 3 de la déclaration n° 2042, c'est-à-dire après application des abattements spéciaux et généraux et prise en compte du seuil de cession. |
Lecture directe du revenu à retenir. |
|
Eléments à prendre en compte |
Source d'information |
Eléments à déduire du revenu brut global
(1)
|
|
II. - Charges admises en déduction |
|
|
|
Déficits : |
|
|
|
Déficits de l'année en cours et déficits reportables des cinq années antérieures (à l'exception de certains déficits fonciers, des déficits agricoles dans certaines circonstances, des déficits d'activités non commerciales à caractère non professionnel, des déficits d'activité commerciale à caractère non professionnel. |
Déficits déclarés cadre 4 de la déclaration n° 2042 en ce qui concerne les déficits fonciers imputables, cadre 5 pour les revenus d'activité non salariaux et cadre 6 pour les déficits des années antérieures |
Montant porté sur la déclaration. |
|
Charges déductibles du revenu global : |
|
|
|
- CSG sur les revenus du patrimoine ;
|
Charges déclarées au cadre 6 de la déclaration n° 2042. |
- montant figurant sur la déclaration ;
|
|
Abattements spéciaux : |
|
|
|
- personnes âgées de plus de 65 ans ou
invalides
quel que soit leur âge ;
|
- pas d'information synthétique sur la
déclaration n° 2042 pour procéder au calcul de ces
abattements ;
|
- déduction d'une somme de 10.000 F (10.040 F) sir
le
revenu net global n'excède as 62.300 F (61.900 F) et de 5.050 F (5.020
F) si ce revenu est compris entre 62.300 F (61.900 F et 100.600 F (100.100 F).
|
|
Eléments à prendre en compte |
Source d'information |
Eléments à réintégrer |
|
III. - Réintégration de certaines charges déduites et prise en compte de certains revenus exonérés d'impôt. |
|||
a) Réintégration de certaines charges (2) : |
|
|
|
- souscriptions en numéraire au capital SA se
consacrant
au financement d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles
(SOFICA) ;
|
Charges déclarées au cadre 6 de la déclaration n° 2042 |
- montants figurant sur la déclaration ;
|
|
b) Prise en compte de certains revenus |
|
|
|
- produits de placement à revenus fixes soumis au
prélèvement libératoire ;
|
- revenus déclarés au cadre 2 de la
déclaration n° 2042 ;
|
-
montant porté sur la déclaration ;
|
(1)
Tous les seuils ou plafonds mentionnés se rapportent aux revenus de 1999
(et pour la phase transitoire, aux revenus 1998, chiffres en italique et entre
parenthèses).
(2) La réintégration de ces charges suppose qu'elles aient
été prises en compte au préalable comme charges
déductibles du revenu imposable pour le calcul de l'impôt sur le
revenu.
Pour la CMU complémentaire, le décret n° 99-1003 du 25
novembre 1999 modifiant l'article R. 762-8 du code de la sécurité
sociale a énuméré les ressources à reconstituer.
Non seulement ces ressources ne correspondent pas à celles qui sont
énumérées au 1° du V de l'article 1417 du code
général des impôts, mais des difficultés
supplémentaires résultent du fait que :
- certaines prestations sociales sont prises en compte, d'autres pas ;
- certains avantages en nature ou certaines prestations sociales font
l'objet d'une évaluation forfaitaire ;
- et plusieurs dispositions visant à prendre en
considération des changements récents dans la situation
économique ou familiale du bénéficiaire, prévoient
que certaines ressources, dans cette hypothèse, soit seront
déduites du total, soit feront l'objet d'abattements.
Pour la détermination des droits à la CMU complémentaire,
les ressources prises en compte, aux termes de l'article R. 861-4 du code
de la sécurité sociale, comprennent l'ensemble des ressources des
personnes composant le
" foyer "
, nettes de
prélèvements sociaux obligatoires, de CSG et de CRDS, y compris
les avantages en nature et les revenus procurés par des biens mobiliers
et immobiliers et par des capitaux.
Toutefois :
- ne sont pas pris en compte : l'allocation d'éducation
spéciale, l'allocation de rentrée scolaire et les primes de
déménagement, les majorations pour tierce personne, l'allocation
compensatrice pour l'emploi d'une tierce personne et la prestation
spécifique dépendance, les prestations en nature des assurances
maternité, maladie, invalidité ou accident du travail, l'AFEAMA
et l'AGED, les aides et secours versés par des organismes sociaux,
l'AJE, l'allocation spécifique d'attente, les indemnités en
capital de l'assurance accidents du travail et indemnités
complémentaires de remplacement, la prime de rééducation
et le prêt d'honneur créé par l'article R. 432-10 du code
de la sécurité sociale, les bourses d'études (sauf celles
de l'enseignement supérieur), les frais funéraires et le capital
décès, l'allocation du fonds de solidarité en faveur des
anciens combattants d'Afrique du Nord et l'aide spécifique en faveur des
conjoints survivants des membres des formations supplétives.
Sont également déduites les charges consécutives au
versement des pensions et obligations alimentaires.
En outre, certaines prestations ou avantages en nature font l'objet d'une
évaluation forfaitaire : il s'agit des avantages en nature
procurés par un logement à son propriétaire ou ceux dont
bénéficie l'occupant à titre gratuit d'un logement, des
avantages procurés par des biens mobiliers, immobiliers ou des capitaux
non exploités ni placés, ainsi que des aides personnelles au
logement.
Enfin, des dispositions spécifiques prévoient des abattements ou
déductions spécifiques en cas :
- de diminution au cours de la période de référence,
du nombre des personnes composant le foyer (régime de
déduction) ;
- de chômage total ou d'une interruption de travail
supérieure à 6 mois (abattement de 30 %) ;
- de stage de formation professionnelle ou de perception de l'allocation
d'insertion ou de l'allocation de solidarité spécifique
(abattement de 30 %).
La très grande complexité de ces règles, avec lesquelles
doivent au quotidien
" jongler "
les agents des caisses et qui
n'a pas toujours de fondement logique, est source de beaucoup de perte de temps
et d'erreurs.
2. L'évaluation des ressources sur douze mois glissants, pour les seuls salariés, empêche toute automatisation des procédures de contrôle des ressources
La
complexité ne s'arrête pas aux différentes
définitions du
" foyer "
et des ressources prises en
compte dans le cadre de la CMU. Elle résulte aussi des dispositions de
l'article R. 861-8 du code de la sécurité sociale (issu du
décret n° 99-1003 du 25 novembre 1999 précité),
qui prévoit que, pour les salariés,
" les ressources
prises en compte sont celles qui ont été effectivement
perçues au cours de la période des douze mois civils
précédant la demande ",
et non pas au cours de
l'année civile précédant cette demande.
On comprend bien la logique de cette disposition, qui vise à prendre en
considération, aussi fidèlement que possible, la situation
économique du demandeur au moment de sa demande de CMU
complémentaire.
Cependant, elle n'est utile que pour les demandeurs dont la situation a
profondément changé au cours des derniers mois
précédant cette demande, et elle fait double emploi avec les
dispositions du même article qui prévoient des déductions
et abattements en cas de chômage, de séparation ou de
décès.
En tout état de cause, elle aurait pu être réservée
aux seules personnes dont la situation avait changé en cours
d'année.
Cette disposition prévoyant un contrôle des ressources sur
" douze mois glissants "
empêche toute automatisation du
contrôle des ressources, toute référence aux
déclarations d'impôt et avis d'imposition, toute collaboration
avec les services des administrations fiscales et sociales, toute
réutilisation, par les demandeurs, de déclarations de ressources
effectuées auprès d'autres organismes que les caisses d'assurance
maladie.
Elle oblige les agents des caisses à un long travail manuel de
reconstitution des ressources, qui sera malheureusement à recommencer
chaque année sur les mêmes bases et selon les mêmes
méthodes.
Ce travail est souvent harassant, notamment lorsqu'il s'agit de se
référer à des bulletins de salaire rédigés
souvent de manière très... sommaire. Ces bulletins de salaire,
pour les personnes employées de maison auprès de particuliers ou
qui font des " petits boulots ", sont souvent au nombre de 4 ou 5 par
mois...
Voici quelques exemples de calculs effectués " à la
main " par les agents d'une CPAM :
Dossier n° 2 : Nicole, Lionel, Laurent
Ressources : de mars 1999 à mars 2000
Dossier n° 3 : Claude
Ressources : de février 1999 à février 2000
La
règle des
" douze mois glissants "
, jugée utile
par le pouvoir réglementaire pour les salariés, ne l'a cependant
pas été, ni pour les indépendants, ni pour les professions
agricoles : les articles R. 861-11 à R. 861-15 du code de la
sécurité sociale prévoient en effet, pour ces personnes,
une évaluation des ressources sur la base de l'année civile
précédant celle de la demande.
On pourrait, à première vue, en conclure que, si la tâche
n'est pas aisée pour les agents des CPAM qui travaillent sur la base des
douze mois glissants, les personnels de l'assurance maladie des
indépendants et de la MSA ont la chance de travailler sur la base de
l'année civile.
Ce serait oublier que, pour les couples comprenant un salarié et un
indépendant ou un agriculteur, le calcul des ressources doit être
effectué sur ces deux bases différentes, dans chacun des
régimes concernés...
Il est difficile de comprendre l'obstination qu'a manifestée le
ministère sur cette question, l'inutile complexité de la
règle des
" douze mois glissants "
ayant
été soulignée à plusieurs reprises par la CNAMTS
pendant toute la période de rédaction des textes
réglementaires.
Ainsi, dès le 20 août 1999, le Directeur général de
la CNAMTS, M. Gilles Johanet, avait adressé une première
lettre concernant cette question à Mme la ministre de l'emploi et de la
solidarité. Cette lettre mettait notamment l'accent sur les avantages
d'une référence aux ressources de l'année civile
précédente, et notamment de la collaboration avec la CNAF qu'elle
rendait possible.
Puis, le 12 octobre 1999, la commission de l'assurance maladie de la CNAMTS
émettait un avis défavorable au projet de décret
prévoyant la référence aux
" douze mois
glissants ".
Caisse
nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés
Commission
de l'assurance maladie
Réunion du 12 octobre 1999
Objet : décret relatif à la composition du
foyer
et à la détermination des ressources et des charges prises en
compte pour l'attribution de la protection complémentaire en
matière de santé et modifiant le Code de la
sécurité sociale (deuxième partie : décrets en
Conseil d'Etat).
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------------
--------------------------------------------------------------------------------
------------
La Commission de l'assurance maladie est appelée à se
prononcer sur ce présent projet de décret.
Caisse
nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés
Commission
de l'assurance maladie
Réunion du 12 octobre 1999
Relevé de décisions
Mais rien n'y a fait : sur arbitrage personnel du ministre, semble-t-il, le décret finalement publié a écarté la solution simple que constituait la référence aux ressources de l'année civile précédente pour l'examen des droits à la CMU complémentaire, et a retenu, pour les salariés, la référence aux " douze mois glissants " .
3. Et il faut aussi compter avec les procédures dérogatoires
Par
souci de
" simplification "
-mais cette simplification a
malheureusement plus profité aux rédacteurs des décrets
d'application qu'aux gestionnaires du dispositif CMU-,
" la
volonté des pouvoirs publics a été d'établir une
stricte identité entre les conditions d'accès au revenu minimum
d'insertion et à la couverture maladie universelle
complémentaire. "
(circulaire DEPSE/SDPS/C2000-7010 du 28
février 2000 du ministère de l'agriculture et de la pêche).
Or, il résulte des textes d'application de l'article 16 du
décret n° 88-1111 du 12 décembre 1988 relatif à
la détermination du RMI et notamment de la circulaire n° 193 de la
CCMSA du 15 décembre 1988 que, "
lorsque les conditions
d'accès au RMI pour les non-salariés ne sont pas satisfaites, le
préfet peut, à titre dérogatoire et pour tenir compte de
circonstances exceptionnelles, ouvrir un droit au RMI
".
Aussi, les textes réglementaires concernant la CMU ont imposé aux
agriculteurs assujettis au régime fiscal du réel une
procédure dérogatoire d'instruction de leurs demandes, qui sera
réalisée, non par la caisse de MSA, mais... par le préfet.
Les articles R. 861-11 et R. 861-12 issus du décret n° 99-1003
du 25 novembre 1999 précité réservent ainsi
l'admission d'office à l'examen des droits à l'attribution de la
CMU complémentaire par les caisses les demandes présentées
par :
- les personnes soumises au régime d'imposition des
bénéfices agricoles forfaitaires mettant en valeur une
exploitation dont le dernier bénéfice agricole forfaitaire connu
est inférieur à 1.030 fois le SMIC (41.942 francs) ;
- et les personnes relevant de l'impôt sur le revenu dans la
catégorie des BIC et/ou des BNC dont le dernier chiffre d'affaires hors
taxe annuel est inférieur aux limites fiscales du régime
micro-entreprises.
En conséquence de l'idée encore trop répandue selon
laquelle les exploitants agricoles soumis au régime d'imposition des
bénéfices agricoles au réel ou transitoire ainsi que les
membres des sociétés soumises à l'impôt sur les
sociétés sont nécessairement
" plus riches "
que ceux qui sont au forfait, elles ne sont pas visées par l'examen
direct des conditions d'accès à la CMU complémentaire.
Il appartient ainsi au préfet (et non à la caisse), à
titre dérogatoire d'accorder, après évaluation des
ressources, le bénéfice de la CMU complémentaire aux
intéressés (article R. 861-13 du code de la
sécurité sociale).
Selon les départements, l'application de ces textes complexes est plus
ou moins difficile. Selon les gestionnaires du régime agricole
rencontrés par votre rapporteur, le préfet donne parfois une
grande liberté d'instruction à la caisse. Mais, dans d'autres
préfectures ou sous-préfectures, il est procédé
à un examen très attentif des dossiers, ce qui implique de
nombreuses demandes d'information adressées aux caisses de MSA, beaucoup
de perte de temps, et parfois aussi beaucoup d'incompréhension de la
part des bénéficiaires potentiels de la CMU imposés au
réel. Il a même fallu, pour que tous les préfets acceptent
d'accorder des dérogations que le ministère publie une
circulaire...
Circulaire DEPSE/SDPS/C2000-7010 du 28 février
2000
du
ministère de l'agriculture et de la pêche
Objet : conditions d'accès à la CMU
complémentaire - Interprétation de l'article R. 861-13 du
code de la sécurité sociale
" L'article R. 861-13 prévoit un système dérogatoire,
placé sous la responsabilité des préfets de
département, ouvert aux personnes qui lors d'une première
instruction de leur dossier se sont vu refuser l'accès à cette
couverture complémentaire.
" La question peut se poser de savoir si ce dispositif dérogatoire
est ouvert aux exploitants agricoles assujettis au régime fiscal du
réel.
" La volonté des pouvoirs publics a été
d'établir une stricte identité entre les conditions
d'accès au revenu minimum d'insertion et à la couverture maladie
universelle complémentaire.
" (...) Les exploitants agricoles soumis au régime d'imposition au
réel, dans la mesure où ils ne remplissent pas toutes les
conditions définies à l'article R. 861-11 mais que leurs
ressources sont inférieures au seuil,
peuvent faire valoir qu'ils se
trouvent dans une situation particulière et prétendre à
faire examiner leur demande par vos soins.
" J'attire votre attention sur le fait que cette admission à
l'examen de leur dossier repose sur le même principe que celui qui a
été fixé dans le cadre de la réglementation
afférente au RMI.
" Or, conformément à l'esprit de la loi du 1
er
décembre 1988 relative au revenu minimum d'insertion et en l'état
actuel des textes réglementaires, ces mêmes exploitants peuvent
voir leur dossier examiné par les commissions de dérogation qui
ont été mises en place.
Le Directeur des Exploitations
de la Politique sociale et de l'Emploi
Christian Dubreuil
Ces inégalités de traitement en ce qui concerne la
procédure d'instruction des demandes de CMU complémentaire
s'ajoutent à celles que l'on peut constater en ce qui concerne la CMU de
base pour les indépendants.
Ces inégalités, prévisibles compte tenu de la
rédaction du projet de loi, avaient été
dénoncées par votre rapporteur au cours de sa discussion en
séance publique, sans que celui-ci ait bénéficié
d'une écoute particulière de la part du Gouvernement.
Ainsi, pour le régime agricole, les règles d'affiliation au
régime de la CMU ou au régime agricole se basent sur des
critères différents qui feront qu'à revenu égal,
deux personnes seront redevables de cotisations d'un montant différent.
La loi prévoit en effet que les bénéficiaires de la CMU
seront redevables d'une cotisation lorsque leurs ressources dépasseront
un certain plafond fixé par décret.
Or, l'assujettissement auprès de la MSA ne se fait pas sur un
critère de revenu mais sur un critère de surface d'exploitation.
En effet, selon les dispositions du code rural, relèvent du
régime agricole toutes les personnes qui dirigent une exploitation d'une
dimension au moins égale à une demi-SMI (surface minimum
d'installation), et ce, même si leur revenu est faible.
Il apparaît donc que les personnes dirigeant une exploitation dont la
surface est supérieure à une demi-SMI relèveront du
régime agricole pour ce qui est de leur couverture maladie et devront
verser une cotisation auprès de la MSA selon les règles en
vigueur actuellement, et ce, qu'elles disposent de plus ou moins de 3.500
francs par mois.
Les personnes dirigeant une exploitation inférieure à une
demi-SMI et sans autre activité relèvent, quant à elles,
du régime de la CMU sans devoir acquitter de cotisation si elles
disposent d'un revenu inférieur à 3.500 francs par mois.
Un problème d'équité se pose donc. Pour
bénéficier d'une couverture maladie, une personne dont le revenu
est inférieur à 3.500 francs par mois se verra dans l'obligation
d'acquitter ou non une cotisation, selon la taille de l'exploitation qu'elle
dirige, et donc selon qu'elle est affiliée ou non au régime
agricole.
4. Les formulaires sont impossibles à remplir sans assistance, car peu clairs et parfois erronés ou incomplets
70 % des dossiers transmis dans une caisse d'assurance
maladie
visitée par votre rapporteur s'avèrent incomplets :
plusieurs rendez-vous avec la grande majorité des demandeurs sont ainsi
nécessaires au cours desquels les agents des caisses doivent fournir des
explications supplémentaires.
Cette perte de temps s'explique par l'insuffisante clarté, et parfois le
caractère erroné, ou incomplet, des formulaires administratifs de
demande.
Quelques exemples :
• Quelle est la différence entre
" revenus
perçus en France, hors de France ou versés par une organisation
internationale "
(formulaire Cerfa n° 11420*01,
déclaration de ressources CMU complémentaire) et
" ressources perçues en France, (hors de France) ou
versées par une organisation internationale "
(formulaire Cerfa
n° 11419*01, déclaration de ressources CMU de base) ?
• Que signifie, pour un demandeur non assisté, les
mentions :
" Période(s) de référence :
du.... au... ou année civile.... "
figurant en tête du
formulaire Cerfa n° 11420*01 ?
• Pourquoi la fiche explicative du document Cerfa n° 11420*01
indique-t-elle que la rubrique n° 6 de la déclaration de
ressources, consacrée aux prestations familiales et sociales, ne doit
pas être remplie par le demandeur, alors qu'elle doit l'être
(
" Cette rubrique sera complétée par la caisse
d'assurance maladie "
) ?
• Pourquoi cette même fiche explicative indique-t-elle que
l'aide personnalisée au logement, l'allocation logement sociale et
l'allocation logement familiale
" ne sont pas prises en
compte "
dans le calcul des ressources, alors que l'article R. 861-7
du code de la sécurité sociale dispose qu'elles sont bien
incluses dans ce calcul à titre forfaitaire (12 % du montant du RMI
lorsque le foyer est composé d'une personne, et 14 % du montant du
RMI fixé pour 2 ou 3 personnes lorsque le foyer est composé de 2
ou 3 personnes) ?
• Comment les agents des caisses peuvent-ils apprécier
" les avantages en nature procurés par un logement "
occupé, soit par son propriétaire ne bénéficiant
pas d'aide personnelle au logement soit, à titre gratuit, par les
membres du foyer du demandeur, l'imprimé de déclaration des
ressources ne comportant aucune question sur ce thème ?
Or l'article R. 861-5 du code de la sécurité sociale
prévoit que ces avantages sont évalués, de manière
forfaitaire, selon des valeurs identiques à celles qui sont
prévues pour les aides au logement.
B. CETTE COMPLEXITÉ EST SOURCE D'ERREURS, D'INCERTITUDES ET INCOMPRÉHENSIONS
La
complexité du dispositif CMU a contribué à
l'
" engorgement "
des CPAM, constaté depuis le
début de l'année 2000.
Certes, il n'est pas anormal que la mise en oeuvre d'une réforme telle
que la CMU s'accompagne de quelques dysfonctionnements, au moins en
début de période.
Il est cependant frappant que tous les organismes, institutions ou syndicats
rencontrés par votre rapporteur aient, chacun pour ce qui les concerne,
donné des exemples d'erreurs ou de dysfonctionnements qui apparaissent
comme très fréquents.
Et il est certain que, malgré le faible nombre de
" nouveaux "
dossiers CMU déposés dans les CPAM,
cette complexité a contribué à aggraver leur
" engorgement "
, occasionnant ainsi un grand retard dans le
remboursement des dépenses de soins engagées par l'ensemble des
assurés sociaux.
1. Quelques exemples d'erreurs, incertitudes et incompréhensions
Envoi
de la CPAM du Val-de-Marne
Envoi de la CPAM de l'Essonne
Difficultés rencontrées par la mutuelle X avec la couverture
maladie universelle
" A ce jour, dans la gestion quotidienne des
bénéficiaires de la CMU, nous avons rencontré quelques
difficultés et notamment avec les Caisses primaires d'assurance maladie,
soit :
" Certaines CPAM refusent de délivrer à des
assurés sociaux une attestation CMU : l'assuré social est
informé qu'il relève bien du dispositif CMU mais la CPAM ayant
connaissance d'un organisme complémentaire pour ce dernier, elle demande
à l'assuré de résilier son contrat mutualiste et alors,
seulement, elle délivrera l'attestation CMU.
" Deux cas de figures se présentent :
" - la CPAM essaye de persuader l'assuré de confier à
son centre de sécurité sociale la gestion de la part
complémentaire ;
" - il y a confusion dans les termes employés car par
radiation du contrat mutualiste, la CPAM veut en fait une radiation du
système Noémie qui est un système de
télétransmission des prestations entre la CPAM et la mutuelle.
" Dans les deux cas, nous sommes confrontés à un mutualiste
angoissé et nous devons alors prendre contact avec la CPAM afin de
solutionner le dossier de cet adhérent dans les meilleurs délais.
" Les assurés sociaux demandeurs de la CMU nous
témoignent d'un accueil difficile dans les CPAM car ils sont
confrontés à un manque d'information évident de la part
des agents qui les reçoivent. Ces mutualistes sollicitent alors la
mutuelle et nous font part de leurs angoisses et nous demandent de
l'aide : nous devons alors prendre contact avec la CPAM en
présence du mutualiste afin de le rassurer.
" Les CPAM ne tiennent pas compte des situations d'urgences
évidentes qui nécessitent une prise en charge immédiate
à la CMU comme le prévoient les textes de la loi et attendent
jusqu'à 3 mois pour délivrer l'attestation CMU définitive
(alors qu'elles doivent au moins délivrer une attestation provisoire et
immédiate au guichet) : là encore, nous sommes face à
un adhérent angoissé qui demande notre aide. Nous intervenons
alors auprès de la CPAM.
" Dans le département 93, environ 5.000 assurés
sociaux ont reçu une attestation CMU qui a été
délivrée par erreur (erreur dans le calcul des ressources par les
CPAM). Ces assurés ont bénéficié du dispositif
depuis au
moins 2 mois : qui prend en charge la part
complémentaire pendant cette période ?
" Dans certains cas, on reçoit des attestations CMU sur
lesquelles n'apparaît pas la famille qui est également
bénéficiaire de la CMU : on doit alors prendre contact avec
la CPAM pour obtenir des compléments d'informations.
" Néanmoins, la CPAM ne délivrant pas une nouvelle
attestation rectifiée à l'assuré, nous devons lui
conseiller de faire la démarche auprès de son centre de
sécurité sociale afin que la famille ne soit pas
pénalisée au moment des soins.
" Pour les concubins qui ont un contrat mutualiste en commun, les deux
demandes sont faites en même temps à la CPAM et les
attestations
arrivent séparées et à deux dates
différentes chez ces assurés : nous sommes alors
obligés de séparer les concubins et leur constituer pour chacun
un contrat mutualiste dans le cadre de la CMU.
" En attendant la mise en place d'une procédure de tiers
payant entre les CPAM, les organismes complémentaires et les
professionnels de santé, les CPAM gèrent à la fois le
paiement de la part obligatoire et celui de la part
complémentaire : certains adhérents nous adressent des
décomptes de sécurité sociale sur lesquels nous constatons
que la CPAM n'a réglé que la part obligatoire ou qu'elle n'a pas
réglé le forfait (dentaire et optique).
" Pendant cette période transitoire pendant laquelle les CPAM
règlent la part complémentaire, nous avions déjà
adressé une carte de mutualiste à un certain nombre
d'adhérents qui sont devenus bénéficiaires de la CMU.
N'ayant pas d'explication sur l'utilisation de l'attestation CMU auprès
des professionnels de santé, ils ont continué à utiliser
leur carte mutualiste pour bénéficier du tiers payant. La
mutuelle a donc réglé ces prestations à la place des CPAM.
" Dans notre fichier d'adhérents, nous avons des personnes
qui sont enregistrées comme bénéficiaires d'une aide
médicale départementale antérieurement au
1
er
janvier 2000. Ces derniers auraient dû recevoir une
attestation CMU provisoire. Certains continuent de payer une cotisation et
perçoivent des prestations et d'autres ont leur contrat suspendu pendant
cette période d'AMG, alors qu'ils pourraient bénéficier du
dispositif CMU comme le prévoit la loi.
" Certains pharmaciens et professionnels de santé
conventionnés avec la sécurité sociale (centres de
santé, dentistes, généralistes, etc.) refusent
systématiquement les patients munis d'attestation CMU ou leur demandent
d'acquitter leurs soins, ce qui génèrent que certains
assurés refusent
aujourd'hui la CMU et choisissent de rendre
à la CPAM leur attestation CMU malgré leur situation de
précarité.
" Certains dentistes ou orthodontistes établissent des devis
de travaux dentaires sur la base de tarifs supérieurs à ceux
définis par l'arrêté préfectoral et ce, bien que le
patient ait présenté son attestation CMU.
" Pour conclure, nous ajouterons qu'il existe un véritable manque
d'information pour les assurés sociaux mais également pour les
associations qui sont sur le terrain et qui sont confrontées aux
populations précaires.
" C'est une telle évidence que ces dernières ont
sollicité la mutuelle à différentes reprises afin
d'organiser des sessions d'information sur la CMU sur la base d'un support que
nous avons nous-mêmes constitué.
" On constate bien que pour les assurés sociaux mais
également pour le tissu associatif, la mutuelle a une place importante
dans le dispositif CMU et devient un " référent " en
matière d'accompagnement dans les démarches. "
Lettre du directeur général de l'assurance maladie de Seine-Saint-Denis
La
complexité est source d'incompréhensions. Il en est ainsi, par
exemple, en matière de prestations familiales, lorsque l'agent de la
caisse fait part au demandeur de la CMU complémentaire de la
nécessité de déclarer ces prestations, alors que le
contraire est écrit sur le formulaire de demande.
Il en est également ainsi pour les personnes âgées qui, de
toute bonne foi, ne déclarent pas qu'elles perçoivent le minimum
vieillesse, la fiche explicative du formulaire de demande faisant
référence à la déclaration d'impôts comme
élément utile à fournir à l'appui de la
déclaration de ressources, et ces personnes n'allant pas jusqu'à
lire la rubrique 9 qui précise qu'il faut déclarer toutes les
pensions et rentes, imposables ou non.
Il en est évidemment le plus souvent ainsi pour toutes les personnes
percevant le minimum vieillesse ou l'allocation aux adultes handicapés
qui ont cru comprendre que le plafond de ressources était de
3.500 francs et qui le dépassent de ... 40 francs, perdant ainsi le
droit à la CMU.
Il en est ainsi, enfin, pour les personnes dont les ressources sont
inférieures au plafond, mais qui ne bénéficieront pas pour
autant de la CMU du fait de la prise en compte forfaitaire de
l'
" avantage logement "
que constitue la
propriété ou l'occupation à titre gratuit. Dans ces cas,
le formulaire de demande de la CMU ne comportant aucune rubrique
consacrée au logement, c'est à l'agent de la caisse qu'il revient
de téléphoner au demandeur, lui demander ces renseignements et
lui annoncer ensuite la mauvaise nouvelle...
2. La mise en oeuvre de la CMU a contribué à d'importants retards dans le traitement des feuilles de soins
Là aussi, l'alerte avait été donnée
dès l'automne : au mois de novembre, l'association des
élèves et anciens élèves du CNESS (AECNESS) avait
voté une motion mettant l'accent sur les difficultés à
attendre, au sein des caisses, compte tenu de la complexité du
dispositif CMU.
Cette motion relayait les propos tenus en séance publique par le
rapporteur de votre commission lors des débats sur le projet de loi
instituant la CMU : il avait en effet, à maintes reprises,
insisté sur les difficultés du
" nouveau
métier "
que devraient apprendre les agents des caisses dans
des délais très brefs.
Opérant une déconnexion entre le paiement de cotisations et le
bénéfice des prestations, mettant en place un contrôle des
ressources jamais vu jusque là en assurance maladie, la CMU a
exigé de ces agents une véritable
" révolution
culturelle ".
Devant affronter, malgré le faible nombre de
" nouveaux "
CMU-istes, une augmentation de la
fréquentation des guichets de 30 à 50 %, devant assister les
demandeurs dans leurs démarches administratives... et aussi supporter
les récriminations de tous ceux qui estimaient avoir droit à la
CMU mais dont les ressources avaient finalement été jugées
supérieures au plafond, les agents des caisses ont accompli un travail
remarquable et fait preuve de beaucoup de patience, d'autant plus remarquable
que leur niveau de vie n'est pas toujours très supérieur à
celui des bénéficiaires de la CMU...
Fin janvier, compte tenu des conséquences des changements de
système informatique, de l'augmentation de la charge de travail
résultat des épidémies de fin d'année et de la mise
en place de la CMU, 10 millions de feuilles de soins étaient en
souffrance dans les CPAM, qui avaient accueilli 500.000 personnes dans le
courant du seul mois de janvier.
A la CPAM de Paris, la fréquentation des guichets a été,
du 3 janvier au 14 avril, de 584.580 personnes, dont 17,6 % de visites au
titre de la CMU ayant pour objet soit des demandes d'informations
(26,6 %), soit des demandes de mise à jour de la carte Vitale (pour
passer des droits liés à l'aide médicale à la CMU
(31,6 %), soit de nouvelles demandes d'attestation CMU (le plus souvent
à la suite d'une perte) (21,2 %), soit encore des demandes de
dossiers d'attribution de la CMU (22,6 %).
CMU -
Accueil centres
au 14.04.200
|
Accueil total |
Dont CMU % |
Demandes Infos (1) |
MAJ Vitale (1) |
Attestation CMU (1) |
Primo-demandeurs (1) |
|||||
Semaine 1 03-07/01 |
38.958 |
8.416 |
21 % |
2.453 |
29 % |
2.118 |
25 % |
1.515 |
18 % |
1.898 |
22 % |
Semaine 2 10-14/01 |
45.685 |
10.176 |
22 % |
2.879 |
28 % |
4.003 |
39 % |
2.451 |
24 % |
2.144 |
21 % |
Semaine 3 17-21/01 |
44.666 |
9.388 |
21 % |
2.416 |
25 % |
3.277 |
35 % |
2.413 |
25 % |
1.924 |
20 % |
Semaine 4 24-28/01 |
43.659 |
9.081 |
20,7 % |
2.354 |
25,9 % |
2.902 |
31,9 % |
1.905 |
20,9 % |
1.931 |
21,2 % |
Semaine 5 31/01-04/02 |
36.684 |
6.695 |
18,3 % |
1.667 |
24,9 % |
2.276 |
34 % |
1.476 |
22 % |
1.383 |
20,7 % |
Semaine 6 07-11/02 |
42.219 |
8.309 |
19,6 % |
1.851 |
22,2 % |
2.986 |
35,9 % |
1.780 |
21,4 % |
1.775 |
21,3 % |
Semaine 7 14-18/02 |
39.533 |
7.303 |
18,5 % |
1.780 |
24,3 % |
2.425 |
33,3 % |
1.586 |
21,7 % |
1.580 |
21,7 % |
Semaine 8 21-25/02 |
38.134 |
7.030 |
18,4 % |
1.637 |
23,3 % |
2.299 |
32,7 % |
1.531 |
21,8 % |
1.643 |
23,3 % |
Semaine 9 28/02-03/03 |
39.281 |
6.465 |
16,4 % |
1.689 |
26,1 % |
1.884 |
29,1 % |
1.402 |
21,7 % |
1.550 |
24 % |
Semaine 10 06-10/03 |
38.527 |
6.117 |
15,9 % |
1.660 |
27,1 % |
1.775 |
29 % |
1.284 |
21 % |
1.460 |
23,9 % |
Semaine 11 13-17/03 |
36.359 |
5.314 |
14,6 % |
1.539 |
29 % |
1.541 |
29 % |
1.020 |
19,2 % |
1.228 |
23,1 % |
Semaine 12 20-24/03 |
35.842 |
4.958 |
13,8 % |
1.344 |
27,1 % |
1.308 |
26,4 % |
931 |
18,8 % |
1.380 |
27,8 % |
Semaine 13 27-31/03 |
36.226 |
4.753 |
13,1 % |
1.389 |
29,2 % |
1.318 |
27,7 % |
952 |
20 % |
1.126 |
23,7 % |
Semaine 14 03-07/04 |
36.042 |
4.715 |
13,1 % |
1.391 |
29,5 % |
1.326 |
28,1 % |
819 |
17,4 % |
1.191 |
25,2 % |
Semaine 15 10-14/04 |
32.765 |
4.219 |
12,9 % |
1.322 |
31,3 % |
1.064 |
25,2 % |
809 |
19,2 % |
1.059 |
25,1 % |
CUMUL |
584.580 |
102.939 |
17,6 % |
27.371 |
26,6 % |
32.502 |
31,6 % |
21.874 |
21,2 % |
23.272 |
22,6 % |
(1)
Une même personne peut solliciter
plusieurs démarches (attestation + MAJ)
dossiers constitués et transmis à la fonction CMU au cours
de la 15
ème
semaine : 633
Cumul année : 14.831
Dont 195 Base seule
Dont 2.432 Base + complémentaire
Dont 11.098 Complémentaire seule
Accords notifiés : 8.032
Refus : 804
AIDE MÉDICALE ETAT
Cumul Activités Permanences d'Accueil
Personnes reçues : 12.889
Accords AME : 5.883
Refus AME : 324
Les données fournies par la CNAMTS sont cohérentes avec celles de
la CPAM de Paris.
Ainsi, au 24 mars 2000, l'ensemble des CPAM avait accueilli, chaque semaine
(moyenne sur les 4 dernières semaines), 105.737 personnes venant
demander les renseignements ou déposer des dossiers.
Demandes de renseignements |
Par semaine (*) |
|
et dépôts de dossiers |
Nombre |
Structure |
Total |
105.737 |
100 % |
Par nature de contrat |
|
|
Physique |
57.809 |
55 % |
Téléphone |
28.541 |
27 % |
Courrier |
13.462 |
13 % |
Par motif de contact |
|
|
Simple renseignements |
75.054 |
71 % |
Rens. aux basculés |
20.876 |
20 % |
Rens. autres assurés |
54.178 |
51 % |
Remplissage de dossiers |
30.683 |
29 % |
(*)
moyenne sur les quatre dernières semaines
Pendant la même période, le nombre d'équivalents temps
plein, dans les caisses primaires, affectés à la CMU (à
l'accueil ou pour d'autres fonctions) s'établissait entre 2.316 et 2.626.
CMU
Equivalents temps plein affectés directement
à la CMU
CPAM Métropole
|
Effectifs ETP |
|
Structure |
||||
|
Semaine du 20 au 24/03/00 |
Semaine du 13 au 17/03/00 |
Semaine du 31/01 au 04/02 |
|
Semaine du 20 au 24/03/00 |
Semaine du 13 au 17/03/00 |
Semaine du 31/01 au 04/02 |
Total |
2.316 |
2.359 |
2.626 |
|
100 % |
100 % |
100 % |
A l'accueil |
1.049 |
1.091 |
1.331 |
|
45 % |
46 % |
51 % |
Aux autres fonctions |
1.267 |
1.269 |
1.295 |
|
55 % |
54 % |
49 % |
Les
retards importants dans le traitement des dossiers qui ont
résulté de cet accroissement significatif d'activité ont
nécessité des mesures urgentes.
Ainsi, la CPAM de Paris a décidé de fermer ses guichets et de ne
plus recevoir d'appels téléphoniques les 20 et 27 avril, 4, 11et
18 mai.
Surtout, de nouveaux personnels ont dû être recrutés.
A cet égard, le ministère de l'emploi et de la solidarité
a adressé la réponse suivante aux nombreux parlementaires qui
avaient fait part de leur inquiétude quant aux conséquences de
l'engorgement des CPAM sur la qualité du service rendu aux
assurés sociaux et aux nombreux professionnels de santé en
attente de paiement des tiers payants :
" Le ministère de l'emploi et de la solidarité est
très attentif à ce que les caisses disposent des moyens
nécessaires pour assurer leurs missions, dans le respect des principes
de bonne gestion des ressources publiques et d'une gestion performante du
service public. Dans ce contexte, et pour tenir compte de
l'événement particulier que constitue la mise en oeuvre de la
couverture maladie universelle (CMU), l'Etat a donné son accord
dès cet été pour anticiper des embauches qui normalement
auraient dû être discutées dans le cadre de la nouvelle
convention d'objectifs et de gestion pour la période 2000-2002. La
commission de gestion administrative de la Caisse nationale de l'assurance
maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) s'est prononcée le 18
octobre 1999 en faveur de 1.400 embauches. L'Etat a donné son accord
à ces embauches. Par ailleurs, au vu des premières charges de
travail liées au démarrage effectif de la CMU, cette commission a
donné, le 1
er
février 2000, un avis favorable à
l'attribution de moyens supplémentaires aux caisses pour la mise en
oeuvre de la CMU et permettre ainsi la résorption du solde de dossiers
en instance dans les caisses. Par lettre du 11 février 2000, l'Etat a
approuvé cette décision qui prévoit la création de
600 emplois pérennes, dont environ 500 emplois-jeunes et 2.000 mois de
contrats à durée déterminée
(CDD). "
Votre commission souhaiterait connaître les conditions financières
de régularisation de ces créations d'emploi.
Elle estime également difficilement compatibles la nature des
tâches auxquelles seront affectés les 500 emplois-jeunes
recrutés (guichet, liquidation..) avec la philosophie qui a
inspiré l'institution des emplois-jeunes, à savoir la promotion
de nouveaux emplois.
Il lui semblerait spécieux de considérer qu'au motif que la CMU
constitue une rupture dans notre système d'assurance maladie, les
personnels recrutés pour sa mise en oeuvre relèveraient de droit
du programme " nouveaux services, nouveaux emplois "...