DEUXIÈME PARTIE
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LES DIFFICULTÉS DE FONCTIONNEMENT
DES
CAISSES D'ALLOCATIONS FAMILIALES
Les
caisses d'allocations familiales de la région parisienne ont
rencontré, au cours de l'année 1999, des difficultés de
fonctionnement considérables qui ont conduit à une
dégradation sensible du service offert aux allocataires.
La presse s'est faite largement l'écho de ces difficultés qui
prenaient la forme de files d'attente interminables aux guichets, de retards
considérables dans les réponses aux courriers et le traitement
des dossiers. Certains articles de presse ont même évoqué
des caisses
" au bord de la rupture de paiement ".
Interrogée lors de son audition par notre commission, le 13 octobre
1999, à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour 2000, Mme Nicole Prud'homme,
Présidente du conseil d'administration de la CNAF, déclarait que
ces difficultés étaient en voie de règlement.
Pourtant, moins de deux mois plus tard, le 6 décembre 1999, elle
demandait au Gouvernement, au nom du conseil d'administration de la CNAF, un
accroissement des moyens humains dont dispose la branche famille, sous la forme
de 1.100 emplois supplémentaires.
Cette demande intervenait ainsi quelques jours après l'adoption en
lecture définitive par l'Assemblée nationale du projet de loi de
financement de la sécurité sociale pour 2000.
Parallèlement, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la
solidarité, chargeait l'Inspection générale des affaires
sociales (IGAS) d'étudier la nature des difficultés persistantes
rencontrées par les CAF, d'analyser les éventuels
problèmes d'adéquation entre les moyens et la charge de travail
et, enfin, de proposer des mesures correctrices aux dysfonctionnements
observés.
Dans ce contexte, MM. Charles Descours, Jacques Machet et Alain Vasselle,
rapporteurs des lois de financement de la sécurité sociale, ont
jugé nécessaire d'utiliser leurs prérogatives de
contrôle sur pièces et sur place afin de mieux mesurer
l'étendue et les conséquences des difficultés de
fonctionnement que connaissaient certaines caisses d'allocations familiales.
Désireux de se rendre compte de la réalité de la situation
" sur le terrain ", les rapporteurs se sont déplacés
à la CNAF le 26 janvier dernier. Ils ont pu y rencontrer Mme Nicole
Prud'homme, présidente, qui représente la CFTC au conseil
d'administration, et M. Diépois, Vice-président,
représentant le MEDEF, puis notre collègue Claude Huriet,
président du conseil de surveillance, et, enfin, Mme Annick Morel,
directrice, entourée de son équipe de direction. Cette visite
à la CNAF avait été précédée de
l'envoi d'un questionnaire particulièrement exhaustif.
Les rapporteurs se sont ensuite rendus dans trois caisses d'allocations
familiales : à Evry, dans l'Essonne, à Chartres, dans
l'Eure-et-Loir et, enfin, à Melun, en Seine-et-Marne.
Le choix de ces trois caisses a été dicté par le souci de
concentrer l'investigation sur les caisses de la région parisienne, qui
connaissaient les plus grandes difficultés, tout en visitant
parallèlement une caisse voisine -celle de Chartres- qui semblait
épargnée par ces difficultés. Ce choix de ces trois
caisses a permis à vos rapporteurs une vision contrastée de la
situation des différentes caisses.
Dans ces trois caisses, les rapporteurs ont rencontré les
présidents des conseils d'administration, les équipes de
direction et les représentants des organisations syndicales
représentatives du personnel. Ils ont également visité les
locaux consacrés à l'accueil du public et ont pu dialoguer
à cette occasion avec les personnels des guichets, en contact permanent
avec les allocataires.
Enfin, dans un souci de compléter l'information dont ils disposaient,
les rapporteurs ont auditionné au Sénat la présidente et
le directeur de la CAF de Grenoble.
Les rapporteurs ont reçu partout le meilleur accueil et leurs
interlocuteurs se sont félicités de la démarche entreprise
par notre commission. Que toutes les personnes auditionnées trouvent ici
l'expression renouvelée de la gratitude des rapporteurs pour leur
collaboration à ce travail.
A l'issue de cette mission de contrôle, il apparaît que les caisses
d'allocations familiales ont rencontré de sérieuses
difficultés de fonctionnement au cours de l'année 1999. Ces
difficultés, qui ont touché particulièrement la
région parisienne, ont conduit à une nette dégradation du
service rendu au public et traduisent, plus généralement,
l'incapacité de la branche famille à respecter les engagements de
qualité prévus par la convention d'objectifs et de gestion qui la
lie à l'Etat.
Les plans d'action successifs engagés par la CNAF et les CAF ont
porté leurs fruits et la situation s'est nettement
améliorée au cours des derniers mois. Cette amélioration
reste toutefois fragile et il n'est pas exclu que l'été 2000 voit
la réapparition de certaines difficultés.
Les origines de ces dysfonctionnements sont multiples : les
difficultés tiennent à la conjonction d'un facteur conjoncturel
que l'on peut espérer transitoire -la mise en place d'un nouveau
système informatique en Ile-de-France-, et d'un élément
structurel plus préoccupant : l'application d'un droit
excessivement complexe à des publics de plus en plus fragilisés.
Dans ce contexte, la décision du Gouvernement d'autoriser la
création de 900 postes dans les CAF apparaît comme un choix
éminemment politique qui résulte plus d'un souci d'apaisement que
d'une réelle volonté de renforcer les moyens dont dispose la
branche : une part -non définie- de ces emplois constitue en effet
un acompte sur les créations d'emplois nécessaires pour compenser
la réduction du temps de travail.
Pour vos rapporteurs, la création de nouveaux emplois peut certes
apporter une bouffée d'oxygène bienvenue aux caisses en
difficultés. Il est douteux toutefois que cette solution de
facilité permette de faire l'économie d'une véritable
simplification du droit et de réels efforts de réorganisation
interne.