M. Thierry Foucaud. En effet, 57 milliards d’euros, mais qui creuse aujourd’hui le déficit ?
L’amendement du Gouvernement, dans sa simplicité et sa brutalité, confirme l’abandon pur et simple du contrat liant l’État et les collectivités territoriales.
Jadis, il s’agissait d’un contrat de croissance et de stabilité. Puis c’est devenu un pacte de stabilité. Et le mouvement de transfert de charges vers les élus locaux se poursuit.
Qu’il me soit permis de prendre quelques exemples, notamment celui de la disposition relative à la régularisation de la dotation globale de fonctionnement. L’abandon pur et simple de l’« amendement Auberger », qui avait d’ailleurs été chèrement négocié par les élus de droite sous une législature déjà ancienne, entraîne dès cette année, compte tenu du décalage évident entre la hausse des prix à la consommation prévue et celle qui sera constatée, une perte sèche de 500 millions d’euros pour les collectivités territoriales. Il faut en avoir conscience !
Sans cette mesure, la dotation de compensation de la taxe professionnelle aurait pu, sans difficulté majeure, être maintenue au niveau, déjà réduit, qu’elle avait atteint l’an dernier.
Cela aurait pu également nous épargner une réforme de la dotation d’aménagement, de la dotation de solidarité urbaine, mais aussi de la dotation globale de fonctionnement des groupements, qui va tendre, naturellement, à la réduction des concours budgétaires destinés soit à la solidarité, soit à la coopération intercommunale.
L’abandon du principe de régularisation, comme du principe faisant évoluer la DGF en tenant compte de la croissance, c’est la mort programmée de l’intercommunalité, notamment en milieu rural, c'est-à-dire là où nous en avons le plus besoin.
Année après année, les effets de l’article 85 de la loi de finances de 2006 se font sentir et frappent de plein fouet toutes les petites structures intercommunales, notamment celles qui regroupent un, deux ou trois cantons dans les départements ruraux.
Avec ces mesures, nous sommes entrés dans une logique de « déménagement » du territoire que nous ne pouvons pas accepter. Il faudra bien, un jour ou l’autre, faire le bilan exact des ressources dont les collectivités territoriales sont aujourd’hui privées ! De la taxe professionnelle, qui se retrouve vidée de son contenu, aux transferts de charges non compensés, en passant par la minoration de la TVA remboursable sur les investissements, ou encore le poids des recettes que s’assure l’État au titre des frais de rôle et de la cotisation minimale de taxe professionnelle, ce sont ainsi des milliards et des milliards d’euros dont les élus locaux sont privés.
Au demeurant – et je m’exprime ici au nom du groupe CRC –, tant qu’un point complet de la situation n’aura pas été fait, nous ne pourrons, en parlementaires conscients de nos responsabilités, que soumettre au débat des propositions, comme nous l’avons encore fait aujourd’hui au travers des amendements défendus par Marie-France Beaufils et Bernard Vera.
Nous sommes d’accord avec nos collègues du groupe socialiste qui demandent la suppression de l’article.
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote.
Mme Nicole Bricq. Le président de la commission des finances, le rapporteur général et le ministre ont dit une chose qui me semble juste.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ah !
Mme Nicole Bricq. Nous nous trouvons à un moment crucial, je dirais même grave. Sans reproduire l’histoire de la chèvre de M. Seguin, qui combattit jusqu’à l’aube avant d’être mangée, vous permettrez que, sur ce point précis, nous nous battions un peu !
Tout à l’heure, M. le rapporteur général a dit que, d’une certaine manière, le nouveau mode d’indexation sanctuarisait les collectivités locales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Je dis qu’il les préserve !
Mme Nicole Bricq. Mais je voudrais rappeler ce qu’il écrit dans son rapport, de façon que nos collègues se prononcent tout à l’heure en toute connaissance de cause : la nouvelle norme d’évolution contraindra – c’est vous qui l’écrivez, monsieur le rapporteur général – « à des choix plus difficiles entre les dotations de péréquation intégrées dans son montant global et la dotation forfaitaire des communes.
« Elle rendra également plus délicate la prise en compte des effets du recensement qui viendra impacter les calculs de DGF des communes en 2009. »
M. Philippe Marini, rapporteur général. Tout est plus difficile en période de crise ! Il ne faut pas voir la réalité en rose !
Mme Nicole Bricq. Certes, mais encore faut-il bien comprendre l’épure dans laquelle nous nous trouvons !
Monsieur le président de la commission, vous avez évoqué, de manière assez sibylline, du reste, un plan de relance qui devrait nous être proposé par le Président de la République d’ici à une dizaine de jours. Vous avez dit que ce plan pourrait avoir un impact favorable sur les collectivités territoriales. Peut-être en savez-vous plus que nous ! Mais alors, que faisons-nous ici ce soir ?
M. Thierry Foucaud. Voilà !
Mme Nicole Bricq. Sommes-nous au cinéma, en pleine fiction ?
Dès le début de la discussion de ce projet de loi de finances pour 2009, nous avons posé la question de la relance, de même que nous l’avions fait lors du débat d’orientation sur les finances publiques. Tout à l’heure, mon collègue Edmond Hervé, dans son intervention, vous a lui aussi entretenu de ce sujet. Je vous le demande donc encore une fois : pourquoi sommes-nous ici ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Pour vous réjouir ! Faites-nous confiance !
Mme Nicole Bricq. Nous sommes en pleine fiction ! Permettez donc que nous nous étonnions non seulement de la tournure que prend ce débat, mais aussi que nous devions attendre qu’une parole quasi divine nous annonce la relance !
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est justement un budget de relance que nous examinons !
Mme Nicole Bricq. Une telle attitude à l’égard des parlementaires que nous sommes n’est pas du tout convenable !
M. le président. La parole est à M. Daniel Dubois, pour explication de vote.
M. Daniel Dubois. Je voudrais d’abord vous dire, monsieur le ministre, que les collectivités locales sont tout à fait conscientes de leurs responsabilités, car elles votent, elles, des budgets en équilibre. Quand elles s’engagent, elles savent qu’elles ont l’obligation de compenser leurs dépenses par leurs recettes.
Si, aujourd’hui, les collectivités locales se trouvent avec des recettes de fonctionnement comportant 64 % de dotations de l’État, c’est parce que celui-ci l’a bien voulu ! En quinze ans, ce pourcentage est passé de 50 à 64 %.
Cela étant dit, je suis intimement persuadé que les collectivités locales sont tout à fait responsables et conscientes de la situation, …
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Bien sûr !
M. Daniel Dubois. … et qu’elles se comportent pleinement en partenaires de l’État. Mais l’intégration de la TVA dans les dotations normées était une erreur.
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. Ça, c’est autre chose !
M. Daniel Dubois. Si un réel débat s’était instauré avec les collectivités locales, sachez que celles-ci sont suffisamment responsables pour accepter de partager l’effort de redressement du pays.
D’ailleurs, pour tout vous dire, monsieur le ministre, le président de la commission des finances a réussi à me convaincre qu’un réel effort était accompli par l’État. Toutefois, je souhaite insister sur la transparence et la confiance nécessaires, faute de quoi les collectivités, qui sont partenaires de l’État, ne seront pas au rendez-vous du plan de relance annoncé, ce qui serait dommage !
Cela étant, je retire mon amendement n° I-126, et je voterai l’amendement du Gouvernement. Mais, encore une fois, je pense que vous commettez une erreur de méthode et, si j’ose dire, de casting !
M. le président. L'amendement n° I-126 est retiré.
La parole est à M. Edmond Hervé, pour explication de vote.
M. Edmond Hervé. J’ai été très surpris par ce que je viens d’entendre. Tous, ici, nous partageons l’impératif qu’est le dialogue parlementaire avec le Gouvernement.
Hier, et encore aujourd’hui, mes collègues socialistes – ou plus généralement de gauche – et moi-même avons dit que nous considérions les collectivités territoriales comme un facteur de relance. Cet après-midi, j’ai consacré la quasi-totalité de mon intervention à cette question de la relance par les collectivités territoriales. Or à aucun moment le représentant du Gouvernement ne nous a répondu sur ce point !
M. Edmond Hervé. Votre collègue, monsieur le ministre, s’est contenté de glisser quelques allusions ironiques à ce qu’on pourrait appeler, pour aller vite, une certaine « irresponsabilité » de plusieurs de nos collègues. En réalité, ce qui nous différencie, c’est tout simplement le fait que nous n’avons pas la même conception de la décentralisation. Je me souviens très clairement des débats que nous avons eus lors de l’examen des lois de décentralisation de 1981 et 1982. Et ça continue !
Nous estimons que les collectivités territoriales ont une capacité d’entraînement. Vous n’auriez pas voté le RMI et le RSA si les collectivités n’avaient pas apporté la preuve de ce qu’elles pouvaient faire en matière de solidarité.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le RSA, ce n’est pas vous !
M. Edmond Hervé. En ce qui concerne le RSA, monsieur Marini, le principal reproche que je pourrais adresser à votre majorité, c’est d’avoir lancé une procédure expérimentale sans attendre son résultat. Le département dont je suis l’élu s’est lancé dans cette expérimentation ; je suis donc bien placé pour vous dire que nous avons eu raison de plaider la cause de l’expérimentation.
Nous avons deux conceptions très différentes des collectivités territoriales.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Une bonne et une mauvaise !
M. Edmond Hervé. Vous avez une approche financière et comptable des collectivités territoriales. Ce n’est pas notre conception ! (Protestations sur les travées de l’UMP et au banc des commissions.) J’ai eu d’autres responsabilités et j’ai toujours eu une démarche de rigueur, que vous avez d’ailleurs reconnue les uns et les autres !
En 1982, nous avons lancé le Fonds spécial de grands travaux, avec des résultats extrêmement positifs.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Ne remontez pas au déluge !
M. Edmond Hervé. Nous sommes optimistes et vous êtes enfermés dans le pessimisme ! (Nouvelles protestations sur les travées de l’UMP.) L’un des moyens de dépasser la situation actuelle, c’est l’investissement. J’ai bien entendu que, dans quelques jours, un plan de relance sera annoncé. Faites confiance à la représentation parlementaire ! À l’heure où nous discutons de questions aussi importantes, il est tout à fait normal que nous soyons informés des projets du Gouvernement.
Je comprends que vous ne puissiez pas nous donner des réponses précises, monsieur le ministre. J’aimerais néanmoins vous poser une question.
Je considère que les collectivités territoriales jouent un rôle déterminant en matière d’équipement, d’aménagement, de logement neuf ou de réhabilitation. Il n’y a d'ailleurs pas de politique du logement si les collectivités territoriales ne sont pas « dans le coup », si vous me permettez l’expression.
Respectueux de l’autorité gouvernementale, je vous poserai une seule question : quelles demandes allez-vous adresser aux autorités bancaires françaises pour relancer véritablement le domaine du logement et de la réhabilitation ?
M. le président. La parole est à M. Gérard Miquel, pour explication de vote.
M. Gérard Miquel. Monsieur le ministre, je vous ai écouté attentivement. À l’évidence, nous vivons un moment difficile, qui exige de nous beaucoup de rigueur et de solidarité.
Nous avons connu une longue période de décentralisation, au cours de laquelle le Gouvernement a transféré de nombreuses compétences aux collectivités locales, qui n’en sont encore, pour certaines d’entre elles, qu’au début de leur mise en œuvre. La situation est donc loin d’être stabilisée.
Le Gouvernement s’est déchargé d’un certain nombre de responsabilités sur les collectivités. Aujourd’hui, vous bloquez la DGF, alors que la crise va provoquer l’augmentation du nombre de RMIstes et de personnes en difficulté. Les collectivités territoriales seront confrontées au paiement de contributions très importantes dont elles ne maîtrisent pas le montant, alors que leurs ressources auront diminué.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Elles n’auront pas diminué, elles auront augmenté de 2 % en moyenne !
M. Gérard Miquel. Monsieur le rapporteur général, nous n’allons pas reprendre la discussion !
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est sur ce point que nous votons : plus 2 % !
M. Gérard Miquel. Exactement !
M. Philippe Marini, rapporteur général. Le double d’une croissance illusoire de 1 % !
M. Gérard Miquel. Monsieur le rapporteur général, vous êtes bien conscient des difficultés auxquelles sont confrontées les collectivités.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Nous les vivons tous !
M. Gérard Miquel. Certes, mais la répartition de la ressource est aujourd’hui mal effectuée en direction des collectivités.
M. Philippe Marini, rapporteur général. C’est vrai !
M. Gérard Miquel. Certaines d’entre elles ont besoin d’investir. Si nous voulons relancer l’économie dans notre pays, l’effort des collectivités doit être soutenu, sinon nous irons vers une récession : dans cette période, les collectivités vont devoir payer des charges importantes liées aux effets d’une décentralisation mal conduite dans le passé.
C’est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas souscrire à vos propositions. Nous vous demandons de bien réfléchir, car le moment est déterminant pour l’avenir des collectivités et pour leurs capacités d’investissement ! (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. La parole est à Mme Marie-France Beaufils, pour explication de vote.
Mme Marie-France Beaufils. Nous sentons bien, dans cette discussion, que deux visions s’opposent.
On ne peut pas considérer que la progression de 2 % décidée pour l’année prochaine soit une formidable opportunité pour sortir de la difficulté les collectivités territoriales.
Comme certains collègues viennent de le rappeler, la situation de la population risque d’être difficile au regard de l’emploi.
Si on ne donne pas les moyens aux collectivités territoriales de jouer leur rôle à l’échelon de leur territoire, si on ne leur offre pas la possibilité de maintenir les services à un niveau correspondant aux besoins, le pouvoir d’achat de la population sera affecté, avec les conséquences que l’on sait sur la consommation.
Au lieu de voter un budget de relance, pour reprendre l’expression du président de la commission des finances,…
M. Jean Arthuis, président de la commission des finances. C’est un budget de relance !
Mme Marie-France Beaufils. …on va au contraire remettre en cause ladite relance.
En ce domaine, tant en investissement qu’en fonctionnement, toutes les collectivités territoriales ont un rôle important à jouer. Si on n’utilise pas ce levier, je suis convaincue que la dégradation économique sera beaucoup plus forte.
C’est pourtant ce qui nous est proposé dans ce projet de budget. Vous refusez, sur le fond, toutes les propositions qui permettraient d’accroître les recettes de l’État, parce que vous ne voulez pas reconnaître que certaines mesures que vous avez prises les années précédentes ont eu des effets nocifs, renforcés par la crise financière. (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.)
M. le président. En conséquence, les amendements nos I-57, I-186 et I-58 n'ont plus d'objet.
Je mets aux voix l'amendement n° I-59.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Je mets aux voix l'article 10, modifié.
(L'article 10 est adopté.)
Article 11
I. – Au deuxième alinéa de l’article L. 1613-6 du code général des collectivités territoriales, l’année : « 2009 » est remplacée par l’année : « 2010 ».
I bis. – Après le deuxième alinéa du même article L. 1613-6, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Par dérogation à l’alinéa précédent, ce fonds bénéficie, au titre de 2009, d’un prélèvement de 10 millions d’euros sur la dotation instituée au IV de l’article 6 de la loi de finances pour 1987 (n° 86-1317 du 30 décembre 1986). »
II. – L’article L. 1614-1 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À titre dérogatoire, la dotation générale de décentralisation mentionnée à l’article L. 1614-4 et les crédits prévus aux 1° et 2° de l’article L. 4332-1 n’évoluent pas en 2009. »
III. – Après la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 2334-26 du même code, il est inséré une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette évolution ne s’applique pas en 2009. »
IV. – Le dernier alinéa de l’article L. 4425-2 et le premier alinéa de l’article L. 4425-4 du même code sont complétés par une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette évolution ne s’applique pas en 2009. »
V. – Le dernier alinéa du I de l’article 98 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l’État, le quatrième alinéa de l’article 6 de la loi n° 88-1089 du 1er décembre 1988 relative aux compétences de la collectivité territoriale de Mayotte en matière de formation professionnelle et d’apprentissage et le I de l’article 55 de la loi de finances pour 2004 (n° 2003-1311 du 30 décembre 2003) sont complétés par une phrase ainsi rédigée :
« À titre dérogatoire, cette évolution ne s’applique pas en 2009. »
VI. – Le II de l’article 134 de la loi de finances pour 2003 (n° 2002-1575 du 30 décembre 2002) est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« À titre dérogatoire, l’évolution prévue au deuxième alinéa ne s’applique pas en 2009. »
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° I-60 est présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés.
L'amendement n° I-187 est présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Supprimer cet article.
La parole est à M. Claude Jeannerot, pour présenter l’amendement n° I-60.
M. Claude Jeannerot. Le Gouvernement et la majorité parlementaire nous assurent que l’intégration du FTCVA au sein de l’ensemble des prélèvements sur recettes destiné aux collectivités territoriales n’a aucun impact sur le FCTVA lui-même.
L’argument, en première analyse, semble juste. L’intégration du FCTVA n’a effectivement, pour l’instant, aucune conséquence sur le fonds. À l’inverse, et nous commençons à le vérifier aujourd’hui, elle exerce une contrainte et une déformation sur toutes les autres dotations. C’est la raison pour laquelle nous maintenons notre position, qui est de retirer le FCTVA de cette enveloppe et de lui conserver son caractère de remboursement intégral.
Notre conviction, en effet, est que la pression qu’exerce le FCTVA, et qu’il exercera plus encore à l’avenir s’il conserve son mode d’évolution, entraînera la disparition ou le gel d’autres dotations. Les premières conséquences ne se font pas attendre, puisque l’article 11, dès aujourd’hui, propose le gel de plusieurs dotations de fonctionnement.
Ainsi est gelée, au titre de l’année 2009, la dotation générale de décentralisation – soit 989 millions d’euros –, qui vise à compenser financièrement une partie des transferts des actes I et II de la décentralisation pour les communes, les départements et les régions.
Ce sont évidemment autant de missions dont la mise en œuvre sera remise en cause en 2009. Pour les communes et leurs groupements, il s’agit de la réalisation des documents d’urbanisme, du financement des bureaux municipaux d’hygiène, etc. Pour les départements, c’est le transfert d’un certain nombre de responsabilités dans le domaine culturel ou dans le domaine des ports maritimes. Pour les régions, c’est la compensation versée au STIF au titre du transport scolaire en Île-de-France, ou le transfert de compétence dans le domaine culturel, etc.
Il en sera de même, mes chers collègues, pour la dotation générale de décentralisation relative à la formation professionnelle, destinée à compenser le transfert progressif de 1983 à 2004 de nouvelles charges de l’État vers les régions en matière de formation professionnelle.
Si nous n’avions pas entendu, aujourd’hui, le Président de la République affirmer, lors de son déplacement à Valenciennes, que la réforme de la formation professionnelle était son « challenge » pour l’année 2009, nous aurions évidemment beaucoup de mal à le croire au regard du seul projet de loi de finances examiné ce soir.
Autrement dit, monsieur le ministre, mes chers collègues, c’est un coup de frein porté à la décentralisation. Une nouvelle fois, l’État se déresponsabilise en transférant des charges sans permettre aux collectivités d’assurer de manière convenable leur mise en œuvre.
Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de l’article 11.
M. le président. La parole est à M. Thierry Foucaud, pour présenter l'amendement n° I-187.
M. Thierry Foucaud. En gelant de nombreuses dotations de compensation, monsieur le ministre, vous allez placer les collectivités locales dans des difficultés énormes en limitant leurs capacités d’investissement, alors que leurs charges de fonctionnement augmentent.
Le dernier indice de prix des dépenses communales est en hausse de 0,9 % au premier trimestre de 2008, comparé au trimestre précédent. Sur les quatre derniers trimestres, la progression de l’indice est de 3,4 %, contre 1,9 % pour l’indice des prix des ménages hors tabac, soit un écart de 1,5 point, contre un écart de 1,9 point au quatrième trimestre de 2007.
Quatre principaux phénomènes ont marqué le premier trimestre de 2008 : la légère accélération des charges de personnel, la hausse des indices de coût dans le secteur du BTP, l’accélération du prix des produits et des services divers, mais aussi le prix des produits alimentaires.
Au regard de ces résultats, le dynamisme de l’inflation supportée par les communes demeure élevé. Une étude de la DGCL, la Direction générale des collectivités locales, confirme également que, pour 2006, les dépenses de fonctionnement dans les communes de plus de 10 000 habitants ont progressé de 3,3 %, alors que l’inflation a été de 1,6 % pour la même période. On pourrait mettre en parallèle le taux prévisionnel de 2 % dans le PLF pour 2009 avec les 3 % qui sont déjà annoncés pour 2008.
Vous savez que nombre de collectivités traversent aujourd’hui des difficultés ; je ne reviendrai pas sur la crise financière qui ne les épargne pas. Votre positionnement crée de l’instabilité, de l’insécurité ; on plonge ainsi les collectivités dans une situation qu’elles n’ont jamais connue à ce jour.
En bloquant les évolutions de nos dotations de fonctionnement, vous ne faites qu’ajouter à ces incertitudes. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Mes chers collègues, nous avons voté à l’article précédent l’enveloppe globale des concours avec une évolution de 2 % et nous abordons maintenant l’exercice de répartition. Certaines dotations évoluant à un rythme plus rapide, notamment le FCTVA, il faut trouver des compensations ; ce sont les fameuses variables d’ajustement, sur lesquelles notre discussion va se focaliser.
Pour éviter que les variables d’ajustement ne pâtissent trop de la contrainte de l’enveloppe, le Gouvernement a dû faire des choix, parmi lesquels figure le maintien en euros courants des dotations qui font l’objet de cet article. Par conséquent, si nous supprimons cet article, nous allons exercer une pression encore plus forte sur les variables d’ajustement et cela va se traduire dans tous les budgets par des situations sans doute difficiles à gérer, voire insupportables.
Telle est la raison pour laquelle il n’est pas possible de donner suite à ces amendements de suppression. La commission en demande donc le retrait.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Tout cela relève d’un équilibre finement pesé et, en ce qui concerne les dotations de fonctionnement autres que la DGF, il est prévu de les laisser en euros courants pour éviter de trop peser sur les autres variables d’ajustement.
Il y a donc une logique, que nous déclinons de façon efficace et juste, me semble-t-il.
M. le président. Monsieur Jeannerot, l’amendement n° I-60 est –il maintenu ?
M. Claude Jeannerot. Oui, monsieur le président, je le maintiens.
M. le président. Monsieur Foucaud, l’amendement n° I-187 est-il maintenu ?
M. Thierry Foucaud. Oui, monsieur le président, je le maintiens également.
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos I-60 et I-187.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)