M. le président. L’amendement n° I-184, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - L’article 85 de la loi de finances pour 2006 (n° 2005-1719 du 30 décembre 2005) est abrogé.
II. - Les pertes de recettes pour l’État découlant du I ci-dessus sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à M. Bernard Vera.
M. Bernard Vera. Le plafonnement de la taxe professionnelle représente une addition de 645 millions d’euros pour les collectivités. C’est ce qui ressort d’un rapport au Gouvernement évaluant la mise en œuvre de ce plafonnement.
Le coût global du plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée augmente de 50 % entre 2006 et 2007, passant ainsi de 5 683 millions d’euros à 8 525 millions d’euros. La situation s’aggrave pour de nombreuses communes soumises à un plafond de participation : elles sont 3 991, soit près de 11 % du total, et 50 communes supportent plus de 50 % de ce plafond de participation.
Certaines communes sont extrêmement touchées, comme Saint-Ouen, à hauteur de 1,182 million d’euros, ou Levallois-Perret, pour 892 000 euros. Les EPCI à fiscalité additionnelle ont été touchés, au titre de l’année 2007, dans la proportion de 58 %. Il en est de même pour les EPCI à taxe professionnelle unique, dont 452 sont soumis à un plafond de participation. Quatre-vingt-cinq départements sont logés à la même enseigne et certains, comme le Nord, la Seine-Saint-Denis ou le Pas-de-Calais, connaissent des difficultés particulièrement criantes. Vingt-quatre régions, dont quatre dépassent 50 % du plafond, sont également concernées, comme les régions Provence-Alpes-Côte d’Azur ou Rhône-Alpes.
Nombreux sont les spécialistes en fiscalité à avoir observé que l’article 85 de la loi de finances pour 2006 laisse la porte ouverte à toutes les interprétations, permettant aux entreprises d’explorer toutes les possibilités d’« optimisation fiscale » dans le seul but de payer la cotisation de taxe professionnelle la moins élevée possible.
La réalité est là : cette mesure a permis aux plus grosses entreprises d’économiser 3 milliards d’euros en 2007 et 3,7 milliards en 2008. Certains secteurs ont vu une baisse de cotisation supérieure à 15 %, comme l’industrie automobile qui, aujourd’hui, licencie. Une nouvelle fois, ce sont les salariés qui pâtissent de ces politiques essentiellement fondées sur des réductions de charges patronales totalement inefficaces !
Vous bridez le pouvoir d’achat en bloquant les salaires et en baissant les cotisations sociales, mais vous favorisez les dividendes des actionnaires. Des milliers d’intérimaires vont connaître le chômage ; c’est aussi l’un des aspects des conséquences de cette politique fiscale.
Pour l’entreprise, il s’agit soit de payer sur les immobilisations, si elle est sous-capitalisée, soit d’invoquer le plafonnement de la valeur ajoutée, si elle dispose de fortes bases taxables.
Mais cet aménagement semble déjà insuffisant pour le MEDEF, qui rêve de voir disparaître la taxe professionnelle, ce que les projets gouvernementaux laissent présager. Le plus choquant dans cette méthode, c’est le manque de concertation évident, alors que cette taxe assise sur les immobilisations représente une part non négligeable des ressources des collectivités territoriales. Qu’il faille moderniser la taxe professionnelle, de nombreux élus locaux en sont convaincus, mais la supprimer soulèverait chez eux une réprobation unanime !
Les exonérations que nous subissons régulièrement ne représentent pas non plus une solution, puisque leurs compensations ont toujours une durée limitée, le temps que l’État ajuste son budget.
Le projet de loi de finances pour 2009 prévoit de réduire de 25,6 % les compensations d’exonérations de taxe professionnelle et de taxe foncière sur les propriétés bâties dues par l’État aux collectivités locales.
Il semble incohérent d’invoquer l’investissement comme une priorité, tout en coupant le robinet des ressources aux collectivités locales.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. Cet amendement, comme le suivant qui n’a pas encore été présenté, tend à revenir sur la dernière en date des réformes de la taxe professionnelle, celle qui a été réalisée par l’article 85 de la loi de finances initiale pour 2006.
La commission ne peut qu’y être défavorable, sachant que, par ailleurs, nous nous dirigeons vers une nouvelle phase d’étude susceptible de déboucher sur une autre réforme de la taxe professionnelle. Mais à chaque jour suffit sa peine : mieux vaut ne pas aggraver l’instabilité législative en ce domaine !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. L’amendement n° I-185, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Avant l’article 10, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Le 1° de l’article 1467 du code général des impôts est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« ...) L’ensemble des titres de placement et de participation, les titres de créances négociables, les prêts à court, moyen et long terme. Ces éléments sont pris en compte pour la moitié de leur montant figurant à l’actif du bilan des entreprises assujetties. Pour les établissements de crédits et les sociétés d’assurances, le montant net de ses actifs est pris en compte après réfaction du montant des actifs représentatifs de la couverture des risques, contrepartie et obligations comptables de ces établissements.
« La valeur nette des actifs, déterminée selon les dispositions du précédent alinéa, est prise en compte après réfaction de la valeur locative des immobilisations visées au a. »
II. - L’article 1636 du même code est ainsi rétabli :
« Art. 1636. - Le taux grevant les actifs définis au c de l’article 1467 est fixé à 0,3 %. Il évolue chaque année, pour chaque entreprise assujettie, à proportion d’un coefficient issu du rapport entre la valeur relative aux actifs définis au c de l’article 1467 au regard de la valeur ajoutée de l’entreprise. »
III. - L’article 1648 du même code est ainsi rétabli :
« Art. 1648. - Il est créé un fonds de péréquation de la taxe professionnelle, alimenté par le produit de l’imposition des actifs visés à l’article 1467.
« Les ressources du fonds sont réparties suivant les règles fixées pour la dotation globale de fonctionnement par les articles L. 2334-1 à L. 2334-23 du code général des collectivités territoriales. »
IV. - 1. Le I ter de l’article 1647 B sexies du même code, est complété par les mots « à l’exception de celle définie par le c de l’article 1647 ».
2. Le premier alinéa du 4° du 1 de l’article 39 du même code est complété in fine par les mots « et de l’imposition résultant de la prise en compte des actifs financiers définis au c de l’article 1467, selon les règles fixées par l’article 1636. »
V. - Le II de l’alinéa 1647 E du même code est ainsi rédigé :
« II. - Le supplément d’imposition, défini par différence entre la cotisation résultant des dispositions du I et la cotisation de taxe professionnelle déterminée selon les règles définies au III, est une ressource des fonds départementaux de péréquation définis à l’article 1648A. »
VI. - Pour compenser la perte de recettes découlant pour l’État des dispositions ci-dessus, il est créé une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Nous vous proposons justement de participer à la réflexion sur la réforme de la taxe professionnelle, qui nous semble essentielle pour les finances locales.
Il s’agit de répondre à une question simple : comment assurer aux collectivités locales les moyens financiers de leur action et leur permettre de répondre aux attentes de leurs administrés pour redonner tout son sens à la démocratie locale ?
Vous opérez a contrario, en partant du principe que tout service rendu est avant tout une dépense et non un objectif à atteindre pour assurer le bien-être de nos concitoyens et de nos entreprises. Il est utile de mener un débat dans notre pays afin d’examiner toutes les propositions de nature à changer la donne des finances locales pour plus de progrès social, de citoyenneté et d’égalité des hommes et des territoires.
En étranglant nos finances locales, vous imposez la destruction des services publics, de tout ce qui structure la conception républicaine de notre société. Avec ce projet de loi, vous nous invitez, comme vous le dites, à participer à la « maîtrise de la dépense publique ». Or les collectivités locales sont contraintes de présenter des budgets en équilibre, de rendre compte dans la proximité de leur action ; elles ne participent en rien aux déficits accumulés de l’État qui, effectivement, comme l’a dit un de nos collègues cet après-midi, ne donne pas l’exemple en la matière.
En effet, si les caisses de l’État ont été vidées, ce ne sont ni les municipalités, ni les départements, ni les régions qui en sont responsables : ce sont bien les cadeaux inconsidérés aux ménages les plus riches et aux entreprises qui n’en avaient pas le plus besoin, loin s’en faut !
Au contraire, les collectivités locales créent des richesses, elles participent au développement économique local, elles n’endettent pas autrement la nation et elles alimentent la croissance. Monsieur le ministre, vous avez rappelé qu’elles réalisent 75 % des investissements publics. Vous voudriez les culpabiliser en leur imposant de participer à une politique destructrice, à notre avis, de ces biens publics !
Le rôle économique et financier des collectivités locales est irremplaçable. Nous avons bien souvent été invités à nous associer à la modernisation de l’État – Mme la ministre le rappelait tout à l’heure –, mais j’ai cru comprendre que, pour vous, moderniser est synonyme de reculs sociaux, de déréglementation, d’impôt allégé pour les plus riches – avec le bouclier fiscal – ou de suppression de la taxe professionnelle.
Cette taxe demeure l’une des ressources essentielle de nos collectivités. S’il est indispensable de la moderniser, il va de soi que nous sommes énergiquement opposés à sa suppression. Au contraire, c’est en l’adaptant à la réalité de notre économie qu’elle donnera toute la mesure de son efficacité.
La spéculation est devenue et reste, malgré la crise, une source essentielle d’enrichissement. Il convient de taxer les actifs financiers de ces entreprises qui utilisent l’argent à d’autres fins que le développement de l’emploi, de la recherche et des salaires. Une entreprise qui réinvestit dans l’activité économique ne serait pas davantage taxée. La taxe professionnelle doit, nous semble-t-il, inciter les entreprises à réinvestir dans l’activité économique et dans l’emploi.
Nous pensons que la modernisation peut donc prendre en compte les besoins des habitants, l’amélioration des conditions de vie et de travail de la grande majorité de nos concitoyens.
La taxe professionnelle est le seul impôt qui établit un lien direct entre l’entreprise et son lieu d’implantation. C’est le mécanisme principal qui permet de responsabiliser l’entreprise devant la collectivité territoriale. Les investissements en infrastructures, les dépenses d’éducation, sociales, culturelles et de loisirs sont déterminantes pour le fonctionnement des entreprises, pour la vie de leurs salariés et leurs formations.
Perdre le lien entre les collectivités territoriales et les entreprises par l’intermédiaire de cet impôt, serait probablement facteur de perte de dynamisme économique.
La modernisation de la taxe professionnelle nous semble donc indispensable.
Nous vous proposons donc de faire en sorte que la base d’imposition intègre les actifs financiers des entreprises, afin de prendre en compte l’évolution de la structure de l’activité économique.
Je rappelle que, aujourd'hui, ce sont les entreprises de production et de l’énergie qui, avant le plafonnement à 3,5 %, acquittent une cotisation de taxe professionnelle supérieure à 5 %. Quant aux activités économiques qui recueillent la part la plus importante de leurs ressources par l’intermédiaire de placements financiers, en même temps que leurs salariés sont soumis au régime sec, elles sont bien souvent à un pourcentage de la valeur ajoutée inférieur à 2 %.
Telle est donc le sens de notre proposition. Cette modernisation de la taxe professionnelle pourrait alimenter un fonds de péréquation qui pourrait être attribué en incluant les charges réelles des collectivités et, bien sûr, en concertation avec les acteurs dans ce domaine.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Marini, rapporteur général. La commission rend hommage, chers collègues, à votre imagination, à votre créativité, et nous espérons que ces contributions pourront être versées aux travaux de la commission qui sera appelée à traiter de la réforme de la taxe professionnelle.
Dans l’immédiat, et pour les raisons déjà exprimées à propos de l’amendement précédent, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Éric Woerth, ministre. Je salue, moi aussi, la créativité des sénateurs du groupe CRC. Une réflexion est néanmoins engagée à la fois sur les collectivités et la fiscalité locale, et il sera tenu compte des questions soulevées dans cet amendement.
L’intégration des actifs financiers dans la base de la taxe professionnelle me semble difficile. Il n’y a pas plus volatiles que les actifs financiers, ainsi qu’on a pu le vérifier récemment. Donc, l’idée en elle-même ne me semble pas opérationnelle.
Le Gouvernement est défavorable à cet amendement.
M. le président. La parole est à M. François Marc, pour explication de vote.
M. François Marc. Les propos de M. le ministre ne me rassurent pas vraiment sur la volonté du Gouvernement de réformer la taxe professionnelle.
Depuis plusieurs années, nous avons entendu bon nombre de déclarations. Nous avons eu le rapport de la commission présidée par Olivier Fouquet qui, après des semaines de travail, a abouti à un dispositif a minima. Depuis deux ans, on nous dit que l’on va reprendre ce dossier et qu’un jour on arrivera peut-être à trouver une solution.
Donc, plutôt que de se féliciter de la créativité des parlementaires, le Gouvernement devrait manifester une volonté d’action beaucoup plus déterminée. Ce n’est pas en tout cas ce qui ressort des propos que nous venons d’entendre.
En ce qui concerne cette réforme de la taxe professionnelle qui a été introduite a minima, il faut savoir que les régions et les départements vont perdre l’équivalent, sur l’année, de 555 millions d'euros, sur un total de 645 millions d'euros pour l’ensemble des collectivités.
Aujourd'hui, les collectivités territoriales perdent près de 4 % de ce qu’aurait dû être la recette de taxe professionnelle, ce qui est tout de même considérable, compte tenu de leurs besoins actuels et de la nécessité de relancer l’investissement.
Il est donc urgent de mener à bien cette réforme de l’impôt économique.
L'amendement n° I-185, comme d'ailleurs l'amendement n° I-184 qui l’a précédé, présente peut-être quelques imperfections, ainsi que le ministre l’a souligné, mais il a l’intérêt d’apporter un début de réponse structurée. Le Sénat pourrait donc, au titre de cette amorce de réflexion, l’adopter et voir si, au cours de la navette, il peut être enrichi. Ce serait déjà un signe en direction de nos concitoyens montrant que l’action est engagée, que cette réforme sera menée rapidement et que les collectivités territoriales vont retrouver ce manque à gagner de 400 millions ou 500 millions d'euros qui est constaté aujourd'hui, ce qui est gravissime.
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° I-185.
(L'amendement n'est pas adopté.)
II. – RESSOURCES AFFECTÉES
A. – Dispositions relatives aux collectivités territoriales
Article 10
I. – L’article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1613-1. – I. – À compter de 2009, la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite dans la loi de finances de l’année précédente du taux prévisionnel, associé au projet de loi de finances de l’année de versement, d’évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année.
« II. – Pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement de 2009, le montant de 2008 est diminué du montant de la dotation globale de fonctionnement calculée en 2008 au profit de la collectivité de Saint-Barthélemy en application de l’article L. 6264-3. »
II. – L’article L. 1613-2 du même code est abrogé.
III. – Le deuxième alinéa de l’article L. 2334-1 du même code est supprimé.
IV. – Après les mots : « dotation globale de fonctionnement », la fin de la première phrase du deuxième alinéa de l’article L. 2334-26 du même code est supprimée.
M. le président. Je suis saisi de sept amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° I-57, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Nicole Bricq.
Mme Nicole Bricq. Il s’agit d’un amendement de suppression de la nouvelle manière d’indexer la dotation globale de fonctionnement.
En effet, le Gouvernement, dans sa logique de réduction des dépenses publiques, poursuit l’extension de la norme d’évolution de dépenses « zéro volume » aux concours financiers de l’État aux collectivités territoriales.
Après avoir instauré le contrat de stabilité dans la loi de finances pour 2008, qui avait déjà fait perdre près de 400 millions d'euros aux collectivités territoriales, vous vous apprêtez cette année à supprimer le mécanisme actuel d’évolution de la DGF, fondée jusqu’ici, je le rappelle, sur l’inflation majorée d’une part de la croissance du produit intérieur brut.
Vous nous proposez donc une évolution de la DGF fondée uniquement sur le taux d’inflation prévu en loi de finances initiale.
Bien sûr, on pourrait dire qu’en période de crise financière et économique le fait de ne pas tenir compte de la croissance ne change pas le montant final de la DGF, au regard de la très faible croissance du PIB en 2008. Mais l’on ne peut pas se satisfaire de cette situation et il faut espérer que nous retrouverons le plus rapidement possible - c’est souhaitable pour notre pays et pour nos concitoyens - une croissance à peu près correcte. Or, quand nous la retrouverons, les collectivités territoriales ne pourront plus bénéficier de cette indexation majorée.
Pourtant - et c’est le sens de cet amendement de suppression -, la prise en compte de la croissance dans l’évolution des dotations est légitime. En effet, comme cela a été rappelé à plusieurs reprises, cet après-midi, dans le débat général, les collectivités territoriales participent à plus de 70 % à l’effort d’investissement public civil en France. Par conséquent, les faire bénéficier de l’évolution de la richesse de notre pays est une juste compensation des efforts qu’elles réalisent.
Justement parce que nous sommes en période de crise, les collectivités territoriales peuvent jouer un rôle d’amortisseur. Il est donc indispensable de leur donner les moyens de poursuivre leur politique d’investissement et de soutien à l’économie locale.
À l’occasion du projet de loi de programmation des finances publiques pour 2009-2012, le Gouvernement a révisé, de manière habile, ses prévisions d’inflation pour 2009 de 2 % à 1,5 %, ce qui lui permet aujourd'hui d’afficher un prétendu cadeau aux collectivités territoriales en proposant de maintenir l’évolution de la DGF à 2 %. Selon le rapporteur général, Philippe Marini, cela permet un surplus de DGF d’environ 180 millions d'euros.
M. Philippe Marini, rapporteur général. Non, 280 millions d'euros !
Mme Nicole Bricq. Au-delà du problème de la stricte évolution des dotations de l’État en faveur des collectivités, le nouveau mode de calcul des dotations de l’État illustre deux visions différentes de la décentralisation et, pour ce qui nous concerne, du lien de confiance essentiel qui doit unir les collectivités territoriales à l’État.
Tout à l’heure, notre collègue Edmond Hervé évoquait une nouvelle étape qu’il a appelée, à juste titre « le temps de la décentralisation projet ». En effet, les collectivités territoriales demandent à être de véritables partenaires de l’État et non pas de simples exécutants de compétences que celui-ci n’a plus les moyens d’assumer.
Pour toutes ces raisons, nous demandons que soit supprimé l’article 10 et que soit maintenue la prise en compte de la croissance dans l’évolution de la DGF, signe d’un partenariat équitable entre collectivités territoriales et État.
M. le président. L'amendement n° I-186, présenté par Mme Beaufils, MM. Foucaud, Vera et les membres du groupe Communiste Républicain et Citoyen, est ainsi libellé :
Rédiger comme suit cet article :
I. - L'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales est ainsi rédigé :
« Art. L. 1613-1. - I. - À compter de 2009, la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite dans la loi de finances de l'année précédente d'un indice faisant la somme du taux prévisionnel, associé au projet de loi de finances de l'année de versement, d'évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année et de la moitié de la croissance prévue du produit intérieur brut marchand.
« II. - Pour le calcul de la dotation globale de fonctionnement de 2009, le montant de 2008 est diminué du montant de la dotation globale de fonctionnement calculée en 2008 au profit de la collectivité de Saint-Barthélémy en application de l'article L. 6264-3. »
II. - Le taux de l'impôt sur les sociétés est relevé à due concurrence.
La parole est à Mme Marie-France Beaufils.
Mme Marie-France Beaufils. Les règles d’indexation des dotations proposées pour cette année représentent un véritable bouleversement. Il est certain que les conséquences seront lourdes pour les budgets des communes, des intercommunalités, des départements et des régions. Avec ces règles est enclenché un cycle de régression pour les finances locales.
L’objectif de réduction de la dépense risque de se traduire par la dégradation des prestations et des services rendus à la population dans une période où la politique économique et financière de ce pays tend à appauvrir et à jeter à la rue de nombreux salariés.
Comme vient de le rappeler Nicole Bricq, comme nous l’avons dit dans le débat général, et comme même M. le rapporteur général l’a souligné, les collectivités territoriales sont, d’une certaine manière, des amortisseurs de la situation que vivent nos populations.
Nous vous demandons donc de revenir à l’évolution telle qu’elle était prévue dans les années antérieures, pour que les collectivités puissent répondre aux besoins. En effet, auparavant, le mode d’indexation était conçu à partir de l’évolution des prix de l’année n et de 50 % du taux de croissance en volume de l’année n-1. Elle donnait ainsi lieu à une régularisation sur l’année n+2.
Ce mécanisme en faveur de la valeur définitive des indices est aujourd’hui abandonné. Vous avez accepté d’abandonner la régularisation négative au titre de 2007, soit 66,8 millions d’euros, mais vous ne tiendrez pas compte non plus de la régularisation au titre de 2008, alors que l’inflation se situe aux alentours de 2,9 % au lieu de 1,6 % prévu en loi de finances initiale.
Vous allez donc supprimer ce dispositif de régularisation, y compris pour 2008, dans le projet de loi de finances rectificative pour 2009 au titre de l’année 2008. En nous accordant généreusement 66,8 millions d’euros pour 2007, vous allez également garder 500 millions d’euros de ce que vous auriez dû redonner aux collectivités territoriales sur la régularisation de 2008. Donc, au final, le différentiel équivaudra à une perte et non à un gain.
C’est par un véritable tour de prestidigitation que vous nous annoncez dans le projet de loi de finances pour 2009 une somme de 1 100 millions d’euros, en intégrant dans l’enveloppe des sommes qui n’y figuraient pas les années précédentes, ce qui vous permet d’afficher une augmentation de 2 %.
Je ne reviendrai pas en détail sur ce sujet, dont j’ai déjà parlé lors de mon intervention générale. Je rappelle quand même que le FCTVA n’a rien à faire dans cette enveloppe globale. Il s’agit de 663 millions d’euros, ce qui n’est pas une petite somme. Je précise également que c’est le résultat de l’investissement des collectivités territoriales durant les deux années qui ont précédé.
Les 2 % annoncés vont se réduire au final, compte tenu de l’intégration d’autres enveloppes, telles que les amendes de police, à la portion congrue de 0,8 % au grand maximum ; il est important de le rappeler.
Par ailleurs, une erreur d’appréciation d’un demi-point du taux d’inflation prévisionnelle correspond à 200 millions d’euros ; cela est d’autant plus grave qu’aucune mesure de correction n’est prévue.
La DGF des communes et des EPCI sera rognée de 115 millions d’euros par rapport à ce qu’elle aurait été selon les calculs que nous utilisions précédemment. La perte pour la DGF totale est estimée à 202 millions d’euros.
C’est pourquoi nous vous proposons de revenir à des calculs qui intègrent bien l’évolution des prix et la croissance de la richesse.
M. le président. L'amendement n° I-58, présenté par Mme Bricq, M. Marc, Mme M. André, MM. Angels, Auban, Demerliat, Frécon, Haut, Hervé, Krattinger, Masseret, Massion, Miquel, Rebsamen, Sergent, Todeschini et les membres du groupe Socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
I. - Rédiger comme suit le premier alinéa du texte proposé par le I de cet article pour l'article L. 1613-1 du code général des collectivités territoriales :
« I. - À compter de 2009, la dotation globale de fonctionnement est calculée par application à la dotation globale de fonctionnement inscrite en loi de finances de l'année précédente, du taux réellement constaté d'évolution des prix à la consommation des ménages, hors tabac, pour la même année.
II. - Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
... - La perte de recettes pour l'État résultant de l'indexation de la dotation globale de fonctionnement sur l'inflation constatée l'année précédente est compensée, à due concurrence, par l'institution d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
La parole est à Mme Nicole Bricq.