M. Richard Tuheiava. Les deux systèmes proposés ayant un résultat quasiment identique, pourquoi braquer davantage nos électeurs ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Mathon-Poinat, pour explication de vote.
Mme Josiane Mathon-Poinat. Compte tenu des explications de M. Tuheiava, je retire l’amendement n° 11 au profit de l’amendement n° 23, lequel est plus précis.
Mme la présidente. L’amendement n° 11 est retiré.
Je mets aux voix l'amendement n° 23.
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, adopte l'amendement.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 2, modifié.
(L'article 2 est adopté.)
Article 3
Le deuxième alinéa de l’article 106 de la même loi organique est ainsi rédigé :
« Chaque liste comporte un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir dans chaque section, augmenté de deux. » – (Adopté.)
Article 4
Le II de l’article 107 de la même loi organique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les mots : « sur la liste » sont remplacés par les mots : « sur la section de la liste » ;
2° À la troisième phrase du cinquième alinéa, les mots : « 12,5 % du total des suffrages exprimés » sont remplacés par les mots : « 10 % des électeurs inscrits ».
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.
L'amendement n° 12 est présenté par Mmes Assassi, Borvo Cohen-Seat, Mathon-Poinat et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.
L'amendement n° 24 est présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Alinéa 3
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l’amendement n° 12.
Mme Éliane Assassi. Cet amendement vise à créer un parallélisme des formes entre élections générales et partielles, ce qui est la moindre des choses.
Plutôt que d’imposer une barrière administrative trop élevée, mieux vaut faire confiance à l’intelligence des forces politiques locales pour passer les alliances et les accords les plus adéquats lors d’élections partielles.
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Tuheiava, pour présenter l'amendement n° 24.
M. Richard Tuheiava. Il s’agit d’un amendement de coordination, madame la présidente.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. L’amendement n° 23 ayant été adopté, par coordination, ces deux amendements identiques doivent l’être également. Par conséquent, la commission ne peut qu’émettre un avis favorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Par cohérence, le Gouvernement est défavorable à ces amendements identiques.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 12 et 24.
(Les amendements sont adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l'article 4, modifié.
(L'article 4 est adopté.)
Chapitre ii
Dispositions relatives à l’organisation et au fonctionnement des institutions de la Polynésie française
Article additionnel avant l'article 5 A
Mme la présidente. L'amendement n° 25, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Avant l’article 5 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le septième alinéa (V) de l’article 8 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée est ainsi rédigé :
« V. - Le haut-commissaire de la République assure, à titre d'information, la publication au Journal officiel de la Polynésie française, ainsi que par voie électronique, des dispositions législatives et réglementaires telles qu'elles sont applicables en Polynésie française et procède à la consolidation des lois et règlements. Cette obligation s’applique aux dispositions législatives et réglementaires qui comportent une mention expresse à cette fin ou qui sont applicables de plein droit. »
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. L’extension des textes législatifs et réglementaires de l’État à la Polynésie française méconnaît trop souvent l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité du droit.
En effet, les dispositifs d’extension sont rédigés de telle façon qu’il est souvent impossible de comprendre quels articles des lois et règlements sont applicables. De plus, les textes n’étant pas « consolidés », le citoyen est obligé de procéder à de longues et périlleuses recherche sur Internet, notamment sur le site Légifrance, pour tenter de lire le droit en « recollant » des morceaux de textes.
L’État, conscient de cette difficulté, a d’ailleurs déjà consacré le principe figurant dans la modification statutaire proposée à propos du code général des collectivités territoriales applicable en Polynésie française.
La présente modification s’inspire de ce principe et vise à ajouter l’obligation de tenir à jour des textes consolidés par l’intermédiaire du haut-commissaire de la République.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. Cet amendement tend à ce que le haut-commissariat publie une version consolidée des textes applicables en Polynésie française. Cette demande paraît tout à fait légitime, tant la question de l’accès au droit et de l’intelligibilité du droit se pose dans les collectivités d’outre-mer. De surcroît, une version consolidée permet une meilleure connaissance du droit. Il s’agit de répondre à un objectif d’intérêt général.
Cet amendement a reçu toute la sympathie de la commission des lois, qui, cependant, s’en remet à l’avis du Gouvernement, celui-ci étant concerné au premier chef par la disposition proposée.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Une telle disposition n’existe dans aucun des statuts régissant les collectivités qui relèvent de l’article 74 de la Constitution. Il n’est pas prévu de donner la compétence en question au haut-commissaire. Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 25.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5 A (nouveau)
Après le quatrième alinéa de l’article 9 de loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Les projets de loi sont accompagnés, le cas échéant, des documents prévus à l’article 8 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution. » – (Adopté.)
Article additionnel après l'article 5 A
Mme la présidente. L'amendement n° 26, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 5 A, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. - Au cinquième alinéa de l’article 9 de la même loi organique, remplacer les mots : « un mois » par les mots : « deux mois » et les mots : « quinze jours » par les mots : « un mois ».
II. - Au troisième alinéa de l’article 10 de la même loi organique, remplacer les mots : « un mois » par les mots : « deux mois » et les mots : « quinze jours » par les mots : « un mois ».
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. La loi organique portant statut d’autonomie de la Polynésie française prévoit des mécanismes de consultation de l’assemblée de la Polynésie française et du conseil des ministres, dont les avis doivent permettre d’éclairer les autorités métropolitaines lors de l’élaboration d’un projet de texte national qui introduit, modifie ou supprime des dispositions particulières à la Polynésie française.
Cependant, de nombreuses difficultés font que les avis, indépendamment de leur qualité, sont souvent rendus hors délais légaux. Ainsi, en 2009, 61 % des avis adoptés n’ont eu aucune influence sur les projets de textes nationaux.
Trois problèmes majeurs sont mis en exergue par les services de l’assemblée de la Polynésie française : des délais légaux trop courts ; un recours trop récurrent à la procédure d’urgence, qui réduit de moitié des délais déjà trop brefs ; enfin, l’absence d’étude d’impact jointe à la saisine et de textes consolidés, ce travail indispensable à une lecture pertinente du projet soumis restant à la charge de la Polynésie française.
Par le présent amendement, nous proposons donc d’allonger le délai de consultation et de le porter de un à deux mois – il ne s’agit donc pas d’un bouleversement des institutions ! – et, le cas échéant, de permettre aux organes concernés de disposer des documents prévus à l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009, qui prévoit que les projets de loi doivent faire l’objet d’une étude d’impact.
Notre amendement vise donc à permettre aux autorités polynésiennes qui bénéficient du statut d’autonomie au titre de l’article 74 de la Constitution et qui sont conscientes de la difficulté d’améliorer la qualité de la loi de participer à l’effort national mené en la matière.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. Vous vous plaignez, monsieur le sénateur, que les avis demandés aux autorités polynésiennes ne soient pas toujours suivis d’effet, comme ils le devraient. Mon opinion est que plus on attend, moins ces avis ont de chance d’être pris en compte. Les délais qui sont prévus me paraissent donc raisonnables, car ils permettent de tenir compte des avis des autorités polynésiennes.
J’ajoute que, aux termes de l’article 5 A, les études d’impact devront être transmises pour information. Tout est donc fait pour les autorités polynésiennes puissent rendre leurs avis en toute connaissance de cause dans des délais relativement brefs, tout en disposant de la documentation et des renseignements nécessaires.
Dans ces conditions, la commission des lois a estimé qu’un allongement du délai, outre qu’il n’était pas nécessaire, pourrait même porter préjudice aux autorités polynésiennes. J’émets donc, au nom de la commission, un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Le délai actuellement prévu nous paraît suffisant. Les difficultés rencontrées en Polynésie pour émettre les avis dans les temps s’expliquent peut-être en partie par ce que j’appelle les « dégâts collatéraux » de l’instabilité politique.
Aujourd’hui, grâce à la procédure d’urgence, qui permet de réunir l’assemblée en session extraordinaire, nous arrivons normalement à obtenir ces avis. Enfin, il y a d’autant moins de raisons de changer ce délai qu’il s’impose de la même façon à toutes les collectivités d’outre-mer. Le Gouvernement est donc défavorable à cet amendement.
Mme la présidente. Je mets aux voix l'amendement n° 26.
(L'amendement n'est pas adopté.)
Article 5 B (nouveau)
I. – L’article 30 de la même loi organique est ainsi modifié :
1° Au début du premier alinéa, les mots : « La Polynésie française peut » sont remplacés par les mots : « La Polynésie française et ses établissements publics peuvent », et les mots : « elle peut » sont remplacés par les mots : « ils peuvent » ;
2° Au second alinéa, après le mot : « annexé », sont insérés les mots : «, selon les cas, » et après le mot : « annuellement », sont ajoutés les mots : « ou au bilan comptable annuel des établissements publics » ;
3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les représentants de la Polynésie française et les représentants des établissements publics de la Polynésie française au conseil d’administration ou au conseil de surveillance de sociétés visées au premier alinéa sont respectivement désignés par le conseil des ministres de la Polynésie française et par le conseil d’administration de l’établissement public actionnaire. »
II. – Le premier alinéa de l’article 157-3 de la même loi organique est complété par les mots : « ou des sociétés mentionnées à l’article 30 ». – (Adopté.)
Article 5 C (nouveau)
Après l’article 30 de la même loi organique, il est inséré un article 30-1 ainsi rédigé :
« Art. 30-1. – La Polynésie française peut, pour l’exercice de ses compétences, créer des autorités administratives indépendantes, pourvues ou non de la personnalité morale, aux fins d’exercer des missions de régulation dans le secteur économique.
« L'acte prévu à l'article 140 dénommé “loi du pays” créant une autorité administrative indépendante en définit les garanties d'indépendance, d'expertise et de continuité.
« Il peut lui attribuer, par dérogation aux dispositions des articles 64, 67, 89 à 92 et 95, un pouvoir réglementaire, ainsi que les pouvoirs d’investigation, de contrôle, de recommandation, de règlement des différends et de sanction, strictement nécessaires à l’accomplissement de ses missions. » – (Adopté.)
Article 5 D (nouveau)
L’article 41 de la même loi organique est ainsi modifié :
1° Les mots : « la Communauté européenne » sont remplacés par les mots : « l’Union européenne » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Le président de la Polynésie française peut demander à l’État de prendre l’initiative de négociations avec l’Union européenne en vue d’obtenir des mesures spécifiques, utiles au développement de la Polynésie française. » – (Adopté.)
Article 5 E (nouveau)
I. – Au II de l’article 43 de la même loi organique, après les mots : « les communes », sont insérés les mots : « ou les établissements publics de coopération intercommunale ».
II. – L’article 48 de la même loi organique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « aux maires » sont insérés les mots : « ou aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale » ;
2° Au deuxième alinéa, après les mots : « la commune intéressée » sont insérés les mots : « ou de l’assemblée délibérante de l’établissement public de coopération intercommunale intéressé ».
III. – L’article 53 de la même loi organique est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, après les mots : « aux communes », sont insérés les mots : « ou aux établissements publics de coopération intercommunale » ;
2° Au deuxième alinéa, après les mots : « conseil municipal » son insérés les mots : « ou de l’organe délibérant de l’établissement public de coopération intercommunale, ». – (Adopté.)
Article 5 F (nouveau)
Au deuxième alinéa de l’article 47 de la même loi organique, après les mots : « les rivages de la mer, » sont insérés les mots : « y compris les lais et relais de la mer, ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 5 F
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 28, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise et Gillot, est ainsi libellé :
Après l’article 5 F, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article 52 de la même loi organique est ainsi rédigé :
« Art. 52. - Un fonds intercommunal de péréquation reçoit une quote-part des impôts, droits et taxes perçus au profit du budget général de la Polynésie française.
« Cette quote-part, qui ne peut être inférieure à 15 % des dites ressources, est fixé par délibération de l’assemblée de la Polynésie française, après consultation du haut-commissaire de la République, en tenant compte des charges respectives de la Polynésie française, des communes et de leurs groupements.
« Les modalités de liquidation et de versement de cette quote-part sont déterminées par un acte prévu à l’article 140 et dénommé « loi du pays ».
« Le fonds intercommunal de péréquation peut recevoir également des subventions de l’État destinées à l’ensemble des communes et à leurs groupements.
« Le fonds intercommunal de péréquation est géré par un comité des finances locales de la Polynésie française composé de représentants des communes, du gouvernement de la Polynésie française, de l’assemblée de la Polynésie française et de l’État. Les représentants des collectivités territoriales constituent la majorité des membres du comité. Celui-ci est présidé par l’un de ses membres représentant les communes.
« Ce comité répartit les ressources du fonds entre les communes, pour une part au prorata du nombre de leurs habitants, pour une autre part compte tenu de leurs charges. Il peut décider d’attribuer une dotation affectée à des groupements de communes pour la réalisation d’opération d’investissement ou la prise en charge de dépenses de fonctionnement présentant un intérêt intercommunal.
« Un décret en Conseil d’État détermine les conditions d’élection des représentants des communes et de l’assemblée de la Polynésie française au comité des finances locales et celles afférentes au président dudit comité. Il fixe également les modalités selon lesquelles le fonds assure à chaque commune un minimum de ressources. »
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. Compte tenu du risque d’incohérence qui existe, sur un certain nombre de points, entre l’amendement n° 30 rectifié et l’amendement n° 28, je me vois dans l’obligation de retirer celui-ci.
Mme la présidente. L'amendement n° 28 est retiré.
L'amendement n° 30 rectifié, présenté par MM. Tuheiava, Patient, Antoinette, S. Larcher, Lise, Gillot et les membres du groupe socialiste, apparentés et rattachés, est ainsi libellé :
Après l’article 5 F, insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L'article 52 de la même loi organique est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le comité des finances locales est également en charge du diagnostic et du suivi financier, au cas par cas et dans le respect de l'article 6, de la situation des communes qui ne peuvent pas se conformer aux obligations prévues par les articles L. 2573-27, L. 2573-28 et L. 2573-30 du code général des collectivités territoriales. S’il est saisi d'une demande à cet effet par une ou plusieurs communes, le comité des finances locales peut émettre des recommandations à valeur consultative. »
La parole est à M. Richard Tuheiava.
M. Richard Tuheiava. Je voudrais m’attarder sur cet amendement, comme je le ferai plus tard sur l’amendement n° 8 rectifié.
Je vous le concède, monsieur le rapporteur, le domaine abordé ici ne concerne pas directement la stabilité des institutions de la Polynésie française. Nous sommes dans un cadre relativement particulier, puisque je propose à la Haute Assemblée de retoucher une disposition, l’article 52 de la loi organique, qui porte sur les missions du comité des finances locales.
La particularité du contexte tient aussi à ce que je pose cette question pour la troisième fois, après qu’elle a été relayée par mes collègues Bernard Frimat et Christian Cointat. Cette interrogation porte sur les compétences exercées par les communes de Polynésie française, notamment les trois compétences environnementales que sont la collecte des déchets, la distribution de l’eau potable et l’assainissement des eaux usées.
C’est donc la troisième fois que j’évoque cette problématique. Bien évidemment, à chaque fois, les véhicules législatifs, par le truchement desquels je soulignais cette difficulté, n’étaient pas adaptés… Tel est du moins l’argument qu’on m’a opposé.
Toutefois, il n’y aura pas au Parlement un autre véhicule législatif organique concernant la Polynésie française avant un bon bout de temps ! Or c’est justement de ce type de texte dont nous avons besoin pour insérer dans la législation cet amendement qui nous paraît important. Il est tellement essentiel pour nous que, pas plus tard que voilà une semaine, au terme d’un séminaire européen en Polynésie française, quarante-six communes sur les quarante-huit du territoire m’ont demandé de le déposer !
Concrètement, cet amendement vise à étendre les missions du comité des finances locales, originellement en charge de la répartition des ressources du Fonds intercommunal de péréquation, le FIP, en faveur des communes, et à mettre en application l’article 2 de la loi organique, lequel précise que l’État et la Polynésie française doivent concourir, ensemble, au développement des communes.
Le problème est que les communes de Polynésie se trouvent exsangues en raison de la baisse actuelle et durable du concours financier provenant du FIP. De plus, elles doivent respecter rigoureusement un calendrier législatif que la Haute Assemblée ne peut plus ignorer désormais. Ce dernier est imposé par le code général des collectivités territoriales en matière de collecte et de traitement des déchets, de distribution d’eau potable et d’assainissement des eaux usées.
Cette situation a été très clairement mise en évidence dans le rapport de la mission d’information réalisée par nos collègues Bernard Frimat et Christian Cointat en 2008.
Or il se trouve que les trois compétences environnementales que je viens de citer obèrent irrémédiablement et lourdement les finances des communes polynésiennes. Plus de la moitié de ces dernières ne seront, en effet, absolument pas en mesure de respecter les délais législatifs.
J’avais pris le soin de déposer une proposition de loi devant la Haute Assemblée pour solliciter l’extension de ces délais, ce qui aurait réglé le problème. Néanmoins les choses ne sont pas si simples. En outre, cette solution, qui n’est d’ailleurs pas forcément voulue par toutes les communes, n’est peut-être pas la bonne.
C'est la raison pour laquelle il m’a semblé bien plus pertinent et habile d’utiliser le véhicule législatif que constitue cette loi organique pour faire adopter par le Parlement et admettre par le Gouvernement, qui est conscient de ce problème, un principe : l’État et la Polynésie française pourraient, au travers de ce comité des finances locales, accompagner les communes qui ne seraient pas en mesure de satisfaire aux délais prévus par le code général des collectivités territoriales, en prenant en charge, au cas par cas, le diagnostic et le suivi financier.
La rédaction que je propose a recueilli ce matin l’assentiment de la commission des lois. Elle se limite à reprendre celle des textes du code général des collectivités territoriales qui, sur le plan juridique, encadrent très clairement et expressément ce nécessaire accompagnement des communes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Christian Cointat, rapporteur. Je suis très embarrassé, car M. Tuheiava a levé tout suspense en donnant l’avis de la commission. (Sourires.) Comment pourrais-je ne pas aller dans le même sens ?
L’amendement n° 30 rectifié est important. Ses dispositions rejoignent les conclusions du rapport que nous avions rédigé sur la Polynésie française. Il tend à permettre au comité des finances locales d’apporter son aide aux communes qui ne parviennent pas à respecter le calendrier fixé par l’ordonnance du 5 octobre 2007. Ce dernier leur impose d’assurer la distribution en eau potable avant le 31 décembre 2015, l’assainissement de l’eau avant le 31 décembre 2020 et le traitement des ordures ménagères et des déchets avant le 31 décembre 2011.
Lors de la mission que nous avions réalisée pour le compte de la commission des lois, M. Frimat et moi-même, nous avions pu constater et mettre en évidence les difficultés rencontrées par les communes de Polynésie française, qui, faute de ressources financières, peinent à développer les équipements nécessaires au bien-être des habitants et au respect de l’environnement, notamment dans les Tuamotu-Gambier et dans les Australes.
La commission est favorable à cet amendement, dont les dispositions vont dans le sens que nous avions préconisé à l’époque.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Marie-Luce Penchard, ministre. Monsieur Tuheiava, vous posez une vraie question. Nous avions déjà eu l’occasion d’échanger sur les compétences des communes de Polynésie française. Il est vrai que le rapport rédigé par les sénateurs Frimat et Cointat a soulevé cette difficulté. Nous avons nous-mêmes considéré que des précisions devaient être apportées dans la loi organique.
Pour autant, je ne pense pas que l’obligation de réaliser un certain nombre d’ouvrages soit au cœur des missions du comité des finances locales. Il est toujours possible – c’est ce qui s’est passé antérieurement – de doter les communes, à l’aide de subventions, pour qu’elles réalisent les ouvrages.
Il est certain qu’il faudra, à un moment, clarifier les compétences entre le pays et les communes et aller vers une autonomie de ces collectivités pour leur permettre d’assumer leurs responsabilités.
C'est la raison pour laquelle l’État a toujours souhaité qu’un travail soit réalisé en ce sens, notamment avec le syndicat de promotion des communes. Cette tâche a été engagée à plusieurs reprises, mais l’instabilité n’a permis ni de mener un débat serein sur cette question ni de poursuivre nos réflexions.
Je pense qu’il faut procéder en deux temps. Ce n’est pas au détour du vote d’un amendement que nous pourrons régler toutes les questions qui se posent autour des compétences des communes. L’objectif de la réforme est plutôt d’aller vers la stabilité politique. Lorsqu’il y aura en Polynésie un gouvernement stable, attaché à traiter les problèmes qui concernent les habitants de ce territoire, nous serons forcément amenés à aborder la réalisation de ces ouvrages indispensables pour les Polynésiens, notamment l’alimentation en eau potable. En même temps, nous pourrons poursuivre le travail mené sur le comité des finances locales et proposer une modification de la loi organique, qui deviendra alors inévitable.
C'est la raison pour laquelle, en l’état des choses, je considère qu’il ne faut pas déséquilibrer la loi organique en apportant une telle modification. J’émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable sur l’amendement n° 30 rectifié.
Mme la présidente. La parole est à M. Richard Tuheiava, pour explication de vote.
M. Richard Tuheiava. Mes chers collègues, je préfère vous donner une lecture beaucoup plus précise de l’amendement pour que nous nous entendions bien sur ce que, au travers de ces dispositions, je demande au comité des finances locales.
J’en appelle, au-delà de la raison, à la solidarité de cette assemblée. Je crois que le lieu s’y prête puisque nous sommes au Sénat, qui assure la représentation des collectivités territoriales. Dans cet hémicycle, chacun connaît au quotidien les difficultés que j’évoque.
J’en appelle donc à votre sagacité. À mon retour en Polynésie française, comment pourrai-je expliquer aux maires des quarante-huit communes concernées que, à trois reprises, le Parlement n’a pas voulu entendre les difficultés dans lesquelles ils se trouvent aujourd'hui et qui ont pourtant été constatées et reconnues ?
Comment pourrai-je leur expliquer que, en 2007, on a imposé aux communes, par le biais d’une ordonnance, sans débat au Parlement, des compétences pour l’exercice desquelles on refuse aujourd’hui d’entériner un partage des responsabilités et un accompagnement au quotidien ?
C'est pourquoi je voudrais démystifier cet amendement et montrer à quel point il est inoffensif.
Je propose la rédaction suivante : « Le comité des finances locales est également en charge » – c’est l’ajout – « du diagnostic ». Mais ce dernier est déjà fait ! C’est la raison du débat de cet après-midi. Nous proposons, en outre, que le comité des finances locales soit chargé « du suivi financier, au cas par cas et dans le respect de l’article 6, de la situation des communes… » L’article 6 vise la libre administration des collectivités territoriales. Nous n’empiétons donc pas sur les compétences des communes. Celles qui sont concernées sont celles qui ne peuvent pas – j’y insiste – se conformer aux obligations prévues par les trois textes instituant les trois compétences.
« Si le comité des finances locales est saisi d’une demande à cet effet par une ou plusieurs communes, il peut émettre des recommandations à valeur consultative. » Nous poussons donc le bouchon un peu plus loin et précisons que le comité des finances locales ne s’autosaisit pas d’office. Je le répète, cette instance n’intervient que s’il est saisi d’une demande à cet effet par une ou plusieurs communes.
En effet, il peut arriver que le problème dépasse la dimension d’une commune prise individuellement et concerne tout un archipel. Le comité des finances locales peut alors émettre des recommandations à valeur consultative.
Si j’entends les inquiétudes qui s’expriment, je ne puis m’empêcher de souligner l’urgence de la situation dans laquelle les communes de la Polynésie française se trouvent aujourd'hui. Or elles se voient toujours opposer la même réponse ! Je le répète, ce sont elles qui, la semaine dernière, m’ont enjoint de déposer un tel amendement.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, vous vous en doutez, à mon retour en Polynésie française – la presse se fera d'ailleurs largement l’écho des débats qui se seront déroulés dans cet hémicycle –, j'aurai beaucoup de mal à expliquer aux maires de ces communes pourquoi, à trois reprises, on a refusé de s’occuper d’elles : d’abord, parce que le texte examiné n'était pas le bon véhicule législatif, ensuite, parce qu’il fallait une loi organique, enfin, aujourd'hui, alors que nous discutons précisément d’un projet de loi organique, parce que c’est trop tôt !