M. le président. L'amendement n° 133, présenté par Mmes Assassi et Cukierman, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Cécile Cukierman.
Mme Cécile Cukierman. En première lecture, nous avons discuté – là encore tardivement – de la situation des tribunaux de commerce. La justice rendue par ces tribunaux n’est pas exempte de critiques. Issus d’une histoire particulière, les juges consulaires sont non pas des professionnels du droit, mais des chefs d’entreprise et des commerçants élus.
Les tribunaux de commerce sont, aujourd’hui, entachés de plusieurs affaires révélant des conflits d’intérêts et des soupçons de partialité dans les jugements qu’ils rendent. Leurs juges sont, en effet, issus du monde de l’entreprise et désignés par leurs pairs, alors qu’ils sont amenés à se prononcer sur des litiges entre commerçants et sur des procédures collectives qui placent les entreprises en difficulté sous contrôle judiciaire, en procédure de sauvegarde, de cessation de paiement, de redressement ou de liquidation judiciaire.
Si une réforme doit être adoptée, elle est très éloignée de celle que prévoit le présent article qui crée des tribunaux de commerce spécialisés – ce qui laisse, du reste, craindre une désertification territoriale dans un certain nombre de départements –, soit une énième juridiction spécialisée, en dehors du droit commun.
Alors que la crise met de nombreuses entreprises et leurs salariés en grande difficulté, il nous paraît plus que jamais nécessaire de laver les tribunaux de commerce de tout soupçon en introduisant l’échevinage. Il s’agit de conserver des juges élus, car la connaissance professionnelle du monde de l’entreprise est nécessaire, mais de leur adjoindre un magistrat, garant de l’impartialité du jugement, évitant tout conflit d’intérêts et renforçant la légitimité des décisions rendues.
Telle est la réforme qui avait été promise et qui devrait être soutenue par un gouvernement se réclamant de la gauche ! Seule cette réforme permettra, en effet, de rendre aux tribunaux de commerce leur capacité à jouer un rôle de régulateur et de remplir une mission d’apaisement des conflits.
Nous demandons donc la suppression de l’article 66, car les tribunaux de commerce spécialisés ne constituent pas une solution et ajouteront, au contraire, de la complexité aux procédures.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. François Pillet, corapporteur. Cet amendement de suppression est contraire à la position initialement adoptée en première lecture par la commission spéciale, puis par le Sénat, laquelle consistait à accepter le principe de la spécialisation de certains tribunaux de commerce sur les affaires les plus complexes.
À l’origine, le texte qui nous était proposé ne nous donnait satisfaction sur aucun point. Nous l’avons beaucoup modifié. En l’espèce, il faut le reconnaître, le Gouvernement a consenti une importante avancée, partant du texte du Sénat. Si la rédaction qui nous est soumise n’est pas entièrement conforme à nos propositions, elle s’en rapproche toutefois beaucoup plus que le texte initial.
De plus, il semblerait que les juges des tribunaux de commerce soient favorables à la rédaction actuelle relative aux conditions dans lesquelles la spécialisation peut être exercée.
J’émets, au nom de la commission spéciale, un avis défavorable sur l’amendement n° 133.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Nicole Bricq, pour explication de vote sur l'article.
Mme Nicole Bricq. Nous ne voterons pas la rédaction de cet article issue des travaux de la commission spéciale, car un différend sur les seuils demeure – le nombre de salariés et le chiffre d’affaires.
M. le président. Je mets aux voix l'article 66.
(L'article 66 est adopté.)
Article 67
(Non modifié)
L’article L. 662-2 du code de commerce est ainsi modifié :
1° À la première phrase, après les mots : « de la cour, », sont insérés les mots : « ou devant une juridiction mentionnée à l’article L. 721-8 » ;
2° La deuxième phrase est complétée par les mots : « ou une juridiction mentionnée à l’article L. 721-8 » ;
3° (Supprimé)
M. le président. Je mets aux voix l'article 67.
(L'article 67 est adopté.)
Article 67 bis
I A (nouveau). – Le dernier alinéa de l’article L. 662-3 du code de commerce est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Lorsque le débiteur est une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation, le tribunal peut entendre l’Autorité des marchés financiers, à sa demande, d’office ou à la demande du ministère public. »
I. – L’article L. 662-8 du code de commerce est ainsi rédigé :
« Art. L. 662-8. – Le tribunal est compétent pour connaître de toute procédure concernant une société qui détient ou contrôle, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, une société pour laquelle une procédure est en cours devant lui. Il est également compétent pour connaître de toute procédure concernant une société qui est détenue ou contrôlée, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, par une société pour laquelle une procédure est en cours devant lui.
« Il peut désigner un administrateur judiciaire et un mandataire judiciaire communs à l’ensemble des procédures.
« Par dérogation à la première phrase du premier alinéa, toute procédure en cours concernant une société détenue ou contrôlée, au sens des articles L. 233-1 et L. 233-3, par une société pour laquelle une procédure est ouverte devant un tribunal de commerce spécialisé est renvoyée devant ce dernier. »
I bis. – Le chapitre II du titre VI du livre VI du même code est complété par un article L. 662-9 ainsi rédigé :
« Art. L. 662-9. – Lorsque le débiteur est une société dont les titres sont admis aux négociations sur un marché réglementé ou sur un système multilatéral de négociation, le tribunal consulte l’Autorité des marchés financiers, dans les conditions prévues à l’article L. 621-20 du code monétaire et financier, dans le cas prévu au troisième alinéa du I de l’article L. 631-19 du présent code et avant de statuer dans le cas prévu à l’article L. 631-19-2 dudit code. »
II. – (Non modifié) Le présent article est applicable aux procédures ouvertes à compter du 1er mars 2016. – (Adopté.)
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Section 2
Administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires
Article 69
(Supprimé)
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Section 3
Efficacité renforcée des procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire, de rétablissement professionnel et de liquidation judiciaire
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Article 70
I. – Après l’article L. 631-19-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 631-19-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 631-19-2. – I. – Dans le cas prévu au troisième alinéa du I de l’article L. 631-19, lorsque les assemblées mentionnées à l’article L. 626-3 ont rejeté le projet de plan et lorsque le redressement de l’entreprise le requiert et qu’il n’existe aucune autre solution sérieuse pour éviter une cessation d’activité de nature à causer un trouble grave à l’économie nationale ou régionale, le tribunal, sur la demande du ministère public ou de l’administrateur judiciaire et après avoir examiné la possibilité de cession totale ou partielle de l’entreprise, peut ordonner la cession de tout ou partie des parts sociales, titres de capital ou valeurs mobilières donnant accès au capital des associés ou actionnaires opposants, au profit des personnes qui se sont engagées à exécuter le plan. Le II de l’article L. 631-19 est applicable.
« Le tribunal statue en présence du ministère public, après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur, les personnes qui se sont engagées à exécuter le plan, les associés ou actionnaires opposants, les autres associés ou actionnaires et les représentants du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel.
« En l’absence d’accord entre les parties, le prix de cession est fixé à dire d’expert, dans un délai fixé par le tribunal.
« Le tribunal statue sur le prix de cession dans les conditions prévues au deuxième alinéa du présent I.
« II. – Le tribunal subordonne l’arrêt du plan à l’engagement des cessionnaires de conserver les droits sociaux pour une durée qu’il fixe, ne pouvant excéder celle du plan, ainsi qu’à la présentation par les cessionnaires de garanties correspondant à leurs engagements figurant dans le projet de plan.
« Le plan est arrêté sous la condition du paiement comptant du prix par les cessionnaires. À défaut, le tribunal prononce, à la demande du ministère public ou d’un associé ou actionnaire cédant, la résolution de la cession.
« III. – Les personnes qui se sont engagées à exécuter le plan sont tenues de racheter les droits sociaux des autres associés ou actionnaires si ceux-ci le demandent dans un délai fixé par le tribunal. Les deux derniers alinéas du I sont applicables.
« IV. – Si les cessionnaires n’exécutent pas leurs engagements, le président du tribunal peut, à la demande du commissaire à l’exécution du plan, leur enjoindre de les exécuter et le tribunal peut, à la demande du ministère public ou, après avoir recueilli l’avis du ministère public, à la demande du commissaire à l’exécution du plan, des représentants du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et de tout intéressé, prononcer la résolution du plan sans préjudice de dommages et intérêts.
« V. – Le présent article est applicable :
« 1° Lorsque le débiteur est une entreprise de taille intermédiaire ou une grande entreprise au sens de l’article 51 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l’économie ;
« 2° Lorsque le débiteur a établi des comptes consolidés conformément à l’article L. 233-16 et que l’ensemble constitué par les entreprises comprises dans la consolidation représente un nombre de salariés, un chiffre d’affaires ou un total de bilan correspondant au 1°.
« Il n’est pas applicable lorsque le débiteur exerce une activité professionnelle libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire. »
II. – Le I de l’article L. 661-1 du même code est ainsi modifié :
1° (Supprimé)
2° Après le 6°, il est inséré un 6° bis ainsi rédigé :
« 6° bis Les décisions statuant sur la cession ordonnée en application de l’article L. 631-19-2 de la part du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et du ministère public, ainsi que de la part des associés ou actionnaires cédants ou cessionnaires ; ».
III. – (Non modifié) Les articles L. 631-19-2 et L. 661-1 du code de commerce, dans leur rédaction résultant du présent article, sont applicables dans les îles Wallis et Futuna.
IV. – (Non modifié)
M. le président. Je mets aux voix l'article 70.
(L'article 70 est adopté.)
Article 70 bis
(Supprimé)
Article 70 ter
(Non modifié)
Dans les conditions prévues à l’article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par ordonnance, dans le délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, les mesures relevant du domaine de la loi pour :
1° Rapprocher le régime applicable au gage des stocks défini au chapitre VII du titre II du livre V du code de commerce du régime de droit commun du gage de meubles corporels défini au chapitre II du sous-titre II du titre II du livre IV du code civil, pour le clarifier et rendre possible le pacte commissoire et le gage avec ou sans dépossession, en vue de favoriser le financement des entreprises sur stocks ;
2° Modifier le régime applicable au gage de meubles corporels et au gage des stocks dans le cadre du livre VI du code de commerce en vue de favoriser la poursuite de l’activité de l’entreprise, le maintien de l’emploi et l’apurement du passif. – (Adopté.)
TITRE III
TRAVAILLER
Chapitre Ier
Exceptions au repos dominical et en soirée
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Article 75
L’article L. 3132-25-2 du code du travail est ainsi rédigé :
« Art. L. 3132-25-2. – I. – La demande de délimitation ou de modification des zones définies aux articles L. 3132-25 et L. 3132-25-1 est faite par le maire ou, après consultation des maires concernés, par le président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, lorsque celui-ci existe et que le périmètre de la zone concernée excède le territoire d’une seule commune.
« La demande de délimitation ou de modification de ces zones est transmise au représentant de l’État dans la région. Elle est motivée et comporte une étude d’impact justifiant notamment l’opportunité de la création ou de la modification de la zone.
« II. – Les zones mentionnées au I sont délimitées ou modifiées par le représentant de l’État dans la région après avis :
« 1° Du conseil municipal des communes dont le territoire est concerné ;
« 2° Des organisations professionnelles d’employeurs et des organisations syndicales de salariés intéressées ;
« 3° De l’organe délibérant des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont sont membres les communes dont le territoire est concerné ;
« 4° (Supprimé)
« 5° Du comité départemental du tourisme, pour les zones touristiques mentionnées à l’article L. 3132-25 ;
« 6° De la chambre de commerce et d’industrie et de la chambre de métiers et de l’artisanat, pour les zones commerciales mentionnées à l’article L. 3132-25-1.
« L’avis de ces organismes est réputé donné à l’issue d’un délai de deux mois à compter de leur saisine en cas de demande de délimitation d’une zone et d’un mois en cas de demande de modification d’une zone existante.
« III. – Le représentant de l’État dans la région statue dans un délai de six mois sur la demande de délimitation dont il est saisi. Il statue dans un délai de trois mois sur une demande de modification d’une zone. » – (Adopté.)
Article 76
I. – L’article L. 3132-25-3 du code du travail est ainsi modifié :
1° Le premier alinéa est ainsi modifié :
a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;
b) Les références : « aux articles L. 3132-20 et L. 3132-25-1 » sont remplacées par la référence : « à l’article L. 3132-20 » ;
2° Sont ajoutés des II à IV ainsi rédigés :
« II. – Pour bénéficier de la faculté de donner le repos hebdomadaire par roulement pour tout ou partie du personnel, prévue aux articles L. 3132-24, L. 3132-25, L. 3132-25-1 et L. 3132-25-6, les établissements doivent être couverts soit par un accord collectif de branche, de groupe, d’entreprise ou d’établissement, soit par un accord conclu à un niveau territorial, soit par un accord conclu dans les conditions mentionnées aux II à IV de l’article L. 5125-4, soit, à défaut, par une décision de l’employeur.
« Les accords collectifs de branche, de groupe, d’entreprise et d’établissement et les accords territoriaux prévoient une compensation déterminée afin de tenir compte du caractère dérogatoire du travail accompli le dimanche.
« L’accord mentionné au premier alinéa du présent II fixe les contreparties, en particulier salariales, accordées aux salariés privés du repos dominical ainsi que les engagements pris en termes d’emploi ou en faveur de certains publics en difficulté ou de personnes handicapées. Il prévoit également les mesures destinées à faciliter la conciliation entre la vie professionnelle et la vie personnelle des salariés privés du repos dominical. Le présent alinéa s’applique également aux établissements autres que ceux mentionnés à l’article L. 3132-12 pour leurs salariés qui travaillent dans la surface de vente d’un établissement situé dans l’une des zones mentionnées aux articles L. 3132-24, L. 3132-25 et L. 3132-25-1 ou dans l’une des gares mentionnées à l’article L. 3132-25-6.
« L’accord fixe les contreparties mises en œuvre par l’employeur pour compenser les charges induites par la garde des enfants pour les salariés privés du repos dominical.
« À défaut d’accord collectif de branche, de groupe, d’entreprise ou d’établissement, attesté par un procès-verbal de désaccord dans les entreprises pourvues de délégués syndicaux ou dans lesquelles une négociation a été engagée dans les conditions mentionnées aux II à IV de l’article L. 5125-4, ou d’accord conclu à un niveau territorial, une décision de l’employeur, prise après avis du comité d’entreprise ou des délégués du personnel, lorsqu’ils existent, et approuvée par référendum organisé auprès des personnels concernés par cette dérogation au repos dominical, fixe les contreparties et les mesures mentionnées aux troisième et quatrième alinéas du présent II.
« Lorsqu’un accord collectif ou qu’un accord territorial est régulièrement négocié postérieurement à la décision prise sur le fondement de l’avant-dernier alinéa du présent II, cet accord s’applique en lieu et place des contreparties prévues par cette décision.
« III. – Dans les cas prévus aux I et II du présent article, l’accord ou la décision de l’employeur fixent les conditions dans lesquelles l’employeur prend en compte l’évolution de la situation personnelle des salariés privés du repos dominical. »
« IV. – Le II n’est pas applicable aux établissements de vente au détail mentionnés à l’article L. 3132-25 employant moins de onze salariés. »
II. – (Non modifié)
M. le président. L'amendement n° 69, présenté par Mme Lienemann, est ainsi libellé :
Alinéa 6
Après les mots :
niveau territorial,
insérer les mots :
dans les conditions définies au I de l’article L. 5125-4,
La parole est à Mme Marie-Noëlle Lienemann.
Mme Marie-Noëlle Lienemann. Cet amendement vise à faire en sorte que les accords de branche, d’entreprise et d’établissement qui pourront déroger à la règle du repos dominical soient réellement majoritaires.
Actuellement, de tels accords doivent respecter deux critères : d’une part, la signature par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 30 % des suffrages exprimés au premier tour des dernières élections des titulaires au comité d’entreprise, de la délégation unique du personnel, DUP, ou des délégués du personnel, quel que soit le nombre de votants et, d’autre part, l’absence d’opposition d’une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli la majorité des suffrages exprimés à ces mêmes élections quel que soit le nombre de votants. En clair, c’est le veto à 50 % !
Par cet amendement, je propose que ces accords ne puissent être considérés comme admis que s’ils ont recueilli la signature d’une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli au moins 50 % des suffrages exprimés en faveur d’organisations représentatives au premier tour des dernières élections des titulaires aux mêmes instances.
Compte tenu de l’importance que le Gouvernement attache à ces accords, il me paraît fondamental que ceux-ci ne puissent être entachés de suspicion de ne pas être majoritaires. Avec le dispositif que je propose, on sera certain qu’il s’agira d’un accord de branche, d’entreprise ou d’établissement réellement majoritaire.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. Le Sénat avait déjà examiné un amendement identique en première lecture et il l’avait rejeté. La proposition de Mme Lienemann consiste à soumettre l’ouverture des commerces le dimanche à la signature d’un accord majoritaire avec les partenaires sociaux.
Si la validité d’un accord relatif à l’ouverture dominicale est conditionnée à sa signature par des organisations syndicales ayant recueilli au moins 50 % des suffrages lors des dernières élections professionnelles, contre 30 % dans le droit commun, il est certain que le nombre de tels accords sera limité et que les ouvertures dominicales seront moins nombreuses. Est-ce vraiment le but recherché à travers le présent projet de loi ? Je ne le pense pas et j’émets, au nom de la commission spéciale, un avis défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 134, présenté par Mmes Assassi, David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
I. – Alinéa 6
Supprimer les mots :
, soit, à défaut, par une décision de l’employeur
II. – Alinéas 10 à 12
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Dominique Watrin.
M. Dominique Watrin. Les alinéas 10 à 12 de l’article 76 que nous souhaitons supprimer permettent, en cas d’échec du dialogue social, de déroger à la règle du repos dominical par décision unilatérale de l’employeur.
Cette mesure a été introduite en première lecture par la droite sénatoriale avant d’être partiellement remise en cause à l’Assemblée nationale. Je dis bien « partiellement », car l’Assemblée nationale a maintenu la possibilité d’agir par référendum dans les entreprises comptant moins de onze salariés.
La commission spéciale du Sénat a rétabli les dispositions qu’elle avait introduites, remettant ainsi en cause le principe qui devrait être le garde-fou présenté à l’occasion de l’examen du présent projet de loi, à savoir pas d’accord, pas d’ouverture dominicale.
Il est inconcevable que les salariés puissent devoir travailler le dimanche sans bénéficier d’un minimum de protection ! La protection première est celle qui est offerte par les organisations qui les représentent. Si les négociations n’aboutissent pas à un accord, c’est que les salariés ne voient pas quel intérêt ces ouvertures dominicales pourraient présenter pour eux. En effet, celles-ci sont coûteuses pour leur vie sociale comme personnelle. Parfois même, elles ne présentent aucun avantage sur le plan financier étant donné la faiblesse des contreparties accordées.
Il est donc fondamental de respecter leur volonté, laquelle s’exprime à travers celle de leurs représentants.
M. le président. L'amendement n° 135, présenté par Mmes Assassi, David et Cohen, M. Watrin et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :
Alinéa 10
Supprimer cet alinéa.
La parole est à Mme Annie David.
Mme Annie David. Dans le droit fil du précédent amendement, nous souhaitons refuser la possibilité offerte aux employeurs de passer outre le dialogue social en consultant directement les salariés par référendum quand les négociations échouent, ce qui revient à renier la légitimité des organisations représentatives du personnel et à prévoir dans la loi les moyens de passer outre le contre-pouvoir qu’elles exercent dans les entreprises. En effet, le principe même de leur existence, basé sur le fait que les salariés peuvent avoir collectivement un poids face à leur employeur, est en l’espèce remis en cause.
Quels ne sont pas les pressions, chantages, promesses qui peuvent être mis en œuvre pour contraindre les salariés individuellement au détriment de leur intérêt collectif !
De nouveau, nous le répétons, si un accord collectif n’est pas conclu, l’ouverture ne doit pas être possible. Rappelons, à ce titre, que dans les très petites entreprises, la possibilité est offerte d’avoir recours aux salariés mandatés.
Quelques jours après la fin de notre discussion sur le projet de loi relatif au dialogue social et à l’emploi, je trouve l’article 76 tout à fait indécent !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Catherine Deroche, corapporteur. La commission est défavorable à ces amendements. En effet, elle souhaite préserver, à côté des accords collectifs de branche, de territoire, d’entreprise, d’établissement ou de groupe, cette possibilité d’ouvrir le commerce sur la base d’une décision de l’employeur – le rétablissement par l’Assemblée nationale de ce dispositif pour les entreprises de moins de onze salariés montre d’ailleurs qu’il n’est pas si scélérat que cela ! – quelle que soit la taille de l’entreprise.
Nous l’avons constaté, des blocages – notamment sur Paris – subsistent, certaines organisations syndicales étant très hostiles à l’ouverture des magasins le dimanche – notamment s’agissant des grands magasins.
Selon moi, demander l’avis des salariés concernés n’est pas vraiment un déni de démocratie, surtout qu’il y a obligatoirement contrepartie de l’employeur. Consulter les salariés est bien, au contraire, l’essence même de la démocratie !
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Emmanuel Macron, ministre. Les auteurs de ces deux amendements proposent de supprimer les dispositions par lesquelles la commission spéciale du Sénat a étendu à toutes les entreprises la décision unilatérale sur la base d’un référendum.
Je rappelle le principe retenu dans le texte initial : pas d’accord, pas d’ouverture ! L’infléchissement réalisé après de nombreuses consultations par le Gouvernement concerne les entreprises de moins de onze salariés. Par souci de simplicité et pour éviter d’avoir systématiquement recours au mandatement dans de petites entreprises qui, depuis plusieurs années, ouvraient déjà le dimanche, il s’agit de laisser la possibilité de recourir à une consultation sur l’ouverture dominicale et la compensation. Cette faculté, nous voulons l’encadrer et la réserver aux seules situations évoquées sans autoriser plus largement l’organisation d’un référendum.
Par référence à la philosophie du texte premier et à la volonté constamment réitérée, sous réserve de l’adaptation qu’il souhaite préserver, le Gouvernement émet un avis favorable sur les amendements de suppression.