M. Jean-Claude Carle. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Jean Desessard, pour explication de vote.
M. Jean Desessard. Je n’ai pas dissimulé le fait que les écologistes ne partagent pas tous la même position sur ce sujet. Vous citez José Bové : certains membres de notre groupe sont d’accord avec lui.
Bien évidemment, je suis allé à la rencontre des éleveurs ! Ce dont il s’agit ici, c’est du respect de la convention de Berne. Les écologistes ont une vision globale et ne souhaitent pas que les lions, les tigres, les ours ou les loups disparaissent de la planète ! Si, à chaque menace, on éradique une espèce, alors il n’en restera pas beaucoup ! Nous devons accepter l’existence d’autres espèces, qui peuvent effectivement constituer parfois une menace pour les humains. Si on éradique en France, pourquoi ne le ferait-on pas également dans les autres pays d’Europe, en Asie ou en Afrique, où il arrive que certains animaux s’en prennent à l’homme ?
Il faut donc envisager la question de manière globale, en tenant bien sûr compte des désagréments et des dégâts que causent les prédateurs dans notre pays. Monsieur Bailly, ce sont non pas les loups, mais les chiens qui représentent aujourd’hui le plus grave danger pour les humains. Ils blessent, et même tuent des personnes : faut-il les éradiquer ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Il y a plus de patous parce qu’il y a plus de loups !
M. Jean Desessard. Les chiens qui attaquent des humains dans nos villes ne sont pas des patous !
M. le président. L’amendement n° 175 rectifié, présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Delahaye et Delcros, Mme Férat, MM. Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot et Médevielle, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 10° de l’article L. 223-8 du code rural et de la pêche maritime est complété par une phrase ainsi rédigée :
« Toutefois, les consultations et avis résultant de l’application des dispositions des articles L. 411-1 et L. 411-2 du code de l’environnement doivent intervenir dans un délai maximum de deux mois à compter de la découverte du foyer infectieux ; ».
La parole est à M. Loïc Hervé.
M. Loïc Hervé. Compte tenu des enjeux de santé publique, des risques sanitaires pour les troupeaux en zones de montagne, des souffrances physiques endurées par les espèces animales protégées frappées par une épizootie, il est nécessaire que la procédure de dérogation à l’interdiction mentionnée au 1° de l’article L. 411-1 du code de l’environnement puisse être accélérée en cas d’urgence.
L’avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail doit intervenir dans un délai suffisamment rapide pour permettre de contrer les risques, de mettre fin à l’inquiétude des exploitants agricoles et d’éradiquer les foyers d’infection.
Un foyer de brucellose – appelée « fièvre de Malte » chez l’homme – découvert en avril 2012 en Haute-Savoie a donné lieu à une décision d’abattage partiel de bouquetins dans le massif du Bargy en octobre 2013. Ce délai de dix-huit mois était beaucoup trop long au regard des risques sanitaires encourus.
Cet amendement vise donc à fixer un délai maximal de deux mois entre la découverte de la maladie et la décision ministérielle.
Je souhaitais vraiment aborder ce soir cette question de la brucellose des bouquetins du Bargy, car elle n’est pas réglée. Il y va de la santé humaine et de la santé des bovins du massif des Aravis. Les bovins sont encore exempts de brucellose en France, mais une menace considérable continue de peser sur nos exportations de viande et de produits laitiers.
J’attire de nouveau l’attention du Gouvernement sur ce problème de l’épizootie de brucellose dans le Bargy, qui doit absolument être réglé.
M. Michel Bouvard. Très bien !
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. Notre collègue Loïc Hervé évoque un cas que je connais bien car, comme Jean-Claude Carle, je suis issu du même territoire. Lorsque j’ai mené les auditions, c’est l’un des points majeurs sur lesquels j’ai souhaité attirer l’attention de mes interlocuteurs.
Loïc Hervé, Jean-Claude Carle et moi-même avons participé à de nombreuses réunions avec des spécialistes de ce sujet très important, qui recouvre des enjeux de santé publique et des risques sanitaires pour les troupeaux en zones de montagne.
Nous ne pouvons donc nous satisfaire d’ajouter dans la loi deux lignes qui n’auraient aucune portée concrète. Cela équivaudrait à nous débarrasser de ce problème à peu de frais.
Permettez-moi de revenir brièvement sur le droit existant, pour que chacun comprenne bien de quoi il s’agit.
Le code rural et le code de l’environnement comportent tous deux des dispositions permettant d’aller jusqu’à l’abattage d’animaux d’une espèce animale sauvage protégée en cas de danger grave pour la santé publique. C’est le cas pour ces bouquetins. Certains spécimens ont d’ailleurs été détruits à ce titre. Je souligne que c’est le Sénat qui, à l’occasion de l’élaboration de la loi pour l’avenir de l’agriculture de 2014, a renforcé ces mesures, sur l’initiative de sa commission des affaires économiques.
Le code de l’environnement prévoit que l’ANSES doit être saisie en vue de mener une expertise indépendante afin de déterminer s’il n’existe pas d’autre solution satisfaisante que la destruction d’une espèce protégée, par dérogation au principe général de protection.
Dans le cas de la brucellose, les délais ont été démesurément longs : la découverte d’un foyer d’infection en avril 2012 a donné lieu à une décision d’abattage partiel de bouquetins en octobre 2013.
En outre, l’ANSES a rendu en juin 2015 un rapport aux termes duquel elle estime que le risque actuel de transmission de la brucellose aux cheptels domestiques par les bouquetins est de « quasi nul » à « minime ».
Il faut que l’on puisse agir rapidement en cas de menace pour la santé publique ou les troupeaux, mais on ne peut pas se passer d’une expertise scientifique et vétérinaire pour apporter la meilleure réponse possible.
Chaque cas d’épidémie est spécifique et complexe. L’amendement vise à réduire à deux mois le délai maximal accordé à l’ANSES pour rendre son avis. Chacun ici sait que c’est impraticable. Tous les ans, lors de l’examen du projet de loi de finances, nous tirons la sonnette d’alarme à propos des moyens de l’ANSES, comme l’a fait notre collègue Pierre Médevielle cette année.
Comment trouver en deux mois la bonne solution pour lutter contre une épizootie ? C’est illusoire ! C’est la raison pour laquelle la commission a émis un avis de sagesse sur cet amendement. À titre personnel, je voterai l’amendement de mon collègue Loïc Hervé. Je regrette qu’une directive signée par Ségolène Royal, Stéphane Le Foll et Barbara Pompili soit revenue sur l’arrêté d’abattage partiel qui avait été pris par le préfet de Haute-Savoie de l’époque, M. Georges-François Leclerc.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. La détermination des délais de réponse aux demandes de dérogation à la protection des espèces pour la faune sauvage relève du niveau réglementaire, et non de la loi. Ils sont ainsi fixés à l’article R. 411-6 du code de l’environnement, qui a d’ailleurs été modifié en juillet 2015. Cet article fixe à quatre mois le délai au-delà duquel est créé un refus tacite faute de réponse de l’autorité administrative. Il n’y a pas de raison de prévoir un délai différent dans le code rural et de la pêche maritime.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Il me semble difficile de voter cet amendement, bien que ses auteurs posent une vraie question, qui ne concerne pas que le bouquetin.
Les délais de réponse sont beaucoup trop longs dans notre pays. On l’a également vu à propos du frelon asiatique ou des plantes envahissantes.
Dans le cadre de la gestion différenciée, qui fait consensus entre nous, la présence du loup peut contribuer à régler le problème de l’épizootie véhiculée par les bouquetins…
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour explication de vote.
M. Jean-Claude Carle. Il s’agit d’un véritable problème de santé publique, eu égard aux conséquences de la brucellose pour les humains et les troupeaux domestiques.
Lorsqu’un troupeau domestique de bovins ou d’ovins est contaminé par la brucellose, la décision d’abattage est immédiate. Ce n’est pas le cas pour les bêtes sauvages : l’incohérence est totale ! Je voterai l’amendement n° 175 rectifié.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote.
M. Loïc Hervé. J’entends que la présence de cette maladie dans le Bargy serait due à l’absence de sélection naturelle. Connaissant bien la géographie de ce massif, j’estime pour ma part qu’elle tient plutôt à l’absence de régulation de la population, le bouquetin n’étant pas chassable en France. Je doute que l’introduction d’un grand prédateur comme le loup puisse être une solution…
Monsieur le rapporteur, l’on peut s’inquiéter de faiblesse des moyens affectés à l’ANSES. Je partage volontiers cette préoccupation.
Cela étant, les connaissances scientifiques sur la fièvre de Malte chez l’homme et la brucellose chez le bouquetin sont stables. Elles permettent à une autorité telle que l’ANSES de délivrer un avis assez rapidement.
Cet amendement a été rédigé en lien avec notre collègue député Bernard Accoyer. Une fois que l’ANSES a rendu son avis, les décisions administratives et politiques nécessaires, parfois difficiles à faire accepter par le monde environnemental, peuvent être prises : plus la procédure sera rapide et cohérente, plus l’action publique en vue de la résolution des problèmes sera efficace.
On parle du bien-être animal dans les abattoirs, mais pas des bouquetins malades du Bargy, ni des troupeaux victimes du loup ! Soyons cohérents ! Monsieur le ministre, agissons de manière rapide et efficace pour résoudre définitivement cette question des bouquetins malades dans le Bargy !
M. le président. L'amendement n° 239, présenté par MM. Savin et Calvet, Mme Lamure, M. Mandelli, Mme Deromedi, MM. Carle, B. Fournier, Raison, Darnaud, Saugey et Genest, Mme Giudicelli et MM. Chaize et A. Marc, est ainsi libellé :
Compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
… – Le 7° de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales est complété par les mots : « , notamment des loups lorsqu’ils sont susceptibles de causer des dommages importants aux élevages et aux cultures. »
La parole est à M. Michel Savin.
M. Michel Savin. Les éleveurs, les bergers, mais aussi les élus locaux de nos massifs se sentent abandonnés face aux attaques répétées du loup, de plus en plus nombreuses. Comme le rappelait M. Bailly tout à l’heure, on dénombrait près de 10 000 animaux victimes en 2015. Cette année, leur nombre sera équivalent, voire plus élevé.
La population de loups en liberté augmente, quant à elle, de 20 % chaque année. Il ne s’agit donc pas d’une espèce en voie de disparition !
De plus, 40 % des attaques se déroulent dorénavant en pleine journée, parfois à proximité des habitations. Ces attaques récurrentes ont lieu en dépit des mesures de protection, dont les environnementalistes eux-mêmes reconnaissent les limites. Pour seule réponse, l'État a versé 21 millions d’euros d’indemnisation en 2015.
Dans le même temps, des habitants et des randonneurs ont été victimes d’agressions très graves de chiens dressés pour protéger les troupeaux, les patous, qui ne font pas la différence entre les prédateurs et les humains.
Cette situation pénalise également le tourisme, activité très importante dans nos territoires. Du fait des attaques de loups et, surtout, de la présence de patous, touristes et randonneurs délaissent nos massifs.
Cette situation montre que le loup gagne la bataille géographique, en progressant sur les terres et en se rapprochant de plus en plus des habitations, qu’il gagne la bataille économique, car la détresse des éleveurs est telle qu’ils sont nombreux à vouloir arrêter leur activité, qu’il est en train de gagner la bataille politique, du fait de l’absence de propositions des pouvoirs publics.
Il faut donner aux élus locaux, notamment aux maires, qui sont aujourd'hui dépourvus de moyens d’action face à la recrudescence des attaques, un signal fort.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Michel Savin. Que répondez-vous au maire de Chichilianne, dans l’Isère, qui se retrouve aujourd'hui traduit devant les tribunaux judiciaires, ainsi que sa commune, parce qu’une personne de cinquante-sept ans a été hospitalisée à la suite de l’attaque d’un patou ?
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Cyril Pellevat, rapporteur. Les auteurs de cet amendement souhaitent prévoir qu’ordonner des tirs de prélèvement de loups, par dérogation à la directive communautaire et à la convention de Berne, soit de la responsabilité du maire, au titre de ses pouvoirs de police, et non plus du préfet, comme c’est le cas actuellement.
Le dépôt d’un tel amendement s’explique par la situation dramatique de certains éleveurs devant la prolifération du loup. C’est justement en raison de cette situation que l’article 16 du présent projet de loi pose le principe d’une gestion différenciée pour les territoires de montagne : lorsque la situation l’exigera, il sera possible de prélever davantage de loups.
L’article 16 pose aussi le principe de l’automaticité de l’indemnisation de l’éleveur pour les dégâts causés à ses troupeaux par les loups.
En revanche, transférer les pouvoirs du préfet au maire en la matière me semble aller trop loin. On s’engagerait là dans un transfert de compétence qui ne me semble pas bien pesé. Aujourd’hui en effet, en matière d’espèces protégées, comme le loup, la loi reconnaît au préfet un droit de police spéciale, qui lui permet d’organiser les opérations de chasse dès lors qu’elles sont justifiées. Grâce à la gestion différenciée, il pourra y en avoir davantage. L’adoption de cet amendement rendrait illisible la répartition des compétences de police spéciale entre le maire et le préfet, sans que soient prévues les modalités d’exercice du contrôle de légalité du préfet.
Il appartient au préfet de garantir le respect du cadre national de lutte contre le loup. C’est lui qui garantit notamment le respect du nombre de prélèvements, et il ne nous semble pas pertinent de changer cette répartition des rôles.
En outre, je ne suis pas sûr que nous ayons tous bien pesé les risques qu’il y aurait à conférer une responsabilité supplémentaire aux maires en matière de tirs de loups. J’ai demandé l’avis de l’Association des maires de France : elle est résolument défavorable à une telle mesure. J’ai également consulté des maires de mon territoire qui sont capitaines de louveterie et membres de la Fédération nationale des chasseurs : tous y sont opposés.
De surcroît, si les territoires des communes sont clairement délimités, les loups les respectent-ils ? Les maires des communes concernées, qui pourront être de sensibilités politiques différentes, prendront-ils tous des arrêtés allant dans le même sens ? À mon sens, seul le préfet peut assurer une cohérence géographique en la matière.
Enfin, le risque de contentieux est énorme ! Les maires seront vraiment pris entre le marteau et l’enclume, confrontés à une population partagée sur cette question, d’autant qu’ils devront rendre des comptes, puisque des quotas nationaux doivent être respectés.
Pour ces raisons, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Même avis, pour les mêmes raisons.
Le loup est protégé par la convention de Berne de 1979 et relève, à ce titre, d’un traitement particulier. Il appartient donc aux seules autorités de l’État de faire procéder à la capture ou à la destruction d’un loup.
Par ailleurs, je ne suis pas du tout persuadé qu’adopter la disposition proposée rendrait service aux maires, au contraire ! L’AMF, consultée par le rapporteur, s’est prononcée contre. Les maires se trouveraient pressés par les uns de détruire tous les loups de France et de Navarre, par les autres de les préserver ! Il n’est pas possible d’avoir 36 000 gestions différentes de ce problème !
La ministre de l’environnement a fortement augmenté le quota, tout en restant dans le cadre de la convention de Berne. Les choses sont équilibrées. Ne déstabilisons pas un dispositif qui ne fonctionne pas si mal, même si je comprends la grande colère et la désespérance des bergers qui voient leurs troupeaux attaqués par des loups ou des chiens errants.
M. le président. La parole est à M. Michel Savin, pour explication de vote.
M. Michel Savin. Monsieur le ministre, s’agissant des chiens errants, le maire peut prendre un arrêté et demander à des louvetiers de faire des battues pour protéger les populations.
M. Jean-Claude Carle. C’est vrai !
M. Michel Savin. Ce qui est possible pour le chien errant ne l’est pas pour le loup.
J’ai moi aussi interrogé des maires : certains sont hésitants, mais d’autres seraient tout à fait prêts à assumer cette responsabilité.
Que répondre à un maire dont l’un des administrés a été attaqué par un patou et qui se retrouve, pour cette raison, devant la justice ? Quelle solution propose-t-on aux maires qui sont dans l’incapacité de répondre aux attentes des éleveurs et des habitants ?
Cet amendement vise à accorder la possibilité aux maires de décider, avec leur conseil municipal, de faire appel à des louvetiers, à des professionnels – il ne s’agit pas de permettre à n’importe qui de tirer sur les loups –, pour faire reculer le loup et ramener la tranquillité dans les territoires où l’on pratique le pastoralisme. Aujourd'hui, la détresse et le désarroi des maires et des éleveurs restent sans réponse.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. Je voudrais faire un petit rappel pour montrer que l’amendement de notre collègue Michel Savin n’est pas si infondé qu’on veut bien le dire.
J’ai eu le privilège d’être membre de la mission d'information sur le loup, constituée à l’Assemblée nationale en 1999 sous le gouvernement de M. Jospin. J’ai ensuite participé à la commission d’enquête parlementaire qui a été mise en place après 2002.
À l’époque, le code rural autorisait les maires à prendre des arrêtés contre les prédateurs. Ces arrêtés ont été déférés devant la juridiction administrative par Mme Voynet ; puis, un soir, on a modifié la loi en douce pour supprimer la disposition permettant aux maires de prendre des arrêtés contre les prédateurs. C’est la vérité historique : il y a vingt ans à peine, ce que propose Michel Savin était permis par la loi. Cette disposition a été supprimée lorsqu’on s’est aperçu qu’elle entrait en contradiction avec la convention de Berne.
Il est très bien de confier cette responsabilité aux préfets, mais dans quels délais répondent-ils aux sollicitations des maires, eu égard à la lourdeur de la machine étatique ?
Quant au quota de vingt-six loups autorisé, savez-vous combien de louveteaux une louve met au monde chaque année ? Nous sommes face à un phénomène de prolifération.
M. le président. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. Nous sommes tous d’accord pour mettre en place une gestion différenciée. Dans cette perspective, il faut reconstruire un service public permettant que le loup, qui est un animal très intelligent, ne s’approche pas des humains. L’État a su le faire dans le passé.
Nous ne sommes pas dogmatiques : il est de l’intérêt tant des défenseurs de l’environnement que des éleveurs que l’on puisse stabiliser les populations de loups et trouver un équilibre. Nous y travaillons, mais les choses peuvent évoluer très vite dans un sens ou dans l’autre.
Par ailleurs, il n’existe pas aujourd’hui de certification des élevages de patous. La plupart de ces animaux, qui représentent une solution élaborée dans l’urgence, sont élevés à l’étranger. Nous devons aborder ce sujet tout à fait important de manière globale. Il y a de bons et de mauvais patous, et ces chiens constituent pour l’homme une plus grande menace que le loup. Nous devons continuer à rechercher un équilibre.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Giraud, pour explication de vote.
Mme Éliane Giraud. À chaque fois que l’on parle de la montagne, y compris au sein de l’association nationale des élus de montagne, on se fait plaisir en évoquant la question du loup. Il faut arrêter de s’envoyer des arguments à la tête.
J’ai écrit à Ségolène Royal parce que, en Isère, il y a eu plus de 380 attaques de loups, l’un de ces animaux étant extrêmement proche des habitations. Il est nécessaire d’envisager les moyens de défense avec les maires et le préfet. Ce travail est en cours, et il ne faut pas faire comme si rien ne se faisait.
Ségolène Royal a interpellé les instances européennes, et j’invite chacun à prendre connaissance de sa réponse à la question écrite que je lui avais adressée sur ce sujet. Il faut cesser de dire que l’on ne fait rien. La question du loup se pose depuis très longtemps, et si les nombreux gouvernements qui se sont succédé ne sont pas parvenus à la résoudre, c’est que cela n’est pas si simple ! Il faut savoir reconnaître les progrès qui sont accomplis.
Les maires ont besoin de réponses. Il faut continuer à travailler ensemble, mais ce n’est pas un amendement au présent texte qui permettra de régler le problème, monsieur Savin.
M. le président. Je mets aux voix l'article 16, modifié.
(L'article 16 est adopté.)
Articles additionnels après l’article 16
M. le président. L'amendement n° 114, présenté par MM. Duran, Roux, Jeansannetas, Richard, Guillaume et Raoul, Mmes Cartron et Bataille, MM. M. Bourquin, Cabanel, Courteau et Daunis, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Montaugé, Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l'article 16
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au début du 1° des articles L. 2333-53 et L. 3333-7 du code général des collectivités territoriales, il est inséré le mot : « Prioritairement ».
La parole est à M. Alain Duran.
M. Alain Duran. Cet amendement vise à préciser que le produit de la taxe communale et départementale sur les remontées mécaniques est prioritairement affecté aux dépenses destinées à favoriser le développement agricole en montagne.
Actuellement, la loi énumère sept domaines d’affectation de cette taxe, dont le développement agricole et forestier, le tourisme, la prévention des accidents en montagne ou encore la protection contre l’érosion des sols.
Au vu des difficultés rencontrées par le pastoralisme et de la crise qui frappe, d’une manière plus générale, les éleveurs, cet amendement vise à apporter un soutien appuyé à ces derniers, afin de les mettre en mesure de poursuivre leur activité.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Les articles L. 2333-53 et L. 3333-7 du code général des collectivités territoriales disposent que le produit de la taxe sur les remontées mécaniques est affecté à des interventions favorisant le développement agricole en montagne, aux dépenses d’équipement, de services, de promotion et de formation induites par le développement du tourisme en montagne et les besoins des divers types de clientèle ainsi qu’à l’amélioration des accès ferroviaires et routiers, aux dépenses de développement d’un tourisme d’initiative locale en montagne et des activités qui y contribuent, à des charges engagées par les clubs locaux de ski pour la formation technique de leurs jeunes adhérents, au financement d’actions de prévention des accidents en montagne conduites par des organismes compétents en la matière, notamment par les sociétés de secours en montagne.
Cet amendement vise à prévoir une affectation prioritaire du produit de cette taxe au développement de l’agriculture en montagne. L’affectation des taxes locales a un caractère largement artificiel ; dès lors, qu’apporte l’introduction du mot « prioritairement » ? La commission des affaires économiques s’en remet à la sagesse du Sénat.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Je suis beaucoup plus réservé que le rapporteur, car les communes et départements ont la faculté d’instituer une taxe sur les recettes brutes provenant de la vente des titres de transport des entreprises exploitant les engins de remontée mécanique.
Monsieur le sénateur Duran, le produit perçu est alors versé au budget communal et au budget départemental.
M. Michel Bouvard. Tout à fait !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Je ne suis pas sûr que ce soit le moment de priver les communes et les départements de recettes… Ce produit est par ailleurs affecté à des catégories de dépenses touristiques selon une répartition choisie librement par les collectivités.
M. Michel Bouvard. Tout à fait !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. L’adoption de votre amendement aurait pour effet de restreindre la liberté de choix des collectivités, et donc leur autonomie, y compris en matière de gestion, en les contraignant à affecter prioritairement cette taxe au développement agricole, aux dépens des autres catégories de dépenses visées par le code général des collectivités territoriales.
Or le Gouvernement souhaite que les collectivités puissent demeurer libres – la décentralisation, c’est cela –, d’affecter le produit de la taxe aux dépenses qu’elles souhaitent privilégier, afin de tenir compte de la diversité de l’activité touristique en montagne.
C’est pourquoi le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement. À défaut, il émettra un avis défavorable.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour explication de vote.
M. Michel Bouvard. Je souscris pleinement aux propos du ministre. J’ajoute qu’une telle disposition relève d’une loi de finances et que la rédaction proposée était en vigueur il y a très longtemps. Y revenir en introduisant l’adverbe « prioritairement » serait ne pas prendre en compte la réalité des besoins des collectivités et donnerait de faux espoirs aux agriculteurs. Dans certaines stations, l’activité agricole est encore significative, mais, dans d’autres, ce n’est malheureusement pas le cas. Il faut conserver aux collectivités une souplesse et une liberté de gestion en la matière. Une partie du produit de la taxe doit bien sûr pouvoir être affectée au développement agricole, mais ne rigidifions pas les choses : les contraintes sont déjà suffisamment nombreuses ! Si l’on continue dans cette voie, on finira par tuer l’outil de travail des stations !