7
Modernisation, développement et protection des territoires de montagne
Suite de la discussion en procédure accélérée et adoption d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
M. le président. Nous reprenons la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne.
Dans la discussion du texte de la commission, nous poursuivons l’examen, au sein du chapitre Ier du titre III, de l’article 19.
Titre III (suite)
RÉHABILITER L’IMMOBILIER DE LOISIR PAR UN URBANISME ADAPTÉ
chapitre Ier (suite)
Rénover la procédure des unités touristiques nouvelles
Article 19 (suite)
M. le président. La parole est à M. le président de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable.
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Je souhaiterais, sous votre contrôle, monsieur le président, puisque vous avez tout comme moi assisté à la conférence des présidents, attirer l’attention de mes collègues sur un point.
Certes, la nuit a été ouverte, mais le président du Sénat a très nettement manifesté son souhait que nous ne siégions pas au-delà de deux heures du matin. Les travaux reprennent effectivement demain matin, dès onze heures trente, voire avant pour ceux qui siègent au bureau du Sénat. Il nous reste 83 amendements à examiner. Aussi, pour tenir le délai imposé, j’appelle chacun à la concision et à faire preuve de rigueur.
M. le président. Je ne peux que confirmer vos propos, monsieur le président de la commission. Nous avons jusqu’à deux heures du matin pour achever l’examen de ce texte.
Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 392, présenté par M. Bouvard, est ainsi libellé :
Alinéas 60 et 61
Supprimer ces alinéas.
La parole est à M. Michel Bouvard.
M. Michel Bouvard. Je retire cet amendement, monsieur le président. (Exclamations.)
M. Hervé Maurey, président de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable. Bravo !
M. le président. L'amendement n° 392 est retiré.
L'amendement n° 119, présenté par MM. Duran, Roux, Jeansannetas, Richard, Guillaume et Raoul, Mmes Cartron et Bataille, MM. M. Bourquin, Cabanel, Courteau et Daunis, Mmes Espagnac et Guillemot, M. S. Larcher, Mme Lienemann, MM. Montaugé, Rome, Vaugrenard et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :
Après l’alinéa 61
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Un décret fixe les règles et prescriptions techniques en matière de démontage. » ;
La parole est à M. Alain Duran.
M. Alain Duran. Le projet de loi, tel qu’il a été adopté par l’Assemblée nationale, a intégré une obligation de démantèlement des remontées mécaniques et de leurs constructions annexes, ainsi que la remise en état des sites. En commission des affaires économiques, le rapporteur pour avis a proposé de remplacer la notion de « démantèlement » par celle de « démontage », et a supprimé l’obligation de remise en état.
Les installations obsolètes nuisent à la qualité des paysages montagnards et créent une pollution autant matérielle que visuelle. L’objectif est bien de faire disparaître ces équipements, de requalifier les paysages et de leur rendre leur caractère authentique. Les enjeux financiers de démontage sont également très importants.
Aussi, il nous apparaît que la notion de démontage devrait être précisée.
C’est pourquoi nous proposons de renvoyer à un décret la définition de cette notion, qui devra recouvrir l’enlèvement des remontées mécaniques hors d’usage, la « renaturalisation » des surfaces inutilisées et la suppression de toute pollution visuelle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques. La commission est favorable à cet amendement, qui va dans le bon sens.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Il y est également favorable.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements identiques.
L'amendement n° 153 rectifié est présenté par MM. Carle et Savin.
L'amendement n° 194 rectifié bis est présenté par MM. L. Hervé, Bonnecarrère, Canevet, Capo-Canellas, Cigolotti, Gabouty et Guerriau, Mme Joissains et MM. Kern, Longeot, Médevielle et Pellevat.
L'amendement n° 311 est présenté par Mme Espagnac.
L'amendement n° 421 est présenté par M. Bouvard.
Ces quatre amendements sont ainsi libellés :
Après l’alinéa 71
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
« Les unités touristiques nouvelles locales relevant de la procédure intégrée décrite au premier alinéa du présent I ne sont pas soumises à l’article L. 142-4 du code de l’urbanisme.
La parole est à M. Jean-Claude Carle, pour présenter l’amendement n° 153 rectifié.
M. Jean-Claude Carle. Cet amendement vise à permettre aux projets d'unités touristiques nouvelles, les UTN, locales non prévus dans les documents d'urbanisme et menés suivant la nouvelle procédure intégrée de déroger au principe d'urbanisation limitée applicable au 1er janvier 2017.
La procédure intégrée a été introduite à la suite d'un compromis obtenu lors de la lecture du texte en séance publique à l'Assemblée nationale, compromis sans lequel l'adoption à l'unanimité moins une voix n'aurait pas été possible. Elle a pour objet de permettre aux communes de mener plus rapidement de nouveaux projets d'UTN locales qui ne seraient pas prévus dans leur plan local d’urbanisme existant.
Ces procédures intégrées n'ont cependant un sens que si elles dérogent également au principe d'urbanisation limitée. En effet, dans le cas contraire, sans ouverture de nouveaux secteurs à l'urbanisation, les projets ne pourraient pas être menés à terme.
Je rappelle, à l’instar de mon collègue Loïc Hervé, que 80 % des stations de montagne ne sont actuellement pas couvertes par un schéma de cohérence territoriale, un SCOT.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour présenter l'amendement n° 194 rectifié bis.
M. Loïc Hervé. Cet amendement est défendu.
M. le président. La parole est à Mme Frédérique Espagnac, pour présenter l'amendement n° 311.
Mme Frédérique Espagnac. Il est également défendu, monsieur le président.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour présenter l'amendement n° 421.
M. Michel Bouvard. Cet amendement a été excellemment défendu par Jean-Claude Carle.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Ces amendements identiques offrent une variante sur le thème de la dérogation au principe d’urbanisation limitée. Il s’agit d’amendements de repli par rapport aux nombreux amendements déjà examinés sur la question, et il me semble qu’ils ne se justifient plus, compte tenu de ce que nous avons voté dans l’après-midi. L’avis est donc défavorable.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Nous partageons cet avis défavorable. Des amendements similaires ont précédemment été présentés, et M. le rapporteur pour avis et moi-même avons exposé les raisons pour lesquelles il ne nous paraissait vraiment pas souhaitable d’adopter de telles mesures.
M. le président. L’amendement n° 153 rectifié est-il maintenu, monsieur Carle ?
M. Jean-Claude Carle. Non, je le retire, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 194 rectifié bis est-il maintenu, monsieur Hervé ?
M. Loïc Hervé. Je le retire aussi, monsieur le président.
M. le président. Qu’en est-il de l’amendement n° 311, madame Espagnac ?
Mme Frédérique Espagnac. Je le retire également, monsieur le président.
M. le président. Et quid de l’amendement n° 421, monsieur Bouvard ?
M. Michel Bouvard. Je le retire aussi, monsieur le président.
M. le président. Les amendements identiques nos 153 rectifié, 194 rectifié bis, 311 et 421 sont retirés.
Je mets aux voix l'article 19, modifié.
(L'article 19 est adopté.)
Articles additionnels après l'article 19
M. le président. L'amendement n° 94 rectifié, présenté par MM. Cornano, Antiste, S. Larcher et Patient et Mme Yonnet, n'est pas soutenu.
Je suis saisi de trois amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 30 rectifié, présenté par Mme Loisier, MM. L. Hervé, Delcros, Lasserre et les membres du groupe Union des Démocrates et Indépendants - UC, est ainsi libellé :
Après l'article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les schémas de cohérence territoriale ou les plans locaux d’urbanisme prennent en compte les schémas départementaux d’accès à la ressource forestière. Des emplacements pour le stockage et le conditionnement de bois issus des exploitations forestières peuvent être réservés entre les massifs de montagne et les agglomérations ou les métropoles proches.
La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier.
Mme Anne-Catherine Loisier. Chacun d’entre nous est bien conscient des difficultés actuelles en matière de transport et d’accessibilité aux massifs, notamment aux massifs forestiers.
Cet amendement concerne le réseau des dessertes forestières, l’objectif étant d’assurer des itinéraires de sortie des bois, mais aussi d’accès aux massifs forestiers, des places de dépôt, des espaces de tournement pour les grumiers, etc.
Il s’inscrit dans un certain contexte puisque, je vous le rappelle, mes chers collègues, le Gouvernement a lancé un programme national de la forêt et du bois, visant à récolter 12 millions de mètres cubes supplémentaires de bois d’ici à 2026.
À cette fin, les territoires forestiers de montagne vont bien évidemment être mobilisés. Mais pour que cette mobilisation se déroule dans de bonnes conditions, il est aussi nécessaire de pouvoir concilier cette exploitation avec les différents usages, en particulier touristiques, que connaissent ces territoires.
Cet amendement est également en ligne avec la volonté affichée par le Gouvernement de fluidifier les transports forestiers à l’échelle nationale. Aujourd'hui, nous travaillons sur une cartographie nationale des itinéraires forestiers, notamment – je le précise à l’attention de mes collègues qui suivent cette question – des itinéraires de bois ronds.
Il me semblerait donc particulièrement intéressant de prévoir que ces schémas de dessertes forestières, élaborés, chaque année, par les conseils départementaux, avec le concours des communes et des établissements publics de coopération intercommunale, les EPCI, puissent être pris en compte dans les SCOT et les PLU.
M. le président. L'amendement n° 268 rectifié, présenté par Mme Malherbe, MM. Amiel, Arnell, Barbier, Bertrand, Castelli, Collin, Esnol, Fortassin et Guérini, Mmes Jouve et Laborde et MM. Mézard, Requier et Vall, est ainsi libellé :
Après l'article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Le premier alinéa de l’article L. 153-8 du code forestier est complété par deux phrases ainsi rédigées :
« Les plans locaux d’urbanisme et les plans locaux d’urbanisme intercommunaux prennent en compte les schémas départementaux d’accès à la ressource forestière. Des emplacements pour le stockage et le conditionnement de bois issus des exploitations forestières peuvent être réservés entre les massifs de montagne et les agglomérations ou les métropoles proches. »
La parole est à M. Alain Bertrand.
M. Alain Bertrand. Cet amendement est défendu.
M. le président. L'amendement n° 340 rectifié bis, présenté par MM. Gremillet, Morisset et Pillet, Mme Di Folco, MM. Raison et Pierre, Mme Imbert, MM. Chasseing, Bizet, Chaize, Mandelli, Houpert, Pointereau, Sido et de Raincourt et Mmes Lamure et Deromedi, est ainsi libellé :
Après l’article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Les plans locaux d’urbanisme et les plans locaux d’urbanisme intercommunaux prennent en compte les schémas départementaux d’accès à la ressource forestière. Des emplacements pour le stockage et le conditionnement de bois issus des exploitations forestières peuvent être réservés entre les massifs de montagne et les agglomérations ou les métropoles proches.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Cet amendement est également défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Ces amendements traitent des liens entre exploitation forestière et documents d’urbanisme.
Leurs auteurs proposent la prise en compte des schémas départementaux d’accès à la ressource forestière par les PLU ou les SCOT, ce qui paraît difficile compte tenu du caractère annuel de ces schémas. Établir ce lien juridique serait donc un facteur de déstabilisation des PLU et des SCOT, qui sont des documents à la temporalité beaucoup plus longue.
Par ailleurs, ces schémas prévoient, pour l’instant, essentiellement des itinéraires empruntant des routes départementales, communales et intercommunales et permettant d’assurer le transport de grumes depuis les chemins forestiers jusqu’aux différents points de livraison. Le lien avec l’urbanisme est donc ténu.
Ces amendements visent à ce que des emplacements pour le stockage et le conditionnement de bois issus des exploitations forestières puissent être réservés dans les documents d’urbanisme. Je suis opposé à cette proposition.
La technique de la réservation, en urbanisme, consiste à grever certains terrains de servitudes administratives. Il faut donc un motif d’intérêt général suffisamment fort pour limiter ainsi le droit de propriété.
Recourir à cet outil très contraignant qu’est la réservation me semble en outre inutile. Je ne vois pas ce qui interdit, aujourd’hui, d’affecter des terrains publics ou privés au stockage et au conditionnement du bois dans le cadre d’un contrat de location entre le propriétaire d’un terrain, privé ou public, et un exploitant forestier.
Bien que le problème économique soulevé par ces amendements soit réel, la réponse urbanistique n’est sans doute pas adaptée. (M. Loïc Hervé s’exclame.)
J’ajoute que la problématique des dessertes forestières est évoquée à plusieurs reprises dans le texte que nous examinons. Nous avons, me semble-t-il, été très attentifs à ce que l’exploitation forestière puisse être réalisée dans de bonnes conditions. Mais cette obligation de prise en compte dans les SCOT et les PLU créerait de nombreuses complications.
Au moment où tout le monde demande de la simplicité, laissons aux élus le soin de trouver les solutions, et n’exigeons aucune intégration particulière aux documents d’urbanisme ! C’est pourquoi, je le répète, l’avis est défavorable sur ces trois amendements.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Dans ce débat, nous passons d’amendements prétendant apporter de la souplesse, supprimer les normes et faciliter la vie à des amendements qui, dans la minute suivante, tendront à imposer des contraintes. Il est un moment où nous devons choisir la voie que nous souhaitons suivre !
La proposition consistant à rendre obligatoire la prise en compte des schémas départementaux d’accès à la ressource forestière dans les SCOT ou les PLU est à l’opposé du discours tenu précédemment par la majorité sénatoriale. Il s’agissait alors de simplifier, rationaliser et de faire confiance aux élus, car là était la raison.
Laissons faire, mesdames, messieurs les sénateurs ! Ne créons pas d’obligations ! N’instaurons pas un cadre supplémentaire, qui viendra compliquer encore la vie des élus, des forestiers et de tous les acteurs de la montagne !
Pour ces raisons, l’avis est défavorable.
M. le président. La parole est à M. Loïc Hervé, pour explication de vote sur l'amendement n° 30 rectifié.
M. Loïc Hervé. La question de la desserte forestière, de l’évacuation et du stockage des bois est absolument essentielle en montagne. Entendre qu’elle est sans lien avec l’urbanisme, c’est – pardon de le dire – entendre une ineptie !
Nous vivons l’inverse : les contraintes physiques imposées par la forêt, la montagne et l’environnement urbain exigent, lorsque nous élaborons un PLU ou un SCOT, que nous définissions, comme peuvent le faire les maires, les problèmes de desserte forestière, mais aussi les endroits où les bois pourront être stockés avant d’être rechargés et mis sur les voiries.
En outre, il n’est pas question de renforcer la norme ; nous souhaitons simplement accorder aux élus locaux la possibilité d’intégrer cette problématique dans leurs documents d’urbanisme. C’est un argument de total bon sens !
M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.
Mme Anne-Catherine Loisier. Je ne comprends absolument pas les arguments avancés.
Aujourd'hui, on le voit facilement, le maillage des dessertes forestières en montagne n’est absolument pas adapté aux objectifs que le Gouvernement s’est fixés, monsieur le ministre. Les 12 millions de mètres cubes supplémentaires de bois, on ira les chercher dans les massifs forestiers, pas en rase campagne ! Donc en montagne !
De plus, les schémas de desserte ne sont aucunement annuels. Ils sont bien évidemment révisés, pour tenir compte des modifications – ajouts ou suppressions – qui peuvent survenir chaque année, mais, j’y insiste, ils n’ont aucune vocation à être annuels.
Enfin, nous avons tous, pour la montagne et les territoires forestiers, des ambitions en termes de développement économique, associées à une préoccupation d’accroître l’exploitation d’une ressource durable. Donnons aux élus – ceux des communes forestières situées en zone de montagne soutiennent largement cet amendement ! – les moyens de répondre à cet enjeu.
Sans cela, que verrons-nous demain ? Nous verrons des grumiers circuler sur de petites routes de montagne, provoquant bouchons et accidents en nombre,…
M. Loïc Hervé. Eh oui !
Mme Anne-Catherine Loisier. … portant préjudice au développement touristique de ces zones. Que l’on m’explique comment le Gouvernement entend développer en montagne, tout à la fois, le tourisme et l’exploitation forestière ! (M. Loïc Hervé applaudit.)
M. le président. La parole est à M. Bernard Delcros, pour explication de vote.
M. Bernard Delcros. J’appuierai les propos de mes collègues.
Les PLU et les SCOT ont été voulus comme des documents visant à élaborer une approche globale de l’aménagement et du développement d’un territoire. Or nous sommes tous d’accord, ici, pour reconnaître l’importance de l’enjeu que représente la forêt en montagne : sur le plan économique, en termes d’emplois dans la filière bois, mais aussi sous l’angle écologique.
La desserte forestière constitue donc un sujet essentiel. Cette question doit trouver sa place dans des documents d’urbanisme qui, une fois encore, ont pour objectif l’aménagement et le développement global du territoire.
L’amendement n° 30 rectifié est donc tout à fait cohérent, et je veux soutenir mes collègues qui le défendent.
M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.
M. Daniel Gremillet. Cet amendement a une portée bien plus grande que celle qu’on veut bien lui accorder.
Dans ce pays, on ne pourra pas ne pas répondre aux questions sécuritaires, et l’on sait sur quelle surface la forêt s’étend dans nos massifs. Le secteur forestier, ne l’oublions pas, reste un secteur dans lequel les accidents, hélas, sont nombreux. Or la résolution du problème sécuritaire passe par la mécanisation.
En outre, nous savons aujourd'hui que, pour mobiliser une production de bois, aussi bien en grume que pour la biomasse – nous avons la chance, en France, de disposer d’espaces forestiers absolument fabuleux, qui constituent des ressources renouvelables et d’avenir ! –, la problématique des dessertes est absolument stratégique.
Pour vivre non loin de la frontière allemande, nous sommes un certain nombre à pouvoir témoigner du niveau de compétitivité que certains pays ont atteint, en se donnant les moyens d’exploiter dans des conditions financières supportables et d’organiser une desserte convenable.
Cet amendement est un amendement responsable, présentant un aspect très intéressant dans la mesure où il propose un mariage des collectivités et des propriétaires privés. Ces dessertes marient effectivement l’ensemble du parcellaire sur un territoire donné. Mine de rien, cet amendement est bien plus stratégique qu’on veut bien le laisser croire !
Pardonnez-moi d’insister, monsieur le rapporteur pour avis, monsieur le ministre, on ne mènera pas de politique forestière satisfaisante et on ne donnera pas au secteur forestier qui en a tant besoin des facteurs économiques de compétitivité si, effectivement, on ne consacre pas de moyens à cette stratégie. Le premier de ces moyens, c’est la mobilisation des bois !
M. Loïc Hervé. Très bien !
M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour explication de vote.
M. Daniel Chasseing. L’amendement n° 340 rectifié bis, que j’ai cosigné, n’est source d’aucune complication pour les communes. Sa rédaction précise bien : « des emplacements pour le stockage et le conditionnement de bois issus des exploitations forestières peuvent être réservés entre les massifs de montagne et les agglomérations ou les métropoles proches ». Bien sûr, il est souhaitable qu’ils le soient, car le bois sera sorti en limite de route par le porteur, puis récupéré par le transporteur. C’est toute l’importance d’avoir des places de dépôt.
M. le président. La parole est à Mme Éliane Giraud, pour explication de vote.
Mme Éliane Giraud. Je voterai à titre personnel cet amendement, et j’illustrerai mon propos avec un cas très concret.
J’ai présidé le parc naturel régional de Chartreuse pendant très longtemps. Un jour, alors qu’un aménagement sur le quai était en cours à Grenoble, les camions ne pouvaient plus sortir !
Aussi, il convient de trouver un accord, de sorte que l’on définisse de véritables zones de desserte. Sans cela, la montagne restera avec ses problèmes d’exploitation et de sortie des bois. (M. Loïc Hervé applaudit.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Une fois de plus, mesdames, messieurs les sénateurs, je souhaite attirer votre attention sur les conséquences de vos décisions.
Comme vous l’avez indiqué, madame Loisier, les schémas départementaux d’accès à la ressource forestière sont actualisés tous les ans, et j’en suis d’accord. Ils sont donc, par nature, très évolutifs.
Imposer un lien avec le PLU ou, encore mieux, avec le SCOT reviendrait à faire modifier ces documents d’urbanisme à chaque actualisation de ces schémas. (Mme Anne-Catherine Loisier s’exclame.)
M. Loïc Hervé. C’est l’inverse !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Mais non ! Je souhaite bien du plaisir aux élus qui auront à le faire.
Le PLU et le SCOT s’inscrivent dans la durée. Dès lors que vous modifiez les schémas départementaux d’accès à la ressource forestière, vous serez bien obligés de les harmoniser. Vous vous trouverez alors dans des situations d’une complexité hors du commun.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 19, et les amendements nos 268 rectifié et 340 rectifié bis n'ont plus d'objet.
Je suis saisi de deux amendements identiques.
L'amendement n° 244 rectifié est présenté par MM. Savin et Calvet, Mme Lamure, M. Mandelli, Mme Deromedi, MM. Carle, B. Fournier, Darnaud, Saugey et Pierre, Mme Giudicelli et MM. Chaize et A. Marc.
L'amendement n° 407 rectifié bis est présenté par M. Bouvard.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Après l'article 19
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La seconde phrase du 1° de l’article L. 141-10 du code de l’urbanisme est ainsi rédigée :
« Il transpose les dispositions pertinentes, d’une part, des chartes de parcs naturels régionaux et leurs délimitations cartographiques à une échelle appropriée, et d’autre part, des schémas départementaux d’accès à la ressource forestière, afin de permettre leur mise en œuvre dans les plans locaux d’urbanisme ou les documents en tenant lieu et les cartes communales ; ».
La parole est à M. Michel Savin, pour présenter l’amendement n° 244 rectifié.
M. Michel Savin. Cet amendement vise à ajouter, parmi les éléments à prendre en compte dans le document d’orientation et d’objectifs d’un PLU, lors de son élaboration, les schémas départementaux d’accès à la ressource forestière.
En effet, ceux-ci indiquent les voies par lesquelles sont extraits les bois lors de l’exploitation des massifs forestiers et il est indispensable d’en tenir compte pour que la stratégie d’urbanisation encadrée par le PLU ne fasse pas obstacle à cette nécessaire extraction des bois.
Il s’agit d’assurer des itinéraires de sorties de bois, de prévenir la fermeture d’accès à certains massifs forestiers en zone de montagne, fermeture qui aboutirait à l’impossibilité de récolter les bois et de les valoriser économiquement, ainsi qu’à une augmentation du risque – avalanche, éboulement, glissement de terrain – dans un contexte de changement climatique.
De même, la possibilité de réserver du foncier à des fins de stockage et de conditionnement, question que nous venons d’aborder, favorise la mobilisation des bois, leur mise à disposition à proximité des agglomérations et des métropoles proches et l’approvisionnement des industries de transformation du bois.
C’est un problème de sécurité, mais aussi de conditions de travail – si ces réserves ne sont pas faites, le travail est réalisé dans des conditions difficiles – et d’entretien des voiries.
Pour éviter des contentieux entre urbanisation, d’une part, et sorties et stockage des bois, d’autre part, il importe d’adopter cet amendement.
M. le président. La parole est à M. Michel Bouvard, pour présenter l'amendement n° 407 rectifié bis.
M. Michel Bouvard. Je m’interroge sur la manière dont ces amendements identiques peuvent s’articuler avec l’amendement que nous venons d’adopter.
La thématique reste inchangée : il s’agit de répondre à un besoin de délimitation des infrastructures et des schémas d’approvisionnement forestier. Mais j’attends l’avis de la commission des affaires économiques pour savoir si les présentes dispositions sont compatibles avec celle que nous venons d’adopter.
Toutefois, les différents éléments que nous évoquons ici montrent à quel point il aurait été justifié d’adopter les dispositions permettant l’intégration des voiries forestières dans les voiries communales, et ce afin d’octroyer aux communes des ressources pour l’entretien des réseaux de desserte.
Mme Anne-Catherine Loisier. Tout à fait !
M. le président. Quel est l’avis de la commission des affaires économiques ?
M. Gérard Bailly, rapporteur pour avis. Permettez-moi de revenir sur l’amendement précédent pour vous dire, mes chers collègues, que le rapporteur, croyez-le bien, partage la même préoccupation que vous s’agissant de la problématique de la desserte des bois. Les massifs sont en effet une richesse, mais le problème était de savoir s’il fallait intégrer les schémas départementaux d’accès à la ressource forestière aux PLU et aux SCOT.
À l’heure où tout le monde réclame des simplifications et un peu plus de souplesse, il ne nous semblait pas nécessaire de prévoir, dans la loi, que tous les PLU devraient à l’avenir intégrer ces problématiques de desserte.