M. Jean-Baptiste Lemoyne. Tout va bien !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Nous sommes également fiers d'avoir amélioré l'accès aux soins grâce à l’ouverture de 1 000 maisons de santé pluriprofessionnelles supplémentaires, à la généralisation du tiers payant, à l’extension du bénéfice d’une complémentaire santé à l'ensemble des salariés. Nous sommes fiers d'avoir placé la prévention au premier plan avec la lutte contre le tabagisme, n’en déplaise à certains. (Exclamations sur plusieurs travées du groupe Les Républicains.)
M. Bruno Sido. Mais oui, ça va mieux !
M. François Grosdidier. Tellement mieux que M. Hollande ne se représente pas !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Enfin, nous sommes fiers d'avoir mené une politique de redistribution, avec un plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté conduit à son terme, une revalorisation du RSA de 10 %, une revalorisation des prestations familiales pour les familles les plus précaires. (Mme Dominique Gillot applaudit.)
M. Alain Gournac. C’est le paradis !
Mme Ségolène Neuville, secrétaire d'État. Tel est le bilan de notre action au service des plus fragiles, au service de la santé des Français. Elle a permis de faire progresser la justice sociale et l'accès aux droits ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain. – Mme Hermeline Malherbe et M. Joël Labbé applaudissent également.)
M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour la réplique.
M. Alain Milon. Madame la secrétaire d’État, la modération doit se retrouver dans les critiques, mais aussi dans la présentation des actions menées…
M. Jean-Louis Carrère. C’est fini !
Plusieurs sénateurs du groupe socialiste et républicain. Stop !
M. Alain Milon. Pour les millions de patients qui sont actuellement traités au titre d’une affection de longue durée, le reste à charge est passé à près de 3 000 euros par an : c’est considérable.
M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.
M. Alain Milon. Mais vous aurez au moins réussi à inverser une courbe, la plus importante de toutes : celle de la natalité ! L’an passé, notre pays a enregistré 20 000 naissances de moins ; c’est dangereux ! (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur plusieurs travées de l'UDI-UC.)
politique économique
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Jean-Claude Lenoir. Ma question s’adresse à M. le secrétaire d'État chargé du budget et des comptes publics.
L’heure du bilan a sonné. Pour apprécier l'efficacité et la pertinence des politiques menées par les gouvernements qui se sont succédé depuis 2012…
M. Jean-Louis Carrère. Et ça continue !
M. Jean-Pierre Sueur. En effet, un vrai meeting !
M. Jean-Claude Lenoir. … en matière de lutte contre le chômage et, plus largement, dans les domaines économique, financier et budgétaire, il faut examiner les résultats obtenus par nos partenaires de l’Union européenne. Pouvez-vous citer un seul chiffre montrant que la France aurait mieux fait que ses voisins européens ? (Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. le secrétaire d’État chargé du budget et des comptes publics.
M. Christian Eckert, secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget et des comptes publics. Monsieur le sénateur Lenoir, chacun ses points de comparaison. Pour ma part, j’ai retenu six items pour dresser le bilan du Gouvernement.
Durant cette législature, la croissance a augmenté de quatre points. Or elle n’avait progressé que d’un point entre 2007 et 2011, soit quatre fois moins. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.)
Le solde du commerce extérieur s’est amélioré de 25 milliards d’euros durant cette législature. Sous le quinquennat précédent, il s'était dégradé de 32 milliards d'euros.
M. Alain Gournac. Tout va bien !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le taux de marge des entreprises aura augmenté de deux points au cours de ce quinquennat, alors qu’il avait baissé de trois points durant le précédent.
M. Alain Gournac. C’est le paradis !
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Au total, 160 000 emplois ont été créés depuis notre arrivée au pouvoir. Durant la législature précédente, 280 000 emplois avaient disparu !
M. René-Paul Savary. Et combien de chômeurs de plus ?
M. Christian Eckert, secrétaire d'État. Le nombre des demandeurs d'emploi a augmenté de 500 000 durant cette législature. C'est trop, mais il avait crû de 800 000 pendant la précédente…
La dette publique a augmenté de six points de PIB, contre vingt-cinq points, c’est-à-dire quatre fois plus, durant le quinquennat précédent.
Enfin, le déficit public s’est amélioré de deux points, alors que nous avions hérité d'un « État en faillite », pour reprendre les mots de celui qui nous l’avait légué… (Sourires sur les travées du groupe socialiste et républicain.)
Monsieur le sénateur, tel est notre bilan. Il est clair, précis, vérifiable. (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
À titre exceptionnel, et avec l’autorisation de mes collègues, je me ferai le porte-parole du Gouvernement pour remercier l'ensemble des sénatrices et des sénateurs, quelles que soient les travées sur lesquelles ils siègent, de la qualité des débats qui nous ont réunis. Ils ont été, le plus souvent, empreints de courtoisie. Je forme le vœu que chacun d’entre vous traverse cette période électorale dans la sérénité, ce qui, bien sûr, n'empêche pas les convictions ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE, du groupe CRC et de l’UDI-UC.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Lenoir, pour la réplique.
M. Jean-Claude Lenoir. Monsieur le secrétaire d’État, vous n’avez pas répondu à ma question. Je vous demandais de comparer les résultats des gouvernements qui se sont succédé pendant ce quinquennat avec ceux qu’ont obtenus leurs homologues européens au cours de la même période.
M. Jean-Louis Carrère. La comparaison avec la période antérieure est plus pertinente !
M. Jean-Claude Lenoir. Vous faites l'impasse sur la grave crise qui a affecté tous les pays entre 2008 et 2010. Je vais vous aider à répondre.
M. Jean-Louis Carrère. Vous n’êtes pas le mieux placé pour donner des leçons !
M. Jean-Claude Lenoir. Au terme de ce quinquennat, la France compte près de 600 000 chômeurs de catégorie A de plus qu’en 2012, et 1,2 million toutes catégories confondues. Pis, la France figure en tête de peloton des pays européens au regard du taux de chômage des jeunes : celui-ci est supérieur à 25 % chez nous, quand il n’est que de 4,7 % en Allemagne.
Le taux de croissance, après avoir été nul pendant deux ans, dépasse à peine 1 %. Dans le même temps, la moyenne des pays de l'Union européenne s’établit à 1,9 % !
En ce qui concerne le commerce extérieur, notre part des ventes à l'intérieur de la zone euro a régressé, passant de 17,9 % à 14 %.
Monsieur le secrétaire d’État, la dette publique représente 97,6 % de notre richesse nationale, contre 83 % en moyenne chez nos voisins.
Enfin, le déficit public était encore de 3,3 % en 2016, et personne ne croit aux 2,7 % annoncés pour l'exercice 2017. L’année dernière, le taux moyen n’était que de 1,9 % pour les pays de l’Union européenne.
M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.
M. Jean-Claude Lenoir. Au total, le bilan du Gouvernement est marqué par une succession d'échecs. C’est la raison pour laquelle nous serons nombreux à dénoncer l'action que vous avez menée. Nous entendons réunir toutes celles et tous ceux qui veulent redresser la France ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l'UDI-UC.)
M. le président. Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.
Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de Mme Isabelle Debré.)
PRÉSIDENCE DE Mme Isabelle Debré
vice-présidente
Mme la présidente. La séance est reprise.
7
Saisine du Conseil constitutionnel
Mme la présidente. Le Conseil constitutionnel a informé le Sénat qu’il a été saisi le 23 février 2017, en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, par plus de soixante députés, de la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d’ordre.
Le texte de la saisine est disponible au bureau de la distribution.
Acte est donné de cette communication.
Personne ne demande la parole ?…
Nous passons à la suite de l’ordre du jour.
8
Maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes
Adoption d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié
Mme la présidente. L’ordre du jour appelle la discussion, à la demande du groupe Les Républicains, de la proposition de loi pour le maintien des compétences « eau » et « assainissement » dans les compétences optionnelles des communautés de communes, présentée par MM. Bruno Retailleau, François Zocchetto, Philippe Bas, Mathieu Darnaud et plusieurs de leurs collègues (proposition n° 291, texte de la commission n° 410, rapport n° 409).
Dans la discussion générale, la parole est à M. Jean Bizet, auteur de la proposition de loi.
M. Jean Bizet, auteur de la proposition de loi. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la présente proposition de loi répond à une forte attente de nos territoires, dont les élus appréhendent le transfert des compétences « eau » et « assainissement ».
Comme vous le savez, le régime d’attribution des compétences « eau » et « assainissement », dont l’exercice est complexe et hétérogène dans les territoires, a été sensiblement modifié par la loi NOTRe. Antérieurement à l’adoption de ce texte, l’assainissement figurait au rang des compétences optionnelles, un des sept groupes relevant du choix des communautés de communes. La compétence « eau », facultative, pouvait être librement transférée à l’intercommunalité par décision des communes membres, à la majorité des deux tiers.
Dans un objectif de renforcement de l’intégration communautaire, la loi NOTRe a élargi le bloc des compétences obligatoires des communautés de communes. Celui-ci comprend désormais l’eau et l’assainissement, le transfert étant organisé en deux temps d’ici au 1er janvier 2020. À cette date, aux termes du droit en vigueur, les services de l’eau et de l’assainissement seront obligatoirement pris en charge par les communautés de communes.
Avant cette échéance, la loi NOTRe a prévu des mesures transitoires. Les communautés de communes existant à la date de publication de la loi auront jusqu’au 31 décembre 2017 pour se conformer aux nouvelles dispositions.
Lors des débats sur la loi NOTRe au Sénat, Jean-Jacques Hyest et René Vandierendonck, corapporteurs du texte, s’étaient opposés à la démarche du Gouvernement visant à créer de nouvelles compétences obligatoires pour les communautés de communes. L’amendement du Gouvernement prévoyant la création de ces nouvelles compétences obligatoires avait suscité une vive opposition transpartisane au Sénat.
Notre assemblée avait donc adopté en deuxième lecture un texte dans lequel l’eau et l’assainissement avaient été classés au rang des compétences optionnelles des communautés de communes, afin de faciliter leur fonctionnement et au nom du principe de subsidiarité.
Aujourd’hui, le transfert de ces compétences suscite de nombreuses difficultés au sein de nos territoires, ce qui nous rappelle la nécessité, en matière de réformes territoriales, de faire preuve de pragmatisme.
On rappellera d’emblée que les délais prévus par la loi NOTRe sont beaucoup trop courts pour certaines communes, notamment rurales. De plus, les petites communes exerçant la compétence « eau » en gestion directe – c’est-à-dire en régie – fournissent déjà l’eau à un coût relativement faible pour les usagers et la collectivité.
Comme vous le savez, la gestion des services de l’eau et de l’assainissement est tributaire de nombreuses considérations géographiques, matérielles et techniques : il s’agit souvent d’exploiter un réseau physique préexistant.
La composition et l’organisation du réseau d’eau et d’assainissement dépendent nécessairement des spécificités, notamment physiques, des territoires. Or la loi n’est pas toujours en mesure d’anticiper les difficultés propres à de tels bouleversements dans l’exercice des compétences des communes.
Sur nos territoires, communes et syndicats exercent actuellement les compétences « eau » et « assainissement » de manière efficace et économique, dans l’intérêt des citoyens et, surtout, en tenant compte des contraintes techniques et géographiques liées à cet exercice.
Doit-on, au nom du seul renforcement de l’intercommunalité, mettre fin à ces pratiques adaptées à nos territoires ? Comme l’a dit Winston Churchill, « il n’y a rien de négatif dans le changement, si c’est dans la bonne direction ». Or la direction prise avec la loi NOTRe, sur cette question, n’est pas conforme à l’intérêt de nos concitoyens.
Le texte dont nous allons débattre a pour objet de remédier aux difficultés créées par ce transfert de compétences. Il vise à limiter les effets des dispositions de la loi NOTRe relatives à l’eau et à l’assainissement en supprimant le caractère obligatoire, à compter du 1er janvier 2020, du transfert de ces compétences aux communautés de communes.
Si ce texte était adopté, la compétence « eau » et la compétence « assainissement » demeureraient donc au rang des compétences optionnelles des communautés de communes.
D’une part, cette proposition de loi permettra de conforter la commune comme cellule de base de la démocratie locale. Comme je l’ai indiqué précédemment, les spécificités des compétences « eau » et « assainissement » font de la commune l’échelon territorial le plus à même de les exercer avec efficacité.
D’autre part, ce texte vise à remédier aux difficultés pratiques liées à ce transfert de compétences. Il procède d’une simple application du principe de subsidiarité, selon lequel une compétence doit être exercée par l’échelon le plus pertinent, en l’occurrence le plus proche des usagers. Cela vaut pour l’ensemble formé par les communes et les communautés de communes comme pour celui constitué de l’Union européenne et de ses États membres.
Nous devons en outre toujours rester fidèles au principe de liberté pour les communes de choisir de transférer ou pas une de leurs compétences à l’intercommunalité.
En application de ces principes, il doit revenir aux communes de choisir le niveau d’exercice des compétences « eau » et « assainissement ». Un transfert rationalisé de ces compétences implique que les communes soient libres d’en déterminer le rythme et le calendrier.
Le maintien du caractère optionnel de ces compétences répond à un impératif de pragmatisme et de flexibilité pour les communes. Cela n’affecte pas les chantiers de transfert déjà en cours dans de nombreuses communautés de communes.
M. Bruno Sido. Absolument !
M. Jean Bizet. Ce texte est d’autant plus nécessaire que, comme l’a souligné notre rapporteur, l’eau représente un enjeu de développement territorial. Il serait en effet peu opportun de retirer à des syndicats cette compétence au profit d’une intercommunalité n’ayant aucun savoir-faire en matière de gestion de l’eau et d’assainissement ne présentant parfois aucune cohérence en termes de périmètre.
En tout état de cause, je voudrais réaffirmer qu’il ne s’agit pas ici de freiner le développement de l’intercommunalité. En réalité, l’objet de cette proposition de loi est de permettre aux acteurs locaux de bénéficier de plus de temps et de plus de flexibilité dans l’exercice complexe de ces compétences, notamment en zone rurale ou de peuplement irrégulier.
Le Sénat, en adoptant ce texte, fera preuve de son attention et de sa vigilance habituelles, s’agissant de l’adaptation de la loi NOTRe aux réalités de nos territoires. Une telle approche convient particulièrement à notre assemblée, et je suis persuadé que, sur toutes les travées, chacun a conscience de l’intérêt de confier aux communes le soin de conférer ou non ces compétences à l’intercommunalité. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur certaines travées de l’UDI-UC. – M. Pierre-Yves Collombat applaudit également.)
M. Bruno Sido. Très bien !
Mme la présidente. La parole est à M. le rapporteur.
M. Mathieu Darnaud, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’Association des maires de France observe que « l’organisation des services de l’eau répond à des logiques de qualité et de disponibilité de la ressource qui dépasse les frontières administratives ».
La question de l’eau, plus encore que celle de l’assainissement, nécessite effectivement un traitement particulier, surtout quand il s’agit des territoires, notamment ruraux, où l’eau est un service essentiel à la vie et une compétence dont le bon exercice contribue au développement.
L’objet de cette proposition de loi est, avant tout, de répondre à une volonté largement exprimée par les maires sur les différents territoires. La mission de suivi et de contrôle des lois de réforme territoriale a mené un important travail ; avec mes collègues René Vandierendonck et Pierre-Yves Collombat, nous avons sillonné les différents territoires de France. Nous rendrons nos conclusions et présenterons plusieurs observations et des propositions dans quelques jours. S’il est une question centrale, sur laquelle l’ensemble des élus des différents territoires ont mis l’accent, c’est bien celle de l’eau et de l’assainissement.
À l’évidence, le transfert des compétences « eau » et « assainissement » vers l’intercommunalité représente parfois un souci majeur en termes de coûts supplémentaires pour l’usager, mais également pour les budgets annexes de l’eau, qui sont souvent, dans les petites communes rurales, les seuls budgets excédentaires.
Se pose également la question des syndicats des eaux. Dans la partie sud de mon département, le syndicat des eaux de la basse Ardèche regroupe aujourd’hui plusieurs intercommunalités et peut, à lui seul, assurer les services d’eau et d’assainissement. Par là même, il participe au développement de ce territoire.
Il importe également de laisser l’initiative aux élus des territoires. Au travers de cette proposition de loi, nous entendons non pas remettre en cause l’ensemble de l’architecture de la loi NOTRe, mais essayer de pointer clairement les problèmes majeurs que rencontrent aujourd’hui les élus, notamment communaux, sur cette question de l’eau et de l’assainissement. Je le dis avec force : là où les choses se passent naturellement, les transferts s’opèrent sans difficultés particulières. Pour autant, il subsiste quelques cas lourds, auxquels nous devons prêter une attention toute particulière.
Avec cette proposition de loi, le Sénat fait véritablement œuvre utile. Nous examinerons tout à l’heure quelques amendements visant, notamment, à inclure les communautés d’agglomération dans le champ de la réflexion. À ce stade, on peut faire observer que les structures intercommunales existantes, en particulier les communautés d’agglomération ou même les communautés urbaines, ne répondent pas, pour partie, à l’objectif initial, en ce qu’elles recouvrent souvent des territoires périurbains ou ruraux, qui ont le plus grand mal à admettre l’idée de leur transférer les compétences « eau » et « assainissement ». Il me semble important de l’entendre. Il nous faudra un jour repenser le découpage des territoires intercommunaux, repenser les outils que sont les communautés de communes, les communautés d’agglomération et les communautés urbaines, pour faire en sorte que les problématiques relatives à la ruralité soient pleinement prises en compte, notamment au travers de cette question des compétences « eau » et « assainissement ».
Pour conclure, je crois qu’il faut veiller à ce que l’application de la loi NOTRe ne vienne pas contrarier les bonnes pratiques dans nos différents territoires. Aujourd’hui, l’exercice des compétences « eau » et « assainissement » par les communes ou les syndicats des eaux est vécu de façon plutôt positive. Il ne faudrait pas qu’un transfert prématuré vienne contrarier cette bonne gestion et, finalement, augmenter la facture pour l’usager.
Nous avons aujourd’hui, à mon sens, l’ardente obligation d’entendre la voix des territoires et de faire en sorte d’adapter les dispositions de la loi NOTRe à leur réalité, sans pour autant détricoter ce texte. Tel est l’esprit de cette proposition de loi, qui recueillera, j’en suis certain, votre assentiment, le seul objectif de ses auteurs ayant été de faire œuvre utile pour l’ensemble des territoires de France. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et de l’UDI-UC. – MM. Pierre-Yves Collombat et René Vandierendonck applaudissent également.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Michel Baylet, ministre de l'aménagement du territoire, de la ruralité et des collectivités territoriales. Madame la présidente, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, l’objet de la présente proposition de loi, dont je salue les auteurs, renvoie à la question des compétences exercées par les établissements de coopération intercommunale à fiscalité propre.
Le législateur a en effet confié de nouvelles responsabilités aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération. Celles-ci sont compétentes, depuis le 1er janvier dernier, en matière de prévention et de gestion des déchets ménagers, de développement économique – je pense en particulier à l’ensemble des zones d’activité – ou encore d’accueil des gens du voyage. Au 1er janvier prochain, elles seront également chargées de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations, au titre de la compétence GEMAPI.
La loi NOTRe a enfin prévu, et c’est le cœur de notre sujet, le transfert à titre optionnel en 2018, puis obligatoire en 2020, des compétences « eau potable » et « assainissement » à l’ensemble des communautés de communes et des communautés d’agglomération.
La proposition de loi discutée aujourd’hui vise à revenir sur ce transfert, qui resterait seulement optionnel. En revanche, le texte ne remet pas en cause les dispositions de la loi NOTRe concernant les communautés d’agglomération.
Mesdames, messieurs les sénateurs, de quoi parlons-nous précisément ?
Le service public d’eau potable se décline en deux types de missions : une mission obligatoire de distribution de l’eau potable aux usagers et des missions facultatives de production, de transport et de stockage. Le service public d’assainissement comporte, quant à lui, deux volets distincts : l’assainissement collectif et l’assainissement non collectif.
Enfin, je souhaite le préciser à cette tribune après avoir eu l’occasion de répondre à plusieurs questions écrites sur le sujet, le transfert de la compétence « assainissement » emporte celui de la gestion des eaux pluviales urbaines.
J’aimerais maintenant rappeler les nombreuses raisons qui ont conduit le Gouvernement à proposer au Parlement de confier ces services publics de première nécessité à l’échelon intercommunal.
Selon le dernier recensement réalisé par l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement, il existe environ 35 000 services d’eau et d’assainissement… En outre, d’après le rapport annuel de la Cour des comptes de 2015, dans près de 80 % des situations, la commune reste l’autorité organisatrice du service. Ces quelques chiffres témoignent de l’extrême atomisation de notre organisation locale.
Transférer aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération ces compétences permettra donc de mutualiser les moyens techniques et financiers indispensables à un service public de qualité.
Cela se traduira d’abord par une meilleure connaissance des réseaux, synonyme de rendement amélioré. Pour rappel, on estime toujours à environ 20 % le taux de perte, en raison des fuites, de ce bien précieux qu’est l’eau potable.
Un sénateur du groupe Les Républicains. Cela ne signifie rien !
M. Jean-Michel Baylet, ministre. Si ! Cela prouve que l’entretien des réseaux n’est pas satisfaisant. La situation sera différente quand il sera assuré par des EPCI de taille plus importante !
M. Pierre-Yves Collombat. Tiens donc ! Bien entendu…
M. Jean-Michel Baylet, ministre. En outre, le transfert à l’intercommunalité permettra de disposer d’une assise financière accrue, dans un contexte global difficile pour les finances publiques, et alors que les services d’eau potable et d’assainissement connaissent ces dernières années un effet de ciseau, entre des ventes d’eau en diminution et des charges d’exploitation qui continuent d’augmenter.
Par définition, les regroupements faciliteront une approche plus globale de la gestion de la ressource en eau, notamment de ses enjeux environnementaux.
Cette gestion intercommunale doit ainsi constituer le trait d’union entre ce que l’on appelle communément le « petit cycle » et le « grand cycle » de l’eau, d’autant que les intercommunalités seront prochainement compétentes en matière de GEMAPI, comme j’ai eu l’occasion de l’indiquer précédemment.
C’est enfin et surtout, mesdames, messieurs les sénateurs, une mesure d’équité et de justice. Est-il normal que les tarifs et la qualité du service public de l’eau diffèrent autant d’un village à l’autre ? L’eau potable et l’assainissement constituent des services publics de première nécessité, comme l’électricité. Sur le même modèle, on pourrait même soutenir –certains ont eu le courage de le faire – la mise en place de tarifs nationaux. La réforme territoriale va assurer une cohérence à l’échelle intercommunale ; c’est déjà une avancée que l’on ne saurait combattre.
Les transferts proposés vont conduire à de profondes évolutions, je ne le nie pas, sources parfois d’inquiétudes sur le terrain. Je reçois de nombreux courriers qui en attestent. Toutefois, le calendrier prévu permet de se préparer dans de bonnes conditions.
Je voudrais d’ailleurs rappeler, à cet égard, la publication d’une note d’information de la Direction générale des collectivités locales, dès le 13 juillet dernier, pour accompagner les collectivités et les élus locaux dans la mise en œuvre de cette réforme.
L’exercice obligatoire au 1er janvier 2020 de ces compétences ne se traduira pas nécessairement du jour au lendemain par l’harmonisation du service et des tarifs. Bien évidemment, cela doit rester un objectif à atteindre dans des délais raisonnables. Les contrats en cours continueront à produire leurs effets jusqu’à leur échéance, sauf décision négociée par l’intercommunalité avec les tiers concernés.
Par conséquent, et même si l’on peut le regretter, des tarifs différenciés pourront exister. Ce n’est pas exactement ce que l’on appelle un big bang institutionnel, convenez-en.
Je souhaiterais enfin dire quelques mots sur le devenir des syndicats intercommunaux existants.
Un certain nombre d’entre eux ont certes vocation à disparaître. Mais, là encore, la loi répond à un objectif de mutualisation des moyens, tout en tenant compte de la nouvelle carte intercommunale issue des travaux des commissions départementales de coopération intercommunale. Il ne s’agit pas de supprimer les outils existants permettant de répondre aux enjeux que je viens de préciser. Ainsi, comme le prévoit la loi NOTRe, dans les syndicats dont le périmètre recouvre tout ou partie du territoire de trois EPCI à fiscalité propre au minimum, les communautés de communes se substitueront automatiquement à leurs communes membres. Les grands syndicats techniques seront donc préservés.
Je pense d’ailleurs que la constitution de grands syndicats départementaux peut représenter un modèle d’organisation pertinent. Certains départements ont en tout cas eu la volonté et le courage d’en mettre en place. J’avoue ne pas y être parvenu dans le mien, mais cela correspond à ma vision des choses. Appliquer un même tarif pour l’eau dans toutes les communes d’un même département relève de l’équité !