Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. S’il vise les fonctions exécutives locales, cet amendement est de même nature que les précédents. La commission y est donc également défavorable.
Par ailleurs, les questions d’incompatibilité des mandats locaux relevant de la loi ordinaire et non d’une loi organique, le Conseil constitutionnel ne manquerait pas de censurer une telle disposition.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Monsieur Bonhomme, l'amendement n° 10 rectifié bis est-il maintenu ?
M. François Bonhomme. Je retire cet amendement d’appel, sans plaisir mais avec raison.
La question n’en demeure pas moins criante et il faudra bien, un jour ou l’autre, se décider à la traiter.
Mme la présidente. L'amendement n° 10 rectifié bis est retiré.
3
Mise au point au sujet de votes
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat.
M. Pierre-Yves Collombat. Lors des scrutins nos 105 et 106 sur le projet de loi ordinaire, MM. Hue, Pélieu et Barbier ont été considérés comme votant contre. Or les deux premiers ne souhaitaient pas prendre part au vote et le troisième entendait s’abstenir.
Mme la présidente. Acte vous est donné de cette mise au point, qui sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin.
4
Rétablissement de la confiance dans l'action publique
Suite de la discussion en procédure accélérée d’un projet de loi organique dans le texte de la commission
Mme la présidente. Nous poursuivons la discussion du projet de loi organique, dans le texte de la commission.
projet de loi organique pour la régulation de la vie publique (suite)
Article 7
L’article LO 151-1 du code électoral est ainsi modifié :
1° Au premier alinéa, les références : « et LO 142 à LO 147-1 » sont remplacées par les références : « , LO 142 à LO 146-1, LO 147 et LO 147-1 » ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard trois mois après son entrée en fonction ou, en cas de contestation de son élection, de la date de la décision du Conseil constitutionnel, le député qui se trouve dans un des cas d’incompatibilité mentionnés aux 1° et 2° de l’article LO 146-2 se met en conformité avec les dispositions de cet article, soit en cédant tout ou partie de la participation, soit en prenant les dispositions nécessaires pour que tout ou partie de celle-ci soit gérée, pendant la durée de son mandat, dans des conditions excluant tout droit de regard de sa part. »
Mme la présidente. L'amendement n° 65, présenté par MM. Doligé et Cardoux, Mme Deseyne, M. J.P. Fournier, Mmes F. Gerbaud, Imbert et Lopez, MM. Milon, Pellevat et Pointereau, Mme Procaccia et M. Vasselle, est ainsi libellé :
I. – Après l'alinéa 1
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Au début, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Au plus tard trois mois après son entrée en fonction ou, en cas de contestation de son élection, la date de la décision du Conseil constitutionnel, le député qui se trouve dans un cas d'incompatibilité mentionné à l'article LO 142 démissionne des fonctions incompatibles avec son mandat parlementaire sauf lorsqu’il occupe un emploi public mentionné au 1° et au 2°. » ;
II. – Alinéa 2
Remplacer la deuxième occurrence de la référence :
LO 142
par la référence :
LO 143
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. Par cet amendement, nous voulons permettre à la France de s’aligner sur les règles en application dans la plupart des pays de l’OCDE, notamment dans les pays anglo-saxons.
Nous proposons que les fonctionnaires devenus parlementaires – et peut-être faudrait-il rectifier cet amendement pour limiter cette disposition à ceux de la catégorie A – aient l’obligation de démissionner de la fonction publique.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, président de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du règlement et d'administration générale, rapporteur. Vous me voyez extrêmement embarrassé : en tant que président de la commission des lois, je vais devoir émettre un avis défavorable sur cet amendement bien inspiré, qui, de surcroît, provient de membres de mon groupe, auquel je suis particulièrement attaché. (Sourires.)
M. Éric Doligé. Vous êtes particulièrement attaché au groupe ou aux membres en question ? (Mêmes mouvements.)
M. Philippe Bas, rapporteur. Au groupe et aux auteurs de cet amendement, et en particulier à vous, monsieur Doligé, qui l’avez si bien présenté.
Je me sens d’autant plus fragile et incertain pour vous répondre que je n’ai su me montrer convaincant voilà quelques instants.
Certains métiers s’exercent dans la fonction publique, d’autres dans le secteur privé. Mettre un parlementaire, dont le mandat pourrait très bien ne pas être renouvelé, dans la situation de ne plus pouvoir exercer son métier serait quelque peu injuste.
Vous avez vous-même objecté qu’il aurait peut-être fallu limiter votre dispositif à la catégorie A. Or une infirmière appartient à cette catégorie. Il existe des infirmières devenues parlementaires, il en est peut-être ici même. De même, un cadre territorial, une aide-soignante ou un professeur de français… Comment ces personnes pourraient-elles reprendre leur travail, à l’issue de leur mandat électif, si nous leur imposons de démissionner de la fonction publique ?
Nous avons un problème de statut des élus. Certains de nos collègues, qui ont abandonné leur métier dans le secteur privé, vont avoir le plus grand mal à le retrouver après leur mandat. Au lieu de traiter cette question, pourquoi interdire à ceux qui pourraient le faire de retrouver leur emploi ? Cela reviendrait à leur imposer de faire tout métier, sauf le leur – infirmière, aide-soignante, cadre territorial, professeur de français, professeur des écoles, etc.
Le désir d’amener plus de justice vous amène à créer une injustice sans régler le problème de ceux qui, en fin de mandat, vont se trouver en grande difficulté.
Le problème se pose surtout pour les jeunes actifs, ou pour les actifs encore jeunes, qui quitteraient la vie publique sans être aidés pour retrouver du travail. Nous devrions nous retrouver autour de la table, avec le Gouvernement, pour résoudre, une bonne fois pour toutes, ce problème lancinant.
En espérant, cette fois, avoir été plus convaincant que précédemment, je vous demanderai, monsieur Doligé, de bien vouloir retirer votre amendement au bénéfice de mes explications.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice. Il s’agit d’une question essentielle du statut de l’élu que nous n’avons pas su régler, alors que nous avons pléthore de textes sur le sujet. Cette question est d’autant plus importante que nous souhaitons faciliter le renouvellement politique.
Sous couvert de rechercher une plus grande égalité entre fonctionnaires et salariés du secteur privé, l’adoption de cet amendement risquerait de créer une discrimination à rebours. Le Parlement doit être composé de l’ensemble des représentants de la Nation, y compris des fonctionnaires. Je ne suis pas persuadée qu’en empêchant un fonctionnaire de retrouver son métier d’origine, quelle que soit sa catégorie, nous créions réellement une plus grande égalité au sein du Parlement.
Mme la présidente. Monsieur Doligé, l'amendement n° 65 est-il maintenu ?
M. Éric Doligé. J’ai écouté avec attention notre rapporteur et Mme la garde des sceaux, qui ont fini par me convaincre.
Je voulais démontrer l’inégalité existant entre les parlementaires issus de la fonction publique et ceux venant du privé. Je pense notamment aux jeunes députés de La République en marche qui ont, pour certains, abandonné leur métier et qui se retrouveront en grande difficulté dans cinq ou dix ans, la fin du cumul des mandants venant leur fermer certaines portes de sortie… On n’a pas mesuré, au travers de certaines décisions, les risques encourus par ces jeunes élus.
M. Philippe Bas, rapporteur. Ils n’auraient pas même dû se présenter ! (Sourires)
M. Éric Doligé. Comme pour de nombreux autres sujets, ce n’est jamais le bon moment de s’attaquer au statut de l’élu et l’on préfère reporter indéfiniment l’examen de cette question. Au fil du temps, on se retrouve face à un mur de plus en plus difficile à franchir. Dans cinq ans, beaucoup de ces nouveaux élus vont être en grande difficulté. Les petits aménagements mis en place sur le court terme ne régleront rien…
Il n’y avait aucune arrière-pensée dans cet amendement. Merci à M. le rapporteur et à Mme la garde des sceaux de m’avoir permis d’aller un peu loin sur le fond.
Mme la présidente. L'amendement n° 65 est retiré.
L'amendement n° 66, présenté par MM. Doligé, Cardoux et Chasseing, Mme Deseyne, M. J.P. Fournier, Mmes F. Gerbaud, Imbert et Lopez, MM. Milon, Pellevat et Pointereau, Mme Procaccia et M. Vasselle, est ainsi libellé :
I. - Après l’alinéa 2
Insérer un alinéa ainsi rédigé :
…° Le second alinéa est complété par les mots : « ni de cotiser pour la retraite à la caisse de son administration d’origine » ;
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :
… – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
… – La perte de recettes résultant pour la Caisse Nationale de Retraites des Agents des collectivités locales du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts
La parole est à M. Éric Doligé.
M. Éric Doligé. J’avais cru comprendre qu’un fonctionnaire qui sortait frais émoulu d’une grande école et rejoignait le Conseil d’État ou le Conseil constitutionnel pouvait en partir au bout d’un an et n’y jamais retourner, sinon la veille de sa retraite potentielle, et bénéficier d’une pension au taux plein.
M. Roger Karoutchi. On ne peut plus le faire !
M. Éric Doligé. Si M. Bas me confirme que ce n’est plus possible, comme on me le souffle, je retirerai mon amendement, ravi d’avoir été devancé sur cette question.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Mon cher collègue, c’est bien volontiers que je vous le confirme. Cette mesure était tellement nécessaire qu’elle a été votée voilà maintenant quatre ans. C’est dire si vous étiez bien inspiré ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Je voudrais juste préciser qu’un membre du Conseil constitutionnel ne cotise pas pour la retraite.
Mme la présidente. L'amendement n° 66 est retiré.
L'amendement n° 8 rectifié bis, présenté par MM. Bonhomme, Pellevat, de Legge et Vasselle, Mme Duchêne, M. A. Marc, Mme Deromedi, M. Doligé, Mme F. Gerbaud et MM. G. Bailly et Béchu, est ainsi libellé :
Alinéa 4
Après la référence :
LO 146-2
insérer les mots:
ou au II de l'article LO 146-3
La parole est à M. François Bonhomme.
M. François Bonhomme. Il s'agit de permettre à un parlementaire détenant des participations dans le capital d'une entreprise de presse de céder ses participations dans un délai de trois mois ou d'en confier la gestion, sans droit de regard, à un tiers.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. Monsieur Bonhomme, les amendements précédents n’ayant pas été adoptés, la commission vous demande de bien vouloir retirer cet amendement de pure coordination.
Mme la présidente. Monsieur Bonhomme, l'amendement n° 8 rectifié bis est-il maintenu ?
M. François Bonhomme. Je me range à la sagesse du rapporteur et retire cet amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L'amendement n° 8 rectifié bis est retiré.
Je mets aux voix l'article 7.
(L'article 7 est adopté.)
Article 8
Le premier alinéa de l’article LO 151-2 du code électoral est ainsi modifié :
1° À la première phrase, après le mot : « général », sont insérés les mots : « ou les participations financières » ;
2° À la même première phrase, après les mots : « en application du », sont insérés les mots : « 5° et du » ;
3° À la seconde phrase, après le mot : « exercées », sont insérés les mots : « ou des participations détenues ». – (Adopté.)
Articles additionnels après l'article 8
Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.
L'amendement n° 55, présenté par MM. Bonhomme, Allizard, G. Bailly et Calvet, Mme Canayer, M. Cardoux, Mme Cayeux, MM. Chaize, Charon, Chasseing, Chatillon, Cuypers et Danesi, Mme Debré, M. Delattre, Mmes Deroche, Deromedi, Deseyne et Di Folco, MM. Doligé et Duvernois, Mme Estrosi Sassone, MM. Frassa et Frogier, Mme F. Gerbaud, MM. Gilles, Grand et Gremillet, Mme Gruny, M. Guené, Mmes Hummel et Imbert, MM. Joyandet, Karoutchi et Laménie, Mme Lamure, MM. D. Laurent, de Legge, Leleux, Magras, Malhuret, Mandelli et Mayet, Mmes Mélot, Micouleau et Morhet-Richaud, MM. Morisset, Nègre, de Nicolaÿ, Nougein, Panunzi, Paul et Pierre, Mme Procaccia, MM. de Raincourt, Raison, Rapin, Retailleau et Revet, Mme de Rose et MM. Savary, Savin, Vaspart, Vasselle et Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code électoral est ainsi modifié :
1° L’article LO 144 est abrogé ;
2° Au premier alinéa des articles LO 176 et LO 319, les mots : « , d’acceptation des fonctions de membre du Conseil constitutionnel ou de Défenseur des droits ou de prolongation au-delà du délai de six mois d’une mission temporaire confiée par le Gouvernement » sont remplacés par les mots : « ou d’acceptation des fonctions de membre du Conseil constitutionnel ou de Défenseur des droits ».
II. – Le II de l’article 2 de la loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique est abrogé.
III. – Le 2° de l’article 1er de l’ordonnance n° 58-1066 du 7 novembre 1958 portant loi organique autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote est abrogé.
La parole est à M. François Bonhomme.
M. François Bonhomme. Le Sénat a adopté, le 3 février 2016, une proposition de loi de M. Jacques Mézard visant à supprimer les missions temporaires confiées aux parlementaires par le Gouvernement.
La commission des lois, sur avis de son rapporteur, Hugues Portelli, a estimé alors que ce procédé constituait une atteinte à la séparation des pouvoirs, le parlementaire devant se consacrer parallèlement à sa mission législative, de contrôle et d'évaluation au sein du Parlement.
Cet amendement tend donc à clarifier le rôle du parlementaire dans l’action publique.
Mme la présidente. L'amendement n° 63 rectifié, présenté par MM. Éblé et Mazuir, Mme Yonnet, MM. Vandierendonck et Raoul, Mmes Herviaux, Lienemann et Monier et M. Duran, est ainsi libellé :
Après l’article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article LO 176 du code électoral est ainsi rédigé :
« Art. LO 176. – Sous réserve du second et du dernier alinéa du présent article, les députés dont le siège devient vacant pour toute autre cause que l’annulation de l’élection, la démission d’office prononcée par le Conseil constitutionnel en application de l’article LO 136-1, la démission intervenue pour tout autre motif qu’une incompatibilité prévue aux articles LO 137, LO 137-1, LO 141 ou LO 141-1 ou la déchéance constatée par le Conseil constitutionnel en application de l’article LO 136 sont remplacés jusqu’au renouvellement de l’Assemblée nationale par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet.
« Toutefois, les députés dont le siège devient vacant, au motif d’une incompatibilité prévue aux articles LO 137, LO 137-1, LO 141 ou LO 141-1 intervenue dans les six mois du dernier renouvellement de l’Assemblée nationale, ne peuvent pas être remplacés par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet.
« Les députés qui acceptent des fonctions Gouvernementales sont remplacés, jusqu’à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation de ces fonctions, par les personnes élues en même temps qu’eux à cet effet. »
La parole est à Mme Évelyne Yonnet.
Mme Évelyne Yonnet. M. Éblé ne pouvant être présent parmi nous, je présenterai cet amendement à sa place.
La volonté des auteurs du texte que nous examinons étant de « rénover » la confiance en nos institutions, il nous a semblé opportun de renforcer la loi pour mettre fin à des pratiques électorales contestables.
En l’état du droit, l’incompatibilité entre un mandat de député et de sénateur permet au suppléant du député élu sénateur de siéger à sa place jusqu’au prochain renouvellement de l’Assemblée nationale.
Cependant, lorsque ces deux élections se succèdent à quelques semaines d’intervalle, un député récemment élu faisant le choix d’être également candidat aux sénatoriales transmettra automatiquement, s’il est élu, son siège de député à son suppléant, sans nouvelle élection.
On voit ici parfaitement la manœuvre consistant à mettre en avant un candidat à la forte notoriété pour gagner la circonscription et ensuite permettre au suppléant, moins connu, d’exercer le mandat quelques semaines plus tard, sans permettre aux électeurs de valider cette succession.
Le retour naturel aux électeurs nous paraît essentiel lorsque ce cas de figure se présente afin de permettre aux citoyens de choisir légitiment le député qu’ils souhaitent voir représenter leur territoire.
L’adoption de cet amendement permettra de limiter ces comportements électoraux douteux que nos concitoyens rejettent massivement. Il répond donc pleinement à la volonté de transparence du Gouvernement.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Bas, rapporteur. La commission est favorable à ces deux amendements.
Quel plaisir, pour le président de la commission des lois, de pouvoir émettre, de temps à autre, des avis favorables ! (Sourires.)
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Nicole Belloubet, garde des sceaux. Le Gouvernement est défavorable à l’amendement n°55.
L’intérêt général justifie que des parlementaires puissent être parfois associés aux travaux de réflexion conduits à la demande du Gouvernement en amont du processus législatif stricto sensu. Cela permet d’associer des profils et des compétences variés. La pluridisciplinarité permet de mieux penser un certain nombre de réformes ensuite mises en œuvre à travers des textes législatifs.
La participation des parlementaires nous semble essentielle à ces réflexions. La suppression des missions temporaires ne me paraît pas de nature à améliorer le fonctionnement de nos institutions.
Par ailleurs, un parlementaire qui accomplit une mission à la demande Gouvernement est libre de l’organisation de son travail et de la formulation de ses conclusions et ne perçoit aucune rémunération ni indemnité. Cette pratique ancienne ne me paraît pas porter gravement atteinte au principe de séparation des pouvoirs.
Le Gouvernement est également défavorable à l’amendement n°63 rectifié. Les dispositions relatives au remplacement, adoptées en 2014, viennent d’entrer en vigueur. Il ne me semble pas opportun de les modifier dès à présent.
Mme la présidente. La parole est à M. Roger Karoutchi, pour explication de vote sur l'amendement n° 55.
M. Roger Karoutchi. Je soutiens l’amendement n°55.
Franchement, depuis des décennies, que ce soit à droite ou à gauche, la prolongation au-delà de six mois d’une mission confiée à un parlementaire est un moyen de transmettre son siège à son suppléant.
Aujourd’hui, si le Gouvernement veut l’avis d’un parlementaire, faire travailler une commission sur une question ou s’appuyer sur une approche un peu différente, il peut le demander sans avoir besoin de nommer un parlementaire en mission. Il y a suffisamment d’échanges entre la majorité et le Gouvernement ou les commissions et le Gouvernement pour le faire. La France n’est pas en guerre civile ! Le Gouvernement peut d’ailleurs demander à une commission, qui ne le refusera pas, de travailler sur un sujet précis et de lui remettre un rapport.
Certes, madame la garde des sceaux, le parlementaire en mission est indépendant et n’est pas rémunéré. Mais en quoi est-il plus indépendant ou plus compétent à lui seul qu’une commission entière ? Pourquoi accorder ce statut – quelque peu curieux – et ne pas simplement consulter un parlementaire ?
Sous la présidence de M. Sarkozy, je souhaitais déjà que l’on supprime ce statut qui ne correspond plus à nos méthodes de travail. Je regrette que cela n’ait pas été fait.
M. Claude Bérit-Débat. Nicolas Sarkozy ne s’était pas privé de recourir à cette manœuvre !
M. Roger Karoutchi. Tout le monde y a eu recours, à gauche comme à droite.
Prolonger la mission du parlementaire au-delà de six mois pour lui permettre de transmettre son siège à son suppléant sans repasser devant les électeurs est une manœuvre aujourd’hui très moyenne.
Mme la présidente. La parole est à M. René-Paul Savary, pour explication de vote.
M. René-Paul Savary. Je soutiens également l’amendement n° 55.
Ma modeste expérience d’un mandat m’a montré que les commissions parlementaires s’emparent elles-mêmes des thèmes particulièrement importants. Nous avons conduit, au sein de la commission des affaires sociales, un certain nombre de missions – sur les urgences, par exemple – de façon consensuelle, en associant plusieurs parlementaires d’orientations politiques différentes. Notre travail y a beaucoup gagné.
La procédure spécifique de nomination d’un parlementaire en mission cache toujours une arrière-pensée politique. Laisser aux commissions la liberté de s’organiser permet d’assurer la pluralité nécessaire au traitement objectif de ces questions.
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre-Yves Collombat, pour explication de vote.
M. Pierre-Yves Collombat. Il y a de bonnes raisons de soutenir cet amendement, ne choisissons pas les mauvaises.
La proposition de loi portée par Jacques Mézard, si ma mémoire est bonne, visait non la suppression des missions temporaires, mais celle de la disposition permettant, quand celles-ci se prolongent au-delà de six mois, la transmission du siège au suppléant. Cette manœuvre s’apparente souvent à une entourloupe pour échapper aux élections partielles.
Reprenez le texte de la proposition de loi, vous verrez qu’il n’était pas question de supprimer les sénateurs en mission temporaire. Maintenant, libre à vous de penser que cette disposition n’a plus lieu d’être, mais décidez-vous en connaissance de cause !
Mme la présidente. La parole est à M. Jean Louis Masson, pour explication de vote.
M. Jean Louis Masson. Le remplacement des parlementaires en mission par leur suppléant est tout à fait anormal. Il s’agit d’une anomalie que j’ai déjà soulignée à plusieurs reprises.
Encore plus grave, la transmission du siège ne bénéficie qu’au parti majoritaire puisque c’est le Gouvernement qui nomme les parlementaires en mission. C’est un véritable scandale démocratique !
Madame la garde des sceaux, comment pouvez-vous considérer qu’une telle situation soit normale ?
Au moment où le parti de M. Macron prétend donner des leçons à tout le monde, il paraît incroyable de cautionner un système aussi rétrograde et antidémocratique, qui permet aux partis majoritaires de faire remplacer tel ou tel député par son suppléant, tout en excluant les partis de l’opposition du dispositif.
Mme la présidente. La parole est à Mme Catherine Génisson, pour explication de vote.
Mme Catherine Génisson. Comme le disait M. Pierre-Yves Collombat, il y a deux sujets, à savoir la nomination d’un parlementaire en mission et la prolongation de celle-ci au-delà de six mois, avec la possibilité de remplacer automatiquement le parlementaire par son suppléant, dispositif qui semble totalement inacceptable.
Le fait qu’un parlementaire puisse être nommé en mission ne me choque pas. Un certain nombre d’entre nous l’ont d’ailleurs été, ce qui leur a permis de traiter un sujet de façon précise et approfondie. En ce qui me concerne, j’ai eu le bonheur de produire un rapport sur l’égalité professionnelle, lequel a abouti à une proposition de loi. Je ne pense pas que, dans ce cas précis, la démocratie ait beaucoup souffert ! Pourquoi un parlementaire, dans la mesure où il adopte une approche pluraliste, ne pourrait-il pas effectuer correctement la mission qui lui est confiée ?
En revanche, le dispositif permettant de prolonger la mission me semble tout à fait anormal.
Mme la présidente. La parole est à M. Marc Laménie, pour explication de vote.
M. Marc Laménie. Je suis cosignataire de cet amendement. Je le rappelle, un gros travail de fond est fait au sein de la Haute Assemblée dans le cadre des rapports d’information, avec l’ensemble des personnels des commissions. Il s’agit d’éclairer non seulement le Sénat, mais aussi le Gouvernement.
Selon moi, cet amendement va dans le sens de la transparence et de l’impartialité.
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi organique, après l'article 8, et l’amendement n° 63 rectifié n’a plus d’objet.
L'amendement n° 88, présenté par M. Bas, au nom de la commission des lois, est ainsi libellé :
Après l'article 8
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le II de l’article LO 145 du code électoral est ainsi rédigé :
« II. – Un député ne peut être désigné en cette qualité dans une institution ou un organisme extérieur qu’en vertu d’une disposition législative qui détermine les conditions de sa désignation. Il ne peut percevoir à ce titre aucune rémunération, gratification ou indemnité. »
II. – Les parlementaires qui se trouvent dans le cas d’incompatibilité prévu au I à la date d’entrée en vigueur de la présente loi peuvent continuer à exercer leurs fonctions au sein d’une institution ou d’un organisme extérieur pour la durée pour laquelle ils ont été désignés.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Philippe Bas, rapporteur. Cet amendement prévoit que la désignation d’un parlementaire dans un organisme extraparlementaire ne peut se faire qu’en vertu d’une loi et non pas d’un décret.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?