Mme la présidente. Je suis donc saisie d’un sous-amendement n° 653, présenté par le Gouvernement, et ainsi libellé :
Amendement n° 452
I. Alinéa 2
Remplacer les mots :
Rédiger ainsi cet alinéa
Par les mots :
Après cet alinéa, insérer un alinéa ainsi rédigé
II. Alinéa 3
remplacer la référence
3°
par la référence
…°
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Il s’agit uniquement de préciser que les cours sont gratuits, ce qui est déjà le cas dans les faits.
La commission émet donc un avis favorable.
Mme la présidente. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.
M. Guillaume Gontard. Madame la présidente, pourrions-nous suspendre la séance pendant quelques instants ? (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.)
En effet, nous n’avons pas bien compris la proposition du Gouvernement et voudrions prendre connaissance du texte de son sous-amendement.
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt-trois heures quarante-cinq, est reprise à vingt-trois heures cinquante.)
Mme la présidente. La séance est reprise.
La parole est à Mme Audrey Linkenheld, pour explication de vote.
Mme Audrey Linkenheld. Depuis le début de cette soirée, nous avons exprimé nos réticences quant à l’obligation, inscrite par le Gouvernement dans le présent projet de loi, de justifier d’un certain niveau de langue pour se voir délivrer une carte de séjour pluriannuelle.
Ce niveau de langue exigé – je n’ai pas bien compris s’il serait fixé par la loi ou par le décret… – pourrait être le niveau A2.
Nous avons demandé à disposer d’une évaluation de la formation linguistique dispensée dans le pays ou d’une étude d’impact, ce qui nous a été refusé. C’est pourquoi nous craignons toujours que cet examen de langue ne soit un facteur d’exclusion, plutôt que d’intégration.
Que les cours de langue soient gratuits est bien entendu un élément positif, auquel nous ne pouvons que souscrire. Mais cela n’enlève rien aux craintes exprimées jusqu’à présent au sujet du niveau de langue A2, qui nous paraît très difficile à atteindre.
Le maintien d’une carte de séjour temporaire rejetterait alors dans la précarité, une fois encore, des hommes et des femmes qui ne demandent rien d’autre que de s’intégrer grâce à une carte de séjour pluriannuelle et d’avoir accès à de véritables moyens d’apprendre cette belle langue qu’est le français.
Mme la présidente. La parole est à M. Ronan Dantec, pour explication de vote.
M. Ronan Dantec. M. le ministre a expliqué – j’ai été attentif, d’autant qu’il est nécessaire de rester concentré assez longtemps sur ses explications – que la langue était le Graal, l’élément qui permettait d’être intégré dans la communauté nationale. Il en résulte l’obligation de justifier d’un niveau de langue, que nous contestons aujourd’hui.
Par ailleurs, M. le ministre affirme être tout de même attentif à nos propos et rechercher le consensus. Il ne peut donc qu’être d’accord sur un point : il est impossible de fixer une obligation de niveau si l’État ne fournit pas le pont permettant d’atteindre ce Graal ! Sinon, cela reviendrait à créer de nouveaux fossés, de nouvelles difficultés, un parcours du combattant qui empêcherait d’accéder aux titres de séjour, même si M. le ministre déclare, la main sur le cœur, qu’une formation gratuite sera dispensée à tous ceux qui le souhaitent.
Pourtant, lorsque nous proposons de garantir aussi le chemin vers la formation, nous ne recevons aucune garantie.
Monsieur le ministre, soyez clair, sans quoi vos propos pourraient être pris pour une forme d’habileté, même si c’est là un procès d’intention que je ne vous ferai jamais.
L’obligation de moyens doit être garantie. La nécessité de passer un examen ne peut être posée sans une obligation de moyens pour l’État. La nouvelle formulation que vous proposez ne fait donc pas tomber l’amendement n° 234, me semble-t-il.
Par conséquent, pouvez-vous préciser que l’obligation d’apprendre la langue et de passer l’examen, d’une part, et celle pour l’État de fournir une formation gratuite, d’autre part, forment bien, à vos yeux, un paquet commun ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Tout d’abord, même si nous connaissons tous la procédure législative, je rappelle qu’il s’agit de ce que nous appelons dans notre jargon un amendement de repli, sur un projet de loi qui est le vôtre, monsieur le ministre, mais aussi celui de la majorité des membres de la commission des lois.
Cet amendement tend à illustrer notre volonté de toujours chercher l’efficacité, au service de celles et de ceux pour lesquels nous nous battons quotidiennement.
Oui, nous pensons que la maîtrise de la langue est un vecteur fondamental de l’intégration.
Sans revenir sur mes propos ou sur ceux qui ont été tenus par mes collègues depuis lundi, l’apprentissage et la maîtrise de la langue française sont des conditions indispensables à l’émancipation de ces femmes et de ces hommes, parfois enfermés dans une forme de repli ou de communautarisme qui les contraignent et les empêchent de s’intégrer et de faire République – nous avons d’ailleurs eu l’occasion de montrer, à l’occasion d’autres débats menés sur d’autres textes, combien le langage était important à cet égard.
Nous avons souhaité prévoir, et cela ne relève pas seulement d’une symbolique des mots, un accès à des cours gratuits dans chaque département. En effet, nous devons être à la fois ambitieux et offensifs, pour réellement permettre cette intégration.
Nous voterons donc l’amendement ainsi sous-amendé par le Gouvernement.
Mme la présidente. La parole est à M. Jacques Fernique, pour explication de vote.
M. Jacques Fernique. Le niveau A2, dont l’obtention deviendrait obligatoire pour accéder à un titre de long séjour, est déjà une obligation pour nos collégiens et nos collégiennes, bien sûr dans une langue vivante étrangère, afin d’obtenir le brevet des collèges.
Or quels sont les moyens – gratuits – déployés par l’éducation nationale pour cela ? Ce sont quatre années d’apprentissage – la sixième, la cinquième, la quatrième et la troisième –, à raison de trois heures hebdomadaires d’enseignement pour la première langue vivante étrangère.
Si l’on fait le calcul – trois heures hebdomadaires sur trente-six semaines pendant quatre ans –, cela correspond à 432 heures. Il s’agit donc non pas simplement de gratuité, mais d’intensité et d’efficacité.
Notre pays brille par ses capacités en matière d’apprentissage des langues étrangères, on le sait… Il faudra donc redoubler d’efforts.
Mme la présidente. La parole est à M. Mickaël Vallet, pour explication de vote.
M. Mickaël Vallet. Monsieur le ministre, je n’ai vu aucune mauvaise foi dans votre première réponse tout à l’heure, mais nous nous sommes peut-être mal compris.
Par conséquent, je le répète, l’objectif de maîtrise de la langue pour vivre et s’intégrer est partagé par tout le monde ici. Ce qui pose problème, c’est le niveau demandé au regard des moyens mis en face.
Sur la question des moyens, la difficulté est de les objectiver. En effet, notre collègue Bernard Jomier expliquait cette après-midi que ce n’était pas forcément aux parlementaires de dresser la liste des maladies chroniques, douloureuses ou que sais-je encore, qui relèveraient de l’aide médicale désormais d’urgence. De la même façon, à une ou deux exceptions près – j’ignore le pedigree de tous nos collègues –, nous ne sommes pas des linguistes ou des pédagogues spécialistes de l’enseignement des langues. Il est donc normal que nous nous interrogions sur ce niveau.
Pourquoi avons-nous, un peu au doigt mouillé, ces discussions qui se réfèrent uniquement à l’étude d’impact du Conseil d’État, qui n’est pas davantage composé de linguistes ou de spécialistes de la pédagogie ? Parce que nous ne disposons pas en France, à la différence de ce qui existe dans d’autres pays ou dans d’autres domaines, comme l’intégration, l’égalité femmes-hommes, les lieux de privation de liberté ou encore les droits, d’un office de la langue qui aborderait ces sujets de manière transversale et qui les objectiverait.
Monsieur le ministre, nous ne tomberons peut-être pas d’accord sur le niveau exigé et le temps imparti, mais un certain nombre d’entre nous seraient prêts à ne pas voter contre votre sous-amendement si vous acceptiez d’y ajouter l’accessibilité effective aux cours, en plus de la gratuité. Il me semble en effet normal de garantir également ce point.
Ce ne serait pas grand-chose, et cela permettrait peut-être l’adoption de votre proposition, dans laquelle je ne veux voir ni habileté ni malice.
Mme la présidente. La parole est à M. Dany Wattebled, pour explication de vote.
M. Dany Wattebled. Notre groupe votera ce sous-amendement.
J’ajouterai une remarque plus générale : on parle de quatre ans pour apprendre le français, mais, en immersion, c’est bien plus facile. Lorsque vous séjournez à l’étranger ou lorsque vous envoyez des enfants vivre à l’étranger, l’apprentissage de la langue est beaucoup plus rapide.
Les étrangers en situation régulière, qui sont chez nous, parlent le français tous les jours. Ce qu’il faut, ce sont des moyens supplémentaires pour corriger leur langue.
Quatre années d’apprentissage ne me semblent donc pas forcément nécessaires pour des personnes qui sont en immersion complète pendant au moins une année.
Mme la présidente. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour explication de vote.
Mme Françoise Gatel. Mes chers collègues, je ne suis plus très sûre de mon niveau de français ce soir… (Sourires.) Je vous assure que je commence à douter !
J’ai bien entendu les explications de M. le ministre : il s’est montré parfaitement clair et je crois que tout le monde l’a compris. Le but est que chacun puisse apprendre le français le plus facilement possible, pour être accueilli en France dans les meilleures conditions, ce qui me semble extrêmement pertinent et salutaire. Nous serons tous d’accord pour saluer cet état d’esprit.
J’ai également compris les explications de Mme Cukierman ; c’est ensuite que j’ai été un peu perdue… (Sourires sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)
J’avais retenu que nos collègues de gauche, très soucieux de l’intégration, voulaient déployer des moyens dignes de ce nom en faveur de celle-ci. Or le choix de la gratuité représente, à ce titre, un effort assez extraordinaire.
On nous a expliqué tout à l’heure que, dans la mesure où nous ne sommes pas l’Académie de médecine, il ne nous revenait pas de dresser la liste des maladies susceptibles d’être prises en charge. Mais, à présent, nous devrions énumérer l’ensemble des moyens nécessaires à cette politique !
Mes chers collègues de gauche, j’ai beaucoup de respect pour vous. Je pense que vous n’avez pas plus de malice que les autres ; mais vos pas de côtés ressemblent tout de même un peu à des digressions et, dans vos interventions, je crois déceler un soupçon de mauvaise foi.
Mme Françoise Gatel. À l’évidence, vous ne voulez pas vous rallier, de manière républicaine, au sous-amendement de M. le ministre, qui a pourtant salué l’amendement de nos collègues communistes ! (Bravo ! et applaudissements sur des travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.)
M. Olivier Paccaud. Excellent !
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Gérald Darmanin, ministre. J’ai bien compris dans quel état d’esprit les membres du groupe communiste ont invité le Sénat à adopter leur amendement ainsi sous-amendé ; ce n’est évidemment pas un blanc-seing pour le vote du présent texte ou même de l’article 1er.
Madame Cukierman, je tiens à vous remercier de votre honnêteté intellectuelle. Nous sommes parvenus à trouver un compromis sur ce sujet, dans un esprit républicain.
À l’instar de Mme Gatel, je n’ai pas compris toutes les interventions qui ont suivi la vôtre. Je déduis simplement de ces circonvolutions que certains cherchent toutes les raisons imaginables de ne pas voter ces dispositions.
Je regrette ce manque d’ouverture, d’autant plus que, pour ce qui concerne l’apprentissage de la langue française, nous nous apprêtons à examiner l’article 2, que le Sénat va, je l’espère, rétablir. Cet article permet aux travailleurs étrangers de suivre des cours de français pendant leurs heures de travail, ce qu’aucun gouvernement n’a jamais fait – nous en parlerons dans quelques instants.
Quoi qu’il en soit, il me semble que nous avons passé suffisamment de temps sur l’article 1er. (Marques d’approbation sur des travées des groupes CRCE-K et Les Républicains.) Nous avons fixé un objectif très noble – pour obtenir une carte de séjour pluriannuelle, il faudra passer un examen de français – et prévu des moyens qui le sont tout autant, à savoir la gratuité des cours. La République s’en trouvera grandie. (Applaudissements sur des travées des groupes RDPI, INDEP et UC.)
Mme la présidente. En conséquence, l’amendement n° 234 n’a plus d’objet.
L’amendement n° 263 rectifié, présenté par M. Ouizille et Mme Narassiguin, est ainsi libellé :
Compléter cet article par cinq paragraphes ainsi rédigés :
…. – Il est constitué une délégation parlementaire à l’immigration et à l’intégration, commune à l’Assemblée nationale et au Sénat.
Elle exerce le contrôle parlementaire de l’action du Gouvernement en matière d’immigration et d’intégration et évalue les politiques publiques en ce domaine. À cette fin, elle est destinataire des informations utiles à l’accomplissement de sa mission. Lui sont notamment communiqués :
1° Tous les éléments d’information statistiques relatifs à l’immigration et à l’intégration ;
2° Un rapport annuel de synthèse exhaustif des crédits consacrés à l’immigration et à l’intégration ;
3° Des éléments d’appréciation relatifs à l’activité générale et à l’organisation des services de l’État dédiés à l’immigration et à l’intégration ;
En outre, la délégation peut solliciter du Premier ministre la communication de tout ou partie des rapports des inspections ministériels ainsi que des rapports des services d’inspection générale des ministères portant sur l’immigration et l’intégration ;
…. – La délégation parlementaire à l’immigration et à l’intégration est composée de quatre députés et de quatre sénateurs. Les présidents des commissions permanentes de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées respectivement de l’immigration et de l’intégration sont membres de droit de la délégation parlementaire à l’immigration et de l’intégration. La fonction de président de la délégation est assurée alternativement, pour un an, par un député et un sénateur, membres de droit.
Les autres membres de la délégation sont désignés par le président de chaque assemblée de manière à assurer une représentation pluraliste. Les deux députés qui ne sont pas membres de droit sont désignés au début de chaque législature et pour la durée de celle-ci. Les deux sénateurs sont désignés après chaque renouvellement partiel du Sénat.
…. – La délégation peut entendre le Premier ministre, les ministres compétents, ainsi que les directeurs compétents en matière d’immigration et d’intégration. Les directeurs de ces services peuvent se faire accompagner des collaborateurs de leur choix en fonction de l’ordre du jour de la délégation. La délégation peut également entendre les directeurs des autres administrations centrales ayant à connaître des enjeux relatifs à l’immigration et à l’intégration.
…. – Chaque année, la délégation établit un rapport public dressant le bilan de son activité.
Dans le cadre de ses travaux, la délégation peut adresser des recommandations et des observations au Président de la République et au Premier ministre. Elle les transmet au Président de chaque assemblée.
…. – La délégation parlementaire à l’immigration et à l’intégration établit son règlement intérieur. Celui-ci est soumis à l’approbation du Bureau de chaque assemblée.
Les dépenses afférentes au fonctionnement de la délégation sont financées et exécutées comme dépenses des assemblées parlementaires.
La parole est à Mme Corinne Narassiguin.
Mme Corinne Narassiguin. Mes chers collègues, cet amendement vise à renforcer les moyens de contrôle dont dispose le Parlement pour ce qui concerne les questions d’immigration.
Ces sujets étant particulièrement importants pour notre pays, nous vous proposons de créer une délégation parlementaire commune aux deux assemblées. Cette instance disposerait de moyens accrus de contrôle et d’évaluation, qu’il s’agisse des politiques publiques menées ou de l’action du Gouvernement en matière d’immigration.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Vous vous souvenez peut-être que, au terme d’un travail mené il y a quelques années, le Sénat a conclu à la nécessité de ne plus créer de nouvelles délégations parlementaires.
En pratique, une instance ne renforcerait pas les moyens du Parlement : elle ne ferait qu’en ôter aux commissions permanentes.
Au demeurant, les commissions des lois des deux assemblées peuvent déjà exercer un tel contrôle : il entre pleinement dans leurs prérogatives.
J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 1er, modifié.
(L’article 1er est adopté.)
Après l’article 1er
Mme la présidente. L’amendement n° 627, présenté par Mme M. Jourda et M. Bonnecarrère, au nom de la commission, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Après l’article L. 433-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, il est inséré un article ainsi rédigé :
« Art. L. 433-1-1. – Par dérogation à l’article L. 433-1, il ne peut être procédé à plus de trois renouvellements consécutifs d’une carte de séjour temporaire portant une mention identique. »
La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Mes chers collègues, en vertu des dispositions que nous venons de voter, il faudra, pour obtenir une carte de séjour pluriannuelle, répondre à un certain nombre de conditions, dont l’obtention d’un résultat suffisant à un examen de français.
Or, en cumulant les titres de séjour annuel, il est aujourd’hui possible d’aller au-delà des quatre années que couvre une carte de séjour pluriannuelle.
Par cohérence, on ne saurait donc dépasser trois renouvellements d’un titre annuel, sauf si son détenteur demande un titre différent. Si, après quatre années de présence sur le territoire national, l’étranger ne parvient pas à acquérir le niveau de français requis, il n’a pas de raison d’y rester. En adoptant une telle disposition, nous donnerons toute sa portée à l’obligation adoptée à l’instant.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 1er.
L’amendement n° 255 rectifié, présenté par MM. Le Rudulier et Anglars, Mme Guidez, MM. Menonville et Frassa, Mmes Romagny et Josende, MM. Rochette et Courtial, Mmes Puissat et V. Boyer, MM. Pointereau et Paccaud, Mmes Petrus, Lavarde et Bellurot, M. Chasseing, Mme P. Martin, M. Wattebled, Mme Lopez, M. Bruyen, Mmes Herzog, Micouleau et Belrhiti, M. Genet, Mmes Canayer et Devésa et M. Duffourg, est ainsi libellé :
Après l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code civil est ainsi modifié :
1° L’article 21-28 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, après la référence : « 21-2, », est insérée la référence : « 21-7, » ;
b) Les deux derniers alinéas sont ainsi rédigés :
« Les personnes à l’intention desquelles est organisée la cérémonie sont tenues d’y participer. Toutefois, en cas de motif légitime les en empêchant, leur participation est reportée à la cérémonie suivante.
« Au cours de la cérémonie d’accueil, la charte des droits et devoirs du citoyen français mentionnée à l’article 21-24 et le texte de La Marseillaise sont remis aux personnes ayant acquis la nationalité française mentionnées au premier alinéa du présent article. Il est procédé au chant d’au moins un couplet, suivi du refrain, de l’hymne national, auquel ces personnes sont tenues de participer. » ;
2° L’article 21-29 est ainsi modifié :
a) Le premier alinéa est ainsi modifié :
– les mots : « susceptibles de » sont remplacés par les mots : « appelées à » ;
– est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Cette communication est faite au moins trente jours avant la date de la cérémonie. » ;
b) Au second alinéa, après le mot : « demande », sont insérés les mots : « , dans un délai de huit jours » ;
3° Après l’article 21-29, sont insérés deux articles 21-30 et 21-31 ainsi rédigés :
« Art. 21-30. – Le représentant de l’État dans le département ou, à Paris, le préfet de police convoque quinze jours au moins avant la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française les personnes à l’intention desquelles elle est organisée. Cette convocation précise la date et l’heure d’ouverture de la session, sa durée prévisible et le lieu où elle se tiendra. Elle rappelle l’obligation de répondre à cette convocation sous peine d’être condamné à l’amende prévue à l’article 21-31. Elle invite les personnes convoquées à renvoyer, par retour de courrier, le récépissé joint à la convocation, après l’avoir dûment signé. Lorsque le maire a été autorisé à organiser la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française en application du second alinéa de l’article 21-29, une copie de ce récépissé lui est transmise sans délai par l’autorité compétente.
« Art. 21-31. – Le fait, sans motif légitime, de ne pas déférer à la convocation reçue en application de l’article 21-20 est puni de 7 500 euros d’amende. Le fait, sans excuse valable, de quitter la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française avant qu’elle soit achevée ou de refuser de participer au chant prévu au dernier alinéa de l’article 21-28 est puni de la même peine. »
II. – Au second alinéa de l’article 433-5-1 du code pénal, après le mot : « réunion », sont insérés les mots : « ou lors de la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française prévue à l’article 21-28 du code civil ».
La parole est à Mme Frédérique Puissat.
Mme Frédérique Puissat. Nous avons été nombreux à signer cet amendement de notre collègue Le Rudulier. Il a pour objet les décrets de naturalisation, que nous connaissons tous dans cet hémicycle.
Il s’agit plus précisément de rendre obligatoire la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française prévue à ce titre. Nous garantirons ainsi toute la solennité qu’exige la remise du décret de naturalisation.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Nous comprenons parfaitement la demande de M. Le Rudulier, car nous mesurons l’importance des cérémonies de naturalisation. Toutefois, le programme prévu est si lourd qu’il est difficilement envisageable. C’est pourquoi cet amendement, déjà rejeté à deux reprises en commission, a reçu d’elle un avis défavorable.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme la présidente. La parole est à Mme Corinne Narassiguin, pour explication de vote.
Mme Corinne Narassiguin. Mes chers collègues, je m’interroge sincèrement sur l’intérêt d’un tel amendement.
Si ces dispositions sont adoptées, il sera désormais obligatoire de chanter, lors des cérémonies de naturalisation, au moins un couplet de La Marseillaise suivi du refrain. Faudra-t-il également chanter juste ? (Marques d’indignation sur les travées du groupe Les Républicains.)
Mme Christine Bonfanti-Dossat. Oh là là !
Mme Corinne Narassiguin. Allez-vous demander la création d’un délit de fausse note, justifiant le retrait du décret de naturalisation au terme de la cérémonie ?
On atteint des summums de ridicule ! (Protestations sur les mêmes travées.) La cérémonie d’attribution de la nationalité est un moment solennel, c’est vrai. J’en reconnais l’importance et, je vous l’accorde bien volontiers, il faut s’assurer que le plus grand nombre de nos nouveaux concitoyens y prennent part. Mais pourquoi les accueillir dans la citoyenneté sur fond de suspicion ? Pourquoi seraient-ils a priori de mauvais citoyens ?
Ces moments de solennité devraient être empreints de fierté pour la communauté nationale tout entière. Pourquoi, dans ces circonstances, leur demander de démontrer une fois de plus qu’ils sont de « bons Français » ?
De telles propositions sont symptomatiques. Toutes les mesures que vous avez fait adopter depuis deux jours reflètent le même étant d’esprit et, pour ma part, je suis scandalisée du degré de ridicule et de caricature que nous atteignons avec cet amendement. (Protestations sur les travées du groupe Les Républicains. – Applaudissements sur des travées du groupe SER.)
Mme la présidente. La parole est à Mme le rapporteur.
Mme Muriel Jourda, rapporteur. Ma chère collègue, la commission a certes émis un avis défavorable sur cet amendement, mais je ne crois pas qu’il soit totalement ridicule de demander à quelqu’un à qui l’on donne non seulement la nationalité, mais la citoyenneté française, de chanter La Marseillaise. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Mme Françoise Gatel applaudit également.)