M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Madame la rapporteure générale, par votre sous-amendement, vous proposez de rehausser le montant du sous-objectif relatif aux établissements de santé afin de tenir compte de la situation financière du secteur et des effets de l’inflation.
Je partage votre préoccupation au sujet de la santé financière de nos hôpitaux et des besoins d’accompagnement. L’Ondam relatif aux établissements de santé pour 2024 a d’ores et déjà été rehaussé de 105,5 milliards d’euros à 105,6 milliards par l’amendement du Gouvernement.
Vous m’interrogez spécifiquement sur l’inflation. Le niveau de financement que nous prévoyons tient compte d’une hypothèse d’inflation à 2,5 % en 2024, alors que le taux anticipé au sens de l’indice des prix à la consommation hors tabac se situe désormais à 2 %.
Il tient aussi compte de l’évolution de la masse salariale liée notamment aux mesures de revalorisation applicables à compter du 1er janvier 2024.
Vous nous interrogez par ailleurs sur le traitement qui est réservé aux crédits mis en réserve. Permettez-moi de vous indiquer que ce projet de loi de financement de la sécurité sociale acte un dégel des mises en réserve sur des dotations Migac (missions d’intérêt général et d’aides à la contractualisation) de plus de 80 millions d’euros.
Comme vous le savez, la décision relative au coefficient prudentiel dépendra, quant à elle, de l’évolution de l’activité hospitalière. Si celle-ci se révèle plus dynamique qu’anticipé, il ne sera pas possible d’envisager un dégel.
Pour ces raisons, madame la rapporteure générale, je suis défavorable à votre sous-amendement n° 1356.
Madame la sénatrice Souyris, vous proposez d’abonder l’Ondam hospitalier 2024 de 1,3 milliard d’euros pour tenir compte de l’augmentation des charges liées à l’inflation.
Je le répète, l’amendement du Gouvernement tend à majorer cet objectif de dépenses de 100 millions d’euros pour le porter à 105,6 milliards d’euros. Quant à l’inflation, qui était estimée en construction à 2,5 % pour 2024, elle s’établit en réalité désormais à 2 %.
Les tarifs de prestations en médecine, chirurgie et obstétrique tiennent compte du financement des mesures de revalorisation salariale. Par exemple, les tarifs des hôpitaux publics et des établissements de santé privés d’intérêt collectif (Espic) ont progressé de 4,4 % à compter du 1er mars 2024.
Dans le cadre de l’Ondam, les établissements ont aussi pu être soutenus financièrement au travers des aides en trésorerie et de la suppression progressive du coefficient de reprise des allégements sociaux et fiscaux.
Enfin, je tiens à rappeler que les établissements de santé continuent de bénéficier, dans le cadre du volet investissement du Ségur, d’un plan pluriannuel de reprise de dette et d’aide à l’investissement de 15,5 milliards d’euros sur dix ans.
Madame la sénatrice Apourceau-Poly, vous avez évoqué le chiffre de 600 millions d’euros dont aurait bénéficié l’hospitalisation privée. Un tel montant n’a jamais été accordé…
Mme Céline Brulin. Disons 500 millions alors !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Deux types de mesures ont été prises en faveur de l’hospitalisation privée, d’une part, pour couvrir l’imputation du point de CNRACL en 2024, d’autre part, pour permettre les revalorisations salariales qui avaient été demandées.
Ces mesures s’étalent néanmoins sur deux ans, à hauteur de 200 millions d’euros en 2024, puis de 130 millions en 2025. Nous sommes loin des 600 millions d’euros ; je ne comprends pas du tout les chiffres que vous mettez en avant…
Je donnerai une réponse globale aux auteurs des amendements nos 871 rectifié ter, 1114, 1243 rectifié bis, 870 rectifié ter, 1115, 1164 rectifié quater et 1242 rectifié.
Vous proposez de majorer les dépenses relatives aux établissements pour personnes âgées et personnes handicapées de 100 millions d’euros et les dépenses relatives aux établissements chargés de la lutte contre les addictions de 9 millions d’euros.
Je rappelle qu’un accord salarial a acté la création d’une prime pour les salariés n’ayant pas bénéficié de la prime Ségur dans les structures relevant du champ de la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale (Bass). Cet accord matérialise la volonté de revaloriser les bas salaires, qui constituent un enjeu majeur dans le champ social et médico-social.
Il a été agréé par l’arrêté du 26 juin 2024, avec un vote en commission nationale d’agrément qui engage les financeurs sur le champ des établissements sociaux et médico-sociaux. Cet accord a été conclu sur la base d’un coût estimé de 300 millions d’euros pour la sécurité sociale en faveur des établissements sociaux et médico-sociaux concernés.
Ce montant avait été annoncé par le ministère en amont des négociations avec les partenaires sociaux, aussi bien dans le dossier de presse du projet de loi de finances pour 2024 que dans la lettre de cadrage qui avait été transmise.
Ainsi, ces financements ont d’ores et déjà été intégrés dans le montant de l’Ondam 2024 consacré aux dépenses relatives aux établissements et services pour personnes âgées, aux dépenses relatives aux établissements et services pour personnes handicapées ainsi qu’aux dépenses relatives aux structures chargées de la lutte contre les addictions.
Les ARS ont reçu, par instruction ministérielle, les enveloppes idoines. Ces crédits ont été répartis ainsi : 291 millions pour les établissements consacrés aux personnes âgées et aux personnes handicapées et 9 millions pour les établissements et services sociaux et médico-sociaux chargés de la lutte contre les addictions. Ces augmentations ont été financées par l’État, au travers des ARS.
J’indique que ces établissements ne sont pas régis par une convention unique. C’est un sujet : il faudrait vraiment que les négociations à propos de la convention collective unique dans tous ces secteurs se terminent pour enfin nous donner la visibilité nécessaire sur ces métiers, qui ont évolué, et sur les salaires, dans chacune des spécialités concernées.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements.
M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.
Mme Raymonde Poncet Monge. En effet, madame la ministre, il n’existe pas de convention unique.
Sous prétexte que l’avenant 43 de la convention collective nationale de la branche de l’aide à domicile a été agréé plusieurs années plus tard, les professionnels de la branche ne bénéficient pas de la prime Ségur. Un jour ou l’autre, il va falloir mettre à plat le mécanisme de cette prime pour en finir avec les trous dans la raquette.
En ce qui concerne la branche de l’aide à domicile, on observe, depuis la conclusion de la convention collective de 1983, des écarts de rémunération pouvant aller jusqu’à 300 euros entre différents métiers, et parfois de 180 euros dès l’embauche.
Aujourd’hui, à cause de ces distorsions de salaires, la branche ne recrute plus. Oui à la prime Ségur, mais il faut aussi, comme nous le proposons dans notre amendement, compenser à juste hauteur les structures qui ont financé cette revalorisation salariale et étendre son bénéfice, sans exception, à l’ensemble des acteurs de la branche de l’aide à domicile.
M. le président. La parole est à Mme Silvana Silvani, pour explication de vote.
Mme Silvana Silvani. La majorité sénatoriale tente de faire le grand écart entre son soutien à la politique de compression des dépenses du Gouvernement et les appels à l’aide des directions des établissements hospitaliers.
La Fédération hospitalière de France estime qu’il faut réévaluer l’Ondam 2024 des établissements de santé de 2,4 milliards d’euros, dont 1,8 milliard pour faire face à la hausse des coûts liée à l’inflation.
La rapporteure générale nous propose d’augmenter le sous-objectif relatif aux établissements de santé de 200 millions d’euros. Ce n’est ni sérieux ni responsable, alors que les hôpitaux demandent 2,4 milliards. Soit les besoins sont réels, et vous devez apporter une solution à leur hauteur, soit vous assumez une politique qui a consisté à revaloriser les tarifs des cliniques privées avec l’argent des hôpitaux publics.
Pour l’ensemble de ces raisons, nous nous abstiendrons sur cette proposition par laquelle vous n’assumez pas les coupes opérées dans les dépenses ni ne répondez aux besoins des hôpitaux.
M. le président. Je mets aux voix le sous-amendement n° 1356.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 42 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 242 |
Pour l’adoption | 242 |
Contre | 0 |
Le Sénat a adopté.
Je mets aux voix l’amendement n° 1343, modifié.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis de la commission est favorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
M. le président. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 43 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 324 |
Pour l’adoption | 242 |
Contre | 82 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, les amendements nos 1116, 871 rectifié ter, 1114, 1243 rectifié bis, 927, 870 rectifié ter, 1115, 1164 rectifié quater et 1242 rectifié n’ont plus d’objet.
Je mets aux voix l’article 2, modifié.
(L’article 2 est adopté.)
Après l’article 2
M. le président. L’amendement n° 1359, présenté par Mme Doineau, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :
Après l’article 2
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
Au III de l’article 28 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024, le montant : « 2,31 milliards d’euros » est remplacé par le montant : « 2,26 milliards d’euros ».
La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Cet amendement, très technique, concerne la clause de sauvegarde. Je rappelle que celle-ci se déclenche lorsque le chiffre d’affaires du secteur dépasse un seuil déterminé : le montant M pour les médicaments et le montant Z pour les dispositifs médicaux. Cette année, ces montants ont été largement dépassés, car les remises n’ont pas atteint le niveau attendu.
Cet amendement vise à abaisser le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde des dispositifs médicaux pour 2024, le montant Z, à 2,26 milliards d’euros, afin de tenir compte de l’exclusion de la taxe sur la valeur ajoutée de l’assiette de la clause de sauvegarde, qui figure dans le présent PLFSS.
Dans la LFSS pour 2024, le montant Z a été fixé à 2,31 milliards d’euros, soit une progression de 4,5 % par rapport à 2023. Ce montant intégrait dans son assiette la TVA assise sur les dispositifs médicaux. Or le PLFSS prévoit d’exclure cette TVA de l’assiette de la clause de sauvegarde, ce qui aurait dû entraîner une baisse de 140 millions d’euros du montant Z.
Je propose cependant, afin de limiter les conséquences pour les acteurs économiques du secteur au titre de l’année 2024, de ne réduire ce montant que de 50 millions d’euros.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement, très bien défendu par madame la rapporteure générale.
M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour explication de vote.
Mme Émilienne Poumirol. L’amendement de Mme la rapporteur générale va dans le bon sens. Comme elle l’a rappelé, dans la LFSS pour 2024, le montant Z, au-dessus duquel est déclenchée la clause de sauvegarde, avait progressé de 4,5 %, ce qui profitait aux industriels du secteur des dispositifs médicaux.
Dans le PLFSS pour 2025, la TVA est exclue de l’assiette. Or les mêmes industriels se réjouiraient si le montant Z demeurait inchangé, ce qui reviendrait de facto à relever le seuil de déclenchement de la clause de sauvegarde. Il est donc pertinent d’abaisser le montant Z.
Toutefois, madame la rapporteure générale, pourquoi ne pas aller jusqu’au bout de la logique ? Pourquoi ne récupérer que 40 millions d’euros quand nous pourrions récupérer 140 millions ?
Alors que l’on nous parle en permanence d’économies dans tous les domaines, il est dommage de se priver d’une recette. Je sais bien que le lobby des industriels des dispositifs médicaux n’est pas d’accord – tout comme le syndicat Les Entreprises du médicament (Leem) dès que l’on évoque la clause de sauvegarde sur les médicaments –, mais il y va tout de même de l’équilibre des comptes de la sécurité sociale.
M. le président. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Pourquoi ne vais-je pas jusqu’au bout ? Tout simplement parce qu’il s’agit de modifier le montant Z en vigueur en 2024 ; or je n’aime pas changer les règles qui s’appliquent en cours d’année.
Il sera toujours possible de les modifier pour 2025, mais j’estime qu’il serait déraisonnable de changer les règles en toute fin d’année. C’est la raison pour laquelle je n’ai proposé de réduire ce montant que de 50 millions d’euros, et non pas de 150 millions.
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 2.
Vote sur l’ensemble de la première partie
M. le président. Je mets aux voix, modifié, l’ensemble de la première partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.
(La première partie du projet de loi est adoptée.)
DEUXIÈME PARTIE
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L’ÉQUILIBRE GÉNÉRAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR L’EXERCICE 2025
TITRE Ier
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES, AU RECOUVREMENT ET À LA TRÉSORERIE
Article 3
I. – Le code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Les deux dernières phrases de l’article L. 731-10 sont supprimées ;
2° L’article L. 731-11 est ainsi modifié :
a) Le signe : « , » est remplacé par le mot : « et » ;
b) Les mots : « et à l’assurance vieillesse » et : « mentionnés au 1° de l’article L. 722-4 » sont supprimés ;
3° La première phrase du second alinéa de l’article L. 731-25 est ainsi modifiée :
a) Les mots : « fixé par décret » sont remplacés par les mots : « identique à celui de la cotisation mentionnée au 2° de l’article L. 241-6 du code de la sécurité sociale » ;
b) Sont ajoutés les mots : « du présent code » ;
4° L’article L. 731-37 est complété par une phrase ainsi modifiée : « Leur taux est fixé par décret. » ;
5° Les cinq derniers alinéas de l’article L. 731-42 sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :
« 1° Pour chaque chef d’exploitation ou d’entreprise, une cotisation calculée pour partie sur l’assiette déterminée en application des articles L. 731-15, L. 731-16 et L. 731-22 retenue dans la limite du plafond mentionné au premier alinéa de l’article L. 241-3 du code de la sécurité sociale et pour partie sur la totalité de cette assiette. Cette cotisation ne peut être inférieure à un montant fixé par décret.
« Les taux applicables à chacune de ces deux parties sont identiques à ceux déterminés en application de l’article L. 633-1 du même code ;
« 2° Pour chaque personne mentionnée au 2° de l’article L. 722-10 du présent code à partir de l’âge de seize ans et pour chaque collaborateur d’exploitation ou d’entreprise mentionné à l’article L. 321-5, une cotisation calculée sur une assiette forfaitaire fixée par décret.
« Le taux de cette cotisation est égal à la somme des taux de la cotisation mentionnée au 1° du présent article. » ;
6° Au premier alinéa de l’article L. 781-29, les mots : « des articles L. 722-16, L. 722-17, » sont remplacés par les mots : « de l’article », les mots : « relatives à l’assurance vieillesse » sont supprimés et, après le mot : « Saint-Martin », sont insérés les mots : « dans leur rédaction antérieure à la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2025, » ;
7° À l’article L. 781-30, les mots : « ni l’article L. 731-42 en tant qu’il fixe les modalités de calcul des cotisations mentionnées audit article » sont supprimés ;
8° À la première phrase des premier et second alinéas de l’article L. 781-36, après la référence : « L. 731-42 », sont insérés les mots : « , dans sa rédaction antérieure à la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2025, ».
II. – Le 1° du I de l’article 26 de la notamment est complété par les mots : « et de l’article 3 de la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2025 ».
III. – Les 2° et 5° à 8° du I s’appliquent aux cotisations dues au titre des périodes courant à compter du 1er janvier 2026.
Par dérogation au second alinéa des 1° et 2° de l’article L. 731-42 du code rural et de la pêche maritime, pour les périodes courant du 1er janvier 2026 au 31 décembre 2028, un décret fixe les taux des cotisations mentionnées au 1° du même article L. 731-42 dues par les chefs d’exploitation et d’entreprise agricole exerçant à titre secondaire et des cotisations mentionnées au 2° dudit article L. 731-42 de manière à résorber progressivement, chaque année, les écarts entre, d’une part, la somme des taux des cotisations d’assurance vieillesse de base applicables aux personnes concernées au 31 décembre 2025 et, d’autre part, les taux mentionnés au second alinéa des 1° et 2° du même article L. 731-42.
M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
Les trois premiers sont identiques.
L’amendement n° 362 rectifié est présenté par M. Lurel, Mmes Conconne et Bélim, M. Fagnen, Mme G. Jourda, M. M. Weber et Mme Monier.
L’amendement n° 914 est présenté par Mme Ramia.
L’amendement n° 1030 est présenté par Mmes Corbière Naminzo, Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.
Ces trois amendements sont ainsi libellés :
I. – Alinéa 18
Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :
II. – Le I de l’article 26 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est ainsi modifié :
1° Le 1° est abrogé ;
2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :
« Les dispositions relatives aux taux, au calcul et au recouvrement des cotisations et des contributions sociales mentionnées au chapitre Ier du titre III du livre VII du code rural et de la pêche maritime et à la section 1 du chapitre 6 du titre III du livre Ier du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction résultant des I et II de l’article 18 de la présente loi, ne sont pas applicables aux travailleurs indépendants agricoles exerçant leur activité en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Victorin Lurel, pour présenter l’amendement n° 362 rectifié.
M. Victorin Lurel. Madame la ministre, madame la rapporteure générale, je vais vous donner l’occasion d’aller jusqu’au bout !
Cet amendement, qui a été adopté à l’Assemblée nationale, dont on ne peut dire qu’il s’agit d’une assemblée de gauchistes, relève, selon moi, de l’évidence.
Alors que nous avions octroyé au Gouvernement, dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2024, une habilitation à légiférer par ordonnance de dix-huit mois pour réformer l’assiette des cotisations et des contributions sociales des exploitants agricoles ultramarins, il nous semble difficile d’accepter sa demande de prorogation pour porter le délai à trente-six mois.
Il ne s’agit pas de discuter de la nécessité de procéder à une harmonisation avec l’outre-mer ni du bien-fondé de la poursuite de la fameuse réforme des retraites du Gouvernement. Voilà déjà douze mois que nous avons accordé cette habilitation. Le Gouvernement devait achever son travail avant la fin du mois de juin 2025 et vous demandez, madame la ministre, dix-huit mois supplémentaires pour réformer l’assiette sociale des exploitants agricoles ultramarins. Cela nous paraît excessif.
C’est pourquoi nous proposons, à l’instar de nos collègues députés, de supprimer cette disposition à l’alinéa 18 du présent article. Nos amendements aux articles 5 ter et 22 iront dans le même sens. Il me semble qu’il s’agit d’amendements de bon sens.
M. le président. L’amendement n° 914 n’est pas soutenu.
La parole est à Mme Silvana Silvani, pour présenter l’amendement n° 1030.
Mme Silvana Silvani. Cet amendement d’Evelyne Corbière Naminzo vise à tenir compte des spécificités des départements et des régions d’outre-mer, dans lesquels les cotisations et les contributions sociales des travailleurs agricoles sont assises sur la superficie de l’exploitation.
Nous souhaitons protéger les petits agriculteurs ultramarins en rendant inapplicable la réforme de l’assiette sociale aux travailleurs indépendants des départements d’outre-mer.
M. le président. L’amendement n° 1307 rectifié bis, présenté par Mme Bélim, M. Lurel, Mmes Canalès et Conconne et MM. Cozic, Fagnen, Tissot, Bourgi et Ziane, est ainsi libellé :
Alinéa 18
I. – Remplacer cet alinéa par deux alinéas ainsi rédigés :
I. – Le 1° du I de l’article 26 de la loi n° 2023-1250 du 26 décembre 2023 de financement de la sécurité sociale pour 2024 est complété par les mots et un alinéa ainsi rédigé: « et de l’article 3 de la loi n° … du … de financement de la sécurité sociale pour 2025.
« Pour les travailleurs indépendants, les chefs d’exploitation ou d’entreprise agricole exerçant leur activité en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, le montant total des cotisations et contributions sociales dues, après application des exonérations prévues à l’article L. 781-6 du code rural et de la pêche maritime, ne peut excéder le montant dont ils étaient redevables au titre de l’année 2024, revalorisé annuellement dans des conditions fixées par décret. Les modalités d’application sont définies par décret. »
II. – Pour compenser la perte de recettes résultant du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :
…. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à Mme Audrey Bélim.
Mme Audrey Bélim. Je souhaite ici exprimer la vive inquiétude de l’ensemble des filières agricoles réunionnaises ainsi que de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) concernant la réforme de l’assiette sociale des non-salariés agricoles ultramarins.
Si nous ne contestons pas la nécessité d’améliorer la protection sociale de nos agriculteurs, les mesures envisagées peuvent directement menacer la survie de nos exploitations.
Les chiffres sont alarmants. Selon le Cerfrance Réunion, l’application, sans adaptation, du régime hexagonal conduirait à multiplier par 6,7 le montant des prélèvements sociaux : ces derniers passeraient de 2 243 euros à près de 15 000 euros en moyenne par an. Cette augmentation massive interviendrait dans un contexte où les exploitants sont déjà fragilisés par l’inflation des charges, alors que la récolte a été catastrophique après le passage du cyclone Belal et de la tempête Candice et que la perspective d’un accord entre l’Union européenne et le Mercosur fait planer une menace sur toutes nos filières.
C’est pourquoi nous proposons, par cet amendement, d’instaurer un mécanisme de plafonnement des cotisations à leur niveau de 2024 dans les territoires ultramarins. Ce plafond serait revalorisé chaque année par décret.
Nous pourrions ainsi éviter que notre agriculture, qui repose sur un modèle familial, loin des modèles occidentaux, ne subisse une déstabilisation brutale. Il n’y a plus à démontrer que la vie chère constitue un défi impérieux pour les outre-mer. Si nous ne produisons plus localement, les prix ne feront qu’augmenter dramatiquement.
Mes chers collègues, nous ne devons légiférer sur les filières agricoles dans les outre-mer que d’une main tremblante.