Mme Céline Brulin. Cet amendement vise lui aussi à conditionner les exonérations de cotisation, mais son objet se concentre sur les allégements dits Fillon.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Par l’amendement n° 837, il est proposé d’intégrer d’un coup tous les dispositifs de partage de la valeur, y compris l’intéressement, aux rémunérations prises en compte pour le calcul des allégements généraux.

Les recettes supplémentaires pour la sécurité sociale seraient – il est vrai – assez spectaculaires, mais le coût d’une telle décision pour les entreprises le serait tout autant… Au regard de ces lourdes conséquences, j’estime que ce serait aller trop loin.

Par ailleurs, la réécriture de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale que vous nous proposez est incompatible avec la rédaction qui résultera de l’article 6.

Telles sont les raisons pour lesquelles l’avis est défavorable sur l’amendement n° 837.

En ce qui concerne l’amendement n° 935, qui rejoint un autre amendement du groupe CRCE – K que nous venons d’examiner, je peux comprendre la préoccupation qui préside à cette proposition visant à conditionner les allégements dégressifs de cotisations à des critères sociaux et environnementaux, mais j’estime que la visibilité est essentielle pour les entreprises. De plus, il me paraît particulièrement compliqué, et au fond assez inopportun, de déterminer les critères pertinents et d’élaborer le barème que vous demandez.

L’avis est donc défavorable sur l’amendement n° 935.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Mêmes avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 837.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 935.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

Les deux premiers sont identiques.

L’amendement n° 85 rectifié bis est présenté par M. Milon, Mme Aeschlimann, M. Khalifé, Mmes Micouleau et Lassarade, M. Sol, Mme M. Mercier, M. Somon, Mmes Borchio Fontimp, Malet et Petrus, M. J.B. Blanc et Mme Jacques.

L’amendement n° 1267 rectifié ter est présenté par Mme Nadille, MM. Lemoyne et Buval et Mmes Schillinger et Duranton.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation, la réduction est applicable à l’ensemble des établissements et services mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles quel que soit leur statut et aux articles L. 6111-4 du code de la santé publique et L. 162-22-3 du code de la sécurité sociale. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann, pour présenter l’amendement n° 85 rectifié bis.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Il est proposé d’élargir aux Ehpad et aux unités de soins de longue durée (USLD) du secteur public la réduction pérenne de cotisations sociales dont bénéficient les seuls Ehpad du secteur privé, qu’ils soient lucratifs ou non.

À la différence des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) associatifs et commerciaux, le secteur public ne bénéficie pas, depuis 2019, de cet abattement de charges pérenne, la surcharge d’environ 400 millions d’euros par an que cela emporte pour le secteur public étant compensée par les tarifs.

Cette différence de traitement pénalise toutefois les établissements sociaux et médico-sociaux publics qui accueillent la grande majorité des résidents les plus modestes et il est inéquitable de les surtaxer.

Agréés intégralement à l’aide sociale, les Ehpad et les USLD publics sont en première ligne pour assurer l’accessibilité aux Ehpad des personnes âgées à faibles ressources, car ils pratiquent des tarifs hébergement dont le montant mensuel est en moyenne inférieur de 1 100 euros aux tarifs du secteur commercial – ils sont aussi inférieurs aux tarifs des établissements du secteur associatif, mais dans une moindre mesure.

Par ailleurs, les tarifs hébergement n’ont pas suivi l’évolution des charges et, depuis bientôt dix ans, toutes leurs revalorisations ont été systématiquement inférieures à l’inflation, ce qui a rendu impossible, pour beaucoup d’Ehpad publics, le maintien d’une capacité d’autofinancement suffisante.

Cette situation s’est fortement aggravée entre 2022 et 2024, l’écart entre l’augmentation des charges liée à l’inflation et celle des tarifs fixés par les conseils départementaux s’étant considérablement creusé.

Pour toutes ces raisons, il convient d’appliquer les abattements de cotisations sociales susvisés aux établissements publics. À défaut, ces derniers se trouvent dans une situation de désavantage concurrentiel qui menace à terme leur pérennité.

Mme la présidente. La parole est à Mme Solanges Nadille, pour présenter l’amendement n° 1267 rectifié ter.

Mme Solanges Nadille. Cet amendement vise à élargir aux Ehpad et aux USLD du secteur public la réduction pérenne de cotisations sociales dont bénéficient aujourd’hui les seuls Ehpad du secteur privé, qu’ils soient lucratifs ou non.

À la différence des établissements et services sociaux et médico-sociaux, le secteur public ne bénéficie pas, depuis 2019, d’un abattement de charges pérenne à hauteur de 8 % de la masse salariale. Dans le secteur sanitaire, cette différence entre le secteur public et le secteur privé est compensée par les tarifs.

Une telle différence de traitement pénalise toutefois les établissements sociaux et médico-sociaux publics qui accueillent la grande majorité des résidents les plus modestes et il est inéquitable de les surtaxer.

Agréés intégralement à l’aide sociale, les Ehpad et les USLD publics sont en première ligne pour assurer l’accessibilité aux Ehpad des personnes âgées à faibles ressources. Ils pratiquent en effet des tarifs d’hébergement inférieurs en moyenne de 600 euros par mois à ceux du secteur commercial, qu’il soit lucratif ou associatif.

Mme la présidente. L’amendement n° 1037 rectifié, présenté par M. Gillé, Mmes Harribey, Bonnefoy et Poumirol, M. Ros, Mmes Bélim et Blatrix Contat, M. Uzenat, Mme Conway-Mouret, M. Fagnen, Mme Artigalas, MM. Bouad, Michau et Pla, Mmes Carlotti et Monier et M. Bourgi, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 241-2-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation, la réduction est applicable à l’ensemble des établissements et services mentionnés au 6° du I de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles quel que soit leur statut et au L. 6111-4 du code de la santé publique. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Hervé Gillé.

M. Hervé Gillé. Cet amendement va dans le même sens que ceux qui viennent d’être présentés, je ne reprendrai donc pas les arguments qui ont été très bien développés par mes deux collègues. Je souhaite insister sur la situation actuelle.

Chaque mois qui passe, les comptes des établissements publics de ce secteur se dégradent un peu plus, si bien que de très nombreux établissements sont aujourd’hui dans le rouge et n’arrivent plus à équilibrer leur budget. À défaut d’une décision collective pour mieux accompagner ces établissements, la situation continuera de se dégrader.

Les positions que vous prenez, madame la ministre, sont systématiquement favorables au secteur privé, au détriment du secteur public. Les établissements du secteur public sont pourtant soumis à davantage d’obligations et ils assurent un meilleur accès aux bénéficiaires les plus modestes. Pourquoi les mettre en difficulté vis-à-vis du secteur privé en ne leur accordant pas les mêmes avantages ?

Il est temps de réagir et de mettre un terme à cette situation intolérable, qui ne cesse de surcroît de se dégrader. J’espère que nous le ferons ce soir, mes chers collègues !

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Comme les auteurs de ces amendements, je suis très préoccupée par la dégradation de la situation financière des Ehpad.

J’estime toutefois que les dispositions proposées ne sont pas la solution miracle pour améliorer la situation.

M. Hervé Gillé. C’est en tout cas une solution !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je vous l’accorde, mon cher collègue.

Mme la ministre pourra peut-être répondre sur les causes de cette distorsion de traitement entre le public et le privé, dont j’avoue ne pas avoir connaissance.

En tout état de cause, la commission estime que cette problématique devra être prise en compte dans le cadre de la réforme structurelle que nous attendons.

M. Victorin Lurel. Ne l’attendons pas !

M. Hervé Gillé. On ne peut pas attendre !

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je conviens toutefois que ma réponse est un peu courte et je vous prie de bien vouloir m’en excuser, mais l’avis de la commission est défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Ces amendements visent à faire bénéficier les Ehpad et les USLD du secteur public de la réduction du taux de cotisations sociales applicable aux établissements assujettis aux impôts commerciaux.

Cette réduction du taux de cotisation sociale pour les entreprises du secteur privé s’est substituée au CICE ; les établissements publics n’en bénéficient pas, parce qu’ils ne sont pas redevables de l’impôt sur les sociétés. Telle est l’origine de la distorsion de traitement que vous évoquez, madame la rapporteure générale. De manière générale, n’étant pas soumis aux mêmes prélèvements obligatoires, le secteur public ne bénéficie pas des mêmes dispositifs d’exonération que le secteur privé.

Les régimes de cotisations des salariés du secteur privé et de la fonction publique sont par ailleurs différents. La complémentaire Agirc-Arrco, par exemple, qui entre dans le champ des allégements dont le secteur privé bénéficie, ne concerne pas les fonctionnaires.

Je tiens toutefois à faire passer un message, mesdames, messieurs les sénateurs. Le Gouvernement s’engage à mener dès l’année prochaine une analyse des différences de coûts salariaux entre les Ehpad privés et publics, dans l’objectif de tendre vers la neutralisation d’une éventuelle différence de traitement socio-fiscale entre ces établissements.

En tout état de cause, je partage avec vous l’objectif de redonner des marges de manœuvre financières aux établissements du secteur public et d’assurer une équité entre les statuts des différents établissements.

En ce qui concerne le tarif hébergement, qui a été évoqué, la loi du 8 avril 2024 portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir et de l’autonomie prévoit un tarif différencié applicable aux résidents non bénéficiaires de l’aide sociale, il est destiné plus particulièrement aux établissements du secteur public. Mon collègue Paul Christophe est pleinement mobilisé pour analyser avec vous les coûts salariaux des Ehpad publics et privés.

Pour l’ensemble de ces raisons, l’avis est défavorable sur ces trois amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Baptiste Lemoyne, pour explication de vote.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Les amendements défendus par Mme Aeschlimann, Mme Nadille et M. Gillé montrent que la cause des Ehpad publics nous réunit largement.

Permettez-moi de vous faire part d’un témoignage personnel. Le groupement des Ehpad publics de l’Yonne (Gepy), département dont je suis élu, fédère vingt-quatre établissements publics. Au printemps dernier, la quasi-totalité des conseils d’administration des établissements de ce groupement a délibéré pour adresser des motions alertant sur la situation financière très compliquée de leurs établissements, qui confine pour certains à une véritable impasse.

Par ces amendements, nos collègues alertent sur cette situation – Mme la rapporteure générale souscrit du reste au constat alarmant qui est dressé.

Nonobstant les différences qui peuvent exister entre les différents types d’Ehpad, j’estime qu’en adoptant ces amendements, nous montrerions que le message a été reçu par le Parlement. Même si cette réduction de cotisations sociales n’est pas la panacée, nous nous honorerions, en attendant de prendre ce chantier à bras-le-corps, à adresser un signal fort à ces femmes et à ces hommes qui sont engagés aux côtés de nos anciens.

Telles sont les raisons pour lesquelles je voterai ces amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. J’entends le message politique des auteurs de ces amendements et je ne peux que souscrire au constat de l’urgence de remettre à plat, non pas le seul secteur public, mais toute la filière.

Les dispositions proposées emportent toutefois un coût qui n’est pas négligeable dans un contexte contraint, où comme vous le savez, nous examinons chaque montant à la virgule près.

Nous débattrons dans les prochains jours des nouvelles recettes nécessaires pour financer la branche autonomie, ce qui inclut ces établissements – je pense par exemple à l’amendement de la commission sur l’augmentation de sept heures de la durée annuelle de travail. Les auteurs des amendements que nous examinons maintenant seront-ils alors favorables à l’instauration de ces sept heures de travail non rémunérées ? En tout état de cause, il nous faudra trouver de nouvelles recettes.

J’estime aussi qu’il nous faut porter un message plus global, mes chers collègues. Depuis dix ans, en dépit des informations précises dont nous disposons sur l’évolution de la démographie, ce secteur n’a fait l’objet d’aucune réforme structurelle. Le modèle est aujourd’hui à bout de souffle. La dualité de pilotage entre les départements et l’État, la définition de ce qu’est un Ehpad ou encore l’articulation de ces établissements avec les aides à domicile sont des sujets qu’il faut appréhender dans le cadre d’une réforme globale.

Adopter ces amendements reviendrait à faire un « coup » pour solde de tout compte, qui, en tout état de cause, ne prospérera pas dans le texte qu’élaborera la commission mixte paritaire. En faisant cela, nous n’enverrions pas un message de sérieux, et cela me préoccupe, mes chers collègues.

Je souhaite plutôt que le Gouvernement s’engage – nous y reviendrons du reste dans la suite de l’examen du présent texte, lorsque nous aborderons le financement de l’autonomie – à ouvrir le débat, dès lors que le projet de loi de finances aura été examiné, c’est-à-dire dès décembre ou janvier, sur la réforme du grand âge promise depuis de nombreuses années par plusieurs gouvernements.

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Et par le Président de la République lui-même !

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Les promesses n’engagent à rien tant que l’on ne se donne pas les moyens financiers de les tenir. Arrêtons donc de nous laisser porter par le vent et engageons une réforme de fond, madame la ministre. L’analyse des statuts des différents types d’établissements et de leurs relations avec les collectivités territoriales est essentielle, mais ce n’est qu’un petit bout du sujet.

Si nous ne prenons pas en main l’ensemble des enjeux de l’autonomie et du grand âge, nous en serons de nouveau réduits, dans un an, à chercher ce que l’on peut raboter.

Aujourd’hui, le sérieux budgétaire nous impose de ne pas voter ces amendements qui, en tout état de cause, ne prospéreront pas dans le texte final.

En revanche, je souhaite que Mme la ministre nous assure que le dossier du grand âge, qui doit inclure un volet recettes et un volet dépenses, sera très prochainement pris en charge. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)

Mme la présidente. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.

M. Hervé Gillé. Il nous faut aujourd’hui, non pas faire un coup politique, mais envoyer un signal qui s’inscrive dans une trajectoire durable. Il nous faut bâtir les réformes qui permettront de remodeler le système pour l’adapter aux réalités sociétales.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Et en intégrant les besoins de financement !

M. Hervé Gillé. La situation est aujourd’hui tellement critique qu’à défaut d’une réaction puissante, ces établissements continueront de couler financièrement, et partant, de coûter de plus en plus cher aux départements et à l’État, au détriment des bénéficiaires, qui pâtiront d’une offre de services dégradée.

Il nous faut donc réagir dès maintenant, mes chers collègues. (M. Christian Bilhac applaudit.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Je rejoins mon collègue Hervé Gillé.

Nos établissements d’hébergement pour personnes âgées sont dans une telle difficulté que certains se trouvent dans l’incapacité totale de boucler leur budget. J’estime qu’il nous faut leur montrer que nous les avons entendus, en leur apportant une solution dès maintenant.

Je soutiendrai donc ces amendements.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 85 rectifié bis et 1267 rectifié ter.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 1037 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de deux amendements identiques.

L’amendement n° 596 rectifié est présenté par MM. Grosvalet et Bilhac, Mme Briante Guillemont, M. Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux.

L’amendement n° 645 est présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla et Uzenat, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toute mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale, instituée à compter du 1er janvier 2025, est compensée par la suppression dans la même proportion d’une mesure de réduction ou d’exonération de cotisations de sécurité sociale existante. »

La parole est à M. Philippe Grosvalet, pour présenter l’amendement n° 596 rectifié.

M. Philippe Grosvalet. Si je ne nie pas les effets positifs des exonérations, force est de constater que leur accumulation fragilise l’ensemble de notre édifice de protection sociale, au détriment des plus faibles. Le Gouvernement est ainsi amené à proposer des déremboursements ou des augmentations de forfaits.

Afin de remédier à cette situation, cet amendement vise à établir le principe simple d’une compensation systématique et intégrale des exonérations de cotisations, en prévoyant que chaque nouveau dispositif entraîne la suppression d’un dispositif existant, pour un montant équivalent.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 645.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise en effet à établir le principe de la compensation systématique et intégrale des exonérations de cotisations sociales et, partant, à limiter la mise en place de nouveaux dispositifs d’exonérations.

Ces exonérations fragilisent en effet le financement de la sécurité sociale et affaiblissent ses capacités d’action. Des exonérations toujours plus nombreuses entraînent le creusement du déficit de la sécurité sociale.

Cet amendement vise à donner à la sécurité sociale les moyens nécessaires pour accomplir ses missions. Il vise aussi à rompre avec la philosophie appliquée depuis 2017 et à sortir de la logique de sous-financement de notre système de sécurité sociale, qui justifie aujourd’hui des mesures de déremboursement et l’augmentation des contributions et forfaits au nom de la réduction du déficit.

Par cet amendement, il vous est proposé qu’à partir de 2025 un dispositif de compensation contribue au rééquilibrage de notre système de sécurité sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Un amendement identique avait été rejeté lors de l’examen du PLFSS pour 2024, après avoir reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement.

La disposition proposée n’a pas d’effet juridique, car une loi ne peut pas contraindre une loi à venir.

Par ailleurs, l’article 21 de la loi du 18 décembre 2023 de programmation des finances publiques pour les années 2023 à 2027 prévoit déjà que les niches sociales ne peuvent excéder 14 % des recettes des régimes obligatoires de base, ce qui implique en pratique de respecter une règle de gage de ce type.

L’avis est donc défavorable sur ces deux amendements identiques.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 596 rectifié et 645.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

Mme la présidente. L’amendement n° 647, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla et Uzenat, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article L. 131-7 du code de la sécurité sociale est complété par un paragraphe ainsi rédigé :

« …. – Lorsque le salaire minimum national professionnel des salariés est inférieur au salaire minimum interprofessionnel de croissance mentionné à l’article L. 3231-2 du code du travail, le salaire minimum retenu pour l’application des mesures mentionnées aux I et au II du présent article est le salaire minimum national professionnel des salariés. »

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Une douzaine de branches professionnelles continuent de fixer des minima conventionnels inférieurs au Smic.

M. Victorin Lurel. C’est un scandale !

Mme Annie Le Houerou. Par cet amendement, adopté par l’Assemblée nationale en première lecture de ce PLFSS, je vous propose, mes chers collègues, que le calcul des allégements de cotisations sociales soit assis, non plus sur le Smic que ces branches professionnelles ne respectent pas, mais sur les minima conventionnels qu’elles pratiquent.

Ce changement vise à inciter ces branches professionnelles à revaloriser leurs grilles salariales en alignant leurs minima conventionnels sur le Smic.

Lorsque les minima conventionnels sont inférieurs au Smic, on observe en effet un phénomène d’écrasement par le bas de l’échelle des rémunérations. Les évolutions salariales s’en trouvent limitées et, dans certains secteurs, la dynamique salariale bloquée.

L’objectif est donc d’encourager les branches professionnelles à adopter de bonnes pratiques salariales, en garantissant des minima conventionnels au moins équivalents au Smic.

Cette proposition s’inscrit du reste dans la continuité des propos que vous avez tenus par le passé, madame la ministre. Dans une tribune publiée dans Le Monde, vous indiquiez en effet qu’il faudrait enfin mettre sur la table le sujet de la conditionnalité des aides aux entreprises pour qu’elles soient davantage fonction de la qualité des pratiques sociales et salariales.

L’adoption de cet amendement constituerait une étape importante dans la lutte contre les pratiques dérogatoires qui affaiblissent les droits des salariés.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. En juin 2024, dans leur rapport d’information intitulé Négociations salariales et smicardisation : faux débat, vrai problème, nos collègues Frédérique Puissat et Corinne Bourcier ne préconisaient pas un tel dispositif.

Par ailleurs, la rédaction de cet amendement ne vise pas le bon article du code de la sécurité sociale, ma chère collègue : l’article L. 131-7 porte en effet sur la compensation des niches, il conviendrait de viser l’article L. 241-13 qui est relatif aux allégements dégressifs.

L’avis est donc défavorable.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Vous soulevez une question qui m’est chère, madame la sénatrice. Comme vous l’avez indiqué, une douzaine de branches ne jouent pas le jeu de la négociation salariale et n’adaptent pas leurs minima conventionnels à l’évolution du Smic. J’avais écrit la tribune que vous évoquez afin de mettre ce sujet sur la table.

La limite de votre proposition est toutefois qu’elle pénaliserait les entreprises vertueuses qui, au sein de l’une de ces douze branches, ne refusent pas la négociation.

Depuis que je suis ministre du travail et de l’emploi, je convoque les branches concernées une à une pour évoquer non seulement la question des minima conventionnels, mais également l’actualisation des classifications, qui est obligatoire tous les cinq ans, ce que certaines n’ont pas fait depuis une quarantaine d’années… La semaine dernière, j’ai par exemple reçu la branche du caoutchouc.

Ces discussions, qui se tiennent en présence de représentants de la direction générale du travail et de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques, me paraissent plus opérationnelles et moins pénalisantes pour les entreprises qui sont vertueuses au sein d’une branche qui ne l’est pas que la proposition que vous portez. Je poursuivrai ces entretiens tout au long de ce trimestre et je viendrai très volontiers vous rendre compte de leurs résultats.

Telles sont les raisons pour lesquelles l’avis est défavorable.