Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 647.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je suis saisie de trois amendements identiques.

L’amendement n° 822 est présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel.

L’amendement n° 944 rectifié est présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° 1220 rectifié ter est présenté par M. Mérillou, Mmes Bélim et Blatrix Contat, MM. M. Weber, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Fagnen et Michau, Mme Monier et MM. Ziane et Bourgi.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au début de la première phrase du 2° du II de l’article L. 137-13 du code de la sécurité sociale, le taux : « 20 % » est remplacé par le taux : « 30 % ».

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour présenter l’amendement n° 822.

Mme Raymonde Poncet Monge. Cet amendement vise à revenir sur l’allégement de la fiscalité sur les actions gratuites. Décidé en 2019, celui-ci profite en majorité à des salariés aux rémunérations élevées et prolonge un usage global des primes à fort effet substitutif encouragé par le Gouvernement.

Ce dispositif d’allégement, qui inclut le forfait social dont le taux fut abaissé de manière non justifiée en 2018, s’ajoute à un ensemble de niches sociales que la Cour des comptes a documenté dans un rapport récent démontrant l’explosion du manque à gagner pour les comptes sociaux des exemptions provoquées entre autres par l’abaissement des forfaits sociaux et exemptions non compensées. La Cour des comptes pointait ainsi la baisse importante du rendement des taxes compensatoires, qui est passé de 43,5 % en 2018 à 35,6 % en 2023, du fait entre autres des nombreux abaissements des forfaits sociaux, dont celui-ci.

Cet abaissement a eu un effet d’aubaine, selon la Cour, puisque « parmi l’ensemble des dispositifs exemptés, les stock-options et les attributions gratuites d’actions ont connu la progression la plus forte, +36 % par an entre 2018 et 2023, compte tenu de leur régime dérogatoire favorable ». En conséquence, la Cour recommandait que, au minimum, la contribution de l’employeur soit rétablie à 30 %. Cette mesure peut être chiffrée à près de 400 millions d’euros de recettes supplémentaires pour la sécurité sociale.

Les auteurs de cet amendement proposent donc de suivre les recommandations de la Cour des comptes et de contribuer à augmenter les recettes de la sécurité sociale en ramenant la contribution patronale sur les actions gratuites au taux de 30 %, comme c’était le cas avant 2018.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour présenter l’amendement n° 944 rectifié.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Une société par actions peut distribuer gratuitement des actions à ses salariés ou à ses dirigeants, selon un mécanisme de rémunération complémentaire qui vise à motiver et à fidéliser certains salariés.

Jusqu’en 2015, le taux de contribution patronale applicable aux attributions gratuites d’action était de 30 %. La loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, dite loi Macron, avait abaissé ce taux à 20 %, la loi de finances pour 2017 l’a rétabli à 30 %, puis la loi de finances pour 2018 l’a de nouveau ramené à 20 %.

Vous l’avez compris, les gouvernements successifs ont tantôt augmenté, tantôt réduit le taux de contribution patronale sur les actions gratuites.

La question primordiale est, selon nous, de savoir qui bénéficie d’actions gratuites et pour quelle utilité. Selon la ministre du travail, 460 000 salariés en ont bénéficié en 2024 pour un montant moyen de 1 300 euros. Alors que le secteur privé compte 2,9 millions de cadres, les actions gratuites bénéficient en réalité à une part extrêmement restreinte des membres des comités de direction.

Pour l’ensemble de ces raisons, nous proposons de relever le taux de la contribution patronale sur les attributions d’actions gratuites de 20 % à 30 %. Cette hausse de dix points ne remettrait pas en cause la distribution d’actions gratuites, mais permettrait de dégager près de 500 millions d’euros de recettes supplémentaires et contribuerait ainsi au partage des efforts pour le financement de la sécurité sociale.

Mme la présidente. L’amendement n° 1220 rectifié ter n’est pas soutenu.

Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Chères collègues, vous proposez de revenir au taux de 30 % qui était appliqué avant 2018, mais qui a connu quelques soubresauts au fil du temps, comme vous l’avez indiqué.

Je vous remercie d’avoir mentionné les conclusions du rapport de la Cour des comptes de 2024 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, auxquelles je me réfère également.

Vous présentez chaque année cet amendement et, chaque année, nous y sommes défavorables. Toutefois, le contexte a légèrement évolué au cours des dernières années et la situation financière de la sécurité sociale n’étant plus très bonne, pour le dire ainsi, il semble donc que la perspective d’une recette de 500 millions d’euros ne doive pas être négligée, d’autant que le taux a varié au fil du temps.

C’est pourquoi je demande l’avis du Gouvernement sur la disposition que proposent nos collègues.

Mme la présidente. Quel est donc l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Ces amendements identiques visent à augmenter le taux de la contribution patronale sur les attributions gratuites d’actions de 20 % à 30 %.

Mme Raymonde Poncet Monge. De le rétablir à 30 %. (M. Victorin Lurel renchérit.)

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Les attributions d’actions gratuites constituent un puissant instrument d’intéressement des salariés et des cadres à l’augmentation de la valeur de leur société. Le dispositif s’étend bien au-delà des cadres dirigeants puisque vous avez mentionné que près d’un demi-million d’actifs du secteur privé en bénéficiaient – c’est donc bien plus que ce que vous désignez comme une « part extrêmement restreinte ». Il permet une plus forte implication des bénéficiaires et favorise le développement de l’entreprise, objectif auquel nous sommes tous attachés. Comme vous le savez, nous avons également le souci de trouver des pistes de financement nouvelles.

Vous avez rappelé les conclusions du rapport de la Cour des comptes, notamment une recommandation concernant la mise en cohérence de la fiscalité et du traitement social des dispositifs d’actionnariat salarié avec le système d’attribution d’actions gratuites. Nous souhaitons que la commission mixte paritaire puisse débattre de cette piste de financement nouvelle. C’est pourquoi le Gouvernement émet un avis favorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. le président de la commission.

M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. À cet instant du débat, je crois qu’il faut être clair. Vous présentez cet amendement tous les ans, nous refaisons à chaque fois le débat sur la fiscalité et les clivages qui nous opposent sur ce type de sujet sont toujours les mêmes.

Dans la discussion générale, j’ai rappelé notre volonté de faire participer l’ensemble des acteurs et l’ensemble des Français à l’effort collectif. Cela justifie que la majorité sénatoriale fasse évoluer sa position sur ce régime fiscal qui équivaut à celui des stock-options. Voilà pourquoi nous souhaitons aujourd’hui accompagner l’évolution que proposent nos collègues. Encore une fois, notre position s’inscrit dans la logique d’action collective que nous défendons afin de trouver des ressources nouvelles pour financer nos outils de prestations sociales et de sécurité sociale. Il faudra s’en souvenir quand nous aborderons, dans la suite de l’examen du texte, d’autres sujets sur lesquels nous solliciterons l’effort de l’ensemble des acteurs.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il faut rappeler le contexte dans lequel s’inscrit notre amendement. En 2018-2019, la Cour des comptes estimait que le budget de la sécurité sociale était presque à l’équilibre, avec 1,7 milliard d’euros de déficit, soit l’épaisseur du trait. En 2019, le Gouvernement a multiplié les cadeaux – la crise covid n’y est pour rien, c’est un autre sujet. Il a ainsi rétabli les heures supplémentaires et complémentaires exonérées, pour un coût de 2,4 milliards d’euros ; il a mis en place une prime de partage de la valeur, pour un coût de 1,1 milliard d’euros ; il a également allégé le forfait social. Or la Cour des comptes indique que l’aggravation du déficit de la sécurité sociale en 2023 correspond exactement au cumul du coût de ces mesures. Autrement dit, jusqu’en 2023, sans cette explosion de dépenses à 9 milliards d’euros, il n’y avait pas de déficit des comptes de la sécurité sociale.

La situation a changé et la prévision de déficit atteint désormais 16 milliards d’euros. Il est temps de revenir sur ce que le gouvernement d’alors a permis en 2019 sous prétexte d’équilibre. À l’époque, nous n’étions déjà pas d’accord avec ces mesures, mais qu’importe ! Aujourd’hui, on ne peut plus se permettre d’accorder des avantages aussi coûteux. L’abaissement du taux du forfait social en fait partie. La Cour des comptes estime que son rétablissement à 30 % générerait une recette de 400 millions d’euros – ma collègue n’est pas loin quand elle reprend le chiffre de 500 millions d’euros. Quoi qu’il en soit, ce n’est pas négligeable.

Ce que le Gouvernement a voulu en 2019 n’est plus possible en 2024. Cet amendement, que je vous invite à adopter, ne fait que tirer les conséquences du contexte dans lequel il s’inscrit.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. La commission des affaires sociales et le Gouvernement font preuve de sagesse en se montrant favorables à cet amendement, car nous avons besoin de trouver des recettes nouvelles.

Cette mesure est indispensable. Nous l’avons dit, quelque 460 000 salariés ont bénéficié du dispositif d’attribution d’actions gratuites en 2024 pour un montant moyen de 1 300 euros. Nous voulons revenir au taux de forfait social de 30 %, qui s’appliquait avant 2018, avant d’être abaissé à 20 %. Tout le monde doit faire des efforts et celui-ci est important puisqu’il s’agit de récupérer 500 millions d’euros au profit des Ehpad.

Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 822 et 944 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

Mme la présidente. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 6.

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 938, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le premier alinéa du V de l’article 1er de la loi n° 2022–1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est ainsi modifié :

1° Les mots : « sont exonérées, » sont remplacés par les mots : « sont versées » ;

2° À la fin, les mots : « , de toutes les cotisations sociales d’origine légale ou conventionnelle à la charge du salarié et de l’employeur ainsi que des participations, taxes et contributions prévues à l’article 235 bis du code général des impôts et à l’article L. 6131–1 du code du travail, dans leur rédaction en vigueur à la date de son versement. » sont supprimés.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Mes chers collègues, je vous invite à ne pas attendre que les comptes de la sécurité sociale s’aggravent davantage pour prendre en compte avec attention les amendements du groupe CRCE-K. En effet, nous allons vous proposer une fois encore une nouvelle piste de recettes, comme nous le faisons avec constance depuis le début de l’examen du texte – vous avez pu le constater.

Depuis plusieurs années, on assiste à un phénomène inquiétant, à savoir le remplacement des augmentations de salaire par l’octroi de primes. Selon l’Insee, près de 30 % du montant des primes versées ont déjà été utilisés comme substitution à des hausses de salaire et cette pratique est en augmentation régulière. Elle n’a rien d’anodin puisqu’elle contribue à affaiblir directement notre système de sécurité sociale, qui est fondé sur la cotisation sociale. Les différentes branches, et plus largement l’ensemble de notre modèle social, pâtissent donc de cette amputation des recettes.

Les salariés subissent également les conséquences d’une telle pratique, car les primes qui leur sont versées n’entrent pas dans le calcul de leur pension de retraite ni dans celui des indemnités de chômage, et ne sont pas prises en considération dans la prise en charge des arrêts maladie.

Nous proposons donc de rétablir les cotisations sociales sur la prime de partage de la valeur pour inciter les employeurs à privilégier des augmentations de salaire durables qui bénéficieront à la fois aux salariés et au financement de la sécurité sociale.

Mme la présidente. L’amendement n° 665 rectifié, présenté par Mmes Lubin et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, M. Jeansannetas, Mme G. Jourda, MM. Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le deuxième alinéa du V de l’article 1er de la loi n° 2022-1158 du 16 août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat est ainsi rédigé :

« La prime de partage de la valeur est assujettie à la contribution prévue à l’article L. 137-15 du code de la sécurité sociale, au taux de 20 %. »

La parole est à Mme Monique Lubin.

Mme Monique Lubin. Cet amendement vise à appliquer le forfait social à la prime de partage de la valeur, y compris pour les entreprises de moins de 250 salariés. Une telle mesure pourrait rapporter 1 milliard d’euros à la sécurité sociale et, plus largement, servir à financer le système des retraites. En effet, l’on compenserait ainsi l’abrogation des mesures de report de l’âge légal et d’accélération du calendrier de la hausse de la durée de cotisation, mesures inscrites dans la réforme des retraites d’avril 2023.

Aujourd’hui, de nombreux compléments de salaire ont un taux de forfait social inférieur au taux normal, fixé à 20 %, ce qui incite les employeurs à contourner le salaire en augmentant le montant des primes. Il en est ainsi de la prime de partage de la valeur, dont l’Insee a estimé qu’elle contournait le salaire à hauteur de 30 %.

Dans le chapitre IV de son rapport de mai 2024 sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, intitulé Les niches sociales des compléments de salaire : un nécessaire rapprochement du droit commun, la Cour des comptes recommande d’appliquer le forfait social à la PPV, à un taux de 20 %, afin de lutter contre le contournement du salaire. Elle précise que cela permettrait d’augmenter les ressources de la sécurité sociale à hauteur de 1 milliard d’euros.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Bien qu’en discussion commune, ces deux amendements ne sont pas du tout rédigés de la même manière.

Madame Brulin, les pertes de recettes liées au recours accru à la prime de partage de la valeur ont été de 1,1 milliard d’euros en 2022, ce qui crée en effet un manque important. Les niches sociales sur les compléments de salaire représentent un montant global d’environ 25 milliards d’euros pour seulement 10 milliards d’euros de contributions compensatoires assises sur les assiettes exemptées. Le sujet est donc essentiel.

Toutefois, je considère qu’il serait excessif de supprimer purement et simplement l’exonération dont bénéficie la PPV. Ainsi, dans son rapport de mai 2024, la Cour des comptes préconise non pas de supprimer la niche sociale correspondant à cette prime, mais d’appliquer le forfait social au taux de 20 % aux entreprises de moins de 250 salariés.

Par ailleurs, l’article 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale intègre la prime de partage de la valeur aux revenus pris en compte pour le calcul des allégements généraux. On peut supposer que cela incitera les employeurs à recourir à d’autres formes de compléments de salaire. La direction de la sécurité sociale indique que c’est la raison pour laquelle elle considère que, même si cette intégration devrait rapporter 400 millions d’euros en 2024 sur seulement deux mois, l’impact deviendrait négligeable à compter de 2025.

Madame Lubin, le renforcement des prélèvements sur la PPV ne semble pas souhaitable. Cet instrument a permis de soutenir le pouvoir d’achat des salariés durant la période d’inflation récente et offre, de plus, une flexibilité aux TPE et PME de notre territoire qui voient leur activité perturbée par le contexte économique.

Par ailleurs, la PPV a fait l’objet d’un accord national interprofessionnel, signé par l’ensemble des partenaires sociaux représentatifs, à l’exception de la CGT. Revenir sur ce point serait trahir l’engagement de transposition de cet accord et affaiblir la démocratie sociale, à laquelle il me semble que vous êtes aussi attachée que moi.

Une réflexion sur la prime de partage de la valeur reste à conduire, c’est une évidence. Le dispositif devra faire l’objet d’une évaluation et d’une adaptation dans le cadre d’un projet de loi présenté par la ministre du travail. Madame la ministre, je vous encourage à le faire.

Avis défavorable sur ces deux amendements.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Même avis que Mme la rapporteure générale sur les deux amendements.

Mme la présidente. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Madame la ministre, en vous écoutant, j’ai cru comprendre que, en appliquant le forfait social à un taux de 20 %, on porterait atteinte au pouvoir d’achat des salariés.

Mais, en même temps, vous déstructurez tout le tissu économique, en particulier la structure du travail, par ces exemptions. Elles constituent un biais en défaveur du travail et du salaire, sur lequel sont assises les cotisations de sécurité sociale et de retraite. Objectivement, un entrepreneur a tout intérêt à contourner le salaire par l’octroi de primes.

Les élus du groupe socialiste n’iront jamais contre l’intérêt des salariés, mais, en l’occurrence, je ne comprends pas votre argument. Il faut garder la structure du travail, le régime permanent et le salaire tel que nous le connaissons.

Regardez ce qui se passe dans la fonction publique, que M. Macron a entièrement déstructurée. Aujourd’hui, les maires ont objectivement intérêt à recruter des contractuels et non pas des titulaires. Voilà ce qui se passe. On a créé une discrimination et ce sont des recettes en moins pour la sécurité sociale.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, vous pourriez commencer par faire figurer la prime de partage de la valeur dans l’annexe afférente du projet de loi de financement de la sécurité sociale. En effet, elle n’est pas mentionnée alors qu’elle pèse 1,1 milliard d’euros chaque année, comme l’a rappelé Mme la rapporteure générale. Depuis 2019, les comptes ne sont plus à l’équilibre et elle contribue chaque année à accroître le déficit de la sécurité sociale, mais vous ne la faites pas figurer dans l’annexe ! Il faut que ce soit la Cour des comptes qui nous donne les chiffres ! Il y a un problème de transparence.

Certes, vous l’avez introduite – à juste titre – dans l’assiette, mais vous savez bien que la substitution de cette prime aux augmentations générales de salaire reste un puissant outil à la main des employeurs. Cette prime, qui n’ouvre aucun droit aux salariés, est déjà utilisée pour contourner les salaires, à hauteur de 30 %, comme l’indique l’Insee, et je crois que, en réalité, cela va bien au-delà. Quel chef d’entreprise n’irait pas se dire : « Je suis bien bête de payer des cotisations, je n’ai qu’à donner une prime » ? D’autant que la prime de partage de la valeur est ponctuelle quand l’augmentation générale des salaires est pérenne. Et, encore une fois, elle est sans droits afférents. Et qu’une majorité de syndicats aient signé l’accord national interprofessionnel n’y change rien.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. Je souhaite répondre à la question qui m’a été posée sur l’assujettissement de la PPV au forfait social à un taux de 20 %.

La loi d’août 2022 portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat prévoit d’exonérer celle-ci de cotisations sociales, cependant qu’elle reste soumise à la CSG-CRDS. Elle est également soumise au taux de forfait social de 20 % pour les entreprises de plus de 250 salariés.

En outre, à l’article 6, les mesures que vous avez votées sur les allégements généraux intègrent bien la prime de partage de la valeur.

Par conséquent, l’amendement n° 665 rectifié est en partie satisfait.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 938.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 665 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 913 rectifié, présenté par MM. Rochette, Longeot, Médevielle, V. Louault, Wattebled, Grand, Chasseing, Chevalier et L. Vogel, Mme Paoli-Gagin, MM. Lemoyne, Henno et Omar Oili, Mme Romagny et MM. Masset, Haye et Gremillet, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après le 3° de l’article L. 3312-3 du code du travail, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« …° Les travailleurs indépendants. Ces derniers peuvent se verser une prime exonérée d’impôt et de charges sociales d’un montant maximum de 5 000 euros par an. Les modalités de versement de cette prime sont définies par décret. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Pierre Jean Rochette.

M. Pierre Jean Rochette. Cet amendement a pour objet de préserver le pouvoir d’achat des indépendants – je précise qu’il ne s’agit pas des élus de mon groupe, mais des travailleurs indépendants… (Sourires.)

En effet, les commerçants, les artisans ou les agriculteurs n’ont pas été pris en compte dans le dispositif de la loi du 16 août 2022 instaurant la prime de partage de la valeur pour les salariés. Ils ont été en quelque sorte oubliés.

Il s’agit donc d’élargir le dispositif en leur offrant à eux aussi la possibilité de se verser, s’ils le souhaitent, ce type de prime. Je rappelle que les travailleurs indépendants représentent 12 % de la population active.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il est défavorable, madame la présidente. En effet, nous cherchons à supprimer des niches, non pas à en créer de nouvelles.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre. C’est le même.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 913 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

Mme la présidente. L’amendement n° 644, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, MM. Bourgi et Ros, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas, Vayssouze-Faure et M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla et Uzenat, Mme G. Jourda et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 6

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le 2° du III de l’article L. 241-10 du code de la sécurité sociale est complété par les mots : « ainsi que les syndicats mixtes “fermés” ».

II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement porte sur un sujet qui a déjà été évoqué précédemment et qui concerne les exonérations de charges selon le statut des établissements. Il vise à aligner le régime applicable aux syndicats mixtes fermés sur celui des centres intercommunaux d’action sociale (CIAS), qui bénéficient d’exonérations de charges sociales.

En effet, dans le cadre de leur développement, les intercommunalités, pour mutualiser significativement leurs coûts, confient de plus en plus souvent aux syndicats mixtes fermés la gestion des services d’aide et d’accompagnement à domicile et participent ainsi aux politiques tant nationales que départementales de maintien à domicile et d’action sociale. Pour autant, les syndicats mixtes fermés ne peuvent pas bénéficier de l’exonération de charges sociales accordée en contrepartie des tâches effectuées au domicile des personnes âgées ou en situation de handicap, des personnes ayant la charge d’un enfant en situation de handicap et des familles en difficulté.

Cette différence de traitement est d’autant plus incompréhensible que les CIAS bénéficient de cette exonération. Une régularisation permettrait par ailleurs de lutter efficacement contre la situation précaire de leurs agents.

Cet amendement a donc pour objet de mettre fin à cette inégalité de traitement devant les cotisations sociales, afin de sécuriser le développement des coopérations intercommunales. C’est une anomalie que nous devons corriger. Dans les deux cas, il s’agit de mutualiser les coûts pour rendre un service meilleur à nos aînés en leur permettant de rester à domicile.