Mme la présidente. L’amendement n° 718, présenté par MM. Jomier et Ros, Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, M. Fichet, Mmes Lubin, Poumirol et Rossignol, M. Bourgi, Mmes Linkenheld et Narassiguin, MM. Ziane et Lurel, Mme Bélim, M. Féraud, Mme Harribey, M. Gillé, Mme Brossel, MM. Fagnen et Chantrel, Mme Conway-Mouret, MM. Darras, Michau, Mérillou et Montaugé, Mme Bonnefoy, M. Roiron, Mme Blatrix Contat, MM. Jeansannetas et Vayssouze-Faure, Mme G. Jourda, M. M. Weber, Mme Monier, MM. P. Joly, Marie, Tissot, Durain et Chaillou, Mme Artigalas, MM. Redon-Sarrazy, Ouizille, Pla, Uzenat et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :
1° L’article L. 314-4-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Il est présenté sous forme de rouleaux, coupés et fractionnés. » ;
2° Au premier alinéa de l’article L. 314-20, les mots : « ou des cigarettes » sont remplacés par les mots : « , des cigarettes ou du tabac à chauffer » ;
3° L’article L. 314-24 est ainsi modifié :
a) Au premier alinéa, les deux occurrences de l’année : « 2023 » sont remplacées par l’année : « 2024 » ;
b) Le tableau du deuxième alinéa est ainsi rédigé :
Catégorie fiscale |
Paramètres de l’accise |
Montant applicable du 1er mars au 31 décembre 2024 |
Cigares et cigarillos |
Taux ( %) |
36,3 |
Tarif ( €/ 1000 unités) |
52,2 |
|
Minimum de perception ( €/ 1000 unités) |
288 |
|
Cigarettes |
Taux ( %) |
55 |
Tarif ( €/ 1000 unités) |
68,1 |
|
Minimum de perception ( €/ 1000 unités) |
360,6 |
|
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes |
Taux ( %) |
50,5 |
Tarif ( €/ 1000 grammes) |
91,7 |
|
Minimum de perception |
350 |
|
Autres tabacs à fumer ou à inhaler après avoir été chauffés |
Taux ( %) |
51,4 |
Tarif ( €/ 1000 grammes) |
33,6 |
|
Minimum de perception ( €/ 1000 grammes) |
145,1 |
|
Tabacs à chauffer commercialisés en bâtonnets et en rouleaux |
Taux ( %) |
51,4 |
Tarif ( €/ 1000 unités) |
19,3 |
|
Minimum de perception ( €/ 1000 unités) |
232 |
|
Autres tabacs à chauffer |
Taux ( %) |
51,4 |
Tarif ( €/ 1000 unités) |
72,7 |
|
Minimum de perception ( €/ 1000 unités) |
875,5 |
|
Tabacs à priser |
Taux ( %) |
58,1 |
Tabacs à mâcher |
Taux ( %) |
40,7 |
»
4° Le tableau du deuxième alinéa de l’article L. 314-25 est ainsi rédigé :
Catégorie fiscale |
Paramètres de l’accise |
Montant applicable du 1er mars au 31 décembre 2024 |
Montant en 2025 |
Montant en 2026 |
Cigares et cigarillos |
Taux ( %) |
30,2 |
32,2 |
34,3 |
Tarif ( €/1 000 unités) |
48,4 |
51,1 |
53,7 |
|
Cigarettes |
Taux ( %) |
51,6 |
52,7 |
53,9 |
Tarif ( €/1 000 unités) |
56,5 |
62,2 |
67,9 |
|
Tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes |
Taux ( %) |
41,4 |
44,4 |
47,5 |
Tarif ( €/1 000 grammes) |
74 |
84,7 |
95,4 |
|
Autres tabacs à fumer ou à inhaler |
Taux (en %) |
45,4 |
47,4 |
49,4 |
Tarif ( €/1 000 grammes) |
24 |
28,2 |
32,2 |
|
Tabacs à chauffer commercialisés en bâtonnets ou en rouleaux |
Taux (en %) |
51,4 |
51,4 |
51,4 |
Tarif ( €/1 000 unités) |
30,2 |
41,1 |
50,9 |
|
Minimum de perception (en €/1 000 unités) |
268 |
303,8 |
336 |
|
Autres tabacs à chauffer |
Taux (en %) |
51,4 |
51,4 |
51,4 |
Tarif ( €/1 000 unités) |
44,0 |
45,5 |
46,4 |
|
Tabacs à priser |
Taux ( %) |
49,3 |
52,3 |
55,4 |
Tabacs à mâcher |
Taux ( %) |
34,9 |
36,9 |
39,0 |
»
La parole est à M. Bernard Jomier.
M. Bernard Jomier. Cet amendement vise à aligner la fiscalité du tabac à chauffer sur celle qui s’applique aux cigarettes.
Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. J’ai précisé ma position en vous présentant l’amendement n° 135 rectifié bis, auquel je vous propose de vous rallier, mes chers collègues.
Je salue les auteurs des autres propositions en discussion, mais j’émets un avis défavorable sur tous leurs amendements.
Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Mes chers collègues, je n’ai pas besoin de vous rappeler que le tabac n’est pas bon pour la santé ni que la lutte contre le tabagisme occupe une place importante dans les politiques de santé publique.
Le levier de l’augmentation du prix du tabac a été fortement mobilisé depuis 2017. Entre 2017 et 2023, le prix du paquet de cigarettes a augmenté de près de 50 % et celui du tabac à rouler de 71 %, si l’on s’en tient à la marque la plus vendue en France.
La LFSS 2023 a organisé une convergence des prix entre les produits du tabac à rouler et du tabac à chauffer, d’une part, et ceux de la cigarette, d’autre part.
Nous avons établi un programme national de lutte contre le tabac, en réunissant tous les acteurs, avec l’objectif d’un paquet de cigarettes à 13 euros à l’horizon 2027. Ce plan a été défini il y a quelques mois. Il me paraîtrait donc prématuré de revenir dès à présent sur cette ambition.
Je regrette, par ailleurs, l’absence d’harmonisation sur le prix entre les différents pays européens. C’est un enjeu important. Une hausse trop importante du prix du paquet favorisera forcément le développement de marchés parallèles et incitera une partie des consommateurs à s’approvisionner ailleurs que chez les buralistes. Or ceux-ci ont précisément participé à l’élaboration du programme national, auquel je préférerais que nous nous en tenions.
La lutte contre le tabagisme est déjà en œuvre, et nous devons régler ce problème du manque d’harmonisation entre les différents pays européens. Je suis issue d’une région très proche de l’Espagne. Dans ce pays, le tabac coûte quasiment trois fois moins cher qu’en France ! (Marques d’approbation sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Laurent Burgoa. Exactement. On est d’accord !
Mme Geneviève Darrieussecq, ministre. Le prix actuel est déjà tout à fait dissuasif, en particulier pour les jeunes, qui sont de moins en moins nombreux à fumer. C’est un élément important. Nous devons continuer en ce sens, car c’est ainsi que nous obtiendrons notre victoire.
Pour toutes ces raisons, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Iacovelli, pour explication de vote.
M. Xavier Iacovelli. Mon groupe est favorable à l’ensemble de ces amendements.
Madame la ministre, il existe une solution très simple pour remédier aux disparités importantes entre les pays européens : il suffirait de ratifier, à l’échelle européenne – pourquoi pas sur l’initiative de la France ? –, le protocole de l’OMS.
Vous avez sans doute déjà entendu parler de ce fameux protocole sur les quotas de livraison de tabac. En France, quelque 51 milliards de cigarettes sont consommées. Or l’industrie du tabac n’en livre que 35 milliards dans notre pays.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Exactement !
M. Xavier Iacovelli. Tout le reste de la consommation est issu du marché parallèle ou de la contrebande. Ainsi, à Andorre, près de 700 millions de cigarettes sont livrées, alors que la population n’en consomme que 125 millions. On le voit, aujourd’hui, ce sont les cigarettiers qui organisent le marché parallèle pour vendre leurs produits dans des pays où la taxe est plus faible.
Le Premier ministre est un Européen convaincu : je ne doute pas qu’il puisse mener ce combat à l’échelle de l’Union. Ratifions le protocole de l’OMS. En outre, l’instauration de quotas de livraison de cigarettes nous permettra de récupérer immédiatement 5 milliards d’euros de recettes supplémentaires !
Mme la présidente. La parole est à Mme Florence Lassarade, pour explication de vote.
Mme Florence Lassarade. Je suis sensible aux arguments de Mme la rapporteure générale et de la ministre. Je défendais mon amendement pour la Ligue contre le cancer. Cette préoccupation est importante pour moi, et je vous saurais gré de persévérer dans la lutte contre le tabagisme.
Cela dit, je retire mon amendement, madame la présidente.
Mme la présidente. L’amendement n° 261 rectifié est retiré.
La parole est à M. Bernard Jomier, pour explication de vote.
M. Bernard Jomier. Pour préciser l’augmentation que vous propose réellement Mme la rapporteure générale, je vais lire l’exposé des motifs de l’amendement n° 135 rectifié bis :
« À titre d’ordre de grandeur, en l’absence de cet amendement, le prix du paquet de cigarettes serait d’environ 12,30 euros en 2025 et 12,60 euros en 2027. » Admirez ! « Avec cet amendement, le prix du paquet de cigarettes approcherait 12,70 euros dès 2025, et resterait à ce niveau en 2027. »
Autrement dit, vous proposez de fixer ce prix à 12,70 euros, au lieu de 12,60 euros. Qui pourrait estimer que c’est trop ? En réalité, cela ne sert à rien ! Je ne comprends même pas l’intérêt de cette trajectoire ! Vous proposez une augmentation de 10 centimes, qui n’aura pas le moindre effet sur la consommation.
Par ailleurs, M. Iacovelli l’a très bien expliqué, qui alimente le marché parallèle ?
M. Xavier Iacovelli. Les cigarettiers !
M. Bernard Jomier. Oui, ce sont les cigarettiers ! C’est donc contre les industriels qu’il faut lutter. Votre prédécesseur, Frédéric Valletoux, qui est désormais président de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale, l’a bien compris, puisqu’il a déposé une proposition de loi visant précisément à appliquer le protocole de l’OMS. J’espère que son texte sera adopté rapidement, y compris par notre chambre.
Madame la rapporteure générale, il n’y a aucun volontarisme dans la trajectoire que vous proposez – 12,70 euros au lieu de 12,60 euros, dans trois ans !
Mme la présidente. La parole est à Mme la rapporteure générale.
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. La seule différence, c’est que je propose une trajectoire plus rapide que celle qui était prévue !
Par ailleurs, nous devons penser cette question en fonction des débats qui ont eu lieu à l’Assemblée nationale et dans la perspective d’un accord avec les députés.
Mme la présidente. Je mets aux voix les amendements identiques nos 717 et 1095.
(Les amendements ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente. Je mets aux voix l’amendement n° 135 rectifié bis.
J’ai été saisie d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Je rappelle que l’avis du Gouvernement est défavorable.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
Mme la présidente. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
(Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.)
Mme la présidente. Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 63 :
Nombre de votants | 340 |
Nombre de suffrages exprimés | 243 |
Pour l’adoption | 241 |
Contre | 2 |
Le Sénat a adopté.
En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9 bis, et l’amendement n° 718 n’a plus d’objet.
La parole est à M. le président de la commission.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Mes chers collègues, compte tenu du rythme de nos débats, nous devrons ouvrir la séance du samedi 23 novembre pour poursuivre l’examen de ce texte. Et nous travaillerons probablement jusque tard dans la nuit ce jour-là…
Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à vingt et une heures trente.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à vingt heures, est reprise à vingt et une heures trente, sous la présidence de M. Loïc Hervé.)
PRÉSIDENCE DE M. Loïc Hervé
vice-président
M. le président. Dans la discussion des articles, nous poursuivons, au sein du titre Ier de la deuxième partie, l’examen des amendements tendant à insérer un article additionnel après l’article 9 bis.
L’amendement n° 306, présenté par Mme Lermytte, M. Chasseing et Mme Bourcier, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Après le quatrième alinéa de l’article L. 314-24 du code des impositions sur les biens et services, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :
« Pour l’année 2025 et par dérogation aux troisième et quatrième alinéas du présent article, l’évolution annuelle pour les tarifs et minima de perception ne peut ni être négative ni excéder 1,8 %. »
II. – La perte de recettes résultant pour les organismes de sécurité sociale du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Daniel Chasseing.
M. Daniel Chasseing. Oui, le tabac est nocif pour la santé : il est cause de naissances prématurées, de cancers, d’insuffisances respiratoires, de cardiopathies et d’insuffisances coronaires. Pour en diminuer la consommation, il faut en augmenter le prix : une hausse de 4 % a donc été décidée dans ce PLFSS.
Mme Lermytte, auteure de cet amendement, a constaté que, dans son département du Nord, le marché parallèle était en très forte augmentation. Elle conseille donc de limiter l’augmentation du prix du tabac à 1,8 %.
Le prix du paquet de cigarettes est passé de 7,5 euros en 2017 à 11,5 euros en 2023, puis jusqu’à 13 euros en 2024. Dans le même temps, le marché parallèle a explosé. On estime désormais qu’il représente entre 20 % et 40 % de la consommation, alors que le réseau des buralistes est supposé assurer le monopole de la vente des produits du tabac.
L’essor de ce marché parallèle a de graves conséquences en matière de santé publique et de lutte contre le tabagisme. Cinq usines ont été découvertes en France par les pouvoirs publics en quatorze mois.
Il est d’autant plus urgent de ne pas renforcer encore la pression fiscale que les instances européennes demandent à la France de réviser son droit national pour le mettre en conformité avec le droit européen et autoriser les particuliers à pouvoir rapporter d’un État membre de l’Union européenne jusqu’à quatre cartouches de paquets de cigarettes, contre une actuellement.
Enfin, il convient de rappeler que les buralistes en milieu rural sont de véritables commerces, qui tiennent un rôle important.
Cet amendement vise donc à revenir à une hausse raisonnée du droit d’accise sur le tabac, plafonnée à 1,8 %, avant la mise en place d’une éventuelle augmentation à l’échelle européenne.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Je tiens à rappeler à notre collègue Daniel Chasseing que la commission des affaires sociales a toujours été favorable à la suppression du plafonnement du droit d’accise sur le tabac. Lors de l’examen du PLFSS pour 2024, elle a ainsi émis un avis défavorable sur un amendement identique, présenté par les mêmes auteurs.
Si l’on rétablissait ce plafonnement, le prix des produits du tabac serait moins frappé par l’inflation que les produits de consommation courante, notamment les produits de première nécessité.
Pour ces raisons, la commission est défavorable à cet amendement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Daniel Chasseing. Je retire l’amendement, monsieur le président.
M. le président. L’amendement n° 306 est retiré.
La parole est à M. le président de la commission de la commission des affaires sociales.
M. Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. J’ai commis une erreur : en tant que président de la commission des affaires sociales, j’aurais dû déclarer irrecevable l’amendement n° 454 rectifié, que nous nous apprêtons à examiner, en ce qu’il tend à prévoir une taxe portant sur un produit illégal.
L’amendement que vous aviez déposé l’année dernière sur ce sujet, monsieur Dossus, avait ainsi été déclaré irrecevable ; il me revenait donc, cette année encore, d’invoquer la même irrecevabilité. Et s’il devait revenir l’année prochaine, je l’invoquerais derechef.
Quel que soit le résultat du vote sur cet amendement, sachez que celui-ci ne pourra prospérer. Nous allons donc en débattre, mais cela n’ira pas plus loin. Je tenais à le préciser.
M. le président. L’amendement n° 454 rectifié, présenté par M. Dossus, Mmes Souyris et Poncet Monge, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :
Après l’article 9 bis
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le livre III du code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :
1° À l’intitulé, les mots : « et tabacs » sont remplacés par les mots : « , tabacs et cannabis » ;
2° L’article L. 311-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Le cannabis et les produits du cannabis au sens de l’article L. 315-1. » ;
3° Le titre Ier est complété par un chapitre ainsi rédigé :
« Chapitre …
« Cannabis et produits du cannabis
« Section 1
« Éléments taxables
« Art. L. 315-1. – Sont soumis à l’accise le cannabis et les produits du cannabis dont la teneur en tétrahydrocannabinol dépasse 1 %.
« Section 2
« Fait générateur
« Art. L. 315-2. – Les règles relatives au fait générateur de l’accise sur le cannabis et les produits du cannabis sont déterminées par les dispositions du titre II du livre Ier et par celles de la section 2 du chapitre Ier du présent titre.
« Section 3
« Montant de l’accise
« Art. L. 315-3. – Les règles relatives au montant de l’accise sur le cannabis et les produits du cannabis sont déterminées par les dispositions du titre III du livre Ier et par celles de la section 3 du chapitre Ier du présent titre.
« Art. L. 315-4. – Le cannabis et les produits du cannabis sont assimilés à la catégorie « Autres tabacs à fumer ou à inhaler après avoir été chauffés » . Les tarifs, taux et minima de perception de l’accise exigible en 2024 sont celles indiquées à l’article L. 314-24 pour la catégorie « Autres tabacs à fumer ou à inhaler après avoir été chauffés » .
« Section 4
« Exigibilité
« Art. L. 315-5. – Les règles relatives à l’exigibilité de l’accise sur le cannabis et les produits du cannabis sont déterminées par les dispositions du titre IV du livre Ier et par celles de la section 4 du chapitre Ier du présent titre.
« Section 5
« Personnes soumises aux obligations fiscales
« Art. L. 315-6. – Les règles relatives aux personnes soumises aux obligations fiscales pour l’accise sur le cannabis et les produits du cannabis sont déterminées par les dispositions du titre V du livre Ier et par celles de la section 5 du chapitre Ier du présent titre.
« Section 6
« Constatation de l’accise
« Art. L. 315-7. – Les règles de constatation de l’accise sur le cannabis et les produits du cannabis sont déterminées par les dispositions du titre VI du livre Ier et par celles de la section 6 du chapitre Ier du présent titre.
« Section 7
« Paiement de l’accise
« Art. L. 315-8. – Les règles relatives au paiement de l’accise sur les tabacs sont déterminées par les dispositions du titre VII du livre Ier et par celles de la section 7 du chapitre Ier du présent titre.
« Section 8
« Affectation
« Art. L. 315-9. – L’affectation du produit de l’accise sur le cannabis et les produits du cannabis est déterminée par le 10° de l’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale. »
II. – L’article L. 131-8 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« …° Le produit de l’accise sur le cannabis et les produits du cannabis mentionnée à l’article L. 315-1 du code des impositions sur les biens et services et perçue est versé à la branche mentionnée au 1° de l’article L. 200-2. »
La parole est donc à M. Thomas Dossus.
M. Thomas Dossus. Mes chers collègues, depuis quelques heures, nous avons augmenté la taxe sur les sodas, la taxe sur les paris et la taxe sur les cigarettes. En l’occurrence, je vous propose d’instaurer une nouvelle taxe, qui ferait plaisir à un certain nombre de nos compatriotes : il s’agit de créer un droit d’accise sur le cannabis et ses produits, à l’image de celui qui existe déjà pour l’alcool et le tabac. En bref, notre amendement vise à légaliser le cannabis, comme vient de le rappeler le président de la commission.
Cet amendement, cher aux écologistes – nous le déposons de façon récurrente –, est attendu par de nombreux Français. Comme nous connaissons une période de tension budgétaire, j’insisterai cette année sur l’effet positif d’une telle légalisation sur nos finances publiques.
Le Conseil d’analyse économique (CAE) a évalué la retombée globale de la légalisation du cannabis sur nos finances publiques à quasiment 3 milliards d’euros. Au Canada, cela rapporte à peu près 5 milliards d’euros à l’État – nous sommes dans les mêmes ordres de grandeur.
Si l’on décompose cette analyse, on constate qu’elle intègre non seulement la fiscalité, mais aussi le retrait de tout ce qui est investi dans la lutte contre les trafics, soit quelque 500 millions d’euros. Si l’on tient compte du coût social de la situation actuelle, la lutte contre le cannabis représente aujourd’hui 900 millions d’euros.
En prévoyant 2 milliards d’euros de recettes fiscales supplémentaires, on approcherait des 3 milliards d’euros, auxquels pourraient s’ajouter entre 350 millions et 700 millions d’euros de cotisations sociales liées aux emplois dans cette nouvelle filière, sachant que la France est d’ores et déjà l’un des plus importants producteurs de chanvre, avec plus de 16 000 hectares cultivés.
Mme Cécile Cukierman. Ce n’est pas sérieux…
M. Thomas Dossus. Cette mesure aurait un effet positif sur nos finances publiques, à hauteur de 3 milliards d’euros, tout en permettant d’assécher financièrement les réseaux de narcotrafic qui gangrènent la société et sèment la violence. Nous pourrions donc, au travers de cette légalisation, donner un coup de main au ministre Retailleau… (Sourires sur les travées du groupe GEST.)
Rappelons tout de même que 41 % des Français ont déjà consommé du cannabis, contre 18 % des Européens : nos compatriotes ont une appétence pour ce produit, que je vous invite à légaliser.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Défavorable, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. le président. La parole est à Mme Anne Souyris, pour explication de vote.
Mme Anne Souyris. En effet, ce produit est pour le moment interdit, même s’il est légal sous certaines formes. Le cannabis thérapeutique, qui est en cours d’expérimentation, a ainsi fait ses preuves et j’espère qu’il sera un jour pérennisé – c’est un autre sujet, mais il est important. Le cannabis n’est donc pas un produit complètement illégal, je tiens à le souligner.
Par ailleurs, de nombreux pays l’ont progressivement légalisé pour des raisons de santé publique, de sécurité publique et pour des raisons économiques. Ces éléments ne sont pas anodins, et je pense que cette assemblée pourrait en prendre conscience. Il convient d’aborder cette question de façon réaliste, pragmatique, et non pas idéologique.
Nous avons évoqué l’objectif de 3 milliards d’euros de recettes fiscales. Mais il faut dire aussi qu’en l’absence de légalisation, on ne peut ni faire de prévention auprès des jeunes ni envisager de programmes d’éducation permettant d’éviter l’abus de drogues. On sait, par exemple, que de nombreux jeunes gens sont aujourd’hui dépressifs et que la drogue peut devenir un sujet de préoccupation dans ces situations. Or, j’y insiste, quand un produit est interdit, on ne peut pas mener de campagne de prévention quant à son usage.
Je me suis rendue dans plusieurs pays où une politique de réduction des risques est mise en place. J’y ai interrogé des policiers : figurez-vous qu’ils ne trouvent pas que la situation française soit formidable… Ils se demandaient ce que nous pouvions faire avec nos « cow-boys », comme ils appellent nos policiers ! (Marques d’agacement sur les travées du groupe Les Républicains.) Ils nous ont expliqué qu’ils pouvaient enfin aider les gens depuis qu’un certain nombre de drogues avaient été légalisées.
La sécurité sociale, dont nous examinons le budget, n’a-t-elle pas pour objectif de protéger les gens ? Ne pouvons-nous pas réfléchir posément sur l’efficacité, ou non, des politiques que nous menons ? Notre politique en matière de drogues est l’une des plus répressives qui soit. (Mêmes mouvements.) Pour autant, c’est dans notre pays qu’il y a le plus grand nombre de jeunes addicts, y compris au cannabis !
M. le président. La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.
Mme Cécile Cukierman. Il s’agit d’un sujet extrêmement sérieux. Devons-nous, ou pas, légaliser le cannabis ? Chacun d’entre nous peut avoir un avis à cet égard. Personnellement, je n’y suis pas favorable, comme une très grande partie de mon groupe.
Quoi qu’il en soit, il n’est pas possible, à l’occasion d’un débat budgétaire, de légaliser un produit qui est aujourd’hui considéré comme une drogue, qui est un fléau pour une grande partie de notre jeunesse et qui plonge des personnes dans la dépendance, même s’il peut avoir quelques vertus thérapeutiques. De nombreuses études scientifiques ont ainsi montré qu’il affectait le développement du cerveau, la réflexion, la capacité d’attention et la concentration.
Je le dis avec beaucoup d’humilité, car je ne suis ni spécialiste du sujet ni scientifique : je ne souhaite pas prolonger ici ce débat, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Notre priorité est tout de même de parler de la santé, une question qui, a priori, intéresse nos concitoyens.
Ayons ce débat, si certains le souhaitent, et argumentons, mais ne disons pas qu’il faut légaliser le cannabis parce que cela rapporterait de l’argent au pays ! Dans ces conditions, on pourrait légaliser bien des choses… Ce ne saurait être un argument recevable.
Nous voterons contre cet amendement.