M. le président. L’amendement n° I-380 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Cabanel, Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve, M. Laouedj, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 422-22 du code des impositions sur les biens et services est ainsi rédigé :
« Art. L. 422-22. – Le tarif de solidarité prévu au 2° de l’article L. 422-20, déterminé en fonction de la destination finale du passager et de la catégorie de service au sens de l’article L. 422-22-1, est le suivant :
«
Tarif (€) |
14 |
40 |
300 |
600 |
24 |
80 |
1 000 |
1 500 |
49 |
150 |
1 500 |
3 000 |
».
La parole est à M. Christian Bilhac.
M. le président. L’amendement n° I-1167, présenté par MM. Dantec, G. Blanc et Dossus, Mme Senée, M. Benarroche, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
L’article L. 422-22 du code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :
1° Le tableau du deuxième alinéa est ainsi rédigé :
«
DESTINATION FINALE |
CATÉGORIE DE SERVICE |
Tarif ( €) |
DESTINATION EUROPÉENNE OU ASSIMILÉE |
Normale |
9,50 |
DESTINATION EUROPÉENNE OU ASSIMILÉE |
Avec services additionnels |
30 |
DESTINATION LOINTAINE |
Normale |
40 |
DESTINATION LOINTAINE |
Avec services additionnels |
120 |
» ;
2° Le dernier alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ne sont pas assujettis à la présente taxe les embarquements des aéronefs réalisant un vol commercial dans un des territoires mentionnés aux deuxième à cinquième alinéas de l’article L. 422-16 du code de l’imposition des biens et services, à l’article L. 112-4 du même code, aux articles 73 et 74 de la Constitution, ainsi que la Corse, et ayant pour destination finale un autre de ces mêmes territoires ».
La parole est à M. Ronan Dantec.
M. Ronan Dantec. Cet amendement vise à découpler le débat sur l’aviation commerciale classique et celui sur les jets privés. Même si ces derniers représentent un enjeu important, il faut se concentrer sur la question principale du transport collectif.
J’ai écouté avec attention l’ensemble des intervenants. Monsieur le ministre, même si aucune réunion interministérielle (RIM) ne vous en a donné mandat, il serait important que vous vous engagiez, au cours de ce débat, à créer un fonds d’aménagement aérien du territoire, abondé par les nouvelles recettes attendues de la TSBA.
Du fait de la législation européenne actuelle, il est presque impossible – j’ai entendu le rapporteur général faire ce constat – de prévoir une exonération pour la Corse, les territoires ultramarins ou les territoires les moins bien desservis.
Comme les recettes tirées du dispositif du Gouvernement s’annoncent élevées, il est crucial que celui-ci s’engage d’ores et déjà à doter ce fonds d’aménagement aérien de moyens importants. Un tel fonds permettrait même d’ouvrir quelques lignes aériennes pour desservir des territoires particulièrement enclavés. C’est un écologiste qui vous le dit !
M. Ronan Dantec. Quoi qu’il en soit, commençons par discuter de la TSBA et des lignes d’aménagement du territoire, avant de nous pencher sur le reste, et notamment les jets privés : ce sont deux débats bien distincts.
Si mon amendement vous semble utile, monsieur le rapporteur général, je le maintiendrai ; sinon, nous le retirerons pour soutenir celui du Gouvernement.
M. le président. L’amendement n° I-1094 rectifié bis, présenté par Mme Pantel, MM. Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Fialaire, Gold et Guiol, Mme Jouve et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
les deux dernières colonnes du tableau du deuxième alinéa de l’article L. 422-22 du code des impositions sur les biens et services sont ainsi rédigées :
«
MINIMUM ( €) |
MAXIMUM ( €) |
2,63 |
4,13 |
20,27 |
29,27 |
6,01 |
9,01 |
54,07 |
72,07 |
».
La parole est à M. Christian Bilhac.
M. le président. L’amendement n° I-1025 rectifié, présenté par MM. Lurel, Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud et Jeansannetas, Mmes Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mmes Conconne et Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – Le code des impositions sur les biens et services est ainsi modifié :
1° Le tableau du deuxième alinéa de l’article L. 422-22 est ainsi rédigé :
«
Destination finale |
Catégorie de service |
Minimum (€) |
Maximum (€) |
Européenne ou assimilée |
Aucun service additionnel |
1,13 |
2,63 |
Présence de services additionnels |
30 |
60 |
|
Usage d’un jet privé |
400 |
800 |
|
Tierce |
Aucun service additionnel |
4,51 |
7,51 |
Présence de services additionnels |
100 |
200 |
|
Usage d’un jet privé |
1200 |
2500 |
» ;
2° À l’article L. 422-27, après le mot : « embarquements », sont insérés les mots : « dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, ».
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2025.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Cet amendement vise à inclure l’aviation d’affaires dans l’assiette de la TSBA. Comme il n’est pas normal qu’elle soit exonérée, nous proposons de créer au sein de cette écocontribution une tranche supplémentaire, spécifique à l’usage de jets privés.
Une partie de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, dite taxe Chirac, finance l’aide publique au développement, quand une autre est dirigée vers l’Afit France et, donc, vers le rail. Or il n’est pas possible de voyager par le rail quand on souhaite se rendre en Guyane à partir de Paris : il conviendrait que l’on tienne compte de cette péréquation inversée, même si elle s’exerce – je ne le conteste pas – au nom de la solidarité nationale.
M. le président. L’amendement n° I-1800 n’est pas soutenu.
L’amendement n° I-1329 rectifié, présenté par Mme M. Carrère, MM. Bilhac, Cabanel, Daubet, Fialaire et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mme Jouve, M. Masset, Mme Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – L’article L.422-22 du code d’imposition sur les biens et services est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Les vols en provenance du territoire hexagonal et dont la destination finale est l’un des territoires mentionnés à l’article 72-3 de la Constitution ou la Corse, et les vols en provenance de l’un des territoires mentionnés à l’article 72-3 de la Constitution ou la Corse, et dont la destination finale est le territoire hexagonal ne sont pas soumis au tarif de solidarité prévu au 2° de l’article L. 422-20 du présent code. »
« Les notions de provenance et de destination sont entendues au sens des points d’embarquement initiaux et des points de débarquement finaux, mentionnés au dernier alinéa du présent article, situés sur les territoires de la Collectivité de Corse, de la Nouvelle-Calédonie et des territoires ultramarins sus mentionnés. »
II. – La perte de recettes résultant pour les collectivités territoriales du I est compensée, à due concurrence, par une majoration de la dotation globale de fonctionnement.
III. – La perte de recettes résultant pour l’État du paragraphe précédent est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Christian Bilhac.
M. Christian Bilhac. Cet amendement vise à exonérer du tarif de solidarité de la taxe sur le transport aérien de passagers les vols entre les outre-mer et l’Hexagone, ainsi que ceux entre la Corse et l’Hexagone. Il convient de maintenir le lien avec ces territoires de la République et de prouver notre attachement à leur égard, d’autant plus que la situation dans les collectivités ultramarines est particulièrement difficile.
M. le président. L’amendement n° I-1026, présenté par MM. Lurel, Cozic, Kanner et Raynal, Mmes Blatrix Contat, Briquet et Espagnac, MM. Éblé, Féraud et Jeansannetas, Mmes Conconne, Artigalas, Bélim, Bonnefoy, Brossel et Canalès, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Daniel, MM. Darras, Fagnen et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et Jomier, Mme G. Jourda, M. Kerrouche, Mmes Le Houerou, Linkenheld et Lubin, MM. Marie et Mérillou, Mme Monier, M. Montaugé, Mme Narassiguin, MM. Ouizille, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Stanzione, Temal, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Vayssouze-Faure, M. Weber, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :
Après l’article 9
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
I. – À l’article L. 422-27 du code des impositions sur les biens et services, après le mot : « embarquements », sont insérés les mots : « dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, ».
II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
La parole est à M. Victorin Lurel.
M. Victorin Lurel. Il est défendu.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Il me semble avoir déjà clairement posé les termes du débat.
La commission émet un avis défavorable sur les amendements nos I-1387, I-1233, I-125 rectifié bis, I-1497 rectifié bis, I-124 rectifié bis, I-252 rectifié bis, I-1427 rectifié bis, I-223 rectifié, I-529 rectifié bis, I-1328 rectifié bis, I-1048 rectifié, I-690, I-380 rectifié, I-1167, I-1094 rectifié bis, I-1025 rectifié, I-1329 rectifié et I-1026.
La commission émet par ailleurs un avis de sagesse sur l’amendement n° I-2076 ; en conséquence, elle demande le retrait de tous les sous-amendements à ce dernier, à l’exception des sous-amendements nos I-2218 rectifié bis, I-2236 rectifié, I-2114 rectifié ter, I-2256 et I-2219 rectifié, pour lesquels celle-ci demande l’avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, nombre de vos amendements ont pour objet les dessertes : lignes d’aménagement du territoire, outre-mer, Corse…
Or, comme je l’indiquais en présentation de l’amendement du Gouvernement, l’ensemble des territoires ultramarins se trouve dans la catégorie « Destination européenne ou assimilée ». Monsieur Lurel, vous évoquiez d’ailleurs le trajet de Pointe-à-Pitre à Cayenne : sachez qu’il relève bien de cette catégorie, et non de la catégorie « Destination lointaine », puisque le trajet se fait de l’Union européenne vers l’Union européenne. Le tarif de solidarité qui s’applique à un tel trajet passerait, si mon amendement était adopté, de 2,63 euros à 9,50 euros.
Nous ne pouvons faire mieux pour les territoires ultramarins que les placer dans cette catégorie « Destination européenne ou assimilée », dans la mesure où la jurisprudence Ryanair interdit les différences de tarification et de taxation entre territoires.
M. Victorin Lurel. Sauf pour les outre-mer !
M. Laurent Saint-Martin, ministre. Une compensation sera néanmoins prévue pour les territoires d’outre-mer – ce point a été évoqué lors des débats à l’Assemblée nationale – au travers d’un financement complémentaire de l’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (Ladom), ainsi que pour la Corse au travers du financement de la continuité territoriale.
L’objectif est d’éviter que notre dispositif d’exonération de certains territoires soit contraire au droit, risque que l’adoption de certains de vos sous-amendements fait peser.
Aussi, le Gouvernement demande le retrait de l’ensemble des amendements et des sous-amendements ; à défaut, il y sera défavorable.
M. Albéric de Montgolfier. Et les lignes d’aménagement du territoire alors ?
M. le président. La parole est à M. Jean-Marc Boyer, pour explication de vote.
M. Jean-Marc Boyer. Il faut être particulièrement attentif aux effets de cette mesure sur les territoires éloignés, qui rencontrent de réels problèmes en matière de mobilité.
En effet, depuis la crise de la covid-19, qui a été un déclencheur, Air France a décidé de supprimer certaines de ses lignes intérieures, en particulier les lignes à destination d’Orly. Conséquence : celles qui relient les petites capitales régionales à Paris sont très fortement pénalisées.
Il me semble inconcevable de voter en faveur d’une nouvelle taxation du secteur aérien, dès lors que ces régions souffrent déjà de difficultés en matière non seulement de mobilité, mais aussi d’aménagement du territoire et, donc, d’un problème de désenclavement. Nous risquerions d’amplifier la désertification d’une partie du territoire national.
Certaines zones, je le rappelle, sont déjà pénalisées par un transport ferroviaire obsolète. Et je ne vous parlerai pas de la région Auvergne-Rhône-Alpes, où les retards avoisinent, voire excèdent parfois les six heures !
À ceux qui parlent de décarbonation, je réponds que le transport aérien intérieur ne représente qu’environ 1 % à 2 % du total des émissions de CO2, contre 6 % à 7 % pour le numérique : téléphone portable, tablette, ordinateur… Nous sommes à l’heure des choix : privilégions l’aménagement du territoire et la mobilité !
M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.
Mme Catherine Conconne. J’avoue que je trouve ce débat, tout autant que la réponse de M. le ministre, ubuesque. D’ailleurs, le ton qu’a adopté ce dernier était tellement hésitant que je suis certaine qu’il n’est pas convaincu par ses propres arguments.
J’ai l’impression que, malgré les progrès des télécommunications, le haut débit, les nouvelles n’arrivent pas jusqu’en France. En métropole, on n’est pas conscient que les pays de ladite outre-mer connaissent une grave crise liée à la vie chère.
En mars 2023, Guillaume Chevrollier et moi-même avons rendu un rapport d’information sur la continuité territoriale outre-mer. Nous faisons la preuve par A plus B que nos pays sont une exception de la République qui n’est plus soutenable ni supportable.
Dans un tel contexte, que fait le Gouvernement ? Il augmente une taxe, en racontant que Ladom recevra un peu d’argent. Or, pour toucher les fonds de l’Agence, il faut être éligible : le plafond de ressources s’élève à 20 000 euros et quelques. Autrement dit, ceux qui le dépassent sont considérés comme riches, ce qui est une aberration !
Comment voulez-vous que nous sortions de nos pays ? Au moins, les Écossais peuvent prendre le bateau ! À moins de monter une compagnie de paddle, nous n’avons pas le choix : nos territoires sont desservis par l’avion, mode de transport qui assure par exemple les évacuations sanitaires.
J’entends les discours sur la nécessité d’un développement endogène de nos pays. Sachez que celui-ci passe également par le tourisme. Or vous ajoutez une taxe qui pèsera sur à peu près 80 % du trafic, soit sur tous ceux qui viennent créer de la valeur ajoutée.
Monsieur le ministre, vous venez de réaliser un véritable « kidnapping fiscal » – je ne vois pas d’autre mot. Je veux bien entendre parler de « solidarité » – ce terme est dans mon ADN –, mais, là, vous allez trop loin !
Quant aux exceptions que vous ne pourriez pas concéder,…
M. le président. Il faut conclure, ma chère collègue.
Mme Catherine Conconne. … je vous rappelle qu’il n’existe pourtant pas de TVA en Guyane. Quant à notre régime d’octroi de mer, il n’existe nulle part ailleurs. Les dérogations sont donc possibles !
M. le président. La parole est à Mme Annick Petrus, pour explication de vote.
Mme Annick Petrus. Dans les territoires ultramarins, le transport aérien est non pas un luxe, mais une nécessité. L’avion est le seul moyen de garantir la continuité tant entre les outre-mer et la métropole qu’entre les outre-mer eux-mêmes.
Cette réalité est encore plus marquée dans le cadre d’une double insularité, comme celle que connaissent Saint-Martin et Saint-Barthélemy face à la Guadeloupe, où de nombreux services administratifs, médicaux et éducatifs sont centralisés. Dans ces petits territoires, nous n’avons que très peu, voire pas de médecins spécialisés. Comment faire ? Comme l’indiquait ma collègue Catherine Conconne, les aides de Ladom ne sont pas pour tout le monde.
Il convient enfin de souligner que cette mesure risque d’aggraver les inégalités entre la métropole et les outre-mer, tout en accentuant la pression économique et sociale sur ces territoires. Il ne faudra pas s’étonner que nos pays traversent de telles crises sociales. Plus que déconsidérés, nous nous sentons pris en otage. Nous ne savons plus quoi faire ni comment.
M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour explication de vote.
Mme Micheline Jacques. Je souscris aux propos de mes collègues : les territoires ultramarins, du fait de leur insularité, sont tributaires du transport aérien, et leurs habitants doivent malheureusement subir les répercussions des hausses de tarifs sur leur pouvoir d’achat, qui est relativement faible.
M. le président. La parole est à M. Stéphane Sautarel, pour explication de vote.
M. Stéphane Sautarel. M. le rapporteur général a demandé l’avis du Gouvernement sur mon sous-amendement n° I-2218 rectifié bis. Or, monsieur ministre, je ne vous ai pas vraiment entendu sur le sujet.
J’insiste sur l’enjeu que représente la douzaine de lignes d’aménagement du territoire, lesquelles sont soumises à des obligations de service public (OSP).
La jurisprudence européenne semble donner lieu à diverses interprétations et n’être pas complètement stabilisée, comme en attestent nos interrogations, il y a quatre ans, sur cette question. Aussi, je souhaiterais que ce sous-amendement soit adopté pour que soient examinées, dans le cadre de la navette, toutes les possibilités d’y donner suite, quitte à en ajuster la rédaction.
M. le président. La parole est à M. Albéric de Montgolfier, pour explication de vote.
M. Albéric de Montgolfier. Je voudrais faire une remarque d’ordre général : j’ai malheureusement trop d’expérience, compte tenu de mes trois mandats consécutifs au sein de la commission des finances, pour ignorer que les recettes escomptées des mesures que l’on met en œuvre ne sont pas toujours au rendez-vous, tout simplement parce que les acteurs économiques s’adaptent.
M. Jean-Marc Boyer. Exactement !
M. Albéric de Montgolfier. Si, à l’avenir, des lignes ferment, la base fiscale se réduira peu à peu. C’est ce qui se produit régulièrement dans un tel cas de figure. Que l’on aime ou pas le low cost, voilà la réalité !
Notre collègue Vincent Capo-Canellas rappelait l’autre jour, en commission, que l’on manquait d’avions et de pilotes. Voyez les retards à la livraison : une commande d’avion, aujourd’hui, c’est sept à huit années d’attente !
Cela oblige les transporteurs aériens à faire des arbitrages et, parmi ces arbitrages, il y a évidemment le fait de privilégier les endroits où l’on taxe moins. Le risque, c’est donc que tout cela entraîne des fermetures de lignes et, par suite, d’aéroports, lesquels sont gérés la plupart du temps par les chambres de commerce et d’industrie (CCI) et sont d’une extrême fragilité.
Alors, méfions-nous quand on nous annonce des centaines de millions de recettes pour une mesure…
J’ai également une question simple à vous adresser, monsieur le ministre, qui rejoint celle que notre collègue Stéphane Sautarel vient de poser : qu’en est-il des lignes soumises à OSP ?
Ces lignes sont financées, subventionnées par l’État ; si l’on accroît leur déficit par une diminution du nombre de passagers, il faudra encore plus les subventionner. Existe-t-il une raison d’ordre juridique qui interdirait de les exonérer de l’augmentation de la taxe ? Je n’en vois pas. En tous cas, la Commission européenne n’a pas fourni de réponse claire à ce sujet.
M. Albéric de Montgolfier. Il serait tout à fait paradoxal d’accroître une taxation pour aboutir, in fine, au creusement d’un déficit qu’il reviendra ensuite aux collectivités et à l’État de compenser.
Taxer pour devoir, ensuite, compenser, avec le risque de porter préjudice à des lignes, ainsi qu’à des aéroports qui, comme je l’ai dit, sont extrêmement fragiles, c’est tout de même étrange…
M. le président. La parole est à Mme Lana Tetuanui, pour explication de vote.
Mme Lana Tetuanui. À l’heure où nous parlons de nos territoires ultramarins, je pose la question, monsieur le ministre : que vous ont-ils fait pour mériter cela ?…
Je vais tâcher d’illustrer mon propos et, surtout, de défendre la cause des territoires que sont la Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et la Polynésie française.
Pour aller chez moi, il faut vingt heures d’avion. Le territoire est accessible en avion, en bateau, à la nage, mais nous n’avons pas de train…
J’ai fait une rapide recherche, mes chers collègues : actuellement, le tarif le plus bas pour chacune des trois compagnies aériennes desservant la Polynésie – attachez vos ceintures – est de 1 800 euros pour French Bee, 3 339 euros pour Air France et 3 028 euros pour Air Tahiti Nui.
Je veux bien entendre que l’on nous oppose les directives européennes. Mais c’est aussi donner des armes à la concurrence américaine, car, je le rappelle, les compagnies américaines desservent l’aéroport de Tahiti–Faa’a. Que me répondrez-vous à ce sujet ?
Ce qui me stupéfie, c’est que nos collègues de l’Assemblée nationale avaient réussi à faire adopter un amendement pour exonérer nos territoires de cette taxe.
J’en appelle donc à la conscience du ministre et du rapporteur général, et je leur dis : « Faites le voyage ! Payez le prix demandé pour vous rendre dans nos territoires ! » Ce sera fini, la rigolade…
M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.
M. Victorin Lurel. Vous avez tort, monsieur le ministre : l’article 349 du TFUE n’emporte aucune interdiction, pas plus que l’article 73 de la Constitution de la République française. À travers cette hausse de taxation, c’est en réalité une volonté politique qui est affichée.
Selon vous, nos territoires ultramarins entreraient tous dans la première catégorie… Donc tous les vols régionaux – Guadeloupe, Martinique, Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Barthélemy, etc. – seraient des vols intra-Union européenne. Ce n’est pas ce que j’ai compris en lisant votre dispositif, et je peine à saisir le mariage entre distance et nature du vol que vous évoquez. Pourrions-nous avoir quelques clarifications ?
Vous parlez ensuite de Ladom. Catherine Conconne a remis un excellent rapport sur le sujet, qui a même donné lieu au dépôt d’une proposition de loi à l’Assemblée nationale – la paternité du travail sénatorial n’a pas été reconnue, mais ce rapport est très réussi. Quand j’étais président de conseil régional et ministre, on faisait voyager 120 000 personnes ; ce nombre est descendu à moins de 30 000 personnes ! Les critères sont trop restrictifs, y compris en matière de plafonds de revenus.
Par ailleurs, la mission « Outre-mer » prévoit une diminution de 1,5 million d’euros, je crois, des crédits alloués à Ladom. Je ne vois donc aucune cohérence dans vos propos ; je perçois en revanche un manque de complémentarité avec l’action des autres ministères. Il y a là, manifestement, un problème.
Et puis, il y a les OSP que notre collègue Albéric de Montgolfier a évoqués. On avait révisé tout cela du temps de Lionel Jospin, mais ce n’est pas vraiment appliqué ; en outre, on se retrouve avec des ensembles archipéliques – c’est le cas de la Guadeloupe – sans liaison aérienne, car ils sont considérés comme insuffisamment rentables pour qu’on y fasse voler des avions. Ce n’est pas le cas de nos concurrents touristiques de l’espace Caraïbe – je pense, par exemple, aux Bahamas.
Si l’on devait encore charger la barque, monsieur le ministre, je dirais que le Gouvernement n’est pas attentif et que le « réflexe outre-mer », pour reprendre une expression de vos prédécesseurs, n’est vraiment pas de mise !
M. le président. La parole est à Mme Jocelyne Guidez, pour explication de vote.
Mme Jocelyne Guidez. Je n’ai déposé que deux amendements au présent projet de loi de finances, dont l’amendement n° I-1233 qui concerne l’outre-mer.
Alors que l’on parle de cherté de la vie en Martinique, on nous apprend que l’on va augmenter le prix des billets d’avion.
Quand je suis arrivée au Sénat, en 2017, je payais 990 euros pour pouvoir me rendre en avion à la Martinique, dont ma famille est originaire ; aujourd’hui, je paie mon billet 1 700 euros. À ce prix, disons-le, on empêche les Antillais de retourner au pays ! Le voyage est inenvisageable quand il faut, pour une famille avec deux enfants, payer ce prix multiplié par quatre ! Les familles ne peuvent donc plus retourner chez elles pendant les vacances, ce que je trouve tout à fait honteux.
Quant au tourisme, sur le marché du Diamant, les commerçants pleurent, parce qu’ils ne voient plus aucun touriste ! Où allons-nous avec ces hausses de prix ? Avant, on invoquait la hausse des tarifs du carburant… De quoi parle-t-on aujourd’hui ? De faire des économies sur notre dos !
Il faut arrêter cela, monsieur le ministre !
M. le président. La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.
M. Vincent Capo-Canellas. Je souhaiterais rappeler un certain nombre de points qui, me semble-t-il, font consensus.
Nous sommes tous très inquiets de la desserte de nos territoires, qu’il s’agisse de la Corse, des outre-mer ou de l’ensemble de nos départements. Et nous sommes tous submergés par les alertes de nos collègues élus qui, gérant des aéroports, ont des difficultés à les financer ou à conserver des lignes – lignes qu’ils s’attendent à perdre.
En tant que rapporteur spécial de la commission des finances sur les questions de transport aérien, j’ai mené un certain nombre d’auditions sur le sujet, et je peux confirmer que ces alertes sont extrêmement fortes. Au-dessus d’un certain seuil d’augmentation de la taxe, des lignes seront perdues, des dessertes territoriales devront être abandonnées et nous détruirons des emplois.
Je rappelle à cet égard que l’Union des aéroports français (UAF) et la Fédération nationale de l’aviation et de ses métiers (Fnam) ont chiffré le risque, qu’elles évaluent à 11 500 emplois détruits – il faut tenir compte de l’emploi induit, mais aussi des effets indirects sur le tourisme.
Par ailleurs, nous avons déjà essayé de sortir les LAT et les outre-mer du dispositif. Le gouvernement de l’époque nous avait dit que cela ne serait pas possible. La mesure a été votée, mais elle n’a pas été mise en œuvre. C’est un fait, et peut-être faut-il progresser là-dessus.
Le dispositif de Ladom existe, mais il est tout de même très perfectible. Comme Catherine Conconne l’a rappelé, il est soumis à des seuils et impose tout un tas de déclarations. En outre, il ne résout en rien la question du tourisme vers les outre-mer.
Face à toutes ces problématiques à régler, je propose un sous-amendement qui se veut d’équilibre : il s’inscrit dans le prolongement du dispositif du Gouvernement – on peut en discuter, mais l’option prise, ici, est de soutenir l’intention de l’exécutif –, tout en maintenant un niveau de prix qui garantit la viabilité des lignes métropolitaines vers la Corse ou vers les outre-mer.
Nous sommes soucieux de trouver une solution. Celle-ci ne peut être trop éloignée des positions du Gouvernement car, je vous le rappelle, nous allons au-devant d’un 49.3. D’où le point d’équilibre proposé : il me semble qu’il satisfait à peu près tous les critères.