M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. L’avis de la commission est défavorable sur cet amendement, qui est contraire au droit européen.

Tout d’abord, les matériaux biosourcés n’entrent dans aucun des cas prévus par l’annexe de la directive TVA qui définit de manière limitative les biens et prestations éligibles aux taux réduits.

Par ailleurs, le droit européen de la concurrence impose de garantir que des biens ou services qui répondent au même besoin pour le consommateur soient placés dans une situation de saine et égale concurrence.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Michaël Weber, pour explication de vote.

M. Michaël Weber. J’entends votre analyse, monsieur le rapporteur général : je regrette que le droit européen nous empêche d’avancer. La rénovation du bâti ancien est en effet un enjeu de la plus haute importance et, à cet égard, l’utilisation de matériaux biosourcés est absolument essentielle, parce qu’elle permet de respecter les caractéristiques du bâtiment ; elle mérite donc d’être mieux valorisée.

Cet amendement de notre collègue Savoldelli est vraiment intéressant ; je déplore qu’il ne puisse prospérer.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Supposons qu’une collectivité décide de différencier, en fonction du type de matériau utilisé, le montant des aides qu’elle verse pour la réalisation de travaux d’isolation : elle agirait en contradiction avec le droit de la concurrence – je le précise pour qu’il n’y ait aucune équivoque. (Murmures.)

Je vous le garantis, mes chers collègues ; j’en ai d’ailleurs moi-même fait l’expérience en tant qu’élu local. On peut s’en désoler, mais les collectivités sont tenues au respect du droit de la concurrence.

Il n’est pas autorisé d’attribuer des aides de niveaux différents selon la qualité des matériaux utilisés : une collectivité qui s’affranchirait de cette règle s’exposerait à des poursuites, et perdrait à tous les coups.

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Ce n’est pas tout à fait vrai, monsieur le rapporteur général, ou bien, si ça l’est, de nombreux départements et préfectures sont dans l’illégalité ! Il peut bel et bien exister, en effet, des taux de subvention différents et ciblés, comme c’est le cas dans mon département de l’Isère pour l’utilisation du bois local certifié Bois des Alpes.

Pour ce qui est du sujet qui nous occupe, plusieurs départements octroient des subventions ciblées sur les matériaux biosourcés, subventions conçues avec les services de l’État et validées par eux. La différenciation des aides est donc possible, même si j’entends votre argument sur le droit européen de la TVA.

Il est essentiel, y compris du point de vue de notre souveraineté, de promouvoir l’utilisation des matériaux biosourcés et le développement de filières en ce domaine. Le lien est fort, par ailleurs, avec l’agriculture – je pense à la paille ou au chanvre. J’ajoute, pour conclure, que la forte densité de ces matériaux les qualifie tout spécialement pour répondre aux préoccupations précédemment formulées à propos du confort d’été.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Oui !

M. Guillaume Gontard. Le véhicule n’est peut-être pas le bon, mais nous devons nous pencher sur la question !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-692.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques.

L’amendement n° I-1132 rectifié est présenté par M. Gillé, Mmes Harribey et Bélim, M. Uzenat, Mmes Bonnefoy et Le Houerou, MM. Ros, Jomier, P. Joly, Chantrel, Bourgi, Ziane, Tissot, Fagnen, Redon-Sarrazy et Devinaz, Mmes Linkenheld et Monier et M. Mérillou.

L’amendement n° I-1290 rectifié est présenté par M. Chasseing, Mmes L. Darcos et Lermytte, MM. Brault et V. Louault, Mme Bourcier, MM. Grand, A. Marc et Capus, Mmes Paoli-Gagin, Dumont et Petrus et MM. Houpert, Longeot et Belin.

L’amendement n° I-1354 est présenté par MM. Dossus et G. Blanc, Mme Senée, MM. Benarroche et Dantec, Mme de Marco, MM. Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mmes Ollivier et Poncet Monge, M. Salmon, Mmes Souyris, M. Vogel et les membres du groupe Écologiste - Solidarité et Territoires.

L’amendement n° I-1448 est présenté par Mme Varaillas, MM. Basquin, Corbisez, Savoldelli, Barros et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky.

L’amendement n° I-1830 rectifié est présenté par M. Canévet, Mme N. Goulet, M. Courtial, Mmes Sollogoub et Billon, MM. Pillefer, Folliot et Delcros, Mme Havet, M. Duffourg, Mmes O. Richard et Antoine, MM. Bleunven, Parigi et Levi et Mme Gacquerre.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 278-0 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les opérations de réparation des cycles, de l’électroménager, des chaussures et articles de cuir, des vêtements et du linge de maison. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Hervé Gillé, pour présenter l’amendement n° I-1132 rectifié.

M. Hervé Gillé. Cette mesure, adoptée à l’Assemblée nationale, consiste à instaurer une TVA circulaire au taux réduit pour la réparation, afin de soutenir les réparateurs indépendants et de rendre ce secteur plus accessible.

Le secteur de la réparation est un élément fondamental de la transition vers une économie circulaire ; pourtant, il est en crise. En vingt ans, le nombre de réparateurs a considérablement diminué, conséquence d’un modèle économique peu rentable, d’une profession vieillissante et de difficultés administratives.

Il faut donc une réponse adaptée pour le relancer.

L’Institut national de l’économie circulaire (Inec) alerte sur le fait que des mesures comme le bonus réparation et l’indice de réparabilité, qui vont dans le bon sens, ne suffiront pas sans un soutien structurel solide. La mesure que nous proposons aura un double impact : alléger la charge fiscale des petits artisans, qui sont les plus vulnérables économiquement ; inciter les consommateurs à réparer plutôt qu’à remplacer leurs produits.

En outre, la directive européenne sur les taux de TVA 2022/542 ouvre la voie à la réduction des taux de TVA pour la réparation dans les secteurs du textile et de l’électroménager. Il y a là une occasion à saisir pour renforcer cette politique.

M. le président. La parole est à M. Daniel Chasseing, pour présenter l’amendement n° I-1290 rectifié.

M. Daniel Chasseing. Il faut soutenir les acteurs de l’économie circulaire, notamment les cordonniers et les réparateurs. Sans une TVA à 5,5 %, les difficultés promettent de s’accumuler pour ces indépendants.

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour présenter l’amendement n° I-1354.

M. Grégory Blanc. De quelle manière devons-nous poser les jalons de la transition écologique ? Les produits écoconçus ont toute leur place dans cette réflexion ; il faut donc encourager la filière.

D’un côté, des produits sont écoconçus, c’est-à-dire conçus pour être réparés ; de l’autre, comme vient de le souligner Hervé Gillé, les réparateurs sont de moins en moins nombreux : le système dysfonctionne. Or nous avons besoin qu’il fonctionne pour être au rendez-vous de la transition.

M. le président. La parole est à M. Gérard Lahellec, pour présenter l’amendement n° I-1448.

M. Gérard Lahellec. Nous souhaitons affirmer, par cet amendement, notre volonté de soutenir le secteur de la réparation afin de limiter le gaspillage des ressources et de favoriser le réemploi, et ce dans le cadre de l’économie circulaire.

Bien que des dispositions existent pour la soutenir, la réparation reste le plus souvent désavantagée. C’est pourquoi nous proposons de mettre en place un taux réduit de TVA sur les activités de réparation. Pour ce faire, comme vient de le rappeler Hervé Gillé, nous pouvons nous appuyer sur la directive européenne 2022/542. J’ajoute qu’une telle mesure entraînerait une réduction du coût de ces services, ce qui serait extrêmement positif à tous points de vue.

M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° I-1830 rectifié.

M. Michel Canévet. Il est défendu.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La France applique déjà des taux réduits à des opérations se rattachant à vingt et un des vingt-quatre items listés par la directive européenne TVA 2022/542 ; voilà pour l’état des lieux.

Par ailleurs, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), qui a examiné cette question, souligne notamment que l’application d’un taux réduit de TVA aux services de réparation n’est pas la mesure la mieux adaptée pour lever les freins non financiers au développement de l’économie circulaire. En effet, rien ne garantit que la baisse de la TVA sera répercutée sur les prix – de nombreux précédents le confirment, notamment celui de la restauration.

M. Olivier Rietmann. C’est sûr !

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. En outre, la mesure proposée est peu ciblée, alors que les difficultés du secteur de la réparation exigent un accompagnement particulier. À mon sens, il faut que l’acte de réparation soit la conséquence d’un choix éclairé : la différence de prix entre l’acte de réparation et l’achat d’un produit neuf doit être significative, s’agissant de biens qui peuvent coûter plusieurs centaines d’euros, ce qui n’est pas tout à fait le cas pour l’utilisation du bonus réparation sur une paire de chaussures, par exemple.

Cette mesure coûterait entre 140 millions et 150 millions d’euros. Certes, cela n’a l’air de rien, mais l’addition de petites sommes finit par faire beaucoup. Il faut sortir de la logique du « quoi qu’il en coûte » et mieux cibler les dispositifs.

Tous les ans, même si je note qu’il y en a moins cette année, nous examinons de nombreux amendements de baisse de la TVA dans tel ou tel secteur. Or, dans le domaine des transports ferroviaires, par exemple, domaine qui a – heureusement ! – échappé à la baisse envisagée, le taux de TVA n’a aucune incidence sur la qualité du service proposé : ce sont l’offre et l’organisation qui sont déterminantes.

J’en reviens à l’écoconception : elle doit s’appuyer sur un réseau de réparateurs de bon niveau, ce qui suppose de mettre l’accent sur la formation et la qualification professionnelles. À défaut, les dispositions que nous adopterons seront des coups d’épée dans l’eau.

Tel est le cas, précisément, des bonus réparation chaussures, textiles et vélo.

Tant pis si quelques réparateurs trouvent mes propos inexacts, mais le coût de la réparation d’un vélo est aujourd’hui légèrement supérieur à ce qu’il était avant l’instauration du bonus réparation, qui a été répercuté dans le prix final.

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Oui…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est ce qui se passe le plus souvent, dans plein de domaines, dans ce genre de cas.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Je partage en tout point l’analyse du rapporteur général. C’est d’ailleurs pour cette raison que, à quelques exceptions près, je suis presque toujours défavorable aux demandes de réduction des taux de TVA. La plupart du temps, en effet, les effets déçoivent de beaucoup les attentes.

Comme je l’ai indiqué tout à l’heure à Mme Havet, l’incitation est soit mauvaise soit très faible : les hausses ou les baisses de taux ont peu d’incidence sur les comportements ; la TVA n’est donc pas un bon outil de fiscalité incitative.

Il est rarement démontré, de surcroît, que la baisse de taux se répercute sur les prix. Il est faux de prétendre que la baisse du taux de TVA fait baisser les prix et permet d’orienter les comportements de consommation ou d’investissement. C’est le contraire qui est documenté ; de nombreux cas l’attestent.

Le dernier exemple en date, qui a fait l’objet de travaux à l’Assemblée nationale, concerne la baisse du taux de TVA applicable aux protections périodiques. On a vu, étude à l’appui, que cette réduction n’avait eu aucun effet sur le prix de vente au consommateur ; les marges, elles, ont augmenté, ce qui n’était pas du tout l’effet escompté.

Modifier les taux de TVA s’avère donc le plus souvent décevant. Ce qui ne déçoit jamais, en revanche, c’est le coût de telles mesures pour les finances publiques ! La seule application du taux réduit à la réparation des articles en cuir coûterait un demi-milliard d’euros. Si c’est pour n’avoir ni incidence sur les prix ni effet incitatif d’orientation des comportements, il vaut peut-être mieux y réfléchir à deux fois…

Qui plus est, en fait d’orientation des comportements de consommation, je préfère que l’on pilote la dépense publique par des subventions plutôt que par des dispositifs fiscaux.

Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Hervé Gillé, pour explication de vote.

M. Hervé Gillé. Monsieur le rapporteur général, on a un peu de mal à vous suivre…

Sur Nestlé Waters et les eaux de source, nous avons proposé, sans succès, une augmentation de la TVA. Si je comprends bien l’argument, la différenciation des taux de TVA n’a aucun intérêt : dans ces conditions, puisqu’à vous écouter les modulations de taux n’ont aucun effet, on ferait mieux de fixer un taux de TVA unique. Tout serait plus simple : plus de taux réduit à 5,5 % ou à 10 % !

Admettez qu’il s’agit là d’une démonstration assez curieuse,…

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. C’est une observation.

M. Hervé Gillé. … d’autant que notre modèle distingue les produits de première nécessité, taxés à 5,5 %, les travaux, taxés à 10 %, etc., jusqu’au taux normal de 20 %. Votre explication n’est pas compréhensible.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Si !

M. Hervé Gillé. Quand nous proposons une augmentation du taux de TVA, comme nous l’avons fait sur les eaux de source et Nestlé Waters, cela ne vous convient pas non plus, alors qu’il s’agit de recettes supplémentaires. Derechef, c’est incompréhensible, monsieur le ministre : d’un côté, vous refusez les nouvelles recettes que nous proposons ; de l’autre, dès que nous proposons une dépense, vous sautez sur l’occasion de dire qu’il ne faut pas grever le budget de l’État !

M. Laurent Saint-Martin, ministre. C’est cohérent.

M. Hervé Gillé. En définitive, monsieur le rapporteur général, quelle solution proposez-vous aux artisans pour relancer leur profession ? Je n’ai rien entendu.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Je l’ai dit !

M. le président. La parole est à M. Grégory Blanc, pour explication de vote.

M. Grégory Blanc. À vous entendre, la fiscalité, et la TVA en particulier, ne serait pas l’outil de l’incitation comportementale.

Mais que faisons-nous donc, dans cette première partie du PLF, sinon faire évoluer la fiscalité, à la hausse ou à la baisse, pour tenir compte des évolutions de la société et des enjeux sociaux à venir ? Pour ma part, je l’affirme haut et fort : oui, la fiscalité a un effet comportemental, et même une vertu comportementale. Par ce biais, nous encourageons certaines pratiques et en décourageons d’autres.

Le CPO, dont j’ai consulté un certain nombre d’avis, considère qu’en matière de transition écologique la norme est l’outil le plus incitatif. Une petite musique commence à résonner à l’échelle de l’Union européenne, et particulièrement dans notre pays : le levier le plus efficace consisterait à bâtir des normes. Cette petite musique, on l’entend constamment, par exemple, à propos du « zéro artificialisation nette » (ZAN) – je fais partie de la mission d’information sur son financement.

Dans certaines circonstances, il faut pouvoir actionner le levier fiscal, qui agit comme une carotte, en quelque sorte, afin que les gens ne voient pas seulement les contraintes, mais mesurent également les avantages des décisions prises : nous avons besoin de manier les deux outils.

Monsieur le rapporteur général, vous avez raison, si les artisans sont de moins en moins nombreux, c’est en partie dû à un problème de formation. Pour autant, il y a aussi un problème de marge qu’il faut mettre sur la table et accepter de traiter. Si, dans les quartiers ou dans les campagnes, on trouve moins de cordonniers aujourd’hui, c’est parce qu’ils gagnent moins d’argent ; il faut donc restaurer leurs marges.

Je conclus par une observation : que vous mettiez sur le même plan les protections hygiéniques vendues en supermarché et la situation des artisans réparateurs, cela me pose problème.

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Grégory Blanc. Je le répète, il faut renforcer la présence de ces métiers dans nos campagnes !

M. le président. La parole est à Mme Christine Lavarde, pour explication de vote.

Mme Christine Lavarde. Ces amendements sont une mauvaise réponse à un réel problème.

Je rappelle que, l’année dernière, une grande campagne de publicité a été lancée autour du bonus réparation, qui visait précisément, entre autres, les cordonniers et les retoucheurs, ce bonus étant financé par les contributions des producteurs aux éco-organismes.

Je viens de me livrer à une rapide expérience sur le site economie.gouv.fr : j’y ai cherché la liste des réparateurs agréés de mon département, qui est peu dense, comme chacun sait ! (Sourires.) J’en ai trouvé huit éligibles au bonus réparation pour les chaussures et pour les vêtements. Quatre d’entre eux invitent à envoyer les produits à réparer par la poste – quid de la proximité et de l’économie circulaire ?… –, l’un appartient à un grand groupe espagnol dont je tairai le nom, les trois autres sont bien des artisans. Pourquoi, dans un département de 1,6 million d’habitants, trouve-t-on aussi peu d’artisans agréés au titre du bonus réparation ? Je peux vous dire, pourtant, que Boulogne ne manque pas de cordonniers… J’ai ma réponse : il est probable que la mise en place du bonus s’avère trop complexe.

Avant de créer un nouvel outil, faisons un bilan des éco-organismes. L’argent qui est collecté sur les achats que nous faisons sert-il vraiment à mettre en place des filières de recyclage ?

J’ai pris l’exemple des chaussures et des vêtements, mais je pourrais vous livrer le fruit d’autres petites enquêtes que j’ai menées concernant les éco-organismes : en la matière, il y a beaucoup à faire, et la TVA ne changera rien au problème.

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Guillaume Gontard, pour explication de vote.

M. Guillaume Gontard. Je suis tout à fait d’accord : il y a énormément à dire sur les éco-organismes et il faudrait y travailler.

Le bonus réparation n’a pas du tout atteint son objectif : il ne fonctionne pas – de nouveau, nous sommes d’accord. Il faut donc s’interroger, car il est nécessaire de rendre ce dispositif opérationnel. Jouer sur la TVA est-il le bon moyen ? Je n’en sais rien.

Reste que, la plupart du temps, faire réparer un objet coûte plus cher que de le remplacer et d’acheter du neuf. Nous devons rééquilibrer la balance, car faire réparer est directement créateur d’emploi, et d’emploi local. Nous avons donc tout intérêt à favoriser ce type de consommation.

Je rappelle que, voilà deux jours, j’ai proposé un crédit d’impôt de 500 euros sur le même sujet ; ce vecteur non plus n’est pas le bon, m’a-t-il été répondu. Quel est donc le bon vecteur ?

M. Hervé Gillé. C’est ce qu’on attend de savoir !

M. Guillaume Gontard. Il va falloir répondre à cette question si l’on veut vraiment favoriser la réparation.

M. le président. La parole est à M. Olivier Rietmann, pour explication de vote.

M. Olivier Rietmann. La TVA, à mes yeux, relève moins d’une fiscalité incitative que d’une fiscalité dissuasive.

Elle ne fonctionne comme outil comportemental que lorsqu’une hausse de taux a été décidée dans un but dissuasif, via une augmentation des prix. Les baisses de TVA, quant à elles, ne fonctionnent jamais, car elles n’ont pas d’incidence sur les prix : cela ne joue pas.

M. Grégory Blanc. Et la restauration ?

M. Olivier Rietmann. Par ailleurs, vous aurez beau prendre toutes les mesures que vous voudrez, si les produits achetés ne sont pas réparables, vous n’arriverez à rien : c’est la réparabilité qui importe.

Je lisais pas plus tard qu’hier le témoignage d’une responsable d’une entreprise de recyclage : en trois ans, la part des produits de prêt-à-porter, vêtements et chaussures, qui sont jetés parce qu’ils sont impossibles à recycler ou à réparer en raison de leur qualité d’origine est passée de 12 % à 30 % ! Ces produits issus de sites internet chinois, transportés par bateau, ne coûtent pas cher et peuvent être remplacés souvent ; ils peluchent et s’usent en très peu de temps.

Voilà le nouveau mode de consommation : acheter pas cher des produits que l’on change souvent et que l’on balance.

M. Guillaume Gontard. C’est vrai !

M. Olivier Rietmann. La réparabilité a du plomb dans l’aile, comprenait-on à la lecture de ce témoignage, car elle se heurte à de nouvelles habitudes de consommation.

Mme Audrey Linkenheld. Quel rapport avec l’amendement ?

M. Olivier Rietmann. Par conséquent, cette baisse de TVA n’aura strictement aucun effet, sinon sur les finances de l’État.

M. Michel Canévet. Je retire mon amendement !

M. le président. L’amendement n° I-1830 rectifié est retiré.

Je mets aux voix les amendements identiques nos I-1132 rectifié, I-1290 rectifié, I-1354 et I-1448.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° I-1268 rectifié bis, présenté par MM. Fialaire, Bilhac et Cabanel, Mme M. Carrère, MM. Daubet et Gold, Mme Guillotin, M. Guiol, Mmes Jouve et Pantel et M. Roux, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 278-0 bis du code général des impôts est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les travaux d’amélioration, de transformation, d’aménagement et d’entretien des monuments historiques. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Raphaël Daubet.

M. Raphaël Daubet. Cet amendement de mon collègue Bernard Fialaire vise à répondre à l’enjeu de la rénovation des monuments historiques.

Dans son rapport publié au mois de juin 2022, La Politique de lÉtat en faveur du patrimoine monumental, la Cour des comptes juge préoccupant l’état d’un quart des monuments historiques. C’est pourquoi il est proposé d’appliquer le taux de TVA réduit à 5,5 % aux travaux de rénovation des monuments historiques, sur le modèle de ce qui existe aujourd’hui pour tous les travaux de rénovation énergétique.

L’effet d’incitation que l’adoption de cette mesure est susceptible de provoquer conduirait à une augmentation des recettes de TVA, compensant ainsi la baisse du taux, laquelle n’aurait donc pas – ou n’aurait que peu – d’incidence sur les finances publiques.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Albéric de Montgolfier. Sagesse ? (Sourires.)

M. Jean-François Husson, rapporteur général de la commission des finances. La commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

En effet, il ne vous a pas échappé que le Gouvernement a récemment abondé de 300 millions d’euros supplémentaires les crédits dédiés au patrimoine, mesure plus efficace que celle que vous proposez, mon cher collègue.

Par ailleurs, la rénovation des bâtiments privés n’étant pas couverte par la directive TVA, pas plus, du reste, que la rénovation des biens publics n’étant pas à la disposition du public, le dispositif proposé est contraire à la réglementation européenne.

Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Laurent Saint-Martin, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° I-1268 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° I-1810 rectifié, présenté par MM. Jacquin et P. Joly, Mme Conway-Mouret, MM. Bourgi, Ros, Redon-Sarrazy, Chaillou, M. Weber, Tissot, Pla et Durain, Mme Bélim, MM. Uzenat, Kerrouche et Chantrel, Mme Espagnac, M. Mérillou et Mme Bonnefoy, est ainsi libellé :

Après l’article 10

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Le B du I de la section V du chapitre Ier du titre II de la première partie du livre premier du code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 278-0 bis est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« …. – Les services de transports publics collectifs de voyageurs, qu’ils soient ferroviaires, guidés, routiers ou fluviaux, à l’exclusion des services librement organisés » ;

2° Le b quater de l’article 279 est complété par les mots : « , à l’exclusion des transports de voyageurs qui relèvent du taux prévu à l’article 278-0 bis du présent code ».

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du I est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à Mme Frédérique Espagnac.