Mme la présidente. Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux ; nous les reprendrons à quatorze heures quarante.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à treize heures dix, est reprise à quatorze heures quarante, sous la présidence de M. Pierre Ouzoulias.)
PRÉSIDENCE DE M. Pierre Ouzoulias
vice-président
M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Prêts et avances à divers services de l’État ou organismes gérant des services publics », ainsi que de la mission « Remboursements et dégrèvements ».
Dans la suite de la discussion, la parole est à M. le ministre.
M. Jean-Baptiste Lemoyne. Un excellent ministre ! (Sourires.)
M. Marc Ferracci, ministre auprès du ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de l’industrie et de l’énergie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je remercie de leur analyse budgétaire approfondie des missions en discussion les rapporteurs spéciaux, la rapporteure pour avis et les orateurs qui se sont exprimés ce matin.
Dans le temps qui m’est imparti, je m’efforcerai d’apporter des réponses sur les principaux sujets qui ont été soulevés. Mon propos s’articulera autour des trois grands axes des politiques publiques qui structurent l’examen de ces missions : les engagements financiers de l’État, les participations financières de l’État et les remboursements et dégrèvements.
Le Gouvernement partage naturellement la préoccupation exprimée par M. Albéric de Montgolfier sur l’évolution des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État ».
Dans le cadre du projet de loi de finances pour 2025, cette mission devrait représenter 56 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 61,3 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), soit une augmentation de 520 millions d’euros en crédits de paiement par rapport à la loi de finances initiale pour 2024.
Cette mission devrait ainsi atteindre un niveau record, et ce principalement sous l’effet de l’alourdissement de la charge de la dette de l’État, qui devrait croître à 54,9 milliards d’euros en comptabilité budgétaire, contre 50,9 milliards d’euros en 2024.
Une telle augmentation matérialise l’impact de la hausse des taux d’intérêt auxquels nous empruntons, bien que cela soit progressif en raison de la durée de vie moyenne élevée de notre dette, qui est d’environ huit années et demie. Après des années de taux d’intérêt historiquement faibles, la normalisation des taux d’intérêt rend visible le coût de notre dette et doit nous conduire à des choix responsables tant dans la gestion des dépenses que dans la recherche de nouvelles économies.
J’appelle l’attention du Sénat sur un élément : le spread, c’est-à-dire l’écart entre les taux d’intérêt qui s’appliquent à la dette française et ceux de nos principaux pays partenaires, en particulier l’Allemagne, s’est accru ces dernières semaines et ces derniers mois. Il représente aujourd’hui 85 points de base. C’est la conséquence du volume global de notre dette, mais également de l’instabilité politique de notre pays. Cette instabilité, que les agences de notation mentionnent, tend à produire des effets sur les taux d’intérêt.
Plusieurs intervenants ont fait référence à l’isolement de la dette covid dans un programme budgétaire spécifique. Ce choix a avant tout des vertus pédagogiques. Le programme 369 vise à identifier et à retracer dans les comptes publics le montant de dette d’État résultant de la crise sanitaire, afin de pouvoir afficher une trajectoire de résorption de cette dette entre 2022 et 2042. Chaque année, une partie du surcroît de recettes liées à la croissance est affectée au remboursement de la dette covid de l’État. Nous ne figeons donc pas une trajectoire dans le marbre.
J’espère ainsi répondre aux observations des rapporteurs spéciaux sur l’inscription de 5,2 milliards d’euros au titre de la contribution au désendettement de l’État. Le programme 369 permet de matérialiser le coût complet de l’effort national, dans un esprit de transparence, de lisibilité et de responsabilité quant à la gestion de nos finances publiques. C’est donc avec constance et vigilance que nous poursuivrons la gestion de ce programme, au service de la solidité et de la résilience de notre économie.
J’en viens aux participations financières de l’État.
Alors que l’année 2024 a été marquée par de nombreuses crises, le portefeuille de l’État actionnaire a plutôt bien résisté. La valorisation du portefeuille coté a globalement progressé de 7 %, ce qui constitue une surperformance très nette par rapport au CAC 40, en baisse de 2,2 % sur la même période.
Au-delà de la performance financière, l’année 2024 restera une année marquante pour l’Agence des participations de l’État (APE) et, à travers elle, pour l’État actionnaire, à plusieurs titres.
L’APE, qui a célébré ses vingt ans d’existence en 2024, a tout à la fois continué d’accompagner ses entreprises, mené des opérations majeures et structuré sa doctrine d’investissement.
Ainsi, trois opérations majeures ont été lancées en 2024 pour renforcer notre contrôle sur des secteurs stratégiques.
D’abord, au mois de juin dernier, l’État a souscrit à l’augmentation de capital de la société John Cockerill Defense aux côtés de la Belgique, dans le cadre de l’acquisition du constructeur de véhicules militaires français Arquus, anciennement Renault Trucks Defense. Cette démarche vise à créer un champion industriel européen des véhicules blindés légers, ce qui est un levier absolument essentiel pour la défense de notre continent.
Ensuite, au mois de novembre dernier, l’État a acquis une action de préférence dans la société Bull SA, filiale française d’Atos regroupant l’essentiel des activités sensibles du groupe. Cela garantit ainsi un niveau de sécurité indispensable pour la souveraineté de l’État, quelle que soit l’issue du processus d’acquisition des activités sensibles d’Atos.
Enfin, le 31 décembre, l’État a acquis 80 % du capital d’Alcatel Submarine Networks (ASN), ce qui marque une avancée décisive pour notre souveraineté numérique. Leader mondial de la fabrication, de la pose et de la maintenance de câbles sous-marins, ASN dispose d’une usine à Calais et d’un savoir-faire unique. Cette entreprise, qui était jusqu’alors propriété du groupe finlandais Nokia, joue un rôle central dans notre maîtrise des réseaux numériques.
Ces trois opérations majeures n’épuisent pas l’intégralité des actions de l’État actionnaire au cours de l’année. L’APE continue ainsi d’accompagner activement les 85 entreprises de son portefeuille. En 2024, elle a apporté son soutien à des politiques publiques prioritaires, comme la souveraineté énergétique, à travers l’augmentation de capital d’Orano, la réindustrialisation, avec une dotation en fonds propres de 56 millions d’euros au grand port maritime de Dunkerque, ou encore la construction de logements intermédiaires, grâce à une augmentation de capital de 250 millions d’euros en faveur de la Société pour le logement intermédiaire.
Ainsi, dans le droit fil des observations du rapporteur spécial Claude Raynal, notre vision d’un État stratège existe bel et bien. Elle se concrétise en recourant à trois outils d’intervention en fonds propres que sont, outre l’APE, la Caisse des dépôts et consignations et Bpifrance, dont les doctrines sont complémentaires.
À ce titre, et en réponse à ce qu’exprimait notamment la rapporteure pour avis Martine Berthet, je suis heureux de vous informer de l’aboutissement de la réflexion engagée sur l’évolution de la doctrine de l’État actionnaire,…
Mme Nathalie Goulet. Ah !
M. Marc Ferracci, ministre. … avec la confirmation non seulement de son périmètre d’intervention, mais aussi des grands principes qui guident et structurent désormais son action. Ces derniers sont au nombre de trois : performance, résilience, responsabilité.
D’abord, la performance, à la fois financière et extrafinancière, vise à protéger les intérêts patrimoniaux de l’État actionnaire.
Ensuite, le souci de la résilience suppose pour l’État actionnaire de veiller à faire en sorte que les entreprises dans lesquelles il investit, souvent présentes dans des secteurs économiques stratégiques, soient capables de s’adapter continuellement aux évolutions et de résister aux chocs de leur environnement.
Enfin, il y a un devoir d’exemplarité en termes de responsabilité, notamment sociale et environnementale.
C’est bien dans ce cadre rénové que nous entendons inscrire notre action pour l’année 2025, en continuant de financer via le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », les opérations de nature patrimoniale décidées par l’État, à l’exclusion de toute opération de gestion courante. Il est ainsi indispensable de préserver ses ressources, en crédits et en recettes.
J’en viens aux crédits évaluatifs de la mission « Remboursements et dégrèvements », qui sont le reflet de la partie recettes du projet de loi de finances pour 2025.
Cette mission assure les droits des contribuables prévus par la loi fiscale, ce qui justifie le caractère évaluatif des crédits. Seule une révision des incitations fiscales ou des modalités de détermination et de levée des impôts permettrait d’en réduire les dépenses.
Environ les trois quarts de la dépense relative aux impôts d’État – c’est le programme 200 – correspondent à la mécanique de collecte de l’impôt. Cela varie en fonction de la conjoncture économique et des choix des contribuables.
Pour la TVA, les remboursements élevés résultent de la décision des entreprises de mobiliser leurs crédits accumulés.
Pour l’impôt sur les sociétés, le ralentissement des bénéfices entre 2022 et 2023 et leur forte dispersion induisent en 2024 des remboursements d’excédents d’acomptes plus importants que prévu lors de la loi de finances initiale pour 2024.
Le reste correspond à des incitations fiscales qui ont été votées et que nous devons honorer, ainsi qu’à des contentieux.
À ce titre, puisque plusieurs orateurs ont abordé le sujet, je rappelle combien le crédit d’impôt recherche constitue un atout majeur pour l’économie française.
M. Michel Canévet. C’est vrai !
M. Marc Ferracci, ministre. Les représentants des filières professionnelles, en particulier industrielles, et les entrepreneurs nous le disent : le CIR est un élément d’attractivité absolument indispensable à nos entreprises, notamment pour la recherche et développement.
Certes, cela ne fait pas obstacle à d’éventuels aménagements dans la cadre des textes budgétaires. Pour autant, je tiens à insister avec la plus grande force sur la volonté de l’État de préserver l’intégrité de ce dispositif, qui participe à l’attractivité de notre territoire pour la recherche et développement et pour les compétences les plus qualifiées.
Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie de votre attention et je me tiens à présent à votre disposition pour poursuivre la discussion. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que, pour ces missions, la conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures.
Nous devrions donc en terminer l’examen aux alentours de quinze heures quarante, afin de pouvoir passer à la suite de l’examen de la mission « Relations avec les collectivités territoriales ».
Douze amendements sont à examiner. Si la discussion n’était pas achevée à quinze heures quarante, conformément à l’organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents et en accord avec la commission des finances, la suite de l’examen de cette mission sera reportée à la fin des missions de la semaine.
engagements financiers de l’état
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
ÉTAT B
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Engagements financiers de l’État |
56 003 647 646 |
61 338 164 329 |
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
54 207 000 000 |
54 207 000 000 |
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
985 272 597 |
985 272 597 |
Épargne |
119 375 049 |
119 375 049 |
Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État (crédits évaluatifs) |
692 000 000 |
692 000 000 |
Dotation du Mécanisme européen de stabilité |
0 |
0 |
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement |
0 |
0 |
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
0 |
181 036 599 |
Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 |
0 |
5 153 480 084 |
M. le président. L’amendement n° II-35, présenté par M. de Montgolfier, au nom de la commission, est ainsi libellé :
I. – Supprimer le programme :
Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits de programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Épargne |
|
|
|
|
Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Dotation du Mécanisme européen de stabilité |
|
|
|
|
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
|
|
|
|
Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 |
|
|
|
5 153 480 084 |
TOTAL |
|
|
|
5 153 480 084 |
SOLDE |
|
- 5 153 480 084 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. La commission des finances, conformément à la position qu’elle a toujours défendue, considère que la création d’un programme dédié à la dette covid relève de l’artifice comptable.
En pratique, une telle opération n’a aucun effet, puisque c’est bien sur des crédits budgétaires que la dette sera remboursée.
M. le ministre, qui aimerait sans doute nous convaincre de retirer cet amendement, va-t-il nous expliquer que la dette liée au covid s’élève à 5,2 milliards d’euros ? Tout cela, c’est du pipeau péruvien ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.) Souvenez-vous : d’après M. Le Maire, l’augmentation de quelque 900 milliards d’euros de la dette française durant son passage à Bercy n’était absolument pas de son fait et tenait uniquement à la crise covid… Dès lors, si je comprends bien, le montant de la dette covid doit s’élever à beaucoup plus que 5,2 milliards d’euros ! (M. Roger Karoutchi rit.)
En réalité, un tel artifice comptable vise simplement à essayer de nous faire croire que la dette française est due à des causes extérieures et que personne n’en est responsable !
C’est la raison pour laquelle la commission propose la suppression du programme « Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 ». Par cohérence, elle défendra également dans quelques instants un amendement tendant à annuler les crédits de 5,2 milliards d’euros abondés sur le compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État » pour doter la Caisse de la dette publique.
Tant qu’à faire, pourquoi ne pas traiter à part toutes les dettes ? Il y aurait ainsi la dette imputable à Bruno Le Maire, la dette imputable au covid, la dette imputable à Pierre, Paul ou Jacques, etc. (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.) Tout cela relève de l’artifice comptable et n’a aucun intérêt !
Dans un souci de transparence et de clarté, il nous paraît souhaitable de supprimer ce programme totalement artificiel lié à une prétendue dette covid. (M. Roger Karoutchi acquiesce.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Marc Ferracci, ministre. Monsieur le rapporteur spécial, j’entends vos arguments. Néanmoins, s’il est un événement que l’on peut à bon droit qualifier d’exogène, c’est bien, me semble-t-il, la crise covid.
De ce point de vue, il me paraît légitime de créer un tel programme, dans un souci de transparence et de pédagogie à l’égard de nos concitoyens. Cela permet de rendre visible la dette supplémentaire liée au covid, qui pèse sur les finances publiques, et de matérialiser la volonté de la rembourser sans émettre de nouveaux titres de dette. Je pense que c’est extrêmement important.
Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement. La démarche de pédagogie qui a été engagée doit perdurer : il s’agit de montrer aux Français que l’amortissement progressif du surcroît de dette lié à la crise sanitaire continue. Par cohérence, il émettra également un avis défavorable sur l’amendement n° II-31 – vous l’avez évoqué, monsieur le rapporteur spécial –, qui sera examiné dans quelques instants.
M. le président. Je suis saisi de deux amendements identiques.
L’amendement n° II-699 est présenté par le Gouvernement.
L’amendement n° II-1680 est présenté par M. Canévet.
Ces deux amendements sont ainsi libellés :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Charge de la dette et trésorerie de l’État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Appels en garantie de l’État (crédits évaluatifs) |
|
|
|
|
Épargne |
|
6 209 762 |
|
6 209 762 |
Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l’État (crédits évaluatifs) |
|
|
||
Dotation du Mécanisme européen de stabilité |
|
|
|
|
Augmentation de capital de la Banque européenne d’investissement |
|
|
|
|
Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque |
|
|
|
9 417 330 |
Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 |
|
|
|
|
TOTAL |
|
6 209 762 |
|
15 627 092 |
SOLDE |
- 6 209 762 |
- 15 627 092 |
La parole est à M. le ministre, pour présenter l’amendement n° II-699.
M. Marc Ferracci, ministre. Mon amendement étant identique à l’amendement n° II-1680, je laisse à M. le sénateur Michel Canévet le soin d’en assurer la présentation commune.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Voilà qui ne manque pas d’élégance.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° II-1680.
M. Michel Canévet. Afin de contribuer à l’effort collectif pour le retour à une meilleure fortune des finances publiques, auquel j’ai fait référence pendant la discussion générale, il s’agit de réduire les crédits de fonctionnement des ministères.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Ce qui nous est proposé, c’est un rabot de 5 %. Si, sur la plupart des missions, c’est logique, en l’occurrence, il s’agirait de raboter de 5 %… une dépense constatée !
Dans ce cas, pourquoi ne pas envisager aussi de raboter de 5 % les charges de la dette ? J’imagine que tout le monde dans cet hémicycle serait d’accord ! Après tout, ce serait logique…
La mission dont nous discutons aujourd’hui est, par nature, une mission de la frustration. (Sourires.) Il s’agit de dresser des constats : le constat qu’il y a 3 000 milliards d’euros de dette et que les taux d’intérêt risquent d’augmenter, le constat qu’il faut procéder à des dégrèvements, etc. C’est une mission purement comptable.
Le dispositif envisagé dans ces amendements identiques relève de l’affichage. Dans la réalité, il n’est pas possible de faire des économies dans le cadre de cette mission. Plus précisément, le seul moyen d’en faire serait de prier pour que les marchés nous accordent encore leur confiance ; mais là, cela relève de l’incantation ou de la foi, selon les convictions de chacun ! (Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.)
Je me bornerai donc à émettre un avis de sagesse sur ces amendements identiques.
M. Michel Canévet. Merci, monsieur le rapporteur spécial !
M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos II-699 et II-1680.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Je m’abstiens !
(Après une épreuve à main levée déclarée douteuse par le bureau, le Sénat, par assis et levé, n’adopte pas les amendements.)
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits de la mission « Engagements financiers de l’État », figurant à l’état B.
Je n’ai été saisi d’aucune demande d’explication de vote avant l’expiration du délai limite.
Je vous rappelle que la commission des finances est favorable à l’adoption des crédits de cette mission.
Je mets aux voix ces crédits, modifiés.
(Les crédits sont adoptés.)
compte d’affectation spéciale : participations financières de l’état
M. le président. Nous allons procéder à l’examen des crédits du compte d’affectation spéciale « Participations financières de l’État », figurant à l’état D.
ÉTAT D
(En euros) |
||
Mission / Programme |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
Participations financières de l’État |
9 568 980 084 |
9 568 980 084 |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
4 415 500 000 |
4 415 500 000 |
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
5 153 480 084 |
5 153 480 084 |
M. le président. Je suis saisi de six amendements faisant l’objet d’une discussion commune.
L’amendement n° II-31, présenté par M. Raynal, au nom de la commission des finances, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
|
|
|
|
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
|
5 153 480 084 |
|
5 153 480 084 |
TOTAL |
|
5 153 480 084 |
|
5 153 480 084 |
SOLDE |
- 5 153 480 084 |
- 5 153 480 084 |
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Claude Raynal, rapporteur spécial. Il s’agit d’un amendement miroir de l’amendement n° II-35, adopté lors de l’examen de la mission « Remboursements et dégrèvements ». Il vise à tirer les conséquences de la suppression du programme 369 « Amortissement de la dette de l’État liée à la covid-19 ».
Je n’y reviens pas, d’autant que M. le ministre a indiqué par avance qu’il y était défavorable. Mes chers collègues, vous avez donc d’emblée les positions respectives de la commission et du Gouvernement.
M. Albéric de Montgolfier, rapporteur spécial. Nous restons dans notre logique !
M. le président. L’amendement n° II-1728, présenté par MM. Gay et Lahellec, Mme Margaté et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :
I. – Créer le programme :
Fonds d’amorçage en faveur de la souveraineté énergétique
II. – En conséquence, modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
||||
Programmes |
Autorisations d’engagement |
Crédits de paiement |
||
|
+ |
- |
+ |
- |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l’État |
|
|
|
|
Désendettement de l’État et d’établissements publics de l’État |
|
3 000 000 000 |
|
3 000 000 000 |
Fonds d’amorçage en faveur de la souveraineté énergétique |
3 000 000 000 |
|
3 000 000 000 |
|
TOTAL |
3 000 000 000 |
3 000 000 000 |
3 000 000 000 |
3 000 000 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
La parole est à Mme Marianne Margaté.
Mme Marianne Margaté. Cet amendement vise à enclencher le processus de nationalisation des groupes TotalEnergies et Engie via une augmentation de la participation de l’État dans ces entreprises. En effet, nous ne pouvons concevoir un grand service public de l’énergie unifié sans ces groupes.
Si, historiquement, à la différence de l’électricité, du gaz et même du charbon, le secteur pétrolier n’a jamais été nationalisé dans sa totalité, il n’en demeure pas moins que, jusqu’en 1997, l’État détenait 35 % du capital et 40 % des droits de vote et des pouvoirs spéciaux, ce qui lui permettait à la fois de s’opposer à des décisions entrepreneuriales contraires à sa politique étrangère ou de défense et de fixer les tarifs du carburant.
Les liens entre l’entreprise qui s’appelait alors Total et l’État ont été remis en cause dans les années 2000, la Commission européenne considérant l’action spécifique de l’État contraire aux droits de l’Union européenne et à la liberté de circulation des capitaux.
Pourtant, la crise que nous traversons actuellement, la défaillance du marché, qui n’est plus à démontrer, et l’impératif d’un changement de modèle compatible avec l’absolue nécessité de sortir des énergies fossiles nous imposent de redonner à l’État la maîtrise du secteur énergétique.
En effet, au vu du poids de ce secteur et de ses entreprises dans notre économie, seule une gestion sociale permettrait de protéger le pouvoir d’achat, d’assurer la sécurité énergétique et de lutter contre le réchauffement climatique.
Le coût de la nationalisation de ces deux groupes est évalué entre 193 milliards et 200 milliards d’euros.
C’est pourquoi nous proposons, dans un premier temps, à l’instar de la commission d’enquête sénatoriale ad hoc, une montée au capital de ces entreprises afin d’assurer, dans un second temps, la création d’un véritable service public de l’énergie, qui prendrait le nom de groupe Énergie de France, en nationalisant TotalEnergies et Engie aux côtés d’EDF.