M. Henri Cabanel. Cet amendement vise à transcrire l’article 3 de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur au sein du titre IV, consacré aux mesures permettant de sécuriser, de simplifier et de faciliter l’exercice des activités agricoles, du présent projet de loi.

Je le rappelle, il s’agit de procéder à des simplifications du régime français des ICPE, bénéficiant aux bâtiments d’élevage. Cette mesure est censée renforcer notre compétitivité agricole, en permettant aux éleveurs français de bénéficier d’installations plus grandes, afin de répondre davantage à la consommation nationale de viande.

Pour ce faire, il est proposé de renforcer les obligations de motivation et de transparence des avis de l’autorité environnementale, souvent utilisés par des tiers à l’occasion de recours contre des projets de construction ou d’extension d’élevage.

Nous souhaitons également relever les seuils à partir desquels s’applique l’obligation d’enquête publique, avec un alignement, pour les bâtiments d’élevage, sur ceux de la directive relative à l’évaluation des incidences de projets sur l’environnement (EIE), et non plus sur ceux, inférieurs, de la directive sur les émissions industrielles (IED). Cela permettrait de faire basculer des exploitations du régime de l’autorisation à celui, moins contraignant, de l’enregistrement.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 121 rectifié quinquies est présenté par M. Canévet, Mmes N. Goulet, Havet, Billon et Doineau et MM. Maurey, S. Demilly, Folliot, Pillefer, Longeot et Bleunven.

L’amendement n° 221 rectifié ter est présenté par MM. Duffourg, Henno et Levi, Mme Romagny, M. Chasseing, Mme Paoli-Gagin et M. Hingray.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au second alinéa du I de l’article L. 512-7 du code de l’environnement, les mots : « soumises ni à la directive 2010/75/ UE du Parlement européen et du Conseil du 24 novembre 2010 relative aux émissions industrielles au titre de son annexe I, ni » sont remplacés par les mots : « pas soumises ».

La parole est à M. Michel Canévet, pour présenter l’amendement n° 121 rectifié quinquies.

M. Michel Canévet. Cet amendement vise à éviter une surtransposition.

Vous le savez, le Sénat n’est pas favorable aux surtranspositions : nos acteurs économiques doivent pouvoir lutter à armes égales face à ceux des autres pays du marché unique. En l’occurrence, nous voulons éviter la surtransposition s’agissant des ICPE, soumises à enregistrement.

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour présenter l’amendement n° 221 rectifié ter.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Cet amendement est défendu.

M. le président. Les deux amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 264 rectifié ter est présenté par M. Bleunven, Mmes Billon, Gacquerre et Jacquemet et MM. Levi, de Nicolaÿ et Kern.

L’amendement n° 583 rectifié bis est présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, J.M. Arnaud et Brault, Mme Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger, Fargeot et Chasseing, Mme Romagny et M. Pillefer.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au second alinéa du I de l’article L 512-7 du code de l’environnement, après la première occurrence des mots : « annexe I », sont insérés les mots : « à l’exception des activités d’élevage ».

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 264 rectifié ter.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 583 rectifié bis.

M. le président. Les trois amendements suivants sont identiques.

L’amendement n° 597 rectifié ter est présenté par M. Bleunven, Mmes Billon, Gacquerre et Jacquemet et MM. Levi, de Nicolaÿ et Kern.

L’amendement n° 624 rectifié ter est présenté par Mmes Loisier et Sollogoub, M. Canévet, Mme Lassarade, MM. Bacci, J.M. Arnaud et Brault, Mme Paoli-Gagin, M. Chauvet, Mme Vermeillet, MM. Favreau et Henno, Mme Berthet, MM. Klinger, Fargeot, Chevalier et Chasseing, Mme Romagny et MM. Pillefer et Daubet.

L’amendement n° 703 rectifié bis est présenté par MM. Gremillet et Rietmann, Mme Belrhiti, MM. Panunzi, Khalifé, Sol, Brisson, Burgoa et de Legge, Mme Malet, M. H. Leroy, Mmes Micouleau, Demas et Ventalon, MM. Chatillon, Belin, Genet et Somon, Mmes Dumont, Gruny, Drexler et Josende, M. Sido, Mme Bonfanti-Dossat, M. Bouchet, Mme Imbert, MM. Reynaud et Cuypers, Mme Richer et MM. Lefèvre, D. Laurent et Milon.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Après l’article 15

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le III de l’article L. 181-10-1 du code de l’environnement est ainsi modifié :

1° Le 1° est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Cette réunion publique d’ouverture est remplacée par une permanence du commissaire enquêteur, incluant au moins une journée dans la mairie de chaque commune du lieu d’implantation du projet, pour les dossiers dont les pétitionnaires emploient moins de dix équivalents temps-plein. Le calcul des effectifs se fait conformément à l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale ; »

2° Le 2° est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par exception, pour les pétitionnaires employant moins de dix équivalents temps-plein calculés conformément au même article L. 130-1, le public peut faire parvenir ses commentaires pendant le dernier mois de la phase de consultation ; »

3° Le 4° est complété par deux phrases ainsi rédigées : « Ces réponses, à l’exception de la réponse à l’avis de l’autorité environnementale, sont facultatives. Les réponses aux observations et aux propositions du public peuvent être transmises et publiées en une fois, jusqu’à la fin de la consultation du public ; »

4° Après la première phrase du 5°, sont insérées deux phrases ainsi rédigées : « Cette réunion publique de clôture est remplacée par une permanence du commissaire enquêteur, incluant au moins une journée dans la mairie de chaque commune du lieu d’implantation du projet, pour les dossiers dont les pétitionnaires emploient moins de dix équivalents temps-plein. Le calcul des effectifs se fait conformément à l’article L. 130-1 du code de la sécurité sociale. »

La parole est à M. Yves Bleunven, pour présenter l’amendement n° 597 rectifié ter.

M. Yves Bleunven. Cet amendement concerne non plus le relèvement des seuils, mais les modalités d’instruction.

Il vise à adapter ces nouvelles modalités de l’instruction des dossiers d’autorisation pour les ICPE et la phase de consultation du public issue de la loi du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte aux entreprises de petite taille, en particulier d’élevage.

En effet, la parallélisation des procédures prévue par la loi que je viens de mentionner a allongé la durée de consultation du public d’un mois à trois mois, et introduit deux réunions publiques aux frais et en présence des porteurs de projet. Or ces nouvelles modalités ne sont pas du tout adaptées à des installations dont les porteurs de projet, en entreprise familiale, ne disposent pas des moyens financiers et humains dédiés et sont très exposés du fait de la proximité entre leur lieu de vie et leur lieu de travail.

Les deux réunions publiques ajoutées par la loi du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte représentent un frein supplémentaire pour le développement de nouveaux projets. Cela va à l’encontre des objectifs de renouvellement des générations en agriculture et de simplification qui inspirent le présent projet de loi, ainsi que de celui de relance économique dans les territoires.

Par cet amendement, nous proposons de remplacer les deux réunions par des permanences du commissaire enquêteur en mairie et de réduire à un mois la période durant laquelle le public peut faire parvenir ses commentaires, comme c’était le cas avant l’adoption de la loi du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte. Enfin, nous souhaitons sécuriser juridiquement le cadre des réponses aux observations du public.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour présenter l’amendement n° 624 rectifié ter.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour présenter l’amendement n° 703 rectifié bis.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Notre collègue Henri Cabanel, auteur de l’amendement n° 77 rectifié, souhaite reprendre les dispositions que nous avons adoptées lors de l’examen de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur ; j’ai eu l’occasion de les rappeler en réponse à la prise de parole du sénateur Canévet sur l’article 15. Je note d’ailleurs que les amendements identiques nos 121 rectifié quinquies et 221 rectifié ter ont un objet assez proche.

Ces dispositions sont : la possibilité de remplacer la réunion publique obligatoire par une permanence de recueil des doléances en mairie ; la possibilité de limiter à moins de trois mois la durée de l’enquête publique ; le principe de rendre facultative la réponse au fil de l’eau pour toutes les questions susceptibles de figurer dans l’enquête publique, seule la réponse à l’autorité environnementale en fin de procédure demeurant obligatoire ; le principe d’attendre l’entrée en vigueur de la directive IED, prévue au 1er septembre 2026, pour relever les seuils français.

À ce propos, je n’ai de cesse d’expliquer, y compris aux filières – je me doute bien que cet amendement a dû être inspiré par ces dernières, dont je comprends d’ailleurs la frustration –, que si nous avions pu faire mieux, nous l’aurions fait. Mais il n’est pas possible d’avancer la date d’entrée en vigueur du dispositif avant le 1er septembre 2026.

Regardons objectivement les choses. Il me semble préférable de laisser ces dispositions dans la proposition de loi et de ne pas les introduire dans le présent projet de loi. J’invite donc notre collègue Henri Cabanel à retirer son amendement, car je n’aimerais pas être contraint d’émettre un avis défavorable.

Laissons la proposition de loi suivre sa trajectoire parlementaire, de son examen par l’Assemblée nationale à son adoption définitive. D’ailleurs, d’ici à l’entrée en vigueur, voire à la parution des décrets d’application, il va s’écouler un certain temps et nous ne serons sans doute plus très loin du 1er septembre 2026. En d’autres termes, le fait d’attendre cette date ne retarde donc pas tant que cela la mise en œuvre des dispositions en question.

La commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 121 rectifié quinquies et 221 rectifié ter, car il n’est pas possible d’avancer la date de relèvement des seuils.

Les amendements identiques nos 264 rectifié ter et 583 rectifié bis ayant sensiblement le même objet, bien que limité à l’élevage, l’avis est également défavorable.

Enfin, la commission émet un avis défavorable sur les amendements identiques nos 597 rectifié ter, 624 rectifié ter et 703 rectifié bis. Il est en effet proposé de prendre en compte les spécificités d’une entreprise ou d’une exploitation de moins de dix salariés pour le relèvement des seuils. Cela n’a pas vraiment de sens : les seuils ne sont pas tributaires du nombre de salariés.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Annie Genevard, ministre. L’amendement n° 77 rectifié vise à introduire dans le présent projet de loi les dispositions de l’article 3 de la proposition de loi des sénateurs Duplomb et Menonville. Celle-ci a prévu un certain nombre de simplifications en faveur des petites structures qui n’ont pas les moyens d’appliquer les procédures prévues par la loi du 23 octobre 2023 relative à l’industrie verte.

Une fois que cette proposition de loi sera, comme nous le souhaitons, définitivement adoptée, la consultation du public sera simplifiée, et il sera possible pour les élevages de bénéficier d’un régime d’enregistrement ICPE dans le cadre de la révision de la directive IED, celle-ci étant applicable à la mi-2026.

Je peux comprendre que vous souhaitiez aller plus vite, mais il me paraît nécessaire que la proposition de loi suive son chemin dans le cadre de la navette parlementaire. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

Je suis également défavorable aux amendements identiques nos 121 rectifié quinquies et 221 rectifié ter, ainsi qu’aux amendements identiques nos 264 rectifié ter et 583 rectifié bis, qui visent à prévoir un régime d’enregistrement, au lieu du régime actuel d’autorisation, pour les élevages soumis à la directive IED. Tant que la révision de la directive IED ne sera pas applicable avec la mise en œuvre des futures règles d’exploitation uniforme pour les élevages de 2026, une telle proposition est incompatible avec le cadre européen et créerait de l’insécurité juridique pour les exploitations.

Enfin, les auteurs des amendements identiques nos 597 rectifié ter, 624 rectifié ter et 703 rectifié bis proposent d’adapter les modalités de la consultation du public issues de la loi relative à l’industrie verte, en particulier pour les entreprises de petite taille.

Si je vous rejoins, mesdames, messieurs les sénateurs, sur le besoin de simplifier les procédures pour les petites exploitations, je pense qu’il est préférable d’en rester à la rédaction qui a été retenue lors de l’examen de la proposition de loi de MM. Duplomb et Menonville. Par ailleurs, il ne me paraît pas adapté de définir des modalités spécifiques en fonction de la taille des effectifs.

Mais si je suis défavorable à ces amendements, j’ai reçu l’engagement du ministère de l’environnement, qui – dois-je le rappeler ? – est compétent sur les questions de consultation du public, de travailler sur l’élaboration d’un guide de mise en œuvre des simplifications proposées. Ce document sera destiné aux commissaires enquêteurs et aux services de l’État dans les territoires, afin que l’on puisse s’assurer de l’effectivité de ces futures simplifications. Je ne saurais trop, d’ailleurs, engager les parlementaires et les professionnels à faire des propositions pour l’élaboration de ce livret.

M. le président. La parole est à M. Henri Cabanel, pour explication de vote.

M. Henri Cabanel. J’ai bien entendu les arguments de la commission et du Gouvernement, mais comme l’on dit chez moi : « Un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. » (M. Michel Canévet sourit.)

La proposition de loi a été votée au Sénat ? Très bien. Elle est désormais dans la navette parlementaire ? Très bien. Mais sommes-nous certains qu’elle sera bien votée par les députés ?

M. Jean-Claude Tissot. Non ! Ils ne la voteront pas !

M. Henri Cabanel. Nous ne pouvons évidemment pas en être sûrs. D’ailleurs, nous ne savons même pas à quelle date elle sera inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.

Je pense donc qu’il serait plus prudent d’introduire les dispositions en question dans le présent projet de loi. Il s’agit bien de simplifier et d’éviter la surtransposition, une pratique dont – mon collègue Canévet l’a rappelé – nous ne voulons plus au Sénat.

Monsieur le rapporteur, je vais raisonnablement vous écouter. Après tout, c’est vous qui prenez le risque ! Pour ma part, je ne suis pas certain que nous obtiendrons satisfaction. Mais j’accepte de retirer mon amendement.

M. le président. L’amendement n° 77 rectifié est retiré.

La parole est à M. Yves Bleunven, pour explication de vote.

M. Yves Bleunven. Je suis sur la même longueur d’onde que mon collègue Cabanel.

Je vous avoue mon incompréhension. Nous sommes en train d’examiner un projet de loi dont l’intitulé contient les termes : « souveraineté alimentaire ». Observons les chiffres. Chez moi, en Bretagne, selon les statistiques Agreste, dans la filière avicole comme dans la filière porcine, la production est en chute libre année après année. Pendant ce temps, on discute, on discute… Mais on ne trouve pas de solution.

On me parle de 2026, et Mme la ministre nous explique qu’il n’est pas possible de traiter les ICPE de la même manière.

Ce qui m’intéresserait, madame la ministre, ce serait que vous nous expliquiez comment apporter une réponse cohérente à nos producteurs, notamment dans les filières animales en Bretagne ! Honnêtement, si vous restez figée sur votre position actuelle, je ne sais pas bien ce que je vais pouvoir leur dire…

Dans l’immédiat, je maintiens mon amendement.

M. le président. La parole est à Mme Anne-Catherine Loisier, pour explication de vote.

Mme Anne-Catherine Loisier. Selon M. le rapporteur et Mme la ministre, cela n’aurait aucun intérêt de prendre en compte la taille de l’exploitation. Je pense exactement le contraire.

La grande majorité des élevages dont nous parlons sont de petits élevages, avec – vous le savez mieux que moi – des gens qui sont très occupés au quotidien et qui n’ont absolument pas le temps de se plonger dans des dossiers aussi complexes.

Par conséquent, si vous voulons vraiment préserver les exploitations de proximité dans nos territoires, il est important, me semble-t-il, d’avoir un dispositif ad hoc. Je maintiens donc mon amendement n° 624 rectifié ter.

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour explication de vote.

M. Daniel Salmon. Permettez-moi de noter deux contradictions.

Premièrement, de nombreux amendements visent à augmenter les seuils pour faciliter l’agrandissement. Or vous défendez dans le même temps l’idée qu’il faut favoriser le renouvellement des générations. Mais agrandir, c’est mécaniquement réduire le nombre d’agriculteurs !

Moi aussi, j’ai regardé les statistiques Agreste. La tendance actuelle est à l’augmentation du nombre de vaches : en trois ans, la proportion d’élevages comptant plus de 100 vaches est passée de 10 % à 13 %. Et, comme M. le rapporteur le soulignait, cette trajectoire de croissance des élevages est liée à des questions de revenus : il faut plus d’animaux, parce que chaque animal rapporte moins ! Le problème est donc bien le prix payé à l’agriculteur. Mais vous ne voulez pas en entendre parler…

Deuxièmement, alors que vous n’avez de cesse d’évoquer « l’acceptabilité », nombre d’amendements tendent à réduire les consultations du public. En d’autres termes, vous voulez ignorer le public, et vous espérez qu’il acceptera tout ensuite. Pour ma part, je pense qu’en démocratie, il faut faire le pari du dialogue et de la pédagogie, sous peine d’être ensuite confronté à de nombreux obstacles.

M. le président. La parole est à M. Daniel Gremillet, pour explication de vote.

M. Daniel Gremillet. Je partage l’incompréhension de mon collègue Bleunven. Nous avons adopté une proposition de loi qui porte le nom de nos deux rapporteurs. Je ne pensais pas qu’il serait gênant d’introduire des dispositions votées par le Sénat dans un texte sur la souveraineté alimentaire… Permettez-moi de faire deux remarques.

Première remarque, comme l’a d’ailleurs souligné notre collègue Henri Cabanel, nous ignorons quelle sera la destinée parlementaire de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur. Mais je ne vois pas en quoi nous retirerions de l’intérêt à cette dernière en reprenant certaines de ses dispositions dans le présent projet de loi.

Ma seconde remarque concerne mon amendement. Je suis un petit peu embêté. Encore une fois, qu’est-ce que l’élevage ? J’entends parler de grosses fermes, mais il faut voir de quoi il retourne : il s’agit de petits agriculteurs qui se sont rassemblés pour travailler ensemble. Il n’y aurait plus d’éleveurs si ceux-ci ne pouvaient se remplacer mutuellement ou veiller sur l’exploitation de leur voisin lorsque cela est nécessaire. (M. Michel Canévet opine.)

L’élevage nécessite des soins 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Il faut bien en avoir conscience, sinon on ne comprend pas l’hécatombe que subissent les productions de volailles et de porcs dans le Grand Ouest. Cela va très vite ! L’évolution est aussi très rapide dans la filière bovine, dans les élevages tant allaitants que laitiers.

Nous voulions simplement sortir l’agriculture du cadre de la loi relative à l’industrie verte et faire en sorte de reconnaître sa spécificité.

M. Michel Canévet. Je retire l’amendement n° 121 rectifié quinquies.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Je fais de même pour l’amendement n° 221 rectifié ter.

M. le président. Les amendements identiques nos 121 rectifié quinquies et 221 rectifié ter sont retirés.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je voudrais intervenir de nouveau sur ces trois catégories d’amendements.

Je tiens d’abord à remercier Henri Cabanel d’avoir retiré son amendement.

En ce qui concerne les amendements nos 264 rectifié ter et 583 rectifié bis, j’entends bien les arguments de Daniel Gremillet ; un tiens vaut mieux que deux tu l’auras, certes. Mais, en réalité, les dispositions de la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur constituent un ensemble. Ne commençons pas à les dissocier !

Son article 1er abroge la séparation de la vente et du conseil en matière de produits phytopharmaceutiques. Certains pourraient se dire que ce problème sera réglé par l’adoption de la proposition de loi relative à l’exercice de la démocratie agricole, déposée par la députée Nicole Le Peih.

On pourrait aussi considérer qu’il suffit d’adopter l’amendement de M. Cabanel pour mettre en œuvre son article 3.

Finalement, on pourrait être tenté de ne pas reprendre les mesures les plus irritantes de la proposition de loi. Pourquoi, en effet, prendre ce risque si on peut l’éviter ? Soyons clairs, c’est bien ce que pensent certains…

Monsieur Bleunven, l’amendement que vous proposez ne fonctionne pas. Je veux bien émettre un avis favorable, nous pouvons le voter, mais il n’aura aucune portée. Nous pouvons soit proposer aux éleveurs une trajectoire qui permet de régler à terme le problème – c’est ce que je souhaite –, soit leur faire croire que nous allons leur apporter une solution très vite, alors que l’on sait très bien que le mécanisme proposé ne marchera pas – ce n’est pas ma façon de procéder.

Je préfère prendre la responsabilité de leur dire que je comprends très bien que ce texte suscite des frustrations, mais que la trajectoire que nous leur proposons aboutira à une vraie solution, efficace d’un point de vue juridique. L’enjeu est uniquement de trouver un mécanisme opérationnel.

Cela ne signifie pas que je n’entends pas le désarroi des éleveurs ou que je n’ai pas conscience de leurs difficultés. Les amendements nos 264 rectifié ter et 583 rectifié bis reprennent d’ailleurs la rédaction que nous avions initialement retenue, avec Franck Menonville, dans notre proposition de loi. Toutefois, à l’issue de nos travaux préparatoires en commission, nous avons dû la modifier, car nous avons compris que le système que nous souhaitions instaurer ne tenait pas sur le plan juridique. C’est aussi simple que cela ! Quoi qu’en disent certains, c’est la réalité.

Enfin, en ce qui concerne la troisième série d’amendements, c’est-à-dire les amendements identiques nos 597 rectifié ter, 624 rectifié ter, et 703 rectifié bis, qui visent à adapter les nouvelles modalités de l’instruction des dossiers d’autorisation des ICPE et la phase de consultation du public aux entreprises de moins de dix salariés, j’indique que notre dispositif est meilleur. (M. Daniel Gremillet le nie.) En effet, nous voulons faire exactement la même chose, mais en en faisant bénéficier toutes les entreprises, et non pas seulement celles qui ont moins de dix salariés.

Le secteur de l’élevage ne se résume pas à une opposition entre les entreprises qui ont plus de dix salariés et celles qui en ont moins. Les activités sont très différentes. Dans l’élevage bovin, les exploitations de plus de dix salariés sont très rares. Ces amendements régleront donc, s’ils sont adoptés, les problèmes de la filière bovine. Dans l’élevage porcin ou de volailles, en revanche, il n’est pas rare que des entreprises aient plus de dix salariés. Il ne faudrait pas les exclure. (Mme Anne-Catherine Loisier opine.)

Là encore, je peux comprendre les frustrations, mais au lieu de chercher, comme nous sommes en train de le faire, à modifier le régime en vigueur par ces amendements, il serait plus simple de demander clairement à Mme la ministre quand la proposition de loi visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur sera inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.

Il serait logique, en effet, que le texte que nous avons adopté à une très large majorité au Sénat soit examiné rapidement par l’Assemblée nationale, afin que celle-ci puisse, je l’espère, l’adopter, et que ce que nous avons voté acquière force de loi. Tel est bien l’objectif. Ne lâchons par la proie pour l’ombre !

M. le président. La parole est à M. Yves Bleunven, pour explication de vote.

M. Yves Bleunven. Je ne comprends pas du tout l’argument juridique. Nous allons bientôt examiner des dispositions sur le petit cycle de l’eau qui semblent quelque peu tomber du ciel, dans la mesure où elles sont raccrochées à la souveraineté alimentaire. Or, monsieur le rapporteur, vous nous expliquez que la défense de nos élevages et de nos filières, qui concerne en plein le sujet de la souveraineté alimentaire, soulève un problème juridique…

La ministre ne nous a pas répondu non plus, tout à l’heure, sur l’application du régime des ICPE. Comment celui-ci évoluera-t-il ? On ne peut pas parler autant de souveraineté alimentaire et refuser de trouver des solutions ! On ne peut pas laisser nos filières agricoles d’élevage dans une situation aussi aberrante par rapport à celle qui prévaut dans les autres pays européens.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Laurent Duplomb, rapporteur. Je n’entrerai pas dans le jeu des questions-réponses.

La réalité est toute simple : actuellement, nous ne pouvons pas déroger aux règles européennes. Ce que vous souhaitez, c’est que cette question soit traitée au niveau du ministère, mais ce n’est pas possible parce que cela relève du niveau local. Le droit européen, j’y insiste, ne le permet pas.

En revanche, les règles européennes qui seront applicables à partir du 1er septembre 2026 permettront d’instaurer des dérogations en ce sens. Le fait que la ministre accepte cette rédaction constitue un progrès.

Comme je l’ai déjà dit hier, il faut rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu ! Il faut donc rendre justice à la ministre : elle a remporté un arbitrage sur ce sujet lors d’une réunion interministérielle, qui ouvre la voie à l’instauration, à partir du 1er septembre 2026, de dérogations pour relever le seuil au niveau européen.

Je ne suis pas juriste et je ne peux donc pas vous donner tous les éléments dans l’immédiat. En revanche, à l’issue de cette séance, mes équipes pourront vous communiquer des données plus précises pour vous permettre de répondre aux interrogations qui remontent du terrain dans votre territoire.

En tout cas, j’y insiste, ces amendements ne constituent pas la bonne manière d’aborder le sujet.