M. Alain Milon. C'est le cas pour toutes les études supérieures !

Mme Mireille Jouve. Comment pourrait-on négliger le fait que les études médicales sont subventionnées par l'argent public et que la rémunération des médecins libéraux par l'assurance maladie impose un équilibre entre droits et devoirs ? Certains semblent l'oublier avec une constance qui agace bien des observateurs et commence à troubler nos concitoyens.

Ces derniers n'oublient pas non plus que l'actuelle pénurie de médecins résulte du numerus clausus à l'entrée des études médicales, lequel a été appliqué pendant des années avec le soutien conjoint des autorités sanitaires, qui en attendaient une baisse des dépenses, et des organisations de médecins, qui défendaient ainsi leur corporation.

Il est grand temps de mettre un terme à ce jeu de dupes pour avancer, sereinement, sur le chemin de réformes indispensables.

L'accès aux soins fait partie de ce terrain où le consensus est possible, afin de répondre aux légitimes attentes de nos concitoyens. Ce texte y participe et c'est la raison pour laquelle je le voterai, à l'instar de certains de mes collègues du groupe du RDSE, en espérant que la main de l'État ne tremble pas et fasse preuve de rapidité et de détermination dans sa mise en œuvre. (Applaudissements au banc des commissions.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Élisabeth Doineau.

Mme Élisabeth Doineau. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, disons-le d'emblée, nous sommes toutes et tous, sans exception, préoccupés par la question majeure de l'accès aux soins dans nos territoires.

C'est pourquoi je commencerai par reconnaître l'intention de l'auteur de cette proposition de loi, Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales du Sénat, qui souhaite apporter au travers de ce texte des réponses à une inégalité inacceptable pour une partie de nos concitoyens. Je tiens également à remercier Mme la rapporteure, Corinne Imbert, pour ses auditions et son travail d'expertise.

Si je salue une grande partie des avancées proposées, je n'ai pas souhaité cosigner ce texte, et ce pour deux raisons.

La première tient à la confusion qui règne en ce domaine. Monsieur le ministre, faute – sans doute – de la présentation d'un projet de loi structurant lors des dix dernières années, les propositions de loi se succèdent sans véritable stratégie qui concernerait l'ensemble de notre système de santé.

Depuis quelques semaines, entre propositions de loi et plan du Gouvernement, nous sommes perdus, incapables d'identifier ce qui pourrait être gardé des propositions des uns ou des autres pour élaborer un projet cohérent.

La deuxième raison est la pression. Oui, j'ose utiliser ce terme ! En effet, nous le voyons bien, les mesures de régulation de l'installation se feraient sans l'accord des médecins et s'adresseraient en particulier aux futurs médecins, qui sont les principaux concernés. J'ai beaucoup de mal à accepter que nous fassions supporter par la nouvelle génération les erreurs politiques du passé et le problème complexe de la démographie, défaillante et mondiale, des soignants.

Je veux rappeler ici combien les études de médecine sont éprouvantes ; certains n'y résistent pas ! Selon moi, exiger des jeunes médecins qu'ils soient performants pendant leurs études, puis qu'ils s'engagent jusqu'à l'épuisement pendant leur internat, et ensuite exiger d'eux d'autres efforts encore après ces dix années, est rédhibitoire !

Toutefois, le trouble que je ressens ne se limite pas à cette confusion et à cette pression, certes bien présentes. Comment allons-nous sortir par le haut de cette situation ?

Dois-je rappeler que les interventions du ministre de la santé, Yannick Neuder, lorsque nous l'avons auditionné en commission sur ce sujet, ont été appréciées par bon nombre d'entre nous ? Arrivée de médecins juniors, meilleure évaluation des Padhue, réintégration des jeunes Français partis faire leurs études à l'étranger : toutes ces mesures annoncées, renforcées par une ferme volonté – que j'ai ressentie personnellement –, étaient suffisamment prometteuses.

Désormais, comment allons-nous concilier les mesures figurant dans cette proposition de loi et celles du plan gouvernemental ? Avec quelle majorité ? Avec quelle ambition globale ? Il serait salutaire de construire un texte suffisamment solide et consensuel afin de ne plus laisser place aux errements législatifs et aux surenchères démagogiques.

Venons-en à ce qui me semble aller dans le bon sens.

L'article 1er, en particulier, conforte la compétence des conseils départementaux en matière de promotion de l'accès aux soins et d'évaluation des besoins de santé, et crée un Office national d'évaluation de la démographie médicale. Dès 2018, avec mon collègue député Thomas Mesnier et le docteur Sophie Augros, nous avons proposé ce chef de filât lors de la remise de notre rapport. Il nous semblait, à l'époque déjà, que c'était le meilleur périmètre pour appréhender la répartition de l'offre de soins.

Pour ce qui concerne l'élaboration d'un zonage efficace à l'échelle infra-territoriale, la mise en place d'un observatoire repensé, avec une feuille de route claire permettant d'agréger les connaissances et l'expertise des parties prenantes, est primordiale.

Je salue également les articles 13 et 14 qui visent à encourager l'accès à la pratique avancée, et les articles 15, 16, et 17 qui permettront de gagner du temps médical.

Enfin, chacun doit avoir conscience que l'appétence pour la médecine générale a diminué ces dernières années, alors même qu'elle est devenue une spécialité. Veillons à ne pas aggraver cette tendance ! (Applaudissements sur des travées du groupe UC. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Émilienne Poumirol. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Émilienne Poumirol. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous le savons tous, l'accès aux soins dans notre pays est non seulement de plus en plus difficile, mais aussi inégalitaire, et la situation ne cesse d'empirer.

Pour y faire face, les textes législatifs comme réglementaires se succèdent, sans vraiment répondre à la détresse grandissante de nos concitoyens. La proposition de loi qui nous est soumise aujourd'hui ne fera pas exception.

Si nous retenons quelques bonnes idées – la rémunération des infirmiers en pratique avancée (IPA) pendant leur formation, la suppression de certains certificats médicaux pour enfant malade, la facilitation de l'exercice dans un cabinet secondaire –, le texte nous paraît, dans son ensemble, largement insuffisant. Il présente une série de mesures sans cohérence globale, et, surtout, sans réelle effectivité. Faute de projet de loi, aucune stratégie nationale n'existe dans ce domaine.

Le chapitre Ier vise à réformer la mesure de la démographie des professions de santé. En complément du nombre de médecins, il nous faudrait surtout prévoir un pilotage fondé sur l'activité et la taille de la patientèle. Il n'est pas possible que deux médecins dont les files actives respectives vont du simple au triple aient les mêmes revenus, simplement parce que l'un d'eux revoit ses patients plus souvent que nécessaire. Je défendrai donc, avec mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, un amendement tendant à prendre en compte le volume horaire par habitant pour mieux répondre à cet enjeu.

L'exemple le plus flagrant de la faible portée de ce texte est sans doute l'article 11, qui vise à favoriser la coopération entre professionnels, mais qui reste particulièrement timide. Il confie aux centres de santé, aux équipes de soins primaires et aux maisons de santé la mission de « favoriser » la coopération entre professionnels de santé. Cette mesure n'a aucune forme d'effectivité.

La coopération entre professionnels au sein des structures d'exercice coordonné était déjà prévue dans la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, dite loi HPST, et dans la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé, dite loi Buzyn.

Par ailleurs, et cela va de soi, pourquoi les professionnels de santé se regrouperaient-il, si ce n'est pour mieux coopérer ?

Il y aurait pourtant tant de choses à faire pour favoriser le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles ! On en compte aujourd'hui un peu plus de 2 700. Si leur développement s'est accéléré depuis 2022, il demeure encore largement insuffisant eu égard au rôle que pourraient jouer les maisons de santé dans l'organisation des soins et le partage des tâches, au travers d'un projet de santé coconstruit et pluriprofessionnel.

Il aurait ainsi pu être proposé de faire bénéficier les maisons de santé du statut de maître de stage, pour qu'elles puissent accueillir des étudiants en quatrième année d'internat ; ou encore, comme le proposait la fédération AVECSanté, de faciliter les consultations avancées dans les zones sous-denses par les médecins installés en maisons de santé « têtes de pont ».

En l'état, le dispositif proposé pour favoriser les coopérations relève de l'incantation, car il est sans effet par rapport à la situation actuelle. Nous proposerons par amendement une réécriture de cet article, pour organiser l'intégration des médecins libéraux dans des équipes pluriprofessionnelles de premier recours. Cela permettra véritablement de libérer du temps médical et d'améliorer la qualité de la prise en charge.

L'article 12 prévoit un énième transfert de compétences, pour permettre aux pharmaciens de prendre en charge des « situations cliniques simples », sans plus de précisions sur ce que cela recouvre. Nous y sommes défavorables : ce n'est pas en étendant toujours plus les compétences des pharmaciens, y compris pour des actes qu'ils ne souhaitent pas assumer, que nous assurerons l'accès aux soins.

La suppression de la possibilité pour les fédérations sportives d'exiger un certificat médical nous inquiète. L'établissement de ces certificats est en effet l'occasion de faire un bilan de santé et participe de la prévention. Nous risquons de mettre en danger les sportifs pour un faible gain de temps médical. S'il convient de lutter contre les certificats médicaux inutiles, demandés sans motif légal ou médical, tel n'est pas le cœur du sujet. Ce ne sont pas les certificats médicaux qui entravent l'accès aux soins.

Enfin, on nous propose, à l'article 15, de faire financer par la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) l'achat d'équipements et de logiciels dits « innovants », sans plus de précision. Cette nouvelle participation des assurés sociaux s'ajouterait au millefeuille des aides à l'installation et des exonérations déjà financées par l'État, les ARS et l'assurance maladie. Non !

Mme la présidente. Il faut conclure, ma chère collègue.

Mme Émilienne Poumirol. Parce que nous mettons en place toujours plus d'incitations financières, le système devient insoutenable financièrement. Et, pourtant, l'accès aux soins continue de se détériorer. Il est temps de changer de méthode ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER. – Mme Cathy Apourceau-Poly applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Pauline Martin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Pauline Martin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout a été dit, vu et entendu sur la désertification médicale. À cet égard, ces discussions générales sont redoutables…

Pourtant, voilà plus de vingt ans que les élus locaux alertent et se sont emparés du sujet, faute de mesures gouvernementales efficaces.

Vingt ans et des millions d'euros d'argent public investis dans la construction de maisons de santé pluriprofessionnelles, de centres de santé, de cabinets susceptibles d'accueillir le monde médical dans les meilleures conditions.

Vingt ans que les territoires – et le premier élu interpellé en la matière demeure le maire – rivalisent en termes de séduction et d'incitations.

Vingt ans aussi qu'en matière de complexité administrative nous nous surpassons. Dans notre pays, plus on dématérialise, plus on complique, et plus la tâche imposée à nos professionnels de santé devient ardue et chronophage.

Vingt ans, c'est surtout le temps qu'il faut pour former deux générations de médecins… Dans le même temps, dans la plupart des territoires, les pathologies s'aggravent faute de diagnostic précoce, et c'est avec un profond sentiment d'impuissance que, trop souvent, nous voyons décéder ces oubliés d'Esculape.

Cette proposition de loi n'est sans doute pas la panacée, mais elle a le mérite d'apporter quelques réponses au problème. Et s'il est vrai que l'on ne régule pas une pénurie, elle met en place des leviers efficients, même si la création d'un office national d'évaluation ou d'un énième comité de pilotage, certes à l'échelle d'un département, me laisse quelque peu dubitative.

Prenant le risque d'entendre s'élever les protestations indignées de certains de mes collègues à l'encontre du constat politiquement peu correct que je vais faire, je me permettrai de rappeler une réalité dont nos concitoyens ont bien conscience, sans oser ouvertement l'exprimer : nonobstant le respect et l'admiration que nous nourrissons à l'égard de nos médecins, dont les études ont été longues et lourdes et les années d'internat chichement rémunérées, on peut tout de même s'interroger sur le caractère libéral de cette profession, qui reste largement financée par les contribuables que nous sommes ! (M. Alain Milon s'esclaffe.)

Or je découvre avec stupéfaction que l'augmentation du tarif des consultations a parfois pour conséquence d'en faire diminuer le nombre. Je lis que le potentiel des médecins remplaçants est sous-utilisé, avec en moyenne vingt-six semaines d'exercice annuel, alors qu'ils ne demandent qu'à travailler plus.

Pour autant, je constate que la réflexion qui a été lancée a le mérite de faire bouger la profession et, plus particulièrement, les syndicats d'internes, qui deviennent force de proposition.

Nous sommes ravis, monsieur le ministre, de vous entendre parler d'un pacte collectif. Nous souhaitons que les actes suivent les mots, et qu'ils nous permettent de soigner enfin les maux de cette France dont la santé est laissée en déshérence depuis trop longtemps.

Alors, allons-y, levons ces blocages dans lesquels excellent les ARS, simplifions, accompagnons cette initiative ! Et remercions nos collègues auteur et rapporteurs de cette proposition de loi rédigée avec le seul souci du bien commun ! (Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – M. Hervé Maurey applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Alain Milon. (Mme Frédérique Puissat applaudit.)

M. Alain Milon. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, « quand le désert avance c'est la vie qui s'en va ». Ces paroles extraites de La chanson d'Azima, interprétée par France Gall, qui concernent le désert naturel, peuvent tout autant s'appliquer à certains de nos territoires.

En effet, monsieur le ministre, lorsque les commerces disparaissent, que les services publics sont remplacés par le numérique et que les professionnels de santé ne sont plus présents, alors oui, on peut dire que le désert avance et que la vie s'en va.

Aujourd'hui, comme l'indique l'exposé des motifs de la proposition de loi, plus de 12 % de la population ne dispose pas de médecin traitant et l'accès aux soins s'avère très inégal d'un territoire à l'autre. Vous vous êtes donc saisi de cet épineux problème, tout en réaffirmant deux principes déontologiques fondamentaux, auxquels je tiens beaucoup : le caractère libéral de la médecine et la liberté de choix des patients.

Les causes de la pénurie de médecins sont multiples, bien sûr. La première d'entre elles est le numerus clausus, auquel personne n'a touché depuis 1971, à l'exception d'Agnès Buzyn.

M. Alain Milon. Tous les responsables politiques, quelle que soit leur appartenance, ont appliqué le numerus clausus ! Il me semble très important de le dire.

Il y a bien d'autres causes à la pénurie : les jeunes générations embrassent une profession plutôt qu'un sacerdoce ; de jeunes médecins s'orientent de plus en plus vers le salariat, ou tout au moins vers un exercice coordonné de la médecine ; des médecins sont victimes, comme tant d'autres professionnels, d'agressions, ce qui les dissuade de s'installer seuls ; la juridicisation de la société peut également être un frein, tout comme la bureaucratisation accrue.

Face à ces évolutions, cette proposition de loi offre des pistes intéressantes permettant de penser le changement.

En matière de pilotage de la politique de santé, une meilleure connaissance des besoins est effectivement essentielle. Une telle approche constitue un changement important pour notre système de santé, un changement de paradigme d'autant plus intéressant qu'il fait du département un acteur de ce pilotage.

Le chapitre consacré à la libération du temps médical et au partage des compétences est un axe important, qui constitue également une petite révolution.

Pour ce qui concerne les dispositions relatives à l'offre de soins, je dois avouer que je suis beaucoup plus circonspect. Elles ne consistent, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, qu'à « changer le pansement »…

Je l'ai dit à l'instant, tout processus de désertification est multifactoriel.

La désertification médicale résulte ainsi, entre autres, d'un assèchement des services publics et des commerces de proximité dans différents endroits de notre pays. Pour autant, l'État ou certaines grandes entreprises publiques s'obligent-ils à rester dans ces territoires ? Quid des écoles, de La Poste, voire de certains transports publics ? Quid de la fermeture de certains lits hospitaliers ?

Obligerait-on certains commerces de proximité à ouvrir leur boutique à tel endroit déficitaire en boulangeries ou en boucheries, des activités qui jouent pourtant un rôle non négligeable dans la vie locale ? Certes pas.

En revanche, pour l'installation des médecins, l'incitation confine à la coercition, sans que personne soit choqué...

Parmi les solutions préconisées, la fermeture d'un cabinet principal pour aller exercer à temps partiel dans un cabinet secondaire m'interroge. Une telle proposition ne comporte-t-elle pas, en pratique, plus de risques qu'elle n'offre de réelles opportunités d'amélioration ?

L'autre question soulevée est celle du financement de ces cabinets secondaires. Qui les prendra en charge ? Le médecin ? La collectivité ? Personnellement, je crains, et je ne suis pas le seul, que l'on ne s'oriente davantage vers une financiarisation accrue de notre système de santé, avec tout ce que cela implique.

Je souhaite ici répondre à ce qu'a dit notre collègue, et néanmoins ami, Bruno Rojouan, sur la sécurité sociale.

Les médecins ne sont pas des salariés de la sécurité sociale ! La sécurité sociale paie les médecins en remplacement des patients. Plus un médecin travaille, plus il gagne ; moins il travaille, moins il gagne. Nous, mes chers collègues, en tant que sénateurs, nous sommes payés de la même façon par l'État, que nous soyons présents ou non dans l'hémicycle…

Mme la présidente. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Alain Milon. Je reviendrai ultérieurement sur les autres sujets que je voulais évoquer.

En attendant, monsieur le ministre, je considère, à l'instar de Francis Blanche, qu'« il vaut mieux penser le changement que changer le pansement » ! (Sourires – Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – Mme Véronique Guillotin applaudit également.)

Mme la présidente. La parole est à M. Bruno Belin. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. Bruno Belin. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, oui, cela fait vingt ans que l'on parle des déserts médicaux, que l'on alerte ! À cet égard, cette proposition de loi représente peut-être une espérance ; il faut donc s'en saisir.

Nous apportons un soutien total à ce texte présenté par le président Philippe Mouiller et les rapporteurs, parce qu'il crée de l'espoir. Nous sommes en effet face à trois enjeux.

Premier enjeu : gagner du temps médical.

Oui, il faut en finir avec la paperasse inutile, qui consomme trop de temps.

Oui, il faut continuer à déléguer des tâches. Pour cela, on peut s'appuyer sur les infirmiers en pratique avancée,...

M. Jean-Baptiste Lemoyne. Sur les pharmaciens !

M. Bruno Belin. ... et sur les pharmaciens, qui sont les derniers professionnels auxquels on peut s'adresser pour obtenir des réponses à des questions portant sur la santé, sans rendez-vous et gratuitement. Utilisons la polyvalence de ces professionnels de santé !

On peut aussi maintenir en activité quelques années de plus les professionnels de santé qui seraient tentés de prendre leur retraite. Trouvons les moyens, soyons imaginatifs, par exemple en favorisant le cumul entre activité professionnelle et retraite. Voilà quelques pistes…

Deuxième enjeu : continuer à former. Je profite de cette occasion pour saluer les étudiants en médecine présents dans nos tribunes ce soir.

Vous avez rappelé, vous aussi, monsieur le ministre, lors de votre intervention, qu'il fallait continuer à former. On a entendu dire il y a quelques semaines que, du fait de la baisse de la natalité, on aurait peut-être moins besoin de professionnels de santé. C'est une erreur totale ! (MM. Olivier Paccaud et Louis-Jean de Nicolaÿ opinent.) En effet, du fait de la technicité croissante de la médecine, du vieillissement de la population et de l'exigence médicale induite par les pathologies naissantes, nous allons avoir besoin, partout, de davantage de professionnels de santé.

Troisième enjeu : rendre la santé accessible dans les territoires.

À cet égard, il est indispensable de recourir aux Padhue, dont on peut facilement évaluer les connaissances linguistiques et techniques lors des stages hospitaliers.

Oui à la liberté ! Je réaffirme notre opposition à la coercition, qui serait contre-productive. Pour autant, une liberté peut être encadrée. La proposition d'encadrement qui est faite représente donc une solution.

Enfin, oui au maillage. Les départements ont d'ores et déjà fait la preuve de leurs compétences dans le domaine des politiques médico-sociales, et nombre d'entre eux ont mis en place des plans de santé.

Surtout, les départements disposent d'une compétence en matière d'aménagement du territoire. Cette finesse d'analyse, que partagent nombre de nos collègues qui sont des départementalistes convaincus et qui ont même siégé dans les assemblées départementales, permet d'apporter une réponse.

Cette proposition de loi n'apporte qu'un début de réponse, monsieur le président Mouiller, et bien d'autres sujets doivent être traités. Nous parlons depuis vingt ans des déserts médicaux ; peut-être parlerons-nous dans vingt ans, au sein de cette assemblée, d'autres problèmes, comme les déserts pharmaceutiques – il y a aussi, à cet égard, un problème de démographie – ou l'accès aux soins dentaires.

Mais ce début de réponse est indispensable pour la santé de nos concitoyens. Je vous invite donc, mes chers collègues, à adopter le texte qui nous est soumis. (Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et INDEP. – Mme Solanges Nadille applaudit également.)

Mme la présidente. La discussion générale est close.

Nous passons à la discussion du texte de la commission.

proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins dans les territoires

Chapitre Ier

Piloter la politique de santé au plus près des territoires

Discussion générale (suite)
Dossier législatif : proposition de loi visant à améliorer l'accès aux soins dans les territoires
Après l'article 1er

Article 1er

I. – Le code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Le chapitre III du titre II du livre IV de la première partie est complété par un article L. 1423-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 1423-4. – Le département coordonne, avec les agences régionales de santé et les caisses primaires d'assurance maladie, les actions en faveur de l'installation des professionnels de santé dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l'accès aux soins mentionnées au 1° de l'article L. 1434-4. » ;

1° bis (nouveau) Le 3° du I de l'article L. 1432-3 est ainsi rédigé :

« 3° De représentants de chaque conseil départemental et de représentants des autres collectivités territoriales et de leurs groupements ; »

2° La première phrase du 1° du I de l'article L. 1434-3 est complétée par les mots : « , compte tenu des observations formulées par les offices départementaux d'évaluation de la démographie des professions de santé » ;

3° Le premier alinéa de l'article L. 1434-4 est ainsi modifié :

a) (nouveau) Le mot : « deux » est supprimé ;

b) Après le mot : « arrêté, », sont insérés les mots : « après avis conforme des offices départementaux d'évaluation de la démographie des professions de santé concernés et » ;

3° bis (nouveau) La première phrase du premier alinéa du III de l'article L. 1434-10 est complétée par les mots : « et les travaux des offices départementaux d'évaluation de la démographie des professions de santé concernés » ;

4° La section 5 du chapitre IV du titre III du livre IV de la première partie est ainsi rétablie :

« Section 5

« Évaluation de la démographie des professions de santé en vue de répondre aux besoins de santé

« Art. L. 1434-14. – I. – L'Office national de l'évaluation de la démographie des professions de santé, placé auprès des ministres chargés de la santé et de l'enseignement supérieur, est chargé de rassembler et de diffuser les données relatives à la démographie des professions de santé et à l'accès aux soins.

« Il dresse chaque année un bilan des besoins identifiés pour chaque profession de santé, le cas échéant par spécialité, aux niveaux national et territorial en s'appuyant sur les travaux des offices départementaux prévus au II. Ce bilan est rendu public dans les six mois suivant l'expiration de la période à laquelle il se rapporte.

« Il propose en conséquence les objectifs nationaux pluriannuels relatifs au nombre de professionnels à former mentionnés au I de l'article L. 631-1 du code de l'éducation et les objectifs quantitatifs d'admission des candidats aux épreuves anonymes de vérification des connaissances mentionnés aux articles L. 4111-2 et L. 4221-12 du présent code.

« II. – Dans chaque département, un office départemental d'évaluation de la démographie des professions de santé, présidé par le président du conseil départemental, identifie les besoins en professions de santé à l'échelle du département et des territoires de santé concernés.

« Les offices départementaux comprennent des représentants des délégations départementales des agences régionales de santé et des caisses primaires d'assurance maladie. Ils associent les représentants des structures territorialement compétentes des ordres et consultent les représentants des conseils territoriaux de santé ainsi que des communes et de leurs groupements concernés.

« III. – L'Office national et les offices départementaux rendent un avis annuel sur le déploiement, tout au long des études de médecine, d'une offre de stages dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l'accès aux soins au sens du 1° de l'article L. 1434-4, et en particulier sur la réalisation des stages prévus au cours de la dernière année du diplôme d'études spécialisées de médecine générale mentionnés à l'article L. 632-2 du code de l'éducation.

« Le bilan annuel mentionné au I du présent article intègre l'avis mentionné au présent III.

« IV. – Les règles relatives à la composition et au fonctionnement de l'Office national et des offices départementaux sont fixées par décret.

« Art. L. 1434-14-1. – Les administrations de l'État et les établissements publics placés sous sa tutelle, les agences régionales de santé, les caisses d'assurance maladie et les ordres professionnels concernés mettent à disposition de l'Office national et des offices départementaux d'évaluation de la démographie des professions de santé les éléments nécessaires à l'exercice de leurs missions. Ils peuvent également solliciter ces éléments auprès des collectivités territoriales et de leurs établissements publics. »

II. – Le 3° du II de l'article L. 631-1 du code de l'éducation est complété par les mots : « proposés par l'Office national de l'évaluation de la démographie des professions de santé en application du I de l'article L. 1434-14 du code de la santé publique ».