I. – Le livre IX du code rural et de la pêche maritime est ainsi modifié :
1° Le chapitre Ier du titre Ier est complété par un article L. 911-5 ainsi rédigé :
« Art. L. 911-5. – I. – L’État définit et met en œuvre une stratégie nationale de transition des flottilles de pêche au chalut de fond. Cette stratégie est révisée tous les trois ans. Elle vise à réduire la dépendance de la filière de la pêche française à la consommation d’énergies fossiles, à protéger les écosystèmes marins et à assurer une gestion durable des ressources halieutiques.
« La stratégie nationale précise les objectifs et les mesures permettant la transition des navires de pêche au chalut de fond vers d’autres pratiques de pêche, y compris par l’expérimentation et l’incitation. Elle fixe notamment les mesures relatives à l’attribution des permis de mise en exploitation des navires de pêche professionnelle ainsi qu’aux critères et à la répartition des quotas qui contribuent à l’atteinte de ces objectifs. Elle comporte les dispositions compensatoires et d’accompagnement économique et social garantissant une transition juste et durable.
« II. – L’État, les collectivités territoriales et leurs établissements publics respectifs prennent en compte la stratégie nationale définie au I dans leurs documents de planification et de programmation maritimes. » ;
2° L’article L. 921-8 est ainsi rétabli :
« Art. L. 921-8. – L’usage des navires de pêche d’une longueur hors tout supérieure ou égale à vingt-cinq mètres est interdit à moins de douze milles nautiques de la laisse de basse mer des côtes. »
II. – Le 2° du I entre en vigueur le 1er janvier 2026.
M. le président. L’amendement n° 2 rectifié ter, présenté par M. Cadec, Mme Evren, MM. Sol, J.P. Vogel, Brisson, Piednoir et Burgoa, Mme Garnier, MM. Rapin, Naturel, Panunzi, Le Rudulier, D. Laurent et Lefèvre, Mme Joseph, MM. Canévet, Chauvet et Bouchet, Mmes Canayer et Belrhiti, MM. Margueritte, Pernot, P. Vidal, Sautarel, Duplomb et L. Vogel, Mme Lassarade, M. Gremillet, Mme Muller-Bronn, M. Milon et Mme Josende, est ainsi libellé :
Supprimer cet article.
La parole est à Mme Agnès Evren.
Mme Agnès Evren. Il est défendu, monsieur le président.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Fernique, rapporteur. Comme pour l’amendement de suppression de l’article 1er, la commission a émis à l’unanimité un avis défavorable sur l’amendement de suppression de l’article 2.
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Baptiste, ministre. Le report éventuel des chalutiers de fonds vers d’autres engins de pêche doit être anticipé à large échelle. Je pense notamment à l’impact potentiel sur les espèces d’intérêt halieutique et leurs quotas, mais aussi sur les espèces protégées.
Par ailleurs, le Gouvernement a déjà traité les enjeux d’évolution des pratiques de pêche, qui sont étudiés dans plusieurs stratégies – je les ai mentionnés dans la discussion générale –, et ce pour l’ensemble des engins de pêche pour lesquels les impacts sur les écosystèmes sont documentés.
Enfin, la France engage des actions en faveur de la durabilité des activités de pêche, quelle que soit la taille des navires. Une interdiction des navires 25 mètres et plus dans la bande côtière, en plus d’être fondée sur un seuil arbitraire, risquerait de porter préjudice à la pêche française, si elle était instaurée à l’échelle nationale. Elle s’opposerait aussi au cadre européen, qui prévoit un accès de certains navires d’autres États membres dans cette bande côtière.
Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement de suppression.
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. Je suis toujours surpris d’entendre que l’on essentialise les pêcheurs, que l’on évoque « les pêcheurs » en général.
Lorsque nous avons gagné, ensemble, contre la pêche électrique – Alain Cadec était là, il pourrait nous en parler –, nous étions soutenus par les pêcheurs artisanaux français, contre les pêcheurs industriels, contre le Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM), qui défendaient une pêche industrielle. Le gouvernement français était des plus ambigus sur ce sujet.
Même chose lorsque nous avons gagné, à l’échelon européen, sur la pêche en eaux profondes. Nous avions évidemment la pêche industrielle contre nous, mais la pêche artisanale avec nous.
Déjà j’entendais les mêmes discours : « Les pêcheurs sont contre ! » Eh bien non ! Il y a des débats au sein de la pêche. Les pêcheurs à la ligne de bars sont contre le chalutage en bœuf dans les zones de frayères du bar. Le secteur de la pêche parle peu, il n’expose pas publiquement ses divergences, mais il est divers.
Alors oui, nous nous battons ici pour la pêche artisanale, avec celles et ceux qui font vivre les territoires, pas avec ceux qui pillent les fonds marins. Si l’on continue, il n’y restera plus rien ! Il n’y aura bientôt plus de pêcheurs et plus d’activité dans les territoires autour de la pêche. Alors, arrêtons ce bazar et les mensonges, cessons de dire qu’il n’existe qu’une pêche française ! C’est faux ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 2 rectifié ter.
(L’amendement n’est pas adopté.)
M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mme Ollivier, MM. Dantec, Benarroche, G. Blanc, Dossus et Gontard, Mme Guhl, M. Jadot, Mme de Marco, M. Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Rédiger ainsi cet article :
I. – L’article L. 921-8 du code rural et de la pêche maritime est ainsi rétabli :
« Art. L. 921-8. – L’usage des navires de pêche d’une longueur hors tout supérieure ou égale à vingt-cinq mètres est interdit à moins de douze milles nautiques de la laisse de basse mer des côtes. »
II. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2026.
La parole est à Mme Mathilde Ollivier.
Mme Mathilde Ollivier. Par cet amendement, nous proposons une solution de repli. Afin de nous permettre d’obtenir l’interdiction des bateaux de 25 mètres et plus dans la bande des douze milles nautiques, cet amendement tend à supprimer la première partie de l’article 2 sur la stratégie nationale de transition des flottilles de pêche au chalut de fond.
Il s’agit d’une mesure de bon sens. Je ne demande pas l’interdiction des bateaux industriels, je demande juste qu’ils aillent pêcher plus loin, à douze milles nautiques, c’est-à-dire à moins de vingt-cinq kilomètres des côtes. On parle ici de bateaux de 100 mètres, de bateaux-usines, qui pêchent sur le territoire des artisans pêcheurs côtiers, alors qu’ils peuvent pêcher en haute mer.
Je le répète, il s’agit d’une mesure de bon sens : nous demandons seulement que ces bateaux aillent pêcher plus loin.
M. le président. Quel est l’avis de la commission ?
M. Jacques Fernique, rapporteur. Cet amendement vise à réécrire l’article 2 de la proposition de loi pour ne conserver que l’interdiction des navires de pêche d’une longueur hors tout supérieure ou égale à 25 mètres à moins de douze milles nautiques de la laisse de basse mer des côtes.
Bien que cet amendement aille dans le bon sens, en ciblant davantage la proposition afin d’en garantir l’acceptabilité, la commission y est défavorable, car elle ne souscrit pas à l’ensemble de l’article 2 tel qu’il a été proposé initialement.
À titre personnel, je soutiens cet amendement, dont l’objectif est de protéger la pêche côtière et artisanale des mégachalutiers, le plus souvent étrangers, qui mettent en péril notre modèle économique et exercent une forte pression sur les ressources et les écosystèmes. L’adoption de cet amendement permettrait d’envoyer un signal fort de soutien à nos pêcheurs. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. Philippe Baptiste, ministre. Je le redis : nous ne sommes pas favorables à cette interdiction, et ce pour trois raisons que je rappellerai très brièvement.
D’abord, juridiquement, une telle interdiction serait contraire au droit européen. Ensuite, le seuil de 25 mètres est arbitraire. Enfin, diplomatiquement, la France s’est battue pour maintenir l’accès de ses navires, y compris de plus de 24 mètres, aux eaux britanniques dans la bande des six à douze milles nautiques. Une interdiction nationale aussi stricte affaiblirait notre position internationale.
L’avis du Gouvernement sur cet amendement est donc défavorable.
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, pour explication de vote.
Mme Mathilde Ollivier. Émettre un avis défavorable sur cet amendement aujourd’hui est un scandale ! Cela revient à prendre position en faveur de la pêche industrielle. Or la France ne compte aujourd’hui qu’un ou deux bateaux de plus de 25 mètres, qui ne représentent que 3 % de la flottille française.
En fait, je le répète : vous prenez fait et cause pour la pêche industrielle, et c’est un scandale !
M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Je rappelle que l’avis de la commission est défavorable, de même que celui du Gouvernement.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 324 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Pour l’adoption | 94 |
Contre | 228 |
Le Sénat n’a pas adopté.
Mes chers collègues, je vais mettre aux voix l’article 2.
Si cet article n’était pas adopté, l’article 3, qui constitue le gage de la proposition de loi, deviendrait sans objet.
Dès lors, il n’y aurait plus lieu de mettre aux voix l’article 3 et l’ensemble de la proposition de loi. Il n’y aurait donc pas d’explication de vote sur cet article et sur l’ensemble.
Personne ne demande la parole pour explication de vote ?…
Je mets aux voix l’article 2.
J’ai été saisi d’une demande de scrutin public émanant du groupe Les Républicains.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions fixées par l’article 56 du règlement.
Le scrutin est ouvert.
(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 325 :
Nombre de votants | 341 |
Nombre de suffrages exprimés | 322 |
Pour l’adoption | 95 |
Contre | 227 |
Le Sénat n’a pas adopté.
En conséquence, l’article 3 n’a plus d’objet.
Mes chers collègues, les articles de la proposition de loi ayant été successivement rejetés par le Sénat, je constate qu’un vote sur l’ensemble n’est pas nécessaire.
En conséquence, la proposition de loi n’est pas adoptée.
9
Modification de l’ordre du jour
M. le président. Mes chers collègues, par lettre en date de ce jour, le Gouvernement demande l’inscription au premier point de l’ordre du jour du jeudi 19 juin de la suite éventuelle de la proposition de loi élargissant la possibilité pour les collectivités territoriales et leurs groupements d’avoir recours au modèle de la société portuaire pour l’exploitation de leurs ports, ainsi que la possibilité de siéger, le cas échéant, le soir du jeudi 19 juin.
Il n’y a pas d’opposition ?…
Il en est ainsi décidé.
10
Ordre du jour
M. le président. Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au mardi 17 juin 2025 :
À quatorze heures et le soir :
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, de simplification du droit de l’urbanisme et du logement (texte de la commission n° 694, 2024-2025) ;
Proposition de loi, adoptée par l’Assemblée nationale, visant à améliorer l’accès aux soins par la territorialisation et la formation (texte de la commission n° 713, 2024-2025).
Personne ne demande la parole ?…
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures cinq.)
Pour le Directeur des comptes rendus du Sénat,
le Chef de publication
FRANÇOIS WICKER