Mme Émilienne Poumirol. Nous comprenons les intentions de l’auteure de la proposition de loi. S’il est vrai que, ces dernières années, le nombre de places vacantes a été important, en 2025, il était inférieur à 200. Par conséquent, le phénomène se résorbe, et il ne paraît donc plus opportun de déroger à la voie d’accès unique prévu à l’article 1er.

Bien plus, comme vient de le souligner Céline Brulin, la voie d’accès unique permet de découvrir les différents métiers de la pharmacie, cette filière ne se limitant pas à la pharmacie d’officine, d’autres spécialités tout aussi importantes s’ouvrent aux étudiants.

Par ailleurs, de nouvelles missions ont été confiées aux pharmaciens d’officine – prescription d’antibiotiques après réalisation d’un test rapide d’orientation diagnostique (Trod), vaccination, entretiens pharmaceutiques, dépistage, prévention, contraception d’urgence, conseils de santé… –, et cette plus grande variété peut davantage attirer que par le passé.

Alors qu’il est cohérent que les étudiants en pharmacie accèdent à cette filière par la voie d’accès unique, dans les conditions prévues à l’article 1er, il est paradoxal de les en sortir, certes par dérogation et dans le cadre d’une expérimentation, au moment même où l’on y réintègre les étudiants en kinésithérapie.

Cela contredit la logique de décloisonnement et les objectifs interprofessionnels de cette proposition de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. Je commencerai par apporter quelques précisions.

L’expérimentation porte sur un accès direct partiel. Elle ne concernera pas tous les étudiants. Ceux qui veulent suivre une première année commune le pourront. De leur côté, les élèves de terminale qui sont déterminés à entreprendre des études de pharmacie pourront s’y engager directement.

Nous avons très souvent ici même des débats nourris, où nous exprimons nos inquiétudes sur les fermetures de pharmacie, les difficultés à remplir les promotions d’étudiants et les problèmes que cela entraîne en termes de ressources humaines.

La proposition retenue à l’article 2 a été largement voulue et saluée et par les doyens et les pharmaciens. L’expérimentation durera cinq ans. Les maquettes qui nous ont été présentées sont également rassurantes : les étudiants qui entrent en première année en socle commun ou directement en première année de pharmacie auront les mêmes blocs d’enseignement et se retrouveront en deuxième année. Je rappelle que la première année en socle commun effraie certains étudiants et les fait partir à l’étranger.

C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur ces amendements identiques.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Baptiste, ministre. Permettez-moi de donner quelques chiffres.

Il est vrai que, en 2022, le système a connu un inquiétant trou d’air, pour le dire un peu brutalement : seules 2 587 places sur 3 600 ont été pourvues. Toutefois, depuis les deux dernières années, nous sommes à près de 95 % de saturation du système.

Par conséquent, on peut considérer qu’aujourd’hui le problème est largement derrière nous et que la situation s’est débloquée. Il y a eu un véritable travail de mobilisation et d’explication de la part de l’Ordre national des pharmaciens et des pharmaciens eux-mêmes de ce qu’était le métier. L’essentiel des difficultés ont donc été réglées.

Si l’on instaure une expérimentation pour les études de pharmacie, la question se posera mécaniquement pour tous les autres métiers du soin.

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. Oui !

M. Philippe Baptiste, ministre. Par ailleurs, cela créerait des disparités territoriales, au moment où l’on essaie de simplifier le dispositif Pass-LAS, qui est hélas très touffu et complexe.

Enfin, grâce à cet accès direct, comme il existe des passerelles entre les études de pharmacie et celles de médecine, on ouvre indirectement le sujet de l’accès aux études de médecine sans avoir réussi l’examen de première année.

Pour toutes ces raisons, sur ces amendements identiques, même s’il partage l’enjeu d’attractivité, le Gouvernement s’en remet à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour explication de vote.

Mme Corinne Imbert. Je remercie Mme la rapporteure de la qualité de sa réponse. Il va de soi que je ne voterai pas ces amendements identiques.

J’ai rencontré des internes en pharmacie ; nous en avons auditionné. Le seul véritable argument qu’ils avancent, c’est celui qui consiste à dire que, parce qu’ils travailleront demain en coopération avec les autres professionnels de santé, il leur faut faire cette première année ensemble.

Je rappelle, à la suite de Mme la rapporteure, que, avec cette proposition on ne les prive pas de la voie d’accès unique : si la réforme aboutit, ils pourront toujours emprunter cette voie s’ils le souhaitent. Toutefois, permettre cette expérimentation me semble intéressant.

Monsieur le ministre, vous avez raison, le trou d’air est passé, mais il a fallu la forte mobilisation de la profession elle-même, de l’ordre, des syndicats et des étudiants ! Le slogan qu’ils ont choisi, « Pharmacien : le moins connu des métiers connus », a fait mouche.

En outre, les nouvelles tâches que peuvent aujourd’hui accomplir les pharmaciens rendent le métier encore plus intéressant. On est loin de l’image de l’épicier – je puis le dire, parce que j’exerce encore ce beau métier. Ce n’est évidemment pas une insulte : cette étiquette a longtemps collé à la profession, pourtant forte de tout un savoir-faire.

Reste que la profession n’est pas sortie d’affaires. Si des jeunes ont envie de se lance dans des études de pharmacie, qu’ils puissent le faire d’entrée.

Enfin, il ne s’agit que d’une expérimentation. Si elle n’est pas pertinente, elle ne sera pas maintenue.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 2, 12 rectifié et 13.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. L’amendement n° 1 rectifié bis, présenté par MM. Chasseing et Capus, Mme Bessin-Guérin, MM. A. Marc, Médevielle et Wattebled, Mme Lermytte, MM. Brault, V. Louault, Malhuret et Fialaire, Mmes Bonfanti-Dossat et Jacquemet, MM. Dhersin et Menonville, Mme Guidez, M. Daubet et Mme Perrot, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

La procédure d’admission directe n’est possible que lorsque les capacités d’accueil maximales des formations de pharmacie de premier cycle n’ont pas été atteintes l’année précédente.

La parole est à Mme Marie-Claude Lermytte.

Mme Marie-Claude Lermytte. Il s’agit d’un amendement de notre collègue Daniel Chasseing.

L’article 2 consiste en une expérimentation de cinq ans permettant l’accès direct, via Parcoursup, aux études de premier cycle de pharmacie pour un nombre limité d’étudiants.

S’il existe bien un problème d’attractivité de la filière, avec 1 100 places vacantes en 2022, et encore 200 places cette année, créer un système automatique, même expérimental, d’accès direct pour certains étudiants et maintenir un concours pour d’autres représenterait une rupture d’égalité entre eux. Cela reviendrait à créer, de nouveau, un système avec deux voies d’accès aux études de pharmacie, alors que l’un des objectifs de cette proposition de loi est justement de supprimer le double système actuel.

C’est pourquoi cet amendement déposé par Daniel Chasseing tend à ce que la possibilité d’admission directe en année n soit conditionnée à l’existence de places vacantes en année n-1.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. Il ne paraît pas pertinent d’ajouter des contraintes à la mise en place de cette expérimentation, qui alors serait effective une année et ne le serait plus l’année suivante. Ce serait bien trop complexe. Il revient aux universités de s’organiser.

Laissons cette expérimentation se déployer pendant cinq ans. Comme l’a indiqué Corinne Imbert, nous en tirerons les conséquences à la fin.

C’est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Baptiste, ministre. Cela a été souligné, on ne peut pas faire fluctuer d’une année sur l’autre les enseignants-chercheurs et les formateurs. Ce serait trop compliqué.

Par ailleurs, compte tenu des calendriers et des contraintes d’élaboration de la maquette de Parcoursup et des propositions faites aux bacheliers, le décalage serait d’au moins deux ans et non d’un an.

En outre, dans cet amendement, il est fait mention des capacités maximales de formation en premier cycle, alors que ce sont les capacités d’accueil pour entrer en deuxième année qui seraient concernées.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement ; à défaut, il émettrait un avis défavorable.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 1 rectifié bis.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 2.

(Larticle 2 est adopté.)

Après l’article 2

M. le président. L’amendement n° 3, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 2

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Par dérogation aux articles L. 612-3 et L. 612-3-2 du code de l’éducation, les bacheliers s’inscrivent directement dans l’institut de formation en soins infirmiers de leur choix. Les modalités de sélection des instituts sont fixées par décret au niveau national.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Nous avons déposé un amendement à l’objet similaire lors de l’examen de la proposition de loi sur la profession d’infirmier : il s’agit d’étudier l’opportunité de sortir de Parcoursup l’accès aux Ifsi (instituts de formation en soins infirmiers).

Nous connaissons tous de très nombreux exemples d’étudiants qui se sont retrouvés à suivre cette formation, alors qu’il s’agissait de leur sixième ou septième choix sur la plateforme et qui, de ce fait, ont abandonné leurs études en cours de route. D’ailleurs, en 2021, le taux d’abandon en première année a été trois fois plus important qu’en 2011, ce qui en dit long.

A contrario, on a tous de très nombreux exemples d’étudiants qui ont placé les Ifsi en premier choix, mais qui se sont retrouvés à l’autre bout de la France, alors même que le maillage d’instituts de formation en soins infirmiers est assez dense, puisque ces structures sont souvent adossées à des hôpitaux de proximité.

Nous souhaitons revenir à la charge, si j’ose dire, puisque, à l’issue de cette discussion, et le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, Yannick Neuder, et le président de la commission des affaires sociales s’étaient engagés à se pencher sur ce sujet. Depuis lors, il ne s’est pas passé grand-chose…

Certes, je n’ignore pas la situation politique que nous connaissons, qui pour partie peut expliquer qu’il en soit ainsi. Pour autant, je souhaite avoir l’assurance qu’il n’y a pas d’autre raison.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. La commission partage le constat sur les effets qu’entraîne l’inscription des Ifsi sur Parcoursup. Pour autant, retirer cette formation de la plateforme au détour d’un amendement paraîtrait quelque peu sportif !

Par conséquent, la commission émet un avis défavorable sur cet amendement, qui d’ailleurs est probablement un amendement d’appel, en attendant la réponse du ministre.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Baptiste, ministre. L’augmentation des abandons est antérieure à l’intégration des Ifsi sur Parcoursup, comme l’a très clairement montré une étude de la Drees.

Ce qui explique avant tout le taux élevé d’abandon, c’est l’accueil des étudiants en stage. Les premiers stages ont parfois lieu dans des services très difficiles, ce qui peut provoquer des traumatismes chez les jeunes étudiants qui se retrouvent confrontés en début de cursus à des situations extrêmement graves.

L’intégration dans le dispositif Parcoursup des formations paramédicales, en particulier infirmières, a permis d’élargir considérablement le vivier des candidats, grâce à une visibilité nationale de l’offre.

Ainsi, le taux de remplissage des Ifsi est de 100 %, ce qui était très loin d’être le cas précédemment. Les Ifsi sont tous pleins, et, en moyenne 85 % de leurs élèves viennent de l’académie d’origine. On ne peut donc pas dire qu’il y ait un immense brassage et que les difficultés viennent de là ; ce n’est pas vrai, même si je reconnais qu’il existe des cas particuliers. En outre, cela permet un adossement universitaire progressif, ce qui est important.

À mon sens, sortir cette formation de Parcoursup entraînerait une perte de visibilité et d’attractivité, ainsi qu’un taux de remplissage moindre, et provoquerait de nouveaux risques d’inégalités sociales et territoriales. Je rappelle que, auparavant, il fallait passer un concours payant et, souvent, s’inscrire en amont à des formations pour augmenter ses chances de réussite.

Reste le taux d’abandon, qui est une vraie question. Il faut y travailler, et je suis tout à fait d’accord pour que l’on réfléchisse ensemble aux réponses à apporter. En revanche, je le répète, je ne crois pas que ce soit dû au rattachement de cette formation à Parcoursup.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 3.

(Lamendement nest pas adopté.)

Article 3

L’article 24 de la loi n° 2023-1268 du 27 décembre 2023 visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels est ainsi modifié :

1° Le I est ainsi modifié :

a) Au début, sont ajoutés les mots : « À titre expérimental, » ;

b) Après le mot : « loi, », la fin de l’alinéa est ainsi rédigée : « les lycées situés dans des zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou concernées par des difficultés dans l’accès aux soins, au sens du 1° de l’article L. 1434-4 du code de la santé publique, proposent une option santé aux élèves des classes de première et de terminale de la voie générale. » ;

c) Sont ajoutés deux alinéas ainsi rédigés :

« Les options santé permettent la découverte des formations de médecine, de pharmacie, d’odontologie, de maïeutique et des formations paramédicales ainsi que des métiers auxquels elles conduisent. Elles visent à encourager l’orientation des lycéens concernés vers les études de santé.

« Pour l’organisation des options santé, les lycées mentionnés au premier alinéa du présent I concluent des conventions avec les universités comportant une unité de formation et de recherche de médecine, de pharmacie, d’odontologie ou de maïeutique ou une composante assurant ces formations au sens de l’article L. 713-4 du code de l’éducation et avec les organismes délivrant des titres de formation requis pour l’exercice des professions de santé. » ;

2° Le II est ainsi rédigé :

« II. – Un décret détermine les modalités de mise en œuvre de l’expérimentation mentionnée au I du présent article. »

M. le président. L’amendement n° 16, présenté par Mmes Poumirol et Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Supprimer cet alinéa.

La parole est à Mme Émilienne Poumirol.

Mme Émilienne Poumirol. Cet amendement vise à supprimer l’obligation de conclure des conventions entre les lycées et les universités pour l’organisation des options santé inscrite à l’alinéa 7 de cet article.

À notre sens, il n’est pas nécessaire de complexifier ce processus qui fonctionne déjà dans de nombreux lycées – 17 en Occitanie, par exemple.

Si le conventionnement avec les universités peut être souhaitable dans certains territoires, l’ériger en obligation pourrait rendre sa mise en œuvre difficile, voire impossible. De plus, ce texte n’aborde pas la question des moyens de l’université, que ceux-ci soient organisationnels ou financiers, pour faire face à cette nouvelle obligation. Nous connaissons pourtant la situation complexe dans laquelle les universités se trouvent.

Par conséquent, pour éviter d’ajouter de la lourdeur administrative, nous proposons de laisser la liberté dans les modalités d’organisation de l’option santé, comme cela se fait aujourd’hui.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. Il nous semble au contraire important de nouer des relations entre les lycées et les universités.

Une option au lycée, ce n’est pas seulement l’enseignement d’une nouvelle matière, c’est bien aussi la découverte d’un métier. Il faut donc mettre le plus grand nombre d’acteurs autour de la table. À ce titre, la commission est plutôt favorable à l’établissement de partenariats avec les professionnels locaux du territoire : hôpitaux locaux, etc.

C’est la raison pour laquelle la commission émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Baptiste, ministre. Pour l’ensemble des raisons que vous avez avancées, madame la sénatrice, le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 16.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je mets aux voix l’article 3.

(Larticle 3 est adopté.)

Après l’article 3

M. le président. L’amendement n° 4, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les conditions des stages et des rémunérations des internes et des externes en médecine.

La parole est à Mme Céline Brulin.

Mme Céline Brulin. Il s’agit de demander un rapport sur les conditions des stages et des rémunérations des internes et des externes en médecine.

Je connais le réflexe pavlovien que suscite une telle demande dans une partie de cet hémicycle (Sourires.), mais je tiens à revenir une nouvelle fois sur les conditions d’études des étudiants en santé, qui sont particulièrement difficiles. Là aussi, le taux d’abandon est extrêmement important, ce qui est tout de même affligeant au regard du manque de professionnels dans les territoires.

Qui plus est, l’état de santé de ces jeunes, leur santé mentale notamment, ne va pas en s’améliorant, ce qui serait en soi une raison pour s’y intéresser.

J’évoquerai également les rémunérations : les internes en médecine sont payés 10,85 euros brut de l’heure, nuit et jour férié, alors qu’ils tiennent nos hôpitaux. C’est indécent ! La dernière étude de la Dares sur les conditions de rémunération des internes de médecine date de 2013 ; en douze ans, loin de s’améliorer, les conditions de travail dans les hôpitaux se sont dégradées.

Tout cela justifie en soi le rapport que nous demandons.

Pour ma part, je pense qu’il y a une corrélation directe entre la souffrance – je pèse mes mots – que vivent les étudiants en médecine et leur détermination à ne vouloir accepter ensuite aucune contrainte.

Quand on souffre autant pendant ses études, il va de soi que l’on ne veut plus subir aucune obligation par la suite ! Améliorer les conditions d’études et de rémunération pourrait donc également servir de levier pour que ces étudiants acceptent ensuite les exigences que peut avoir la société à leur endroit.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. Il faut continuer à travailler sur les conditions de travail des étudiants, mais je rappelle que des évolutions législatives ont eu lieu, qui doivent s’appliquer dans les hôpitaux. Les données sont aujourd’hui connues : mieux vaut effectuer un travail au niveau des professions.

La commission émet donc un avis défavorable sur cette demande de rapport, qui n’apportera aucun éclairage supplémentaire.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Madame la sénatrice, je vous remercie d’appeler notre attention sur la qualité de vie des étudiants en médecine, en deuxième, en troisième cycle ou lors de leur stage.

À la suite de la covid, le Ségur de la santé a permis la revalorisation d’une partie de leur rémunération, mais également l’adoption de modifications législatives, notamment sur leur temps de travail. Désormais, les directions des établissements peuvent se voir infliger des pénalités en cas de non-respect du temps de travail.

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. Bien sûr !

Mme Stéphanie Rist, ministre. Nous avons lancé au mois de septembre dernier une grande enquête pour évaluer ces différentes mesures, notamment les conditions de travail et le temps de travail, dont les résultats seront connus avant la fin de l’année.

Madame la sénatrice, comptez sur mon engagement pour veiller à la santé des étudiants en santé. C’est la raison pour laquelle le Gouvernement sollicite le retrait de cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 4.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 9, présenté par Mmes Souyris, Poncet Monge, Ollivier et de Marco, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot, Mellouli et Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 3

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur la prévention, la détection et la prise en charge des violences sexistes et sexuelles dans les formations en santé.

Ce rapport présente :

1° Un état des lieux des signalements, procédures disciplinaires et dispositifs de soutien existants au sein des universités, facultés, établissements hospitaliers et structures de stage accueillant des étudiantes et étudiants en santé ;

2° Des propositions visant à renforcer la prévention et la formation obligatoire des encadrants, tuteurs et référents de stage en matière de lutte contre les violences sexistes et sexuelles ;

3° La création, dans chaque université comportant une faculté ou école de santé, d’un référent violences sexistes et sexuelles dédié aux formations médicales et paramédicales ;

4° Les modalités de coopération entre les établissements d’enseignement supérieur, les hôpitaux et les associations étudiantes pour favoriser la libération de la parole, le signalement et la protection des victimes.

La parole est à Mme Anne Souyris.

Mme Anne Souyris. Nous le savons, vous n’aimez pas les demandes de rapport…

Pour autant, pour des raisons de recevabilité financière, je n’ai malheureusement pas la capacité de demander au Gouvernement de donner à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes les moyens qui lui sont indispensables.

Selon une enquête de 2021 de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), 49 % des étudiantes en stage ont déclaré avoir été victimes de remarques sexistes. D’après une autre enquête, réalisée en 2024, la moitié des étudiants de médecine éprouvaient des symptômes d’anxiété.

Le plan national d’action contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) dans l’enseignement supérieur et la recherche (ESR) 2021-2025, les différentes recommandations professionnelles, la création de cellules d’écoute et de signalement dans les universités sont autant de dispositifs qui complexifient malheureusement leur lisibilité.

Alors que le nombre de signalements ne cessent d’augmenter et que les agresseurs restent le plus souvent impunis, annoncer un plan national ne suffit plus. Ces stratégies interministérielles sont essentiellement symboliques. Il faut désormais des mesures appliquées, évaluées et financées.

En demandant un rapport d’évaluation et de propositions concrètes pour améliorer la prévention, la formation et la protection des étudiantes et des étudiants, j’invite le Gouvernement à agir avec le sérieux qu’appelle un tel problème.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Véronique Guillotin, rapporteure. Les violences sexistes et sexuelles dans les formations de santé constituent un sujet d’une gravité incontestable et un enjeu majeur ; nous y sommes tous sensibles dans cet hémicycle.

Selon une enquête du Conseil national de l’Ordre des médecins, près d’une femme médecin sur deux a été victime de VSS de la part d’un autre médecin, en majorité pendant son parcours étudiant.

Dans le cadre du rapport sur la soumission chimique que j’ai récemment remis au Gouvernement avec ma collègue Sandrine Josso, j’ai formulé des recommandations visant à rendre obligatoires les formations aux VSS pour les dirigeants d’université, d’institut et école et à intégrer à la formation des professionnels de santé des modules de prévention et de sensibilisation aux VSS.

Les représentants des universités et UFR que nous avons auditionnés s’y sont déclarés favorables. Tous ces établissements doivent maintenant déployer des dispositifs de prévention. Sur ce sujet, il ne faut rien lâcher et continuer à œuvrer.

Pour autant, sur cette demande de rapport, la commission émet un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Philippe Baptiste, ministre. Ces violences inadmissibles et honteuses doivent évidemment être combattues avec la plus grande virulence.

Vous l’avez mentionné, en plus des dispositifs communs à toutes les disciplines et à toutes les facultés, il existe des dispositifs spécifiques dans le domaine de la santé : plans numéros d’appels et d’écoute… Madame la sénatrice, je suis évidemment à votre disposition pour vous les présenter et vous en communiquer les résultats au fur et à mesure.

C’est donc non pas d’un nouveau rapport que nous avons besoin, mais bien d’une mise en œuvre pratique et efficiente des dispositifs en vigueur.

Par conséquent, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 9.

(Lamendement nest pas adopté.)

Chapitre II

Territorialiser le troisième cycle des études de médecine

Article 4

I. – Le code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’article L. 632-2 est ainsi modifié :

a) Le I est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Le nombre d’étudiants de troisième cycle des études de médecine susceptibles d’être affectés par spécialité et par subdivision territoriale est défini, en priorité, en fonction de la situation de la démographie médicale dans les différentes spécialités, des besoins de santé des territoires et des besoins prévisionnels du système de santé, puis des capacités de formation en stage et hors stage.

« L’affectation par subdivision territoriale et par spécialité des étudiants ayant satisfait aux exigences des épreuves mentionnées au 1° du présent I s’effectue selon des modalités prenant en compte les résultats à ces mêmes épreuves ainsi que le parcours de formation, le projet professionnel des étudiants et, le cas échéant, leur situation de handicap. Elle permet aux deux tiers de ces étudiants d’accéder au troisième cycle dans la région dans laquelle ils ont validé le deuxième cycle des études de médecine. » ;

b) Le III est ainsi modifié :

– après le mot : « territoriale, », la fin du 4° est ainsi rédigée : « au terme d’une procédure de concertation destinée à évaluer notamment les besoins de santé des territoires et les besoins prévisionnels du système de santé ; »

– la seconde phrase du 5° est supprimée ;

2° (nouveau) Au quatrième alinéa de l’article L. 632-6, les mots : « 5° du III du même article L. 632-2 » sont remplacés par les mots : « dernier alinéa du I de l’article L. 632-2 » ;

3° (nouveau) Au premier alinéa du III de l’article L. 713-4, la référence : « 5° du III » est remplacée par la référence : « dernier alinéa du I ».

II (nouveau). – Le I entre en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État et, au plus tard, le 1er septembre 2027.

M. le président. L’amendement n° 24, présenté par M. Khalifé et Mme Guillotin, au nom de la commission des affaires sociales, est ainsi libellé :