M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Les auteurs de cet amendement proposent que l’obligation de dépôt des comptes des entreprises soit opposable aux commissaires aux comptes. On ferait ainsi peser cette obligation sur les commissaires aux comptes plutôt que sur les sociétés fautives, ce qui n’est pas pertinent.

En outre, les commissaires aux comptes risquent d’être débordés : si les TPE et les PME n’ont pas d’obligation formelle de dépôt de leurs comptes, pour autant, les commissaires risquent, faute de temps, de se trouver en défaut pour déposer tous les comptes, tandis que les plus grosses entreprises disposent de leurs propres commissaires et que leur personnel est en mesure d’accomplir ce travail.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis pour les mêmes raisons.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. Vous me voyez sourire : je parlais de réticences, mais il s’agit plutôt d’une réelle résistance ! Il ne s’agit nullement de rendre cette obligation opposable aux commissaires aux comptes ; simplement, on leur confie une mission supplémentaire.

Je rappelle que le commissaire aux comptes est indépendant et qu’il doit attester que la comptabilité est sincère. Sa responsabilité est déjà engagée s’il ne respecte pas les prescriptions de la loi.

Il leur suffira de transmettre les comptes certifiés au greffe du tribunal de commerce en même temps qu’à l’entreprise. Je ne vois pas en quoi cela pose problème.

En seraient-ils débordés ? Mon Dieu, non : c’est un dépôt dématérialisé, qui s’effectue par un simple clic. Les commissaires vérifient déjà nécessairement les comptes, leur devoir est de délivrer une certification de sincérité. La mission supplémentaire que nous leur demandons d’assumer ne les surchargera pas, c’est un simple test de bonne volonté. Cela ne coûtera rien à personne, mais, à vous croire, ce serait Cuba !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 67 rectifié.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. L’amendement n° 71, présenté par M. Lurel, Mme Bélim, M. Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L’article 22 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;

b) Les mots : « ou qui » sont remplacés par les mots : « , qui » ;

c) Après les mots : « activité économique », la fin de l’alinéa est ainsi rédigée : « ou dont le chiffre d’affaires total hors taxes réalisé dans le territoire concerné est supérieur à un million d’euros transmettent, le 30 juin de chaque année, au représentant de l’État dans le territoire et à l’observatoire des prix, des marges et des revenus compétent les comptes sociaux et la comptabilité analytique de leur dernier exercice clos. » ;

2° Le second alinéa est remplacé par quatre alinéas ainsi rédigés :

« II. – Chaque trimestre, les entreprises mentionnées au I, les commerçants détaillants dont la surface de vente est supérieure ou égale à 300 mètres carrés ainsi que les commerçants en gros transmettent au représentant de l’État dans le territoire, au service statistique public et à l’observatoire des prix, des marges et des revenus compétent :

« 1° Les taux de marge en valeur pratiquée sur les produits commercialisés et leurs évolutions ;

« 2° Le cas échéant, les taux de marge pratiqués tout au long de la chaîne d’approvisionnement, de livraison et de commercialisation des produits et leurs évolutions ;

« 3° Les prix d’achat et de vente des produits alimentaires et non alimentaires et leurs évolutions ;

« 4° Le cas échéant, pour les filiales des entreprises détenues à plus de 25 % par leur société mère, les prix de cession interne et leurs évolutions.

« III. – En l’absence de transmission des données et documents mentionnés aux I et II, le représentant de l’État dans le territoire saisit le juge des référés afin que ce dernier adresse à l’entreprise une injonction de transmettre lesdits données et documents sous trois semaines et sous astreinte. Le montant de cette astreinte ne peut être inférieur à 2 % du chiffre d’affaires journalier moyen hors taxes réalisé par l’entreprise en France lors du dernier exercice clos, par jour de retard à compter de la date fixée par l’injonction.

« L’injonction fait l’objet d’une mesure de publicité. L’entreprise est informée, lors de la procédure contradictoire préalable au prononcé de l’injonction, de la nature et des modalités de la publicité envisagée. La publicité est effectuée aux frais du professionnel destinataire de l’injonction.

« IV. – Les informations transmises en application du présent article ne sont pas diffusées auprès des consommateurs ni rendues publiques.

« V. – Le I entre en vigueur le 1er janvier 2027. Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret. »

II. – La perte de recettes résultant pour l’État du présent article est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La parole est à M. Victorin Lurel.

M. Victorin Lurel. Le dispositif de cet amendement reprend celui de l’article 1er de la proposition de loi visant à lutter contre la vie chère en renforçant le droit de la concurrence et de la régulation économique outre-mer, telle que je l’avais déposée. Son objet est de rendre plus prescriptif l’article 22 de la loi du 20 novembre 2012 afin, là encore, de renforcer la transparence des activités économiques.

Sans rentrer dans le détail de notre proposition, je dirai simplement que nous demandons l’instauration d’obligations de transparence spécifiques pour les entreprises dont plus de 25 % du capital est détenu par une société-mère.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Il est défavorable, monsieur le président.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Ce dispositif ferait doublon avec celui que vous avez adopté à l’article 9, aux termes duquel le représentant de l’État peut saisir le président du tribunal de commerce territorialement compétent pour enjoindre à une personne morale de déposer ses comptes.

En outre, une obligation de transmission des informations sur les prix et les quantités des produits de grande consommation est également instaurée à l’article 6, que votre assemblée a renforcé.

Cet amendement me semblant donc satisfait, j’en demande le retrait ; à défaut, l’avis du Gouvernement serait défavorable.

M. le président. Monsieur Lurel, l’amendement n° 71 est-il maintenu ?

M. Victorin Lurel. Mme la ministre affirme que l’amendement est satisfait, mais je n’en suis pas convaincu. Je le maintiens !

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 71.

(Lamendement nest pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 56, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 22 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Sont ajoutés dix alinéas ainsi rédigés :

« Le bénéfice des aides économiques accordées par l’État ou les collectivités territoriales dans les collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, qu’elles revêtent la forme de crédits d’impôt, de défiscalisation, de réductions de cotisations sociales, de subventions directes ou d’avantages fiscaux de quelque nature que ce soit, est subordonné au respect de l’obligation de publication des comptes sociaux conformément au droit qui s’applique à l’entreprise bénéficiaire.

« Sont notamment visés par cette disposition :

« 1° Les dispositifs de défiscalisation applicables aux investissements productifs en outre-mer ;

« 2° Les aides aux entreprises relevant de la loi de finances relative à l’économie des outre-mer ;

« 3° Les exonérations de cotisations patronales ou de charges sociales ;

« 4° Les subventions d’investissement ou de fonctionnement ;

« 5° Toute autre aide financière publique, directe ou indirecte.

« L’entreprise bénéficiaire doit justifier, au moment de la demande et chaque année du versement de l’aide, qu’elle s’acquitte de l’obligation de publication de ses comptes. Cette justification doit être apportée auprès de l’autorité publique qui octroie l’aide.

« Le non-respect de cette obligation de publication ou la falsification des comptes produits est constitutif d’une violation des conditions d’octroi de l’aide et justifie le remboursement total ou partiel des aides versées, sans préjudice des sanctions prévues par le droit pénal.

« …. – Un arrêté du ministre chargé de l’économie et du ministre chargé des finances précise les modalités d’application du présent article, notamment les délais de production des justificatifs et les seuils de chiffre d’affaires au-dessus desquels l’obligation de publication s’impose. »

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Je le retire au profit de l’amendement n° 55 rectifié qui suit, monsieur le président.

M. le président. L’amendement n° 56 est retiré.

L’amendement n° 55 rectifié, présenté par Mme Bélim, MM. Lurel et Omar Oili, Mme Artigalas, MM. Kanner, Bouad, Cardon, Mérillou, Michau, Montaugé, Pla, Redon-Sarrazy, Stanzione, Tissot et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 9

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

L’article 22 de la loi n° 2012-1270 du 20 novembre 2012 relative à la régulation économique outre-mer et portant diverses dispositions relatives aux outre-mer est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le bénéfice des aides économiques accordées par l’État ou les collectivités territoriales est subordonné au respect de l’obligation de publication des comptes sociaux conformément au droit qui s’applique à l’entreprise bénéficiaire. Les modalités d’application du présent alinéa sont définies par décret. »

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Cet amendement vise à renforcer la transparence financière et la responsabilité des entreprises bénéficiant d’aides publiques dans les territoires d’outre-mer, en subordonnant l’accès à ces aides au respect de l’obligation de publication des comptes sociaux.

Les aides économiques accordées aux entreprises par l’État et les collectivités représentent des ressources publiques substantielles, prélevées sur les finances publiques ultramarines ou nationales. Il est légitime que la collectivité exige en contrepartie une transparence financière minimale de la part de leurs bénéficiaires.

À La Réunion comme dans d’autres territoires ultramarins, certaines entreprises bénéficiaires d’aides économiques refusent de se soumettre à l’obligation de publication de leurs comptes sociaux, ou la contournent, ce qui empêche l’évaluation du besoin qu’elles ont de ces aides. Sans comptes certifiés, il est impossible de vérifier que l’entreprise justifie réellement de la nécessité d’une aide.

Cela favorise l’opacité et les abus. La non-publication permet de cacher les bénéfices réels, les structures de groupe, les flux financiers vers des tiers ou encore les rémunérations excessives de dirigeants.

Cela crée une iniquité, car les TPE-PME, respectueuses de leurs obligations comptables, voient leurs concurrents bénéficier d’avantages publics tout en échappant aux contrôles.

Enfin, cela fragilise les finances publiques, car l’État aide des entreprises sans pouvoir vérifier si l’aide était justifiée ou si elle a atteint son objectif.

Notre proposition s’inscrit ainsi dans la continuité de la loi de modernisation de l’économie de 2008 et de la loi Lurel de 2012 ; elle constitue aussi un prolongement des directives comptables européennes imposant la publication des comptes pour les entreprises dépassant certains seuils.

Nous n’entendons pas, par cet amendement, remettre en cause les aides justifiées : toute entreprise respectant ses obligations légales de publication pourra continuer à en bénéficier. Seules les entreprises refusant une transparence élémentaire en seront exclues.

M. Victorin Lurel. Un bon amendement !

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Micheline Jacques, rapporteur. Les sanctions proposées sont disproportionnées, d’autant que l’article 9 instaure déjà un nouveau régime de sanctions en cas de non-dépôt des comptes, régime qui a de surcroît été renforcé en commission par un amendement des rapporteurs.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Il est proposé dans cet amendement, me semble-t-il, non pas d’instaurer une sanction, mais de poser une condition à l’octroi d’aides.

Cet objectif me semble louable, tant l’absence de publication des comptes sociaux peut traduire un manque de transparence quant au besoin effectif d’aides, notamment pour ce qui est du bénéfice de l’entreprise.

Les règles européennes relatives aux aides d’État ne font pas de la publication des comptes sociaux une condition de l’octroi de telles aides, mais n’empêchent pas pour autant les États membres de soumettre à cette obligation les entreprises qui en bénéficient. Notons d’ailleurs que les aides fiscales à l’investissement outre-mer sont d’ores et déjà conditionnées au dépôt des comptes.

J’approuve donc l’objet de cet amendement, dont la rédaction est en outre meilleure que celle de l’amendement n° 56 qui a été retiré. Par conséquent, l’avis du Gouvernement est favorable.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.

Mme Audrey Bélim. Voter cet amendement ne mange pas de pain, mes chers collègues ! Il est tout de même question des dotations destinées aux territoires ultramarins, dotations qui sont reversées à ces entreprises sous forme d’aides. Il est normal que ces aides fassent à un moment donné l’objet d’un certain contrôle et que des sanctions soient prononcées si la nécessité de ces aides ne peut être vérifiée.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 55 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 9.

TITRE III

RENFORCER LA CONCURRENCE

Après l’article 9
Dossier législatif : projet de loi de lutte contre la vie chère dans les outre-mer
Après l’article 10

Article 10

I. – L’article L. 461-1 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « dix-sept » est remplacés par le mot : « dix-neuf » ;

b) Après le 3°, il est inséré un 4° ainsi rédigé :

« 4° Deux personnalités choisies en raison de leur expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer. » ;

c) Au septième alinéa, les références : « 2° et 3° » sont remplacés par les références : « 2°, 3° et 4° » ;

2° Au III, les mots : « , sous réserve du septième alinéa du II, » sont supprimés.

II. – Le mandat des membres nommés pour la première fois en application du 4° du II de l’article L. 461-1 du code de commerce prend effet à compter du 18 septembre 2026. Le mandat du membre nommé en second prend fin le 17 mars 2029 et peut être renouvelé pour une durée de cinq ans.

III. – Le premier alinéa de l’article L. 461-4 du code de commerce est ainsi rédigé :

« L’Autorité de la concurrence dispose de services d’instruction, dont l’un traite les sujets concernant les collectivités de l’article 73 de la Constitution, Saint-Pierre-et-Miquelon, Saint-Martin, Saint-Barthélemy et Wallis-et-Futuna. Ils sont dirigés par un rapporteur général nommé par arrêté du ministre chargé de l’économie après avis du collège. »

IV. – Après l’article 6 de l’ordonnance n° 2014-471 du 7 mai 2014 portant extension et adaptation à la Nouvelle-Calédonie de dispositions du livre IV du code de commerce relevant de la compétence de l’État en matière de pouvoirs d’enquête, de voies de recours, de sanctions et d’infractions, il est inséré un article 6-1 ainsi rédigé :

« Art. 6-1. – Les décisions par lesquelles le rapporteur général de l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, en application de l’article Lp. 463-4 du code de commerce applicable en Nouvelle-Calédonie, refuse la protection du secret des affaires ou lève la protection accordée peuvent faire l’objet d’un recours en réformation ou en annulation devant le premier président de la cour d’appel de Paris ou son délégué.

« L’ordonnance du premier président de la cour d’appel de Paris statuant sur ce recours peut faire l’objet d’un pourvoi en cassation.

« Ce recours et ce pourvoi sont instruits et jugés en chambre du conseil.

« Un décret en Conseil d’État détermine les délais de recours et de pourvoi et fixe la date d’entrée en vigueur de ces dispositions, au plus tard le 1er janvier 2026. »

V. – Après l’article L. 462-9-1 du code de commerce, il est inséré un article L. 462-9-1-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 462-9-1-1. – L’Autorité de la concurrence peut, sans que puisse y faire obstacle l’obligation de secret professionnel, communiquer à l’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, de sa propre initiative ou sur demande de cette dernière, toute information ou document qu’elle détient ou qu’elle recueille, dans l’exercice de ses propres missions ou de celles exercées pour le compte de cette autorité. »

VI. – Le III de l’article L. 430-2 du code de commerce est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « un ou plusieurs départements d’outre-mer, dans le Département de Mayotte, dans les îles Wallis et Futuna ou dans » sont remplacés par les mots : « les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et » ;

2° Au troisième alinéa, le nombre : « 5 » est remplacé par le nombre : « 3 ».

M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, sur l’article.

M. Marc Laménie. L’article 10 vise à augmenter les moyens de l’Autorité de la concurrence (ADLC).

Je veux avant tout souligner la qualité du travail de la commission des affaires économiques sur ce texte ; en témoigne l’ampleur de son rapport, de plus de 130 pages. Ce travail est aussi une marque de solidarité entre ceux qui, parmi nous, représentent des territoires de métropole et ceux qui représentent nos outre-mer ; cette solidarité aussi mérite d’être relevée.

L’ADLC, autorité administrative indépendante instituée par la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie, est composée d’un collège de dix-sept membres nommés pour cinq ans. Ses services d’instruction emploient 123 équivalents temps plein travaillé (ETPT).

Elle mène une action importante dans les outre-mer : depuis 2008, elle a rendu 46 décisions les concernant, pour un total de 232 millions d’euros d’amendes, dont 177 millions d’euros prononcés à l’encontre d’auteurs de pratiques anticoncurrentielles. Elle a également publié plusieurs avis relatifs à l’outre-mer, qui témoignent, eux aussi, de l’importance de cette autorité.

Aux termes de cet article, le nombre de membres du collège de l’ADLC passerait à dix-neuf : on adjoindrait aux membres existants deux « personnalités choisies en raison de leur expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer ».

L’article prévoit aussi la formation au sein de l’Autorité d’un service d’instruction spécifique pour l’outre-mer.

L’article procède également à une augmentation des moyens de la DGCCRF en outre-mer.

Enfin, il abaisse outre-mer, de 5 millions à 3 millions d’euros, le seuil de notification en matière de concentration dans le commerce de détail, secteur très sensible dans les territoires ultramarins au vu du contexte de crise de la vie chère. On reprend ainsi l’une des mesures de la proposition de loi de notre collègue Victorin Lurel adoptée par notre assemblée le 5 mars 2025.

Au vu de ces éléments, les membres du groupe Les Indépendants voteront évidemment cet article.

M. le président. L’amendement n° 136 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Après le mot :

personnalités

insérer les mots :

, issues de deux bassins géographiques différents,

La parole est à Mme Audrey Bélim.

Mme Audrey Bélim. Le présent article prévoit l’ouverture du collège de l’Autorité de la concurrence à des personnalités ayant une « expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer ».

Nous proposons que ces représentants ultramarins soient issus de deux bassins géographiques différents, afin de renforcer la prise en compte de la diversité de nos territoires.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Frédéric Buval, rapporteur. Imposer que les deux membres du collège de l’Autorité de la concurrence nommés en tant qu’experts des questions ultramarines soient issus de deux bassins géographiques différents paraît trop restrictif et exclut la possibilité que ces personnalités soient issues de l’Hexagone.

Il importe avant tout de nommer les personnalités les plus qualifiées possible en matière de concurrence outre-mer et de connaissance des économies ultramarines, quand bien même elles devraient provenir d’un même bassin géographique ultramarin ou de l’Hexagone.

L’avis est donc défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Naïma Moutchou, ministre. Même avis.

M. le président. La parole est à M. Victorin Lurel, pour explication de vote.

M. Victorin Lurel. À en croire notre rapporteur, la précision que nous demandons reviendrait à imposer une sorte de décision ethnique, voire chromatique… Il faudrait que l’on soit originaire des outre-mer ; mais ce n’est en aucune manière ni la lettre ni l’esprit de notre amendement !

Si vous êtes expert de tel ou tel territoire ultramarin, du Pacifique ou de l’océan Indien, de l’Atlantique ou des Caraïbes, ce ne sont évidemment pas vos origines qui seront appréciées, mais votre expertise et vos qualifications. Tel est le sens de notre amendement, et non pas le communautarisme échevelé que vous voulez y voir ! Il importe de ne pas le dévoyer, mais de bien en comprendre le sens.

M. le président. La parole est à Mme Catherine Conconne, pour explication de vote.

Mme Catherine Conconne. Nous voici devant un cas où la notion d’« ultramarin », contre laquelle je me bats régulièrement, trouve toutes ses limites. Qu’est-ce donc qu’une personnalité ultramarine experte ? J’avoue que cela me pose problème. Ce doit être une espèce d’homme-orchestre, qui connaîtrait sur le bout des doigts tout ce qui se passe à Wallis-et-Futuna, en Nouvelle-Calédonie, en Guadeloupe… Il faut arrêter !

Depuis le début de l’examen de ce projet de loi, je n’ai cessé d’entendre dire qu’il faut absolument différencier les territoires, qu’aucun d’entre eux ne ressemble à un autre. Or on persiste à nous soumettre des dispositions qui vont dans le sens contraire.

Qu’on me donne donc l’ADN d’un expert ultramarin ! J’avoue peiner à qualifier cet homme ou cette femme-orchestre, qui saurait tout sur l’économie, la concurrence, les forces en présence, etc., d’une bonne dizaine de pays. Certains disent que ces personnalités existent ; pour ma part, je demande à voir.

M. le président. La parole est à Mme Audrey Bélim, pour explication de vote.

Mme Audrey Bélim. Si vous me permettez d’insister, mes chers collègues, je tiens à rappeler les termes sur lesquels porte notre amendement : « deux personnalités choisies en raison de leur expertise en matière économique ou en matière de concurrence dans les outre-mer ». Ce n’est pas le physique qui est visé, mais bien la compétence, la connaissance, l’appétence pour cette matière et la capacité à la défendre demain.

M. le président. Je mets aux voix l’amendement n° 136 rectifié.

(Lamendement est adopté.)

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 133 rectifié, présenté par Mme Bélim et M. Lurel, est ainsi libellé :

I. – Alinéas 18 à 20

Remplacer ces alinéas par un paragraphe ainsi rédigé :

VI. – Le III de l’article L. 430-2 du code de commerce est ainsi rédigé :

« III. – Lorsque au moins une des parties à la concentration exerce tout ou partie de son activité dans les collectivités relevant de l’article 73 de la Constitution et les collectivités d’outre-mer de Saint-Pierre-et-Miquelon, de Saint-Martin ou de Saint-Barthélemy, est soumise aux dispositions des articles L. 430-3 et suivants du présent titre toute opération de concentration, au sens de l’article L. 430-1, lorsque sont réunies les deux conditions suivantes :

« 1° Le chiffre d’affaires total hors taxes réalisé individuellement dans au moins un des départements ou collectivités territoriales concernés par deux au moins des entreprises ou groupes de personnes physiques ou morales concernés est supérieur à 15 millions d’euros, ou à 3 millions d’euros dans le secteur du commerce de détail sans qu’il soit nécessaire que ce seuil soit atteint par l’ensemble des entreprises concernées dans le même département ou la même collectivité territoriale ;

« 2° L’opération n’entre pas dans le champ d’application du règlement (CE) n° 139/2004 du Conseil, du 20 janvier 2004, précité.

« Les modalités d’application du présent III sont précisées par décret en Conseil d’État. »

La parole est à Mme Audrey Bélim.