En revanche, une telle mesure de rétorsion, car c'est bien de cela qu'il s'agit, n'existe pas dans les autres champs de la fraude. Ainsi, pour les fraudes massives aux cotisations, aucune mesure équivalente n'est prévue. Les entreprises redressées pour travail dissimulé ne se voient pas privées, même temporairement, des allègements généraux de cotisations sur les salaires à venir, que l'on pourrait pourtant suspendre six mois avant de les rétablir ensuite. De même, s'agissant des fraudes aux prestations des professionnels de santé, dont on vient de débattre, aucune disposition comparable n'existe.

Pour toutes ces raisons, nous proposons de supprimer cet article et de rétablir pleinement le principe de proportionnalité.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Olivier Henno, rapporteur. Un fraudeur est un fraudeur : il y a dans tous les cas de figure une forme de rupture de confiance, qui justifie une suspension temporaire du bénéfice du tiers payant. Ce dispositif constituera un frein à la récidive, une mesure efficace pour lutter contre toute fraude. C'est pourquoi la commission émet un avis défavorable sur ces deux amendements identiques.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Le tiers payant évite le renoncement aux soins. Le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

M. le président. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.

Mme Marion Canalès. Nous sommes parfaitement d'accord avec M. le rapporteur : un fraudeur est un fraudeur. Hier, nous parlions des cabinets de conseil qui aident certaines entreprises à mettre en place des procédés constitutifs de fraude fiscale : on ne leur impose pas de double ou de triple peine ! Pourquoi s'en prendre à un dispositif annexe, le tiers payant, lorsqu'une personne est condamnée et assume sa peine – ce qui est normal ? Cela semble profondément disproportionné.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, vous auriez dû aller jusqu'au bout de votre raisonnement et émettre un avis favorable sur nos amendements. Cela semble bien difficile, lorsqu'une proposition émane d'une certaine partie de l'hémicycle…

Vous avez raison de rappeler que le tiers payant sert avant tout à faire reculer le renoncement aux soins. Le fait de devoir avancer les frais conduira en effet, pour nombre de nos concitoyens, à un tel renoncement, ce qui, in fine, coûtera plus cher à la sécurité sociale.

Cette mesure est superfétatoire ; je comprends que, pour vous, en remettre une petite couche contre les assurés ne fait jamais de mal, mais, en l'occurrence, cela n'a pas lieu d'être.

Enfin, comment imaginer qu'une telle mesure soit dissuasive ? Croire que les assurés suivent nos débats dans le détail et sont au courant des dispositifs législatifs que nous votons relève de l'illusion. Le tiers payant joue un rôle dans l'accès aux soins. Il doit continuer à le faire et ne saurait devenir un instrument de rétorsion.

M. le président. La parole est à Mme Laurence Rossignol, pour explication de vote.

Mme Laurence Rossignol. J'ai une question à poser à ceux de nos collègues qui soutiennent l'article 17 ter, ou à ceux qui n'ont pas le courage de s'y opposer clairement : priver un individu de soins, est-ce une sanction juste et compatible avec la déontologie des médecins, avec l'État de droit et avec l'idée que nous nous faisons des droits humains ? On ne peut répondre que par oui ou par non. (Murmures désapprobateurs sur les travées du groupe Les Républicains.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur.

M. Olivier Henno, rapporteur. C'est une manœuvre dialectique bien connue que de réduire le débat à une opposition stérile entre partisans du « oui » et partisans du « non ». Il ne s'agit pas du tout de priver quiconque de soins. Il s'agit simplement de suspendre temporairement le bénéfice du tiers payant, parce qu'il nous semble que ce serait dissuasif. Alors, s'il vous plaît, pas de caricatures !

Mme Laurence Rossignol. On est pour ou contre !

M. Olivier Henno, rapporteur. En tous les cas, nous n'allons pas tomber dans votre piège, ma chère collègue, nous connaissons aussi la dialectique… (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 98 et 114.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'article 17 ter.

(L'article 17 ter est adopté.)

Après l'article 17 ter

M. le président. Je suis saisi de quatre amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

Les deux premiers amendements sont identiques.

L'amendement n° 38 rectifié quater est présenté par M. Menonville, Mme N. Goulet, MM. Laugier, Delahaye et Dhersin, Mme Saint-Pé, M. J.M. Arnaud, Mmes Antoine, Loisier et Romagny, MM. Levi et Kern, Mmes Jacquemet et Gacquerre et M. Haye.

L'amendement n° 91 rectifié est présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Après l'article 17 ter 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L'article L. 161-36-3 est ainsi modifié :

a) Le premier alinéa est ainsi modifié :

– à la troisième phrase, après les mots : « l'organisme d'assurance maladie » , sont insérés les mots : « déclenche la procédure d'enquête ou » et les mots : « l'avant-dernier alinéa de » sont supprimés ;

– sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées : « Ce décret fixe également les conditions et les limites dans lesquelles le tiers payant peut être suspendu, à l'issue des contrôles adéquats, dès l'envoi de la notification de placement hors de la convention ou de suspension de ses effets dans les conditions prévues à l'article L. 162-15-1. Ce décret détermine également le délai à l'expiration duquel le professionnel peut appliquer le tiers payant lorsque celui-ci est de nouveau placé sous le régime conventionnel à la suite d'une sanction ou condamnation pour fraude. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Pour l'application des dispositions prévues au premier alinéa, il est tenu compte de l'ensemble des activités du professionnel à titre libéral ou au sein d'un ou plusieurs centres de santé. »

2° L'article L. 871-1 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Elles prévoient la suspension du mécanisme du tiers payant à compter de la date à laquelle les organismes d'assurance maladie complémentaire sont informés par l'organisme local d'assurance maladie de la mise en œuvre de la procédure visée à l'article L. 114-9 du code de la sécurité sociale pour des faits de nature à constituer une fraude ou de la notification de placement hors de la convention ou de suspension de ces effets dans les conditions prévues à l'article L. 162-15-1. »

La parole est à Mme Nathalie Goulet, pour présenter l'amendement n° 38 rectifié quater.

Mme Nathalie Goulet. Cet amendement, déposé par notre collègue Franck Menonville, a pour objet d'autoriser la suspension du tiers payant complémentaire pour les professionnels de santé condamnés pour fraude.

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l'amendement n° 91 rectifié.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement vise à lutter contre la fraude à l'assurance maladie et aux complémentaires santé, en agissant sur le tiers payant appliqué par certains professionnels de santé. Il s'agit de donner davantage de prérogatives à l'assurance maladie en lui permettant de suspendre le tiers payant dès l'ouverture d'une enquête ou dès la notification d'un déconventionnement.

Une telle mesure permettrait d'interrompre rapidement les versements injustifiés et de sécuriser la dépense publique. Le tiers payant constitue une avancée majeure pour les droits des personnes malades. Il garantit un accès aux soins pour toutes et tous, sans que les difficultés financières ne deviennent un obstacle. Il évite ainsi le renoncement aux soins.

Cependant, depuis quelques années, certains professionnels ont détourné ce dispositif à leur profit, au détriment des patients les plus vulnérables. D'après Alternatives économiques, qui reprend des estimations de la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam), près des trois quarts des fraudes détectées, soit 237 millions sur 316 millions d'euros, résultent de professionnels de santé. Ces chiffres montrent l'importance qu'il y a à combler les déficits causés par les abus observés en matière de tiers payant, des abus qui détournent ce dispositif de sa fonction première de solidarité et d'accès aux soins.

Dans un contexte de maîtrise des dépenses sociales, il n'est pas acceptable de laisser se développer de telles pratiques. Celles-ci constituent une atteinte au système de santé, aux patients fragiles et aux principes éthiques qui régissent l'exercice médical.

Même si elle n'est en rien comparable à la fraude fiscale, la fraude aux prestations de l'assurance maladie atteint un montant que la Cour des comptes a évalué entre 3,8 et 4,5 milliards d'euros en 2023, soit plus du tiers du déficit de la branche cette année-là.

En renforçant les moyens d'action de l'assurance maladie, cet amendement vise à contribuer à la protection de notre système social et à garantir son bon fonctionnement.

M. le président. L'amendement n° 264 rectifié septies, présenté par Mmes Aeschlimann et Josende, MM. Khalifé et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. Mizzon, Naturel et Laugier, Mme Gosselin, MM. Somon et Burgoa, Mme Bellamy, MM. Belin et H. Leroy, Mmes Micouleau et P. Martin, MM. Bruyen, Delia, Chatillon et Milon et Mmes Malet, Romagny, Guidez, Bellurot et Jacques, est ainsi libellé :

Après l'article 17 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l'article L. 161-36-3, les mots : « de l'avant-dernier » sont remplacés par les mots : « au quatrième ».

2° Le dernier alinéa de l'article L. 871-1 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Dans les conditions prévues à l'article L. 161-36-3, les organismes d'assurance maladie complémentaire peuvent déroger au délai maximal de paiement prévu pour le tiers payant. »

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Par cet amendement, nous partons du constat qu'aujourd'hui un déséquilibre flagrant persiste dans notre système de lutte contre la fraude au tiers payant. L'assurance maladie dispose d'un outil essentiel : la possibilité de déroger au délai de remboursement en cas de contrôle pour fraude. Ce levier est efficace et permet de prévenir le versement d'indus à des professionnels faisant l'objet de contrôles.

En revanche, les organismes complémentaires, pourtant confrontés aux mêmes risques, se voient privés de cette possibilité. Cet amendement de bon sens vise donc à rétablir une égalité de traitement entre l'assurance maladie et les organismes complémentaires : nous souhaitons permettre aux organismes complémentaires de déroger également au délai de paiement du tiers payant pendant que les services de l'assurance maladie mènent leurs contrôles.

Enfin, il tend à corriger une erreur matérielle à l'article L. 161-36-3 du code de la sécurité sociale, afin de garantir la clarté et la précision de notre système juridique.

M. le président. L'amendement n° 274 rectifié septies, présenté par Mmes Aeschlimann et Josende, MM. Khalifé et Panunzi, Mme Belrhiti, MM. Mizzon, Naturel et Laugier, Mme Gosselin, MM. Somon et Burgoa, Mme Bellamy, MM. Belin et H. Leroy, Mmes Micouleau et P. Martin, MM. Bruyen, Delia, Chatillon et Milon et Mmes Malet, Romagny, Guidez, Bellurot et Jacques, est ainsi libellé :

Après l'article 17 ter 

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après la troisième phrase du premier alinéa de l'article L. 161-36-3 du code de la sécurité sociale, est insérée une phrase ainsi rédigée : « La dérogation au délai maximal comprend les activités du professionnel de santé exercées à titre libéral, au sein d'un ou plusieurs centres de santé ou sociétés de téléconsultation mentionnées à l'article L. 4081-1 du code de la santé publique. »

La parole est à Mme Marie-Do Aeschlimann.

Mme Marie-Do Aeschlimann. Nous avons vu, tout au long de ces dernières années, que certains professionnels détournaient la garantie de paiement liée au tiers payant à des fins frauduleuses.

L'article L. 161-36-3 du code de la sécurité sociale prévoit déjà la possibilité de suspendre le bénéfice du tiers payant pour un professionnel reconnu comme fraudeur. Mais, aujourd'hui, cette suspension ne s'applique qu'à l'activité concernée, quand bien même le professionnel exercerait parallèlement dans d'autres structures, parfois en téléconsultation ou sous d'autres statuts.

Cet amendement vise donc à garantir l'effectivité de la suspension du tiers payant lorsque le professionnel exerce dans différents lieux ou sous divers statuts. Il ne s'agit pas d'alourdir la sanction, mais d'en renforcer la cohérence et de garantir l'efficacité de la lutte contre la fraude à l'assurance maladie. Une fraude doit produire les mêmes effets, quel que soit le cadre d'exercice du professionnel de santé concerné.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Olivier Henno, rapporteur. Les deux amendements identiques nos 38 rectifié quater et 91 rectifié visent à déroger au délai de paiement maximal de remboursement du tiers payant pour les professionnels de santé dès l'ouverture d'une enquête pour fraude, mais aussi à suspendre le tiers payant dès la notification de la sanction de déconventionnement pour fraude, et non à la date d'effet du déconventionnement.

En allongeant les délais de remboursement du tiers payant dès l'engagement d'une enquête, cette disposition ne respecterait pas la présomption d'innocence qui s'applique aussi aux professionnels de santé. Il revient à l'assurance maladie, après avoir prouvé l'existence d'une fraude, de sanctionner le professionnel de santé et de récupérer l'indu après l'application de la sanction, pas avant. La suspension du tiers payant dès la notification d'une sanction de déconventionnement, quant à elle, violerait le droit au recours. La commission a donc émis un avis défavorable sur ces deux amendements.

L'amendement n° 264 rectifié septies tend à autoriser les complémentaires santé à déroger au délai maximal de paiement prévu pour le tiers payant, notamment en cas de dépôt de plainte pour fraude par l'assurance maladie. Une telle mesure respecte le principe de proportionnalité : on prévoit en effet de transposer aux complémentaires santé des prérogatives dont dispose déjà l'assurance maladie, ce qui renforcera la coordination dans la lutte contre la fraude. La commission a donc émis un avis favorable sur cet amendement.

La commission est également favorable à l'amendement n° 274 rectifié septies, qui vise à ce que l'ensemble des activités d'un professionnel de santé soient prises en compte pour la dérogation aux délais de paiement du tiers payant. Cette disposition renforcera les moyens dont dispose l'assurance maladie pour retarder temporairement le versement du tiers payant en cas de situation à risque, tout en sécurisant cette dérogation sur le plan juridique.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Je comprends qu'il faille mieux outiller les acteurs de la lutte contre la fraude que sont l'assurance maladie et les organismes complémentaires. Toutefois, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse du Sénat sur ces quatre amendements en discussion commune. En effet, la mise en œuvre des différents dispositifs proposés paraît complexe et il semble qu'une expertise préalable de ceux-ci serait souhaitable.

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 38 rectifié quater et 91 rectifié.

(Les amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 264 rectifié septies.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17 ter.

Je mets aux voix l'amendement n° 274 rectifié septies.

(L'amendement est adopté.)

M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17 ter.

L'amendement n° 94, présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 17 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

I. – Après le 5° de l'article L. 162-4, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« ...° Lorsqu'ils prescrivent des produits, prestations et actes dans les conditions prévues au 26° de l'article L. 162-5. »

II. – L'article L. 162-5 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« L'ensemble des produits, prestations et actes ne sont pas remboursés par l'assurance maladie s'ils sont prescrits par un médecin qui n'est pas conventionné. Cette mesure s'applique pendant toute la durée au cours de laquelle le médecin n'est pas conventionné dans des conditions définies par décret. »

III. – L'article L. 162-32-1 est ainsi modifié :

1° Au début, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Il est ajouté un paragraphe ainsi rédigé :

« II. – L'ensemble des produits, prestations et actes ne sont pas remboursés par l'assurance maladie s'ils sont prescrits par un médecin salarié mentionné à l'article L. 6323-1-5 du code de la santé publique travaillant dans un centre de santé qui n'est pas conventionné.

« Cette mesure s'applique pendant toute la durée au cours de laquelle le centre n'est pas conventionné dans des conditions définies par décret.

« Le centre de santé informe le patient que les produits, prestations et actes prescrits dans les conditions prévues au présent paragraphe ne seront pas remboursés par l'assurance maladie. »

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement a pour objet d'aligner le remboursement des soins et médicaments prescrits sur la nature du conventionnement du prescripteur, afin de réduire les risques de fraude et de responsabiliser pleinement les professionnels de santé. Il s'agit également de désinciter à la prise de rendez-vous avec des médecins du secteur 3, dont le fonctionnement ne correspond pas à l'esprit d'une protection sociale juste et équitable.

Le conventionnement n'est pas une simple formalité. Il garantit la qualité des prescriptions, un suivi rigoureux des soins, et responsabilise le prescripteur. Le dispositif que nous proposons ne doit en aucun cas pénaliser les patients ; il faut accompagner une telle mesure d'obligations de transparence renforcée et d'informations plus claires. Les plus vulnérables ne doivent pas, une fois encore, être victimes de ceux qui profitent du système.

Par ailleurs, le projet de loi de financement de la sécurité sociale impose une taxation accrue du secteur 2 et de l'option de pratique tarifaire maîtrisée (Optam) : on pourrait observer de ce fait un glissement des praticiens vers le secteur 2 hors Optam, voire vers le secteur 3. Une telle évolution affaiblirait le recours au conventionnement et, de fait, l'accès aux soins.

Il est donc nécessaire de bien délimiter les types de conventionnement et de cibler les dépassements d'honoraires. Cet amendement vise ainsi à distinguer clairement le secteur 3, dont les pratiques ne sont pas alignées sur les valeurs de notre système de sécurité sociale, et à protéger nos concitoyens tout en préservant la solidarité nationale.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Olivier Henno, rapporteur. Cet amendement a pour objet de dérembourser l'ensemble des prescriptions émises par les médecins déconventionnés. Être déconventionné, ce n'est pas frauder. Cela existe, c'est un choix que certains font. Le dispositif que vous proposez, ma chère collègue, nous semble abusif, dans la mesure où l'objet de ce texte est la lutte contre la fraude. La commission est donc défavorable à cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Pour la même raison que celle que j'ai avancée tout à l'heure à propos du déremboursement des prescriptions des médecins non conventionnés, le Gouvernement s'en remettra à la sagesse de la Haute Assemblée.

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il faudrait tout de même que nous parvenions à faire la distinction entre les médecins non conventionnés du secteur 3 et les médecins déconventionnés pour cause de fraude.

Ce sujet me semble s'inscrire dans la suite logique de nos discussions précédentes. Un médecin exerçant en secteur 3 ne peut pas être mis sous objectif, puisqu'il n'est pas conventionné. Il ne répond donc de rien ; il peut faire ce qu'il veut, prescrire ce qu'il veut. Nous devons rembourser, et nous n'avons, me semble-t-il, aucun droit de regard sur la manière dont il exerce la médecine. La convention est claire de ce point de vue : s'il y a des mises sous objectif, c'est bien parce que l'on estime que certaines pratiques s'écartent des usages habituels, des normes ou des recommandations de bonnes pratiques.

Il ne faudrait pas que, par manque de volonté, nous assistions à des « fuites » vers le secteur 3. Il s'agit du moins d'une recommandation de la Cnam, des mutuelles et des assureurs. En tout état de cause, nous en reparlerons lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, puisqu'un article de ce texte est consacré à cette question. Si l'amendement de notre collègue Annie Le Houerou était rejeté, ce ne serait donc que partie remise.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 94.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président. L'amendement n° 95, présenté par Mme Le Houerou, M. Fichet, Mme Canalès, MM. Lurel, Jacquin et Kanner, Mmes Conconne et Féret, M. Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l'article 17 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les praticiens conseils du service du contrôle médical et les praticiens conseils agissant pour le compte des entreprises régies par le code des assurances, des mutuelles ou unions régies par le code de la mutualité et des institutions de prévoyance ou unions régies par les dispositions du présent code assurant le versement d'indemnités complémentaires à celles visées aux articles L. 321-1 et L. 433-1 ou d'une pension complémentaire à celle visée à l'article L. 341-1 sont habilités à partager les informations obtenues grâce aux contrôles médicaux réalisés, dans des conditions prévues par décret. »

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Cet amendement tend à renforcer les moyens des services de contrôle médical afin de leur permettre de rendre des avis sur les fraudes potentielles et d'enrichir leurs bases de données pour mieux identifier les abus.

Le dispositif proposé vise trois objectifs complémentaires.

Tout d'abord, la transmission d'informations des organismes complémentaires vers les services de contrôle médical permettra d'accélérer et d'enrichir les contrôles en mobilisant l'ensemble des expertises disponibles.

Ensuite, l'augmentation du nombre d'informations disponibles permettra de réduire les délais de décision ainsi que le volume des indus, au bénéfice tant de l'assurance maladie que des régimes de prévoyance.

Enfin, cette mesure a pour objet de renforcer la cohérence des décisions rendues pour un même assuré, en harmonisant l'évaluation médicale entre les différents payeurs, ce qui rendra l'action de l'administration plus lisible pour le patient.

Le présent amendement tend donc à faciliter l'action de l'assurance maladie et à assurer le bon suivi des décisions de versement.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Olivier Henno, rapporteur. Les questions soulevées par notre collègue sont tout à fait respectables et très pertinentes, mais il nous semble que cet amendement est satisfait par l'article 5 et notamment les échanges d'informations que cet article prévoit. La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Même avis.

M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° 95.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Articles 18, 19 et 20 (précédemment examinés)

M. le président. Je rappelle que les articles 18, 19 et 20 ont été précédemment examinés.

Articles 20 bis, 20 ter et 20 quater (nouveaux) (précédemment examinés)

M. le président. Je rappelle également que les articles 20 bis, 20 ter et 20 quater ont été précédemment examinés.

TITRE III

GARANTIR UN MEILLEUR RECOUVREMENT DES MONTANTS SOUSTRAITS PAR FRAUDE

Après l'article 17 ter
Dossier législatif : projet de loi relatif à la lutte contre les fraudes sociales et fiscales
Articles 20 bis, 20 ter et 20 quater (nouveaux) (précédemment examinés)

Article 21

I. – Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° L'article L. 133-1 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi rédigé :

« I. – Lorsqu'un procès-verbal de travail dissimulé a été établi par les agents chargés du contrôle mentionnés au premier alinéa de l'article L. 243-7 du présent code ou à l'article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, ou transmis aux organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-1 du présent code et à l'article L. 723-3 du code rural et de la pêche maritime en application de l'article L. 8271-6-4 du code du travail, l'agent chargé du contrôle peut, en cas de circonstances susceptibles de menacer le recouvrement de la créance sociale, dresser à l'encontre de la personne contrôlée un procès-verbal de flagrance sociale.

« Ce procès-verbal comporte l'évaluation du montant des cotisations et des contributions éludées, des majorations mentionnées à l'article L. 243-7-7 du présent code et, le cas échéant, des majorations et des pénalités afférentes, ainsi que du montant des réductions ou des exonérations de cotisations ou de contributions sociales dont a pu bénéficier le débiteur annulées en application du deuxième alinéa de l'article L. 133-4-2, ainsi que les voies et les délais de recours applicables.

« Le procès-verbal de flagrance sociale est signé par l'agent chargé du contrôle.

« L'original du procès-verbal est conservé par l'organisme de recouvrement et une copie est notifiée à la personne contrôlée. » ;

b) Le II est ainsi modifié :

– la première phrase est supprimée ;

– au début de la seconde phrase, les mots : « À défaut, le directeur de l'organisme de recouvrement peut » sont remplacés par les mots : « La notification du procès-verbal de flagrance permet au directeur de l'organisme de recouvrement de » ;

b) bis (nouveau) Au début du III, les mots : « La décision du directeur de l'organisme peut être contestée » sont remplacés par les mots : « Le procès-verbal de flagrance peut être contesté » ;

c) Il est ajouté un IV ainsi rédigé :

« IV. – Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. » ;

2° Après le premier alinéa de l'article L. 244-9, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la contrainte mentionnée au premier alinéa résulte de la constatation d'une infraction de travail illégal définie à l'article L. 8221-1 du code du travail, elle est immédiatement exécutoire en tant qu'elle porte sur des sommes redressées à ce titre. Le débiteur, qui a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, peut demander au président de ce tribunal d'en arrêter l'exécution provisoire lorsqu'il existe un moyen sérieux d'invalidation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Un décret en Conseil d'État précise les modalités et délais de la procédure aux fins d'arrêter l'exécution provisoire de la contrainte, prévue au présent alinéa. »

II. – Après le 1° du II de l'article L. 725-3 du code rural et de la pêche maritime, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :

« 1° bis Lorsque la contrainte résulte de la constatation d'une infraction de travail illégal définie à l'article L. 8221-1 du code du travail, elle est immédiatement exécutoire en tant qu'elle porte sur des sommes redressées à ce titre. Le débiteur, qui a formé opposition à cette contrainte devant le tribunal judiciaire spécialement désigné en application de l'article L. 211-16 du code de l'organisation judiciaire, peut demander au président de ce tribunal d'en arrêter l'exécution provisoire lorsqu'il existe un moyen sérieux d'invalidation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives. Un décret en Conseil d'État précise les modalités et délais de la procédure aux fins d'arrêter l'exécution provisoire de la contrainte prévue au présent alinéa. »

III. – Le 1° du I entre en vigueur selon des modalités fixées par décret et au plus tard le 1er janvier 2027.

IV. – Le 2° du I et le II s'appliquent aux contraintes décernées à compter d'une date fixée par décret et au plus tard à compter du 1er janvier 2027.

M. le président. Je suis saisi de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 46 rectifié bis, présenté par Mmes Guillotin et M. Carrère, M. Guiol, Mme Jouve, MM. Laouedj et Masset, Mme Pantel, M. Roux, Mme Girardin, M. Fialaire, Mme N. Delattre et MM. Bilhac, Cabanel et Gold, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Après le mot :

dissimulé

insérer les mots :