Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous avons un problème majeur de clarté et d’honnêteté vis-à-vis de nos concitoyens. On ne peut pas, d’un côté, affirmer que le déficit de notre modèle de protection sociale est structurel, et, de l’autre, continuer à en creuser le trou.

On peut s’accorder sur un point : ce n’est pas aux plus pauvres de compenser le manque de cotisation des plus riches. À gauche, en tout cas, c’est ce que nous pensons tous. Dans ces conditions, les réductions de cotisations des travailleurs les moins bien payés doivent être compensées en faisant cotiser davantage ceux qui gagnent davantage.

Ce n’est pas le choix retenu par la majorité sénatoriale ou par le Gouvernement. Pour autant, ce n’est pas le moment de réparer l’injustice fiscale par une aberration mathématique qui consiste à réduire les recettes de la sécurité sociale, alors que les besoins sont de plus en plus importants.

À la fin, ce sont les plus précaires qui subissent les conséquences de ce manque de recettes, en devant travailler plus longtemps avant d’accéder à la retraite, en devant payer plus cher leurs médicaments, en voyant les indemnités de l’assurance chômage réduites, etc.

Les groupes CRCE-K et SER proposent un entre-deux, à savoir la limitation des baisses de cotisations aux salaires équivalents à 2 SMIC. C’est déjà beaucoup, car le salaire socialisé participe à la protection sociale : c’est aussi du salaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour présenter l’amendement n° 1671 rectifié.

Mme Annie Le Houerou. Il s’agit d’un amendement dont l’objet est commun aux groupes de gauche.

Nous avons eu ce débat l’année dernière, mais le gouvernement Bayrou a refusé le compromis dégagé au Sénat. Il a décidé de réduire les allégements avec un point de sortie à 3 Smic, soit 5 400 euros, c’est-à-dire plus de deux fois le salaire médian.

Pourtant, le coût des allégements généraux explose, et la réduction de ces dispositifs est d’autant plus nécessaire que ceux-ci ne sont pas efficaces après 1,6 Smic. La Cour des comptes indique que le manque à gagner des allégements généraux a atteint plus de 77 milliards d’euros en 2024 et appelle par conséquent à des mesures de régulation.

Par ailleurs, l’État déroge à la loi Veil et ne compense pas ces exonérations. La compensation des allégements généraux était considérée comme à peu près équilibrée jusqu’à la réforme de 2019. Aussi, dans son rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale de mai 2025, la Cour des comptes chiffre-t-elle la sous-compensation du bandeau maladie à 5,5 milliards d’euros en 2024.

La sécurité sociale n’a pas à supporter le coût d’aides à l’emploi inefficaces, d’autant plus que leur suppression n’aurait pas d’impact sur le marché de l’emploi. En effet, les expériences internationales nous apprennent que la suppression des exonérations ne détruit pas les emplois existants. Ce mécanisme a donc été utilisé pour lutter contre l’âgisme en Suède, ce qui a pendant un temps favorisé l’emploi des jeunes de moins de 26 ans.

Aussi, en ce qui concerne l’éventuelle smicardisation des emplois, le rapport Bozio-Wasmer insiste : « L’existence de trappes à bas salaire est difficile à démontrer. De plus, les études concluent qu’aplanir la courbe des exonérations ne fonctionne pas. Il vaut mieux concentrer les efforts sur les bas salaires. »

C’est pourquoi les groupes de gauche proposent de fixer la sortie des allégements généraux à 2 Smic, soit 3 600 euros mensuels.

Mme la présidente. L’amendement n° 1681 rectifié, présenté par Mme Le Houerou, M. Kanner, Mmes Canalès, Conconne et Féret, MM. Fichet et Jomier, Mmes Lubin, Poumirol, Rossignol, Artigalas et Bélim, MM. Cardon, Chaillou et Chantrel, Mme Conway-Mouret, M. Darras, Mme Espagnac, MM. Féraud et Gillé, Mme Harribey, MM. Jacquin et P. Joly, Mme Linkenheld, MM. Lurel, Marie, Mérillou et Michau, Mme Monier, MM. Montaugé, Pla et Redon-Sarrazy, Mme S. Robert, MM. Roiron, Ros, Tissot, Uzenat, M. Vallet, Ziane et les membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la seconde phrase du second alinéa du I de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de l’article 18 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, le taux : « 200 % » est remplacé par le taux : « 140 % ».

La parole est à Mme Annie Le Houerou.

Mme Annie Le Houerou. Je regrette d’avoir à défendre cet amendement avant que l’amendement n° 1671 rectifié ne soit mis aux voix, car je pense que celui-ci pourrait être adopté.

Il s’agit d’un amendement de repli qui vise à ramener à 2,4 Smic le point de sortie des exonérations de cotisations sociales.

Mme la présidente. L’amendement n° 1160 rectifié, présenté par Mmes Apourceau-Poly, Brulin, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le II de l’article L. 241-13 du code de la sécurité sociale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Cette réduction ne s’applique pas lorsque les revenus distribués au sens de l’article 109 du code général des impôts sont supérieurs à 10 % du bénéfice imposable du dernier exercice clos. »

La parole est à Mme Marianne Margaté.

Mme Marianne Margaté. Je reviens sur la notion de cohérence, dont il a déjà été question. Comment prétendre financer durablement la sécurité sociale lorsque l’on réduit progressivement la part du capital dans son assiette, et ce alors même que la structure de répartition de la valeur créée se transforme profondément ?

Depuis 2024, ce sont environ 70 milliards d’euros de dividendes qui sont distribués chaque année par les entreprises du CAC 40. Ce chiffre n’est pas conjoncturel. Il s’inscrit dans une tendance longue, dans laquelle la dynamique du versement aux actionnaires est décorrélée de l’investissement productif et de la progression salariale.

Cette dissociation est abondamment documentée. Les données de concentration sont elles aussi établies : 1 % des ménages capte près de 96 % des dividendes distribués en France. Dans le même temps, les hôpitaux se voient rappeler l’exigence de rationalisation et les assurés sociaux se trouvent placés devant des arbitrages impossibles entre délai de prise en charge, renoncement aux soins et reste à charge.

Il faut regarder les choses en face : le problème réside dans l’assèchement progressif de ces ressources relativement aux capacités contributives du capital, pas dans la dépense sociale.

C’est pourquoi nous proposons de retirer le bénéfice de la réduction dégressive des cotisations patronales aux entreprises distribuant des dividendes supérieurs à 10 % du bénéfice imposable. Appelons cela une « mesure incitative », pour reprendre un vocabulaire plus familier à nos collègues libéraux. (Sourires sur les travées des groupes CRCE-K et SER.)

Si l’entreprise privilégie l’investissement, la montée en compétences, la recherche, la transition écologique, elle conserve l’allégement. Si elle privilégie le vol de la valeur au détriment de l’économie et du travail, elle doit contribuer à hauteur de la protection sociale qu’elle laisse aux autres la charge de financer.

Mme la présidente. L’amendement n° 1161 rectifié, présenté par Mmes Brulin, Apourceau-Poly, Silvani et les membres du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste – Kanaky, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié:

1° Le premier alinéa de l’article L. 241-2-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « un montant, fixé par décret, qui ne peut être inférieur à 2,25 fois le salaire minimum de croissance applicable au 31 décembre 2023 » sont remplacés par le montant : « 3 886 euros » ;

b) Les mots : « 2 fois le salaire minimum de croissance calculé selon les modalités prévues au deuxième alinéa du III du même article L. 241-13, » sont remplacés par le montant : « 3 454 euros » ;

c) Les mots : « dans la limite de 2,25 fois le salaire minimum de croissance calculé selon les modalités prévues au deuxième alinéa du même article L. 241-13 » sont remplacés par les mots : « dans la limite de 3 886 euros ».

2° Le premier alinéa de l’article L. 241-6-1 est ainsi modifié :

a) Les mots : « fixé par décret, qui ne peut être inférieur à 3,3 fois le salaire minimum de croissance applicable au 31 décembre 2023 » sont remplacés par les mots: « qui ne peut être inférieur à 5 699 euros » ;

b) Les mots : « 2 fois le salaire minimum de croissance calculé selon les modalités prévues au deuxième alinéa du III de l’article L. 241-13, » sont remplacés par le montant : « et 3 454 euros » ;

c) Les mots : « dans la limite de 3,3 fois le salaire minimum de croissance calculé selon les modalités prévues au deuxième alinéa du III de l’article L. 241-13 » sont remplacés par les mots : « dans la limite de 5 699 euros ».

3° Le deuxième alinéa de l’article L. 241-13, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025 de financement de la sécurité sociale pour 2025, est ainsi modifié :

a) Les mots : « le salaire minimum de croissance applicable au 1er janvier 2024 majoré de 200 % » sont remplacés par le montant : « 3 533 euros » ;

b) Les mots : « et le salaire minimum de croissance en vigueur majoré de 200 % » sont remplacés par le montant : « 3 603 euros ».

La parole est à M. Gérard Lahellec.

M. Gérard Lahellec. Cet amendement vise à remplacer les exonérations en montant net plutôt qu’en proportion du Smic.

Cette mesure est inspirée de l’article intitulé « Dégonflement des engagements de cotisation » de Clément Carbonnier, dans lequel ce professeur de l’université Paris I formule une proposition originale sur la réduction des allégements de cotisations sociales. Il invite à dégonfler progressivement les allégements en modifiant le barème et en fixant ce dernier sur un montant en euros plutôt qu’en proportion du Smic.

Plutôt que de tenter de réduire les allégements en fixant un barème sur les années les plus favorables pour l’inflation, M. Carbonnier suggère de laisser les salaires se décaler vers le haut du barème au fur et à mesure de l’inflation. Ainsi, les exonérations s’éteindront petit à petit vers le bas.

Pour ne pas entraîner de choc pour les entreprises, nous avons veillé à rester le plus fidèle possible au barème quand nous les avons remplacés par des montants numéraires.

Ainsi, les allégements de cotisation de l’assurance maladie s’appliqueraient en dessous de 3 886 euros et en dessous de 5 699 euros pour l’application du bandeau famille. Ces montants permettraient aussi de gagner en lisibilité pour les entreprises.

Mme la présidente. L’amendement n° 940 rectifié, présenté par Mmes Poncet Monge et Souyris, MM. Benarroche, G. Blanc et Dantec, Mme de Marco, MM. Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Ollivier, M. Salmon et Mmes Senée et M. Vogel, est ainsi libellé :

Après l’article 12 bis

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le code de la sécurité sociale est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa de l’article L. 241-2-1, les deux occurrences du nombre : « 2,25 » sont remplacées par le nombre : « 2 » ;

2° Au premier alinéa de l’article L. 241-6-1, les deux occurrences du nombre : « 3,3 » sont remplacées par le nombre : « 2 ».

La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge.

Mme Raymonde Poncet Monge. Il s’agit de limiter le champ d’application de l’allégement des cotisations familiales et maladies aux salaires inférieurs ou égaux à 2 Smic.

J’aime bien citer les études, car cela permet de connaître l’état du consensus ! Or selon une étude de 2019 du Conseil d’analyse économique, « les baisses de cotisations sociales sur les salaires plus élevés […] n’ont pas encore fait la preuve de leur efficacité ». Et les auteurs de conclure : « Nous recommandons une remise en cause des réductions du coût du travail au-delà du seuil de 1,6 Smic. »

En d’autres termes, les exonérations de cotisations sociales n’ont aucun effet probant sur l’emploi ou sur la compétitivité au-delà de 2 Smic.

Dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, la réforme des exonérations de cotisations, qui faisait suite au rapport Bozio-Wasmer, n’a qu’imparfaitement corrigé la dynamique des exonérations de cotisations sociales.

Selon le dernier rapport du Groupe d’experts Smic, si le scénario de lissage des exonérations retenues entraîne des économies, il est néfaste pour l’emploi. Ce consensus a été démontré par Antoine Bozio et Étienne Wasmer dans leur rapport établissant un état de l’art de la recherche sur les politiques d’exonération de cotisations sociales en France et en Europe : ils ne parviennent pas à démontrer en France un effet des exonérations de cotisations sur l’emploi au-delà d’un certain seuil.

Enfin, l’évaluation interdisciplinaire des impacts du CICE en matière de compétitivité internationale, d’investissement, d’emploi et de salaires n’a pas permis de conclure à de réels effets sur l’emploi.

En conséquence, il est grand temps de limiter ces exonérations aux salaires inférieurs ou égaux à 2 Smic.

Tel est l’objet de cet amendement.

Mme la présidente. Quel est l’avis de la commission ?

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Même si ces amendements sont en discussion commune, ils n’ont pas tous le même objet.

Aux auteurs des amendements ayant pour objet un transfert d’un pourcentage de CSG aux départements, je précise – sans relancer le débat, car nous l’avons déjà eu – que le fonds national de financement de la protection de l’enfance n’a jamais été abondé.

Nous souhaitons plus de décentralisation, mais il faut changer la façon dont les collectivités peuvent lever l’impôt, car elles ne peuvent pas totalement dépendre des dotations de l’État. On a vu comment la situation s’était dégradée au fil du temps, ce qui empêchait les collectivités de lever un impôt correspondant aux besoins des départements. On ne peut pas résoudre ce problème en aggravant le déficit de la sécurité sociale.

Les auteurs des amendements identiques nos 799 rectifié ter et 1710 rectifié ont compris qu’il fallait procéder autrement et ont proposé une sortie des allégements généraux à 2 Smic.

Nous avons évoqué une telle mesure l’an dernier et nous avons alors dû travailler et nous mettre d’accord avec le gouvernement de l’époque. C’est pourquoi nous ne souhaitons pas revenir cette année sur la suppression des allégements généraux, que ce soit à partir de 2 Smic ou d’une autre proportion.

Aujourd’hui, il nous paraît important de savoir ce que l’État fait de la courbe des allégements généraux. Sur ce point, nous sommes rassurés, puisque l’État protège les salaires qui sont au Smic. Nous avons été unanimes à le souhaiter l’an dernier ; cette année, la courbe est convexe jusqu’à un peu plus de 2 Smic.

L’amendement n° 800 rectifié ter vise à transférer aux départements 0,2 point de cotisation sociale généralisée. J’ai déjà développé les arguments s’opposant à cette mesure, en évoquant d’autres sources de financement pour les départements.

L’amendement n° 1128 rectifié bis ayant un objet analogue, mon argumentation sera la même.

Les amendements identiques nos 419 rectifié quinquies, 441 rectifié quinquies et 869 rectifié ter tendent à transférer aux départements 0,04 point de cotisation sociale généralisée. Certes, c’est une ponction moindre ; pour autant, cela ne me semble pas cohérent.

L’amendement n° 1086 rectifié bis a pour objet le cas spécifique de la SNCF, de la RATP et des industries électriques et gazières (IEG).

Actuellement, la SNCF et la RATP ne bénéficient que des bandeaux famille et maladie, les IEG ne bénéficiant que du bandeau famille. En l’absence de disposition spécifique, ces entreprises cesseraient de bénéficier des allégements généraux au 1er janvier 2026, c’est-à-dire demain !

Cet amendement vise donc à maintenir les bandeaux famille et maladie pour la SNCF et la RATP, ainsi que le bandeau famille pour les IEG. Je sollicite l’avis du Gouvernement et souhaite connaître le montant qu’induirait cette demande.

L’amendement n° 951 rectifié a pour objet une intégration des revenus liés à l’actionnariat salarié dans le calcul de la base pour la réduction générale dégressive de cotisations patronales.

Il s’agit d’une proposition avancée par la Cour des comptes : « Un élargissement de l’assiette des allégements généraux pour y intégrer les compléments de salaire relevant de la participation financière ou de l’actionnariat salarié […] pourrait rapporter jusqu’à 3 milliards d’euros. »

Cet amendement a un objet intéressant, mais, comme amendement recette, je lui préfère l’amendement n° 1678, que nous avons d’ailleurs adopté.

Les amendements identiques nos 1170 rectifié et 1671 rectifié, ainsi que l’amendement n° 1681 rectifié, ont pour objet une sortie des allégements généraux à 2 Smic. Nous avons déjà eu ce débat l’an dernier, je n’y reviens pas, d’autant que, je le répète, la proposition du Gouvernement nous rassure.

Les amendements nos 1160 rectifié et 1161 rectifié ont un objet proche, puisqu’ils visent, pour l’un, la suppression de la réduction dégressive des cotisations patronales pour les entreprises qui distribuent des dividendes jugés excessifs – nous avons déjà abordé cette question l’an dernier –, pour l’autre, un gel pérenne du barème des allégements généraux.

L’amendement n° 940 rectifié a pour objet une limitation du champ d’application de l’allégement des cotisations familiales et maladies aux salaires inférieurs ou égaux à 2 Smic. Il s’agit donc de limiter les bandeaux famille et maladie aux salaires inférieurs à 2 Smic.

Le Gouvernement ayant proposé la réduction générale dégressive unique, la RGDU, qui sera appliquée à partir du 1er janvier 2026, cet amendement vise des dispositions qui seront abrogées à cette date.

Au total, la commission émet un avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion commune, à l’exception de l’amendement n° 1086 rectifié bis, sur lequel elle sollicite l’avis du Gouvernement, afin de connaître les sommes en jeu et de savoir si cette mesure ne dégrade pas le déficit de la sécurité sociale.

Mme la présidente. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Stéphanie Rist, ministre. Ces amendements en discussion commune tendent à aborder deux sujets.

Le premier est l’affectation de la CSG. Le débat a déjà eu lieu, comme l’a rappelé Mme la rapporteure générale. S’il doit être ouvert, comme l’a indiqué le Premier ministre, ce sera uniquement dans le cadre d’une réorganisation des compétences.

C’est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis défavorable sur tous les amendements ayant pour objet l’affectation de la CSG.

Le second débat a trait aux allégements généraux, qui sont un outil essentiel au soutien de notre économie, de la compétitivité de nos entreprises et de l’emploi.

Cela a été rappelé, l’année dernière, cette réforme a protégé notre économie, notamment au niveau du Smic. Elle permet de lutter contre les trappes à bas salaire et préserve la compétitivité des industries. Les mesures contenues dans ces amendements vont beaucoup plus loin : il est par exemple question de supprimer les allégements généraux au-delà de 2 Smic, ce qui entraînerait une augmentation du coût du travail de plus de 10 milliards d’euros.

J’en viens à l’amendement n° 1086 rectifié bis, ce qui me permet de répondre précisément à la question de Mme la rapporteure générale. Le phénomène qu’il est proposé de rectifier constitue un effet de bord d’une mesure corrective qui garantit aux entreprises EDF, SNCF et RATP de bénéficier du même niveau d’allégement qu’en 2025.

Le Gouvernement veut préserver la compétitivité de ces entreprises au moment où a lieu l’ouverture à la concurrence. C’est pourquoi il émet un avis favorable sur cet amendement.

À l’heure actuelle, pour l’ensemble des entreprises concernées, cette mesure représente un coût global de 300 millions d’euros, mais ce n’est pas ce que coûtera le dispositif l’année prochaine : il s’agit seulement de permettre à ces entreprises de conserver le bénéfice des allégements généraux.

Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur l’ensemble des amendements en discussion, à l’exception de l’amendement n° 1086 rectifié bis.

Mme la présidente. La parole est à Mme Raymonde Poncet Monge, pour explication de vote.

Mme Raymonde Poncet Monge. Madame la ministre, vous affirmez que, à partir de 2 Smic, le coût du travail augmenterait de 10 milliards d’euros. Pourtant, le consensus économique s’accorde à dire que cela rapporterait 7 milliards d’euros. De notre côté, on ne gonfle pas les chiffres ; il serait bon que, du vôtre, on ne gonfle pas le coût du travail à la suite de la suppression des exonérations !

Combien d’études vous faudra-t-il pour changer d’avis ? Les économistes qui ont soutenu le CICE disent eux-mêmes aujourd’hui que ce dispositif a été une erreur, parce qu’il n’a eu aucun effet, que ce soit sur l’emploi ou sur la compétitivité internationale – je rappelle que la compétitivité est une donnée relative, qui s’apprécie toujours au regard de celle des autres. Les études menées par les plus éminents experts le confirment.

Cessez de répéter que cette mesure vise la compétitivité et l’emploi. Dites que vous voulez maintenir ce cadeau aux entreprises. Car c’est bien d’un cadeau qu’il s’agit, puisque cela n’a aucun effet !

La raison que vous avez invoquée pour instaurer cette mesure ne se trouve pas confirmée a posteriori par les évaluations. Vous voulez maintenir ces exonérations, qui coûtent 7 milliards d’euros, alors que, avec une telle somme, on pourrait faire beaucoup, notamment renoncer à quelques mesures antisociales.

Mme la présidente. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour explication de vote.

Mme Annie Le Houerou. Je souhaite revenir sur l’amendement n° 1710 rectifié, élaboré avec Départements solidaires, qui vise à apporter une réponse structurelle et durable à la crise financière que traversent les départements.

Je ne reviens pas sur l’explosion des dépenses sociales – RSA, ASE… – qui fragilisent ces collectivités, elles qui assument pourtant la solidarité nationale. Leur modèle financier n’est plus soutenable, et il est donc de notre responsabilité de leur apporter une solution pérenne.

Le dispositif que nous proposons repose sur deux mécanismes équilibrés.

D’une part, il s’agit de transférer aux départements 0,4 point de CSG, soit environ 7 milliards d’euros. Les règles d’assiette et le taux de la CSG demeurent strictement inchangés. Rien ne bouge pour les contribuables.

Ce transfert se fait par une simple réaffectation interne, ce qui permet de donner aux départements une ressource dynamique corrélée à l’évolution économique, donc à même d’accompagner l’évolution de leurs charges. Concrètement, les organismes bénéficiaires de la CSG voient leur part légèrement ajustée de manière strictement proportionnée, sans impact sur les assurés.

D’autre part, pour compenser intégralement cette évolution, il convient de supprimer les exonérations de cotisations sociales au-delà de 2 Smic. Cela représente 7 milliards d’euros d’économies, finançant ainsi à l’euro près le transfert de la CSG, sans peser davantage sur les finances sociales et sans alourdir les prélèvements des ménages.

Mes chers collègues, ces deux mesures sont cohérentes. Elles sont neutres financièrement pour la sécurité sociale et elles sont indispensables pour redonner de l’oxygène aux départements. Elles garantissent à ces collectivités un financement stable, lisible, dynamique, à la hauteur des missions essentielles qu’elles exercent au nom de la Nation.

Mme la présidente. La parole est à Mme Cathy Apourceau-Poly, pour explication de vote.

Mme Cathy Apourceau-Poly. Nous le voyons bien : nous sommes à la limite de cet exercice budgétaire. Depuis le début de ce débat, nous vous proposons des recettes qui représentent plusieurs milliards d’euros. Vous les avez toutes refusées.

Finalement, les dispositions de tous ces amendements mettent en lumière les difficultés des départements. Ces dernières sont telles que nous en sommes arrivés aujourd’hui à utiliser l’argent de la CSG pour financer les départements. C’est tout de même pitoyable !

Madame la rapporteure générale, je n’ai pas bien compris votre position. Depuis 2021, les départements ne perçoivent plus qu’un impôt direct. Depuis la suppression de la taxe d’habitation, seuls demeurent les DMTO (droits de mutation à titre onéreux). Le montant de la dotation globale de fonctionnement (DGF) est à la baisse dans les départements.

Vous affirmez donc qu’il faut trouver un impôt nouveau.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des affaires sociales. Il faut tout revoir ! Tout est à inventer !

Mme Cathy Apourceau-Poly. Je vous pose la question : quel impôt ? Que proposez-vous pour les départements ? Je ne comprends pas bien votre position.

Cela a été rappelé, les départements font face à des charges de plus en plus importantes. Je ne reviens pas sur ce que je répète à l’envi.

Je suis élue du Pas-de-Calais, un département qui a connu les inondations : la région et le département ont dû mettre la main à la poche pour aider les collectivités et les habitants qui se sont retrouvés dans des situations dramatiques. Or le président du conseil départemental l’affirme lui-même aujourd’hui : c’est l’asphyxie généralisée.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marion Canalès, pour explication de vote.