M. Max Brisson. Absolument !
M. Vincent Delahaye. Si l'on concentrait les crédits alloués à ces différents médias, les moyens seraient beaucoup mieux ciblés : le service – public – rendu aux Français y gagnerait en intérêt. C'est pourquoi j'ai cosigné l'amendement de mon collègue Canévet, que je soutiens.
Pour ma part, j'estime qu'il ne faut pas concentrer les économies à tel ou tel endroit : il faut en faire partout, de façon raisonnable et en les accompagnant de réformes.
Nous parlons de ce sujet depuis des années. Cela fait quelque temps déjà que je suis sénateur ; quand j'ai commencé à siéger dans cet hémicycle, il en était déjà question. Or il ne se passe jamais rien...
M. Max Brisson. Il y a la réforme Lafon !
M. Vincent Delahaye. Il est temps qu'il se passe enfin quelque chose.
M. le président. La parole est à M. Michel Canévet, pour explication de vote.
M. Michel Canévet. Parce que nous proposons des réductions de crédits, nous serions opposés au service public de l'information ? Mais pas du tout ! Je ne peux laisser croire une telle chose.
Je suis attaché au pluralisme de la presse et des médias. Je veux que nous nous donnions les moyens de garantir ce pluralisme. Mais je suis également attaché à ce que la situation des finances publiques de notre pays s'améliore.
Chacun, dans cet hémicycle, doit avoir conscience de l'état de dégradation avancée dans lequel se trouvent nos comptes et des risques que cette situation fait peser sur l'avenir. L'augmentation de la charge d'intérêts de la dette grèvera durablement les capacités d'action publique.
Reste que – j'y insiste – je suis attaché au pluralisme, donc à l'audiovisuel public.
M. le président. La parole est à M. Adel Ziane, pour explication de vote.
M. Adel Ziane. C'est au terme de l'examen de ces crédits que nous discutons enfin du fond : le sujet est d'une extrême importance.
J'ai entendu mes collègues exprimer leur préoccupation quant à l'état des finances publiques. Nous nous en soucions tout comme eux. Mais nous avons une autre préoccupation, quant à l'état du débat public dans notre pays.
J'ai aussi entendu mes collègues faire valoir leur droit et la nécessité de « faire le procès » de l'audiovisuel public. Ces termes, utilisés en commission, n'ont pas manqué de nous heurter.
L'état du débat public dépend notamment du sort réservé aux valeurs du pluralisme et de la liberté d'opinion ; or ces valeurs subissent une attaque en règle.
M. Durox avait déposé des amendements visant à supprimer les aides à la presse. Il n'était pas présent en séance pour les défendre…
Contrairement à ce que certains disent, nous ne sommes pas hostiles à toute réflexion sur la réforme de l'audiovisuel public. Mais la véritable question est la suivante : où voulons-nous aller ? Comment faire en sorte, avec les moyens dont nous disposons aujourd'hui, que l'audiovisuel public demeure un véritable lieu d'expression libre et un garant du pluralisme des opinions dans notre pays ?
M. le président. La parole est à M. Yannick Jadot, pour explication de vote.
M. Yannick Jadot. Chers collègues de la majorité sénatoriale, tout le monde est pour les petites lignes ferroviaires ; sauf qu'à force de réduire les budgets les trains sont en retard, les petites lignes sont dégradées et l'on finit par les fermer.
De même, tout le monde dit vouloir lutter contre le dérèglement climatique, mais on supprime tous les budgets de la transition écologique et l'on s'étonne que notre trajectoire de décarbonation ne soit pas à la hauteur de l'accord de Paris !
C'est exactement ce que vous faites avec l'audiovisuel public. À vous entendre, on a l'impression que ce service est sclérosé depuis des décennies.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Ça fait un bail, oui…
M. Yannick Jadot. Or il évolue ! J'ai regardé la série Des vivants, sur le 13-novembre et les victimes du Bataclan : c'est tout simplement magnifique.
Elle est là, la qualité du service public ! À force de l'attaquer, la réalité est que, volontairement ou non, vous faites le jeu de Bolloré ! (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)
M. Max Brisson. Et le rapport de la Cour des comptes ?
M. le président. La parole est à M. Cédric Vial, pour explication de vote.
M. Cédric Vial. Nous avons besoin d'un débat apaisé.
Je salue à cet égard la sérénité de nos discussions de cette année, qui tranchent sur celles des années précédentes : cette fois, nos échanges ont pu se tenir sur la base de chiffres stabilisés, sans les modifications successives qui avaient compliqué nos travaux l'an passé.
À l'issue du processus, un effort est demandé à l'audiovisuel public : il ne serait pas cohérent qu'il soit seul exempté des efforts que tous les autres services publics doivent consentir.
Cet effort est à la fois important et supportable. Je le dis à mes collègues centristes : 65,3 millions d'euros d'économies sur la seule dotation budgétaire de France Télévisions, ce n'est pas négligeable. Ajoutez à l'équation l'obligation faite au groupe d'absorber un déficit de 44 millions d'euros, que l'État ne prendra plus en charge cette année. L'effort net est ainsi de 109 millions d'euros, sans compter les effets du glissement vieillesse technicité (GVT) ou encore ceux de l'inflation. En définitive, il atteint presque 148 millions d'euros.
Cet effort est important, incontestablement. Il reste néanmoins maîtrisé, puisqu'il s'agit d'inciter l'audiovisuel public à engager des réformes structurelles.
De telles réformes prennent du temps. J'espère que l'effort demandé va contraindre l'audiovisuel public à les engager tout en travaillant – je le disais tout à l'heure – à la définition d'un nouveau périmètre et de nouvelles missions. La représentation nationale et le Gouvernement devront les accompagner dans cette voie.
M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, pour explication de vote.
Mme Sylvie Robert. J'observe avec plaisir que certains de nos collègues ressentent aujourd'hui le besoin de dire qu'ils sont des défenseurs de l'audiovisuel public ; dont acte.
Nous l'avons toujours dit : le problème, c'est la méthode. Commençons par définir clairement le contenu de la réforme de l'audiovisuel public – pour ma part, j'ai toujours pris soin de préciser que je ne suis pas contre le principe d'une telle réforme –, avant de déterminer les moyens à mobiliser pour l'accompagner.
Aujourd'hui, que fait-on ? On baisse les crédits, on fragilise, on baisse encore. Que restera-t-il, en définitive ? Rien. Ce sont le pluralisme et la démocratie qui sont en jeu, mes chers collègues.
M. le président. La parole est à Mme Colombe Brossel, pour explication de vote. (M. Roger Karoutchi s'impatiente.)
Mme Colombe Brossel. Sans doute un peu frustrés par le déclenchement, cet été, du « 49.3 sénatorial » – j'ai nommé l'article 44, alinéa 3, de la Constitution – sur la réforme de l'audiovisuel public, nous ressentons le besoin de reparler de ce sujet.
Nous sommes tous d'accord sur ce point : il faut réformer, il faut avancer – nous l'avons clairement affirmé, dans l'hémicycle comme en commission. Mais de quoi s'agit-il en l'occurrence ? De réformer ou de dénigrer ?
Ces derniers mois, beaucoup de mensonges ont été proférés au sujet de l'audiovisuel public. Telle radio, par exemple, serait devenue une « radio de vieux », quand les chiffres d'audience sont sans appel : c'est bel et bien la radio du service public qui est la plus écoutée.
La meilleure façon d'affirmer son soutien à l'audiovisuel public n'est peut-être pas de passer son temps à le dénigrer sur CNews et dans le JDD… (Applaudissements sur des travées des groupes SER et GEST.)
M. le président. La parole est à M. Laurent Lafon, pour explication de vote.
M. Laurent Lafon. La séance suivait son cours de manière assez calme, presque atone, jusqu'à ce que nous en venions à l'audiovisuel public, qui, ici comme ailleurs, attise les débats et les passions.
Mme Sylvie Robert. C'est que nous y tenons !
M. Laurent Lafon. Mes chers collègues, sur ce sujet, il faut que nous sachions nous montrer raisonnables, tous autant que nous sommes : évitons que l'audiovisuel public ne soit pris dans un étau politique, enserré dans une caricature de débat entre ceux qui se réfèrent uniquement à CNews et ceux qui n'ont que le mot « privatisation » à la bouche.
Je rappelle à mes collègues et amis centristes que l'audiovisuel public contribue bien cette année à l'effort de rétablissement des comptes publics. Dans ce projet de budget, sa dotation n'augmente ni ne stagne par rapport à l'exercice précédent : elle diminue de 71 millions d'euros, sachant que l'année dernière un effort a déjà été consenti.
Max Brisson l'a souligné avec raison, et nous serons tous d'accord sur ce point : l'audiovisuel public ne saurait se concevoir comme une réalité statique. L'environnement audiovisuel international est en profonde mutation ; il faut donc que notre audiovisuel public se réorganise, qu'il entende les critiques qui lui sont faites et qu'il se réforme. Dire cela, ce n'est pas être contre l'audiovisuel public : au contraire, c'est le soutenir.
C'est pourquoi nous défendons une réforme, celle dont j'ai moi-même pris l'initiative au nom de nombreux collègues, visant à créer une holding qui regrouperait les principales entités de l'audiovisuel public. Cette réforme – je le rappelle – est le fruit d'un travail conduit conjointement dès 2015. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains.)
M. Roger Karoutchi. Et maintenant, votons !
M. le président. La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Pour un peu, je me retrouverais plongé au sein de la commission de la culture, dans laquelle j'ai eu le plaisir et l'honneur de siéger pendant six ans.
Mme Sylvie Robert. Bienvenue ! (Sourires.)
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Mais je suis désormais membre de la commission des finances…
J'engage ceux de mes collègues qui ne l'auraient pas fait – visiblement, certains ici sont dans ce cas – à lire le rapport de la Cour des comptes : « La situation financière n'est pas soutenable. »
Des décisions devront être prises aux environs du mois de mai ou du mois de juin prochain, car les capitaux propres de la société France Télévisions, autrement dit sa crédibilité financière, se sont effondrés en huit ans, passant de 294 millions à 179 millions d'euros.
M. Max Brisson. Absolument !
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Oui, il y a un péril ! La présidente de France Télévisions commence à le comprendre…
M. Max Brisson. Elle commence !
M. Laurent Lafon. L'accord collectif ayant été dénoncé à l'été 2025, il va devoir être renégocié, car, à l'évidence, le compte n'y est pas. (M. Patrick Kanner s'exclame.)
M. le président. Je mets aux voix l'amendement n° II-1733 rectifié bis.
(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. L'amendement n° II-2004, présenté par Mmes de Marco et Ollivier, MM. Benarroche, G. Blanc, Dantec, Dossus, Fernique et Gontard, Mme Guhl, MM. Jadot et Mellouli, Mme Poncet Monge, M. Salmon et Mmes Senée, Souyris et M. Vogel, est ainsi libellé :
Modifier ainsi les crédits des programmes :
(En euros) |
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Programmes |
Autorisations d'engagement |
Crédits de paiement |
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+ |
- |
+ |
- |
France Télévisions |
|
|
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ARTE France |
|
1 500 000 |
|
1 500 000 |
Radio France |
|
|
|
|
France Médias Monde |
|
|
|
|
Institut national de l'audiovisuel |
1 500 000 |
|
1 500 000 |
|
TV5 Monde |
|
|
|
|
Programme de transformation |
|
|
|
|
TOTAL |
1 500 000 |
1 500 000 |
1 500 000 |
1 500 000 |
SOLDE |
0 |
0 |
||
La parole est à Mme Monique de Marco.
Mme Monique de Marco. L'Institut national de l'audiovisuel est l'entité qui subit, après France Télévisions, la plus forte diminution de ses ressources dans ce projet de loi de finances.
Je propose de maintenir les crédits de l'INA à leur niveau de 2025. Il y va de la capacité de l'institut à poursuivre les chantiers de modernisation qu'il a engagés – je pense notamment à l'utilisation de l'intelligence artificielle pour l'archivage des documents.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Jean-Raymond Hugonet, rapporteur spécial. Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. le président. Nous allons procéder au vote des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », figurant à l'état D.
Je n'ai été saisi d'aucune demande d'explication de vote avant l'expiration du délai limite.
Je mets aux voix ces crédits.
(Les crédits sont adoptés.)
M. le président. Mes chers collègues, nous avons achevé l'examen des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
Nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures seize, est reprise à dix-sept heures dix-sept.)
M. le président. Le Sénat va examiner les crédits de la mission « Santé ».
La parole est à M. le rapporteur spécial.
M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial de la commission des finances. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les crédits de la mission « Santé » s'élèvent pour 2026 à 1,67 milliard d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement. Ils augmentent ainsi de près de 11 % par rapport à l'exercice précédent.
En apparence, cela fait beaucoup, mais cette augmentation est trompeuse, car elle porte exclusivement sur un programme qui sert de « boîte aux lettres » pour des crédits européens destinés au financement des investissements des hôpitaux.
Ces fonds européens, qui doivent augmenter en 2026, seront reversés à la sécurité sociale. En réalité, les crédits de la mission « Santé », hors ces financements, restent stables pour l'année 2026.
La mission « Santé » – vous le savez sans doute, mes chers collègues – a été un peu déshabillée au fil du temps. Il n'y reste plus grand-chose, sinon un budget dont l'examen nous anime toujours beaucoup : celui de l'aide médicale de l'État, l'AME, qui représente 90 % des crédits qui y sont retracés.
Pour le reste, on trouve au sein de cette mission un saupoudrage d'aides destinées à des actions de prévention, la dotation versée à l'agence de santé de Wallis-et-Futuna, ainsi que les crédits de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et de l'Institut national du cancer (Inca).
Les crédits affectés à l'Inca augmentent de 9,6 millions d'euros en 2026 par rapport à 2025, cette hausse étant fléchée vers le financement de la mise en œuvre du registre national des cancers. Ce montant paraît important ; la commission des finances s'est demandé s'il était bien justifié. En tout état de cause, je rappelle que ce registre a été créé sur l'initiative de notre collègue Sonia de La Provôté, que je salue, dont la proposition de loi a été adoptée à l'unanimité de notre assemblée. Un tel registre national, construit à partir des registres qui existent déjà localement, va nous aider dans la lutte contre le cancer. Je suis donc bien sûr favorable à l'augmentation des crédits de l'Inca.
J'en viens enfin, madame la ministre, aux crédits affectés aux dépenses d'aide médicale de l'État. Malheureusement, ces crédits seront cette année encore insincères. Ils ont été reconduits au même niveau que l'an dernier, soit 1,207 milliard d'euros, alors que l'exécution pour 2025 est attendue aux alentours de 1,4 milliard d'euros. Il y a donc 200 millions d'euros d'écart entre la budgétisation et l'exécution, sachant qu'une légère progression des dépenses réelles devrait encore être enregistrée en 2026.
Le code de la sécurité sociale et le code de l'action sociale et des familles indiquent très clairement que les crédits d'AME de droit commun sont pris en charge par l'État. Dès lors, je ne comprends pas cette sous-budgétisation chronique du dispositif.
En 2024, l'État a déjà contracté une dette de 185 millions d'euros à l'égard de la sécurité sociale au titre des dépenses d'aide médicale de l'État. Cette situation risque de s'aggraver en 2025 : les montants inscrits en loi de finances initiale n'ayant pas été corrigés en loi de finances de fin de gestion, cette dette pourrait s'alourdir de plus de 200 millions d'euros. Si nous laissons les crédits de l'AME en l'état, si nous ne changeons rien – pour ma part, vous l'aurez compris, je suis pour changer des choses –, nous aurons créé, à la fin de l'année 2026, une nouvelle dette de l'État à l'égard de la sécurité sociale : nous aurons creusé le trou de la sécurité sociale de 670 millions d'euros supplémentaires !
Voilà qui n'est pas raisonnable : vient un moment où il faut faire face aux dépenses. L'AME couvre essentiellement les soins dispensés aux patients qui sont en situation irrégulière sur notre territoire ; s'agissant d'un guichet ouvert – ces patients doivent bien sûr être soignés –, les remboursements versés dans ce cadre sont effectués quel que soit le niveau des crédits ouverts. Il convient donc de modifier certains aspects du dispositif.
Sur ce sujet, les travaux ne manquent pas : je citerai le rapport remis au mois de décembre 2023 par Claude Evin et Patrick Stefanini, mais aussi le rapport d'information que j'ai moi-même remis, au mois de juillet 2025, au nom de la commission des finances.
Un certain nombre des recommandations que j'ai formulées ont été reprises dans des projets de décret. Madame la ministre, ces textes sont-ils toujours d'actualité ? Seront-ils ou non publiés ? Si, par exemple, on réforme les conditions d'obtention de la carte d'AME, en excluant, comme je le souhaite, l'extrait d'acte de naissance de la liste des documents d'identité valables pour la délivrance d'une telle carte, et si, comme le propose la commission des finances, on modifie le panier de soins non urgents, sans toucher au panier de soins urgents, alors seulement il deviendra possible de faire tenir les dépenses réelles dans l'enveloppe de 1,2 milliard d'euros inscrite à cet effet dans le projet de loi de finances pour 2026. Dans le cas contraire, les crédits ouverts ne suffiront pas.
J'aurai l'occasion de revenir sur tous ces sujets lors de la présentation de mes amendements et en donnant l'avis de la commission sur les amendements de nos collègues. (Applaudissements sur des travées des groupes UC et Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)
M. le président. La parole est à Mme Pascale Gruny, en remplacement de Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe UC.)
Mme Pascale Gruny, en remplacement de Mme Florence Lassarade, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, en 2026, la mission « Santé » sera de nouveau marquée par le poids de la contrainte budgétaire.
Si le montant des crédits de la mission affiche une augmentation de 12,8 %, cette évolution ne résulte en réalité que du versement des crédits européens délégués à la France pour soutenir le volet « investissement » du Ségur de la santé.
En dehors de ce mécanisme comptable, le projet de loi de finances pour 2026 reconduit quasiment à l'identique les crédits de paiement ouverts en 2025, soit 1,43 milliard d'euros.
Ce choix emporte deux conséquences. Premièrement, il inscrit dans la durée la contraction des moyens alloués à la prévention, à la sécurité sanitaire et à l'offre de soins. Deuxièmement, il confirme la déconnexion, déjà observée en 2025, entre les crédits ouverts pour financer l'AME et la réalité des dépenses constatées.
Les dépenses d'AME ont progressé de 6 % par an en moyenne depuis 2009 et de 40 % entre 2021 et 2025. Cette année, si la réserve de précaution n'est pas dégelée, l'État aura accumulé environ 243 millions d'euros de dette nouvelle à l'égard de la sécurité sociale, soit l'équivalent de 20 % du montant des crédits consacrés à l'AME.
Ce constat doit nous inciter à définir une orientation claire : soit il existe une volonté de contenir la dépense d'AME, et cette orientation doit être soutenue par des mesures appropriées de maîtrise des dépenses, soit il convient de doter le programme de moyens suffisants pour éviter l'aggravation de la dette contractée par l'État à l'endroit de la sécurité sociale. Nous faisons le choix de la maîtrise des dépenses : c'est le sens des deux amendements déposés par Florence Lassarade au nom de la commission des affaires sociales.
Pour ce qui est du programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », notre commission a exprimé sa vive préoccupation quant à la baisse continue des crédits. Le projet de loi de finances pour 2026 confirme la réduction de 22 % entérinée dans la loi de finances pour 2025. En outre, si le Gouvernement maintient ses prévisions, le programme aura perdu plus du quart de ses financements entre 2024 et 2028.
Plusieurs acteurs souffrent de cette situation, notamment les associations, qui prolongent l'action institutionnelle et déploient une offre de prise en charge au plus près des usagers ; l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), qui connaît des difficultés pour honorer ses engagements d'indemnisation à l'égard des victimes de la Dépakine ; ou encore l'agence de santé de Wallis-et-Futuna, dont la dotation annuelle ne permet toujours pas de couvrir les besoins de financement.
Toutefois, l'attribution à l'Inca de crédits complémentaires destinés à financer la création d'un registre national des cancers mérite d'être saluée. Ce projet, défendu par le Sénat voilà plus de deux ans déjà, doit contribuer à améliorer la prévention et à mieux adapter la prise en charge des patients. Nous serons attentifs aux conditions de sa concrétisation. (Applaudissements sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Marc Laménie applaudit également.)
Organisation des travaux
M. le président. Avant de donner la parole aux orateurs des groupes, je vous indique, pour la bonne information de tous, que trente-sept amendements sont à examiner sur cette mission.
La conférence des présidents a fixé la durée maximale de la discussion à deux heures quarante-cinq. Nous devrions donc terminer l'examen de cette mission aux alentours de vingt heures et passer à l'examen de la mission « Monde combattant, mémoire et liens avec la Nation » à vingt et une heures trente.
Au-delà, conformément à l'organisation de nos travaux décidée par la conférence des présidents, et en accord avec la commission des finances, la suite de l'examen de cette mission serait reportée à la fin des missions de la semaine.
Santé (suite)
M. le président. Mes chers collègues, je vous rappelle que le temps de parole attribué à chaque groupe pour chaque unité de discussion comprend le temps de l'intervention générale et celui de l'explication de vote.
Par ailleurs, le Gouvernement dispose au total de dix minutes pour intervenir.
Dans la suite de la discussion, la parole est à Mme Guylène Pantel. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Émilienne Poumirol applaudit également.)
Mme Guylène Pantel. Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous débattons aujourd'hui d'une mission qui, en dépit d'un périmètre étroit, n'en demeure pas moins essentielle, les crédits qui y sont inscrits étant notamment destinés à des personnes en situation de grande vulnérabilité.
La mission « Santé » occupe une place particulière dans notre budget national : elle rassemble uniquement les dépenses de santé qui restent à la charge directe de l'État. Ces dépenses ont trait, pour l'essentiel, à l'aide médicale de l'État, à la sécurité sanitaire, à l'indemnisation des victimes et au financement d'interventions dans les territoires d'outre-mer.
Pour 2026, les crédits de cette mission dépassent 1,6 milliard d'euros, en hausse d'un peu plus de 10 % par rapport à 2025. Cette progression doit toutefois être lue avec prudence : elle est presque entièrement le fait du programme 379, simple dispositif transitoire destiné au reversement à l'assurance maladie de crédits européens. Exception faite de ce programme, les crédits sont quasiment stables.
Je n'entrerai pas davantage dans le détail des chiffres, car cela vient d'être fait. Ces derniers montrent que la mission « Santé » n'est pas un instrument de réforme structurelle, mais un budget de responsabilité ciblé : celui par lequel l'État assume directement la protection sanitaire, la prévention de certains risques et la prise en charge de ceux qui n'ont accès à aucun autre dispositif.
Dans cette mission, l'aide médicale de l'État occupe évidemment une place centrale. Comme l'an dernier, les rapporteurs ont déposé des amendements visant à minorer de 200 millions d'euros les crédits qui y sont alloués. Ils s'appuient sur une réforme du dispositif de prise en charge des soins non urgents, fondée sur un accord préalable permanent des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM).
Cette évolution appelle, de notre part, une appréciation prudente. Elle n'est pas anodine : elle modifierait concrètement les conditions d'accès aux soins pour un public particulièrement fragile.
Les élus du RDSE souhaitent rappeler que l'AME est aussi un instrument de santé publique. Retarder ou empêcher l'accès aux soins ne fait souvent qu'aggraver l'état des personnes concernées, tout en reportant les prises en charge vers des solutions plus coûteuses.
Avant de modifier l'équilibre de ce dispositif, il faut avoir des éléments précis, mesurés et partagés. S'il faut engager une véritable réforme du panier de soins, les professionnels de santé doivent y être associés, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Voilà pourquoi la majorité d'entre nous s'opposera à ces amendements de minoration. Nous nous y opposerons, non pas par refus de débattre, mais parce qu'une telle réduction, appliquée sans garantie et sans analyse d'impact complète, créerait davantage d'incertitudes qu'elle ne résoudrait de difficultés. Nous privilégions une approche fondée sur les faits, attentive aux besoins réels et soucieuse de maintenir la stabilité d'un dispositif doté d'une fonction sanitaire indispensable.
La mission « Santé » comprend aussi le programme 204, « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins ». Notre collègue Nathalie Delattre a déposé un amendement visant à en majorer les crédits de 10 millions d'euros. L'objectif est de créer un mécanisme d'indemnisation des dommages sanitaires attribuables à l'acétate de cyprotérone et à d'autres progestatifs de synthèse. Les membres du RDSE font pleinement leur la préoccupation humaine et sanitaire qui sous-tend cet amendement.
Il ne s'agit pas seulement de crédits supplémentaires : il s'agit avant tout de reconnaître des souffrances et de réparer des préjudices avérés de manière équitable et transparente.
La mission « Santé » du projet de loi de finances pour 2026 incarne l'engagement de l'État envers les plus fragiles. Dès lors, les élus du RDSE ne peuvent cautionner les réductions qui seront proposées par voie d'amendements : de telles mesures risqueraient d'aggraver les inégalités d'accès à la santé et les politiques publiques de prévention.
Les crédits de la mission recueilleront majoritairement nos suffrages, à condition qu'ils restent dans leur version initiale. La santé n'est pas une dépense : elle est un investissement collectif. (Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – M. Marc Laménie applaudit également.)