CHAPITRE II -
L'OUVERTURE ATTENDUE DE NÉGOCIATIONS
MULTILATERALES DÉLICATES
Le projet de budget du commerce extérieur pour 2002 s'inscrit dans un contexte international marqué par l'accord survenu à Doha (Qatar) le 15 novembre 2001, lors de la quatrième conférence ministérielle de l'Organisation Mondiale du Commerce, sur un agenda de négociations multilatérales pour les prochaines années, désigné sous le nom de « Doha development program ». Cet accord de compromis a été obtenu au prix de nombreuses ambiguïtés et s'inscrit dans un climat compliqué par des différends commerciaux persistants, notamment entre les Etats-Unis et l'Europe, ce qui laisse augurer des négociations particulièrement délicates.
I. LE SUCCÈS DE LA CONFÉRENCE DE DOHA
A. UN CONTEXTE INÉDIT
La
conférence de Doha intervenait deux ans après celle de Seattle
(décembre 1999), qui s'était soldée par un échec
cuisant que l'on pouvait imputer à trois séries de raisons :
- des causes structurelles : divergences transatlantiques (notamment,
opposition des Etats-Unis et de l'Europe sur le dossier agricole) et
dissensions Nord-Sud (entre pays développés et pays en
développement ou moins avancés, demandant à ce titre un
traitement de faveur et réclamant une évaluation des
conséquences des précédents accords de Marrakech) ;
- des circonstances particulièrement défavorables :
l'administration américaine, qui plus est exerçant la
présidence de la conférence, était déjà en
campagne électorale et adoptait, de ce fait, une attitude maximaliste,
d'autant que la vigueur de la croissance américaine éloignait
l'urgence d'une ouverture plus grande des marchés mondiaux.
L'Union européenne, pour sa part, se prononçait pour l'ouverture
d'un cycle large et équilibré, englobant les nouveaux sujets.
Bien qu'elle ait su rallier à sa position des « pays
amis » (Japon, pays d'Europe centrale et orientale, Corée,
Norvège...), l'Union européenne n'a pu trouver de terrain
d'entente avec le « front » américain (les
Etats-Unis s'étant acquis le soutien des pays d'Amérique Latine).
La conférence s'est donc ouverte sans que les grandes lignes d'un texte
de synthèse aient pu être finalisées.
La conférence de Seattle n'a toutefois pas été inutile car
elle a servi de révélateur à trois
phénomènes inédits : l'attitude offensive, sans
précédent, des pays en développement ;
l'inquiétude à l'égard du caractère plus normatif
des engagements internationaux depuis l'institution, par les accords de
Marrakech, d'un mécanisme de règlement des
différends ; l'irruption des opinions publiques dans les
négociations internationales.
La conférence de Doha se présentait deux mois après les
tragiques attentats terroristes commis aux Etats-Unis le 11 septembre 2001,
dont l'onde de choc traversait les relations internationales. La
tenue-même de la conférence a été mise en question,
tout comme sa date et son lieu. D'autres conférences internationales ont
d'ailleurs été annulées (FAO...) à la même
période.
La conférence de l'OMC survenait, en outre, dans un contexte
avéré de ralentissement économique
généralisé, et spécialement marqué aux
Etats-Unis, que le choc des attentats ne manquerait pas d'accentuer.
De ces diverses circonstances, il résultait qu'un accord à Doha
représentait, non seulement, l'occasion de restaurer un climat de
confiance dans les perspectives offertes par la conjoncture économique ,
mais aussi une forme de réponse mondiale au terrorisme. En outre, un
nouvel échec à Doha, après celui de Seattle, aurait sans
doute signifié la fin de l'OMC, du moins dans sa forme actuelle.