II. LA NÉCESSITÉ DE RÉFORMER POUR FAIRE FACE À L'ACCROISSEMENT DES DEMANDES DE VISAS ET D'ASILE
Outre
les missions diplomatiques classiques, le ministère des affaires
étrangères a également pour responsabilité
d'accorder aux étrangers les visas d'entrée et de séjour
sur le territoire et exerce la tutelle sur l'Office français de
protection des réfugiés et apatrides (OFPRA), qui examine les
demandes d'asile politique et assure la protection des réfugiés.
Or, depuis plusieurs années les services des visas dans les consulats
à l'étranger et, en France, les services de l'OFPRA, font face
à un accroissement très sensible des demandes posant des
problèmes de moyens matériels et humains importants et mettant en
cause le mode de gestion des demandes et, en définitive, le droit
fondamental que constitue l'asile.
A. UN EFFORT IMPORTANT FAIT AU PROFIT DES SERVICES DES VISAS
1. Evolution du nombre des visas délivrés et des règles de délivrance
En 2001,
les postes consulaires français ont délivré 2,1 millions
de visas toutes catégories confondues. Le chiffre est stable par rapport
à 2000 en raison de la suppression des visas de court séjour vis
à vis de Hong Kong et de la Bulgarie et de la forte diminution du nombre
des visas accordés en Turquie du fait de la crise économique.
Pour ces trois pays, ce sont 120 000 visas de moins qui ont
été délivrés.
De plus, compte tenu de la situation en Algérie, les demandes des
ressortissants algériens continuent d'être traitées selon
une procédure particulière.
EVOLUTION DU TRAITEMENT DES DEMANDES DE VISAS EN ALGÉRIE
Pour
57 000 visas délivrés en 1997, 83.000 en 1998, 147 000
en 1999, 178 000 en 2000 et 277.000 l'ont été en 2001. Le
tassement constaté au premier semestre 2002, qui laisse présager
la délivrance d'environ 200 000 visas dans l'année, trouve
son origine dans l'augmentation de la proportion des demandeurs
présentant un fort risque migratoire.
1/ Mise en place d'une nouvelle procédure
L'arrêté du 10 janvier 2000 a redonné à notre
consulat général à Alger sa pleine compétence en
matière de visas. En pratique, ses services -et ceux du consulat
général de France à Annaba (voir infra)- sont en mesure de
traiter localement une partie des dossiers (personnalités et hommes
d'affaires, participant à nos programmes d'échanges et de
coopération notamment), correspondant à environ 25 % des demandes.
Nos consulats généraux répondent directement à tous
les demandeurs, leur adressent les convocations, les demandes de pièces
complémentaires ou les décisions de refus.
Pour les autres demandes, la sous-direction de la circulation des
étrangers à Nantes n'a conservé qu'une fonction d'appui
technique : instruction des dossiers et transmission aux postes des
éléments nécessaires à l'établissement des
convocations ainsi que des projets de réponse aux demandeurs et aux
intervenants.
2/ Réouverture de nos consulats généraux à
Annaba et Oran
Notre consulat général à Annaba a été
rouvert à la fin de l'année 2000. En matière de visas, il
fonctionne de la même manière que le consulat
général de France à Alger : une boîte postale a
été mise en place afin de recueillir les demandes de visa des
ressortissants algériens résidant dans la circonscription
consulaire du consulat général. La réouverture de notre
consulat général à Annaba a notamment permis aux
Algériens domiciliés dans l'Est algérien de ne plus se
déplacer à Alger pour retirer leur visa.
A Oran, des travaux immobiliers de transformation d'une partie du lycée
Pasteur en consulat général vont être entrepris
prochainement, en vue de l'ouverture du poste au début de 2004.
3/ Améliorations apportées au dispositif
3.1 - Nouveau système de convocations
A la suite de l'inspection de nos postes en Algérie effectuée en
2001 par l'inspection Générale des Affaires Etrangères, un
nouveau système de convocations a été mis en place au
consulat général de France à Alger le 1er juin 2001.
Désormais, les personnes sont convoquées à jour fixe,
selon un créneau horaire (matin ou après-midi)
déterminé par le consulat général. Les personnes
qui ne pourraient se présenter ce jour-là sont invitées
à retirer leur visa le mercredi. Parallèlement, le service des
visas de notre consulat général à Alger est en mesure de
fonctionner six jours sur sept. Ce nouveau système de convocations donne
satisfaction. Il a notamment permis de réduire très sensiblement
les files d'attente à l'extérieur du consulat ainsi que les
délais de convocation.
3.2 - Transmission aérienne des demandes entre Alger, Annaba
et Nantes
Depuis l'année dernière, les demandes de visa parvenues aux
boites postales placées auprès de nos consulats
généraux en Algérie sont transmises par la voie
aérienne entre Alger (deux fois par semaine), Annaba (une fois par
semaine) et Nantes. Auparavant, ces dossiers étaient acheminés
par bateau entre Alger et Marseille, puis envoyés au Quai d'Orsay avant
de rejoindre Nantes.
A ce niveau, une amélioration sensible des délais a
été constatée : il s'écoule en moyenne sept
semaines entre l'arrivée du dossier dans la boite postale et l'envoi de
la convocation au bénéficiaire de visa. Toutefois, les
délais peuvent s'allonger au delà de cette durée en
période d'affluence des demandes, faute de moyens humains en nombre
suffisant, notamment à Nantes.
3.3 - Traitement des visas de long séjour pour études
par notre consulat général à Alger
Depuis le 1er mai 2001, notre consulat général à Alger
instruit directement l'ensemble des demandes de visa de long séjour pour
études.
A cet effet, une boîte postale spécifique a été
installée auprès de ce consulat général et le
ministère de l'intérieur est consulté uniquement par la
voie informatique, avec envoi a posteriori du formulaire de demande. Un
raccourcissement important des délais d'instruction de cette
catégorie de visas est attendu. En moyenne, un délai d'un mois
devrait s'écouler entre la réception du dossier et la
délivrance du visa.
Source : ministère des affaires étrangères
Depuis l'adoption de
loi du 13 mai 1998
relative à
l'entrée et au séjour des étrangers en France et au droit
d'asile, les conditions de délivrance des visas ont été
modifiées et rendues plus transparentes. Elle a tout d'abord visé
à
faciliter les déplacements des personnalités
contribuant à la vitalité de nos relations bilatérales
: des visas de circulation d'une validité d'un à cinq ans,
permettant des séjours successifs de trois mois par semestre dans
l'espace Schengen, sont délivrés aux personnalités de
milieux politiques, économiques ou culturels, et aux personnes qui ont
à se déplacer fréquemment en France.
Elle doit ensuite faciliter l'exercice du
droit à une vie familiale
normale des membres de famille des ressortissants français ou
communautaires
: bénéficiaires d'une carte de séjour
de plein-droit en France, les proches de Français (conjoint, enfants
mineurs, ascendants à charge) ou de ressortissant communautaire se
voient accorder un visa sans délai dès qu'ils apportent la preuve
d'un lien familial avec un tel ressortissant, sauf si des raisons d'ordre
public s'y opposent.
La loi de 1998 a également pour but
d'encourager le séjour en
France des scientifiques étrangers, des ingénieurs informaticiens
et des artistes
exerçant une activité salariée.
Ceux-ci sont dispensés de la procédure préalable
d'introduction des travailleurs étrangers en France et obtiennent un
visa sans délai au vu d'un document unique (protocole d'accueil
délivré par un organisme de recherche agréé pour
les scientifiques, contrat de travail visé pour les ingénieurs
informaticiens et les artistes). Il en est de même pour les
étudiants étrangers
. Leurs demandes sont traitées
en liaison avec les services culturels, qui signalent aux services consulaires
ceux dont les requêtes s'intègrent dans notre politique de
formation et donnent leur avis sur le sérieux et la qualité des
études envisagées avant tout refus de visa. Cette réforme
s'est traduite par
une augmentation significative du nombre des visas pour
études, qui a doublé en trois ans, passant de 28.951 en 1998
à 57.883 en 2001.
Cette loi a eu, en outre, pour objectif de
rendre plus transparents les
refus de visas en rendant obligatoire leur motivation pour les
catégories de personnes suivantes
:
- étudiants qui entendent suivre un enseignement dans un
établissement habilité à délivrer des
diplômes visés par l' Etat,
- membres de famille des ressortissants français et des Etats de
l'Espace Economique Européen ;
- bénéficiaires du regroupement familial ;
- étrangers pouvant obtenir de plein droit une carte de séjour en
France (anciens combattants, personnes ayant obtenu le statut de
réfugié, titulaires d'une rente d'accident du travail ou de
maladie professionnelle...) ;
- salariés bénéficiaires de la procédure
d'introduction des travailleurs de l'OMI ;
- enfants mineurs ayant fait l'objet d'une décision d'adoption
plénière au profit de personnes titulaires d'un agrément
pour adoption délivré par les autorités françaises ;
- étrangers inscrits aux fins de non-admission au Système
d'Information Schengen (SIS).
2. Un effort matériel accru indispensable en faveur des services des visas à l'étranger
Les
moyens nouveaux mis en place depuis plusieurs années ont pour objectif
d'améliorer l'accueil et l'information du public, et de moderniser les
méthodes de travail pour améliorer l'efficacité et lutter
contre la fraude.
Les services des visas, qui constituent bien souvent le premier point de
contact des ressortissants étrangers avec la France, continuent de
bénéficier d'un important programme (environ 6 M € par an)
de modernisation des locaux destiné en particulier à
aménager plus confortablement les salles d'attente du public et les
guichets. Au rythme d'une demi-douzaine chaque année, les postes qui
connaissent les flux de demandeurs les plus importants sont progressivement
rénovés. Nos postes en Chine, en Afrique subsaharienne et
à Londres figurent sur le programme de rénovation 2002/2003.
EFFORTS FINANCIERS ACCOMPLIS OU PROGRAMMÉS EN FAVEUR DES SERVICES DES VISAS EN 2002 ET 2003 (EN EUROS)
Postes |
Libellé |
Montant prévisionnel des CP |
|
|
de l'opération |
2 002 |
2 003 |
ABUJA |
Ambassade provisoire - aménagement visas |
0 |
60 000 |
ACCRA |
Ambassade - construction et consulat - rénovation |
3 000 |
200 000 |
AGADIR |
Construction nouveau consulat |
0 |
100 000 |
ALGER |
Ambassade - bulle visas |
0 |
100 000 |
AMMAN |
Ambassade - rénovation, extension |
0 |
100 000 |
ANKARA |
extension des pavillons visas + scac |
42 000 |
510 000 |
BAMAKO |
Consulat - construction |
75 000 |
0 |
BISSAO |
campus diplomatique - rénovation |
2 400 |
24 000 |
CASABLANCA |
Extension et restructuration du CG |
129 000 |
0 |
DAKAR |
Visas - aménagement |
0 |
63 000 |
DAR ES SALAM |
Projet bulle visas + autres services |
0 |
200 000 |
DOUALA |
Bâtiment visas - construction |
127 000 |
88 000 |
FES |
Construction service visas du CG |
62 867 |
600 000 |
HONG KONG |
Consulat - rénovation |
0 |
300 000 |
ISLAMABAD |
construction bulle visas |
0 |
250 000 |
ISTANBUL |
rénovation institut français + consulat général |
0 |
30 000 |
JERUSALEM |
Consulat - rénovation |
5 000 |
100 000 |
LAGOS |
Service visas - rénovation |
27 000 |
506 000 |
LIMA |
construction section consulaire |
42 000 |
8 000 |
LOME |
Régie et visas - aménagement |
62 100 |
0 |
LONDRES |
Rénovation du CG |
0 |
200 000 |
MARRAKECH |
Rénovation service visas du CG |
53 357 |
0 |
MOSCOU |
Ambassade - gros entretien |
100 000 |
0 |
NOUAKCHOTT |
Service des visas - construction |
22 000 |
260 000 |
ORAN |
Consulat - réouverture |
0 |
500 000 |
PEKIN |
Consulat - visas: extension |
95 000 |
0 |
RABAT |
Rénovation service visas du CG |
5 623 |
0 |
RIYAD |
Réaménagement de l'Ambassade |
0 |
700 000 |
SARAJEVO |
aménagement et extension chancellerie (consulat + services culturels) |
0 |
20 000 |
SEOUL |
Consulat - réimplantation |
200 000 |
0 |
SFAX |
rénovation service visas |
opération suspendue |
|
SHANGHAI |
Consulat - implantation |
200 000 |
0 |
TANGER |
Amélioration visas |
23 000 |
38 000 |
VARSOVIE |
Ambassade - rénovation |
26 000 |
400 000 |
|
TOTAL |
1 304 349 |
5 359 003 |
Source ministère des affaires
étrangères
Par ailleurs, la rubrique « Venir en France »,
créée en 1999, du site Internet du ministère des affaires
étrangères, disponible en français, en anglais et en
espagnol, a été consultée en 2001 par près d'un
million de visiteurs (500.000 l'année précédente), et
650.000 au premier semestre 2002. Une version en arabe est également
disponible depuis quelques semaines. Elle fournit toutes les informations
utiles, qu'il s'agisse du régime de circulation s'appliquant à
une nationalité donnée, des modalités de constitution d'un
dossier de visa en fonction de la durée et de l'objet du séjour
en France, ou des coordonnées des services des visas des postes
consulaires français. Le formulaire de demande de visa peut
également être obtenu en ligne.
Les méthodes de délivrance des visas sont en forte
évolution avec l'informatisation et la mise en réseau des
procédures
. La diffusion de la nouvelle version du Réseau
Mondial Visa, le RMV2, entamée en 2001 et qui devrait être
étendue à tous les postes avant la fin de 2003, va
entraîner une profonde modification des méthodes de travail : en
effet, un dossier entièrement informatisé des demandes de visa
avec un historique complet (intervenants, refus antérieurs...) sera
désormais constitué, une aide en ligne fournie aux agents, et les
postes et l'administration seront connectés en temps réel.
En outre, un effort considérable de formation des agents a
été effectué avec l'organisation de sessions
régionales orientées à la fois sur la
réglementation et sur la formation à cette nouvelle application
informatique, au rythme de son déploiement. Le Manuel des agents de
guichet procure une information synthétique aux personnels qui
reçoivent le public.
Il s'agit également de lutter plus efficacement contre la fraude
,
qui tend à se développer avec l'assouplissement des
critères de délivrance des visas. La fraude touche non seulement
les documents de voyage mais également les justificatifs
présentés à l'appui des demandes de visas (documents
d'état civil, invitations par des organismes en France,
réservations d'hôtel, attestations d'accueil...). Face à ce
phénomène, un ensemble d'actions a été mis en
oeuvre :
- cent soixante postes consulaires ont été équipés
d'un « rétrocheck », appareil qui permet de
détecter les falsifications sur les documents de voyage et les documents
les plus couramment utilisés ;
- des actions de formation sont menées conjointement avec la Police aux
frontières, tant en France, avant le départ des agents en poste
qu'à l'étranger, dans les pays les plus exposés. C'est
ainsi que le Pakistan et plusieurs pays d'Afrique ont pu en
bénéficier ;
- la coopération entre le ministère des affaires
étrangères et le ministère de l'intérieur est
systématique lorsque des filières sont détectées.
Les échanges d'informations entre les deux ministères permettent
de mettre en place les parades nécessaires ;
- la collaboration des autorités de police locales est
recherchée, lorsqu'elle est possible, chaque fois que des trafics sont
repérés à l'extérieur des locaux consulaires.
La lutte contre les demandes abusives sera également
améliorée grâce à la mise en place au 1er janvier
2003 d'une procédure harmonisée de frais de dossier pour les pays
de l'espace Schengen. Désormais, les frais sont perçus lors de la
demande et ne seront pas remboursés en cas de refus. Cette disposition
devrait limiter le « visa shopping », qui consistait pour
les étrangers à multiplier les demandes de visas pour se rendre
dans l'espace Schengen et ainsi profiter du pays aux critères
d'attribution les plus souples.
Les services du ministère des affaires étrangères
doivent, enfin, faire face à la judiciarisation de la contestation des
décisions de refus de visas
. Le nombre des requêtes
communiquées en défense en 2000 s'est élevé
à 1 360 contre 137 en 1998. C'est pour répondre à cet
accroissement qu'a été créée le 1er décembre
2000 une Commission de recours contre les refus de visa (CRV). Mécanisme
de prévention du contentieux, comme il en existe dans d'autres secteurs
de l'administration, le recours devant cette Commission constitue un
préalable obligatoire avant un éventuel recours devant le Conseil
d'Etat. Depuis sa création, 2 565 recours et actions contentieuses ont
été enregistrées en 2001 et 1 848 pour le premier semestre
2002. Il en résulte un alourdissement considérable de la charge
de travail (préparation des mémoires en défense, recherche
d'éléments d'informations pour la CRV) et la
nécessité d'une adaptation en profondeur des méthodes de
travail.